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HUMEUR : Zanzi and the City



 
 


Entre deux épisodes de mon feuilleton intersidérant, je vous livre un authentique billet d’humeur ancré dans l’actualité brûlante. Dans quelques jours, les Français voteront pour élire un homme ou une femme à la magistrature suprême. Le choix est inédit. Jusqu’à présent, la République française s’est toujours montrée plus machiste que ne le fut jamais le royaume des lys avec la loi salique. Si la monarchie française n’admettait pas qu’une femme puisse accéder au trône, préservant ainsi le caractère national et unique de sa dynastie, en revanche, de Blanche de Castille à Anne d’Autriche, en passant par les princesses et les favorites royales, nombreuses furent les femmes qui exercèrent, pour les unes le pouvoir, pour les autres une influence considérable à l’ombre du trône de France. Si dimanche prochain Ségolène Royal (au nom prédestiné ?) est élue Présidente de la République, elle deviendra la première femme à gouverner la France depuis la Régence de la mère de Louis XIV, soit environ 350 ans…

Voici pour le rappel historique. L’histoire, vous le savez, est vivante. Toujours en marche, elle s’écrit chaque minute, chaque jour, offrant à nos yeux les rebondissements les plus inattendus. Le duel Sarkozy-Royal, longtemps annoncé par les sondages officiels, n’était pourtant plus garanti quelques jours avant le premier tour. Un sursaut civique, une prise de conscience, une participation massive, et l’horreur redoutée a pu être évitée. Mais rien n’est joué, rien n’est acquis. Tout reste encore à faire. L’élan du premier tour doit se poursuivre et se concrétiser pour que dimanche 6 mai, une certaine vision de la France l’emporte sur une autre.

Je ne vais pas vous cacher que je fus longtemps réticent à l’idée de voter pour Ségolène Royal. Je n’avais pas envie de le faire sur la seule base du motif qu’elle serait « la candidate des gays ». Un choix de société ne peut se résumer à deux points de programme imposés par la ligne directrice d’un parti à quelqu’un qui, de prime abord, n’en voulait pas entendre parler. Aujourd’hui encore, je ne suis pas certain que cette dame soit la personne la mieux qualifiée pour prendre en main le destin de 60 millions de Français et redresser notre pays. D’un autre côté, je n’en pense pas moins de Nicolas Sarkozy. Ni l’une ni l’autre ne m’enthousiasment outre mesure, mais il est vrai que je suis difficile à enthousiasmer.

La France souffre cruellement d’un déficit d’hommes (et de femmes) d’Etat capables, de par leur charisme, de susciter l’adhésion de tout un peuple et de créer l’élan vital autour d’eux-mêmes et de leur projet. Pour charismatiques qu’ils furent, chacun selon son style, François Mitterrand et Jacques Chirac n’ont jamais réussi à réaliser l’union sacrée. Etant chefs de partis, ils ne pouvaient par définition idéologique obtenir le ralliement de l’autre camp. Il eut fallu pour cela des heures graves qu’ils n’ont pas connues. La personnalité singulière du Général De Gaulle et les circonstances exceptionnelles qui, par deux fois, l’ont porté au pouvoir, ont pendant quelque temps permis de recréer l’union nationale autour de la figure du chef qu’incarnait l’homme du 18-Juin. Mais les Français adorent brûler le lendemain ce qu’ils ont adoré la veille. Censée revêtir la forme d’un plébiscite du père de la patrie, la première élection présidentielle au suffrage universel direct portait en elle les ferment de la contestation et de l’opposition qui devaient conduire quatre ans plus tard le vieux soldat à la retraite.

J’en viens à considérer qu’il faut des circonstances critiques et un péril majeur pour la Nation pour que des figures providentielles émergent du lot. De telles circonstances ne sont pas encore réunies et les deux candidats qui briguent nos suffrages n’ont pas, à mon sens, l’envergure nécessaire pour diriger la France. Pourtant, il faut faire un choix. Celui du vote blanc ne résoudrait rien.

Depuis que je suis électeur, j’ai plus souvent voté à droite qu’à gauche. Peut-être par atavisme familial. Je n’en tire ni gloire ni honte. C’est ainsi. Français moyen, je ne me suis jamais vraiment senti comme appartenant au « peuple de gauche » ; a contrario, je ne pense pas non plus que je puisse me dire comme étant membre de « l’élite de droite ». Voyez comme je mets entre guillemets de vieux clichés qui ont la vie dure. En vérité, j’aimerais que l’on parvienne à dépasser ces clichés, à transcender les clivages qui régissent la vie politique depuis deux siècles, et à travailler ensemble pour le bien commun. Vœu pieu d’un rêveur qui aimerait bâtir un monde meilleur. Voilà pourquoi j’ai été tenté par le vote Bayrou. Mais c’est une utopie de vouloir rassembler les forces vives de la Nation en procédant d’un système partisan.

Puisqu’il faut choisir, je choisis le vrai changement, la vraie rupture. En 2007, la France qui a longtemps éclairé le monde ne brille plus que par son absence. Elle est en retrait et en retard. Que ce soit sur le plan économique ou sur les questions de société, elle tient la queue du peloton. Dimanche prochain, les Français doivent envoyer un signal fort à la face du monde qui les regarde, ils doivent proclamer que leur pays n’a pas perdu son audace et son humanisme. C’est pourquoi je voterai et appelle à voter pour Ségolène Royal. Je le dis avec d’autant plus de force que si je sais et n’oublie pas d’où je viens, je sais aussi où je veux aller.

Je veux pouvoir être libre d’embrasser mon chéri en public si je veux, libre de l’épouser si nous voulons nous marier, libre d’élever des enfants ensemble si nous en avons envie. Je suis – pratiquement – un citoyen de première classe dans ma vie professionnelle, je ne veux pas être considéré comme un sous-citoyen de seconde zone dans ma vie privée. Je refuse que celle-ci soit espionnée et fasse l’objet de fiches de renseignements. J’ai toujours été libre comme le vent, et j’entends le rester. Je proclame que quiconque veut empêcher le vent de souffler provoquera des tempêtes. J’ai envie de pouvoir respirer, lundi matin, un air de liberté.

Le 6 mai, je voterai et appelle à voter Ségolène Royal.


Pour lire le précédent épisode de Zanzi and the City, cliquez ici.

 
 

 
 

Avant et Après

Précédemment, dans Zanzi and the City : Traqué par toutes les polices, Zanzi se déguise avec le masque laissé par l’agent Sharp. Mais ce travestissement fait de lui le sosie de Don Rafaelo Veronese, un chef mafieux. À Las Vegas, Zanzi parvient à duper Benito La Crampe, le bras droit de Don Rafaelo, et grâce à lui, s’envole pour les Bahamas…

Arrivé à Nassau, je m’empressai de me faire fabriquer un nouveau masque en latex et de nouveaux papiers d’identité. C’est fou ce que ça peut aider de transporter une fortune dans une mallette blindée, et de porter sur soi un flingue dans un holster. En moins de 24 h chrono, Stefano Brazzi se volatilisa et je pus ainsi échapper aux foudres du véritable Don Rafaelo qui avait probablement déjà appris qu’un sosie s’était fait passer pour lui au Bellagio.

J’étais content de mon nouveau masque. Il me donnait une tête de playboy et me valait de beaux succès, tant auprès de la gent féminine que des beaux mâles qui sillonnaient les plages bahaméennes. Je pris ainsi dix jours de vacances pour oublier mes problèmes, remplissant mes journées de soleil, de cocktails, de luxe et de sexe. Les choses prirent un tour compliqué lorsque les gens commencèrent à se demander pourquoi mon corps bronzait tandis que mon visage demeurait ostensiblement blanc. De plus, ma véritable identité me manquait. Un mois s’était déjà écoulé depuis que l’Alien m’avait volé mon visage et ma vie. Je devais le retrouver, me retrouver. Mais comment faire ? Au comble du désespoir, et sans entrevoir la moindre solution rationnelle, j’appelai alors mon TiFrère.

TiF est un génie des mathématiques. C’est un brillant scienTiFique qui vit caché dans un presbyterium où il se livre à des travaux occultes sur la physique astrologique et le secret des nombres. Comme j’étais devenu incapable de raisonner, je fis appel à lui et à son avis objecTiF. Je rentrai à Paris. TiF me donna rendez-vous à la Cité des Sciences de La Villette, et sous le dôme du Planétarium, je lui racontai mon histoire.
— Je sais qui peut t’aider, me dit-il.
Le cœur rempli d’espoir, je lui demandai de qui il s’agissait.
— Les frères Bogdanoff !

J’étais interloqué. Comment n’y avais-je pas songé plus tôt ? Igor et Grichka Bogdanoff, les mystérieux frères de l’espace, les spécialistes interstellaires du Temps X et des martiens qui viennent de Vénus, détenaient la réponse à mon problème. Eux-mêmes ont subi, il y a quelques années, une transformation faciale inexpliquée. Peut-être avaient-ils croisé la route semée d’étoiles du même Alien ?
— Je dois les rencontrer. TiF, accompagne-moi.

Trouver les Bogdanoff n’est pas chose aisée. On dit que ce sont leurs projections astrales qui s’expriment lorsqu’ils participent à des conférences. Certains prétendent qu’ils habitent chez Raël, d’autres chez Tom Cruise, et qu’ils seraient les nouveaux gourous de la Scientologie… Pour mettre la main sur ces deux phénomènes métaphysiques, je devais faire appel aux services d’une spécialiste. Une fausse enseigne sur l’avenue des Champs-Élysées sert de couverture à l’agence de voyages Queeny Travels, spécialisée dans la téléportation. La maîtresse des lieux n’emploie que des garçons gays, de moins de 30 ans, qui sont réputés pour être des bombes sexuelles. Un éphèbe vêtu d’un simple pagne en peau de léopard nous introduisit, TiF et moi, auprès d’elle.

— Les Bogdanoff, dit-elle, ont été vus pour la dernière fois à la base de Baïkonour. Ils partaient pour la datcha de Vladimir Poutine. Mais ils n’y sont plus. Je vais interroger mon ordinateur.
Nous la suivîmes dans une autre pièce. Un ordinateur en forme d’œil d’Horus scintillait au plafond. Étrange impression de déjà-vu qui me ramenait dans mon enfance.
— Shabada, recherche sur les frères Bogdanoff !
L’ordinateur se mit à tournoyer. Un bruit venu du fond de la pièce vint nous distraire TiF et moi. Deux éphèbes étaient en train d’explorer mutuellement leur anatomie.
— Mes chers enfants s’amusent, fit remarquer la patronne, n’y faites pas attention, ça leur prend souvent. Alors Shabada, ça vient ?
L’ordinateur cyclope rencontrait des difficultés pour mener à bien la mission qui lui était confiée. Finalement, la réponse lui vint :
— Maîtresse, les frères Bogdanoff se cachent au Futuroscope de Poitiers.

J’étais soulagé de n’être pas obligé d’aller jusqu’en Russie. Tous ces voyages commençaient à me peser. Mais je n’étais pas encore au bout de mes peines, ni de mes surprises. TiF et moi remerciâmes la créature en cuissardes qui nous avait renseignés, et quittâmes son agence alors que retentissait les cris d’un double orgasme. Les « chers enfants » venaient d’atteindre le septième ciel, tandis que je me demandais s’il n’allait pas me falloir monter plus haut encore pour reprendre le visage que l’on m’avait volé.


Pour lire le précédent épisode de Zanzi and the City, cliquez ici.

 
 


Souvent, quand ils me voient, les gens se demandent pourquoi je suis seul dans la vie. Comment est-il possible qu’un homme jeune, beau et riche soit désespérément célibataire ? Pour couper court aux rumeurs les plus folles et aux théories les plus invraisemblables sur un éventuel défaut caché, je leur réponds que je suis célibataire par choix. Je leur mens. C’est un état que je subis comme les populations du Sahel subissent la sécheresse. Si l’eau de l’amour n’irrigue pas ma vie, ce n’est pas parce que je le refuse. C’est parce que je suis maudit.

Flash-back. Il y a cinq ans, j’étais plus fou, moins sage. Je m’enivrais d’expériences et de rencontres éphémères. Encore que de tout mon cœur et de toute mon âme j’aie toujours aspiré à l’amour vrai, sincère et durable, il était encore trop tôt car la vie ne m’avait pas encore appris l’essentiel de ce qu’il faut savoir pour construire une histoire avec la bonne personne. À l’époque, je ne faisais pas vraiment de plans cul. J’étais surtout dans un mood de séduction et je flirtais pour le plaisir. J’avais envie, besoin de plaire, d’être désiré. C’était une époque où je sortais beaucoup. Peu de rencontres via Internet. Cependant, je me suis laissé aller à draguer par ce biais. Et c’est alors que les choses ont dégénéré.

Au printemps 2002, je me suis lancé dans un marivaudage virtuel avec un certain Freddy. C’était amusant, plaisant, divertissant. Ça n’aurait jamais dû avoir les conséquences qui, aujourd’hui encore, pèsent sur le cours de ma destinée. À la manière des personnages des Liaisons Dangereuses de Laclos, nous nous sommes adressés des missives. Ce qui, pour moi, n’était qu’un badinage printanier, fut pris par Freddy pour quelque chose de beaucoup plus sérieux. À ce moment-là, j’étais à quelques mois d’un premier départ professionnel à l’étranger et n’avais aucune intention de m’engager avec qui que ce fût. Cependant, je jouais sur plusieurs tableaux et contais fleurette à plus d’un durant cette période. Lorsque Freddy se fit insistant pour me rencontrer enfin, je me suis montré stupide et lâche. Plutôt que de lui dire la vérité, j’ai inventé un prétexte pour me débiner et sortir de ce jeu de cache-cache qui prenait des proportions qui commençaient à me dépasser. Je lui ai donc dit que j’avais renoué avec une ex qui ne voulait pas me partager. La foudre m’est alors tombée sur la tête. En un dernier message désespéré et rageur, Freddy m’a maudit en ces termes : « Non ! Tu es trop cruel. Et il te faudra aimer dans la miséricorde divine pour être sauvé. »

Sur le coup, j’étais plus fâché qu’ébranlé par cet anathème. Cinq ans après, je me dis que je suis depuis ce temps sous le coup d’une véritable malédiction. Les esprits cartésiens et rationnels pourront me dire que je me fais des idées, que ce ne sont là que coïncidences et qu’il ne faut pas y prêter attention. Mais enfin, ces cinq dernières années, je n’ai connu aucun amour heureux, ni vécu aucune relation aboutie. J’étais comme abonné aux mecs pas libres, et lorsqu’ils l’étaient, il y avait toujours quelque chose qui clochait. L’emprise du passé, la peur de l’avenir, les incertitudes du présent. Cette triple combinaison étend encore son ombre funeste sur ma dernière rencontre. Même motif, même punition. Et tandis que tous les éléments objectifs sont réunis pour donner naissance à une belle histoire et aboutir à l’épanouissement à deux, la fatalité qui m’accable s’acharne contre cet amour naissant et s’efforce de briser l’élan vital.

Je suis tenté de céder au découragement. Dois-je m’obstiner, sachant que tout est contre nous, contre moi ? Me faudra-t-il renoncer à mon vœu le plus cher, au moment où je n’aspire qu’à stabiliser mon existence et à lui donner des bases solides ? Toi qui me lis, et qui sais que je parle de toi, pourquoi me demandes-tu de ne pas t’aimer ? N’as-tu pas ressenti, lorsque tu t’es blotti contre moi, les sensations les plus douces, et un sentiment de paix et de sécurité ? N’as-tu pas éprouvé, lorsque que tu as dormi dans mes bras et que nous nous sommes aimés aux premières lueurs du printemps, ce même sentiment de plénitude qui m’a submergé ? N’as-tu pas envie qu’il en soit ainsi tous les soirs et tous les matins de notre vie, et de réaliser, avec moi, la promesse de l’aube ?

Et toi, Freddy, si tu me lis, je te demande pardon pour t’avoir fait du mal. Je n’avais pas de mauvaises intentions mais je me suis laissé entraîner dans un jeu où, visiblement, nous n’avions pas les mêmes règles. Le temps a passé et peut-être que ta vie a trouvé son équilibre et sa sérénité. Quoi qu’il en soit, je te supplie de me pardonner et de lever la condamnation qui m’opprime. L’erreur est humaine, le pardon est divin. Je te demande cette clémence au nom de Celui qui nous a créés.


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Matthew venait de quitter le motel, de me quitter, me laissant seul et désemparé. J’allumai le téléviseur. Le bulletin d’informations du soir m’apprit que j’étais recherché par toutes les polices des États-Unis. En zappant, je vis les plus grandes chaînes diffuser les images de ma cavale à Los Angeles. Tandis que CNN était très factuelle, Fox News me présentait comme un probable terroriste d’Al-Kaïda et titrait « Le nouveau visage de l’axe du mal ». Ce qui était pour le moins ironique.

Je devais quitter le pays, coûte que coûte. Il m’était impossible d’appeler Martin dont la ligne devait être sur écoute. Avant de partir, Matthew m’avait fait don du masque en latex dont il s’était servi pour se déguiser en routier. Je le mis, car c’était le seul moyen dont je disposais pour circuler en ayant figure humaine. Le nez avait l’air écrasé et l’ensemble me donnait la gueule de Danny DeVito qu’un boxeur aurait passé à tabac. J’étais laid, mais faute de mieux, c’est sous cet aspect que je pris la poudre d’escampette, direction Las Vegas !

Reckless gambler jusqu’au bout, je décidai de prendre une chambre au Bellagio et de séduire Dame Fortune au casino. À ma grande surprise, en me voyant arriver dans le hall, le personnel me déroula le tapis rouge. Cela annonçait-il une chance insolente au tapis vert ? Suspicieux, je me tenais sur mes gardes. Je n’eus rien à demander : un groom à croquer m’invita à le suivre. L’ascenseur nous conduisit à l’avant-dernier étage de l’hôtel. Avec une clé électronique, le garçon ouvrit une porte et soudain, avec componction et force courbettes, me dit :
— Je suis vraiment navré, don Rafaelo, mais nous n’étions pas prévenus de votre arrivée inopinée, c’est pourquoi les extras ne sont pas prêts. Voulez-vous que je vous les apporte tout de suite ?
Le groom tremblotait. M’efforçant de ne pas paraître stupide et interdit devant ce discours inattendu, je grommelai un borborygme suivi d’un toussotement que le jeune garçon trop obséquieux prit pour un oui. Il s’éclipsa, tandis que je pénétrai dans mes appartements. Un hall d’entrée, de la taille d’une chambre d’hôtel normale, ouvrait sur une suite apparemment dix fois plus grande dont l’immensité et le luxe me donnèrent le vertige. Au bout de dix minutes environ, le garçon revint, essoufflé et le visage cramoisi de celui que la honte consume en public. Il me sembla au bord de l’apoplexie.
— Pardonnez-moi d’avoir mis si longtemps à revenir, don Rafaelo.
Je haussai mes faux sourcils. Le boy m’apportait donc les « extras ». Joliment disposés sur une desserte en argent massif, j’admirai un plateau de caviar accompagné de blinis, un jéroboam de Bollinger cuvée spéciale, et une boîte de Cohiba. Je remis au groom un billet de cent dollars pour le faire déguerpir. Pour qui ce garçon me prenait-il ? Je ne pouvais le lui demander, aussi me mis-je à procéder à une fouille minutieuse des lieux, en quête du moindre indice pouvant m’éclairer.

Cent grammes de Beluga royal de la Caspienne et un litre de champagne plus tard, je n’avais toujours rien trouvé lorsqu’on frappa à la porte. Enhardi par les bulles, j’allai ouvrir vêtu d’un simple peignoir de bain.
— Raf ! Mais bon Dieu, qu’est-ce que tu fous ici ? T’as perdu la tête ?
Sur le moment, j’ai failli répondre au bonhomme qui venait d’entrer en trombe que j’avais perdu autre chose, mais je me retins. Feignant l’amnésie alcoolique, je décidai de tenter le tout pour le tout. Quitte ou double. Pile ou face !
— Hey mec, de quoi tu me parles ? hic ! Je ne sais même plus qui je suis… hic !
— Quoi ? Tas une voix bizarre, Raf ? T’es malade ?
— Un peu… hic ! J’ai des trous de mémoire…

Ce ne fut pas un jeu d’enfant d’embobiner ce type, mais enfin il m’apprit que j’étais Don Rafaelo Veronese, puissant caïd de la pègre, qui louait une suite à l’année au Bellagio. Lui aussi était surveillé par le FBI ! L’envie me vint de coller mon poing sur la gueule de l’agent Sharp s’il avait eu le malheur de se trouver là. Mais où donc Matthew avait-il la tête en se faisant faire ce masque ? Cependant, cela pouvait me servir et il me vint une idée. Après avoir repris mes esprits, j’ordonnai à Benito « La Crampe », le second de Don Rafaelo, de trouver le moyen de m’exfiltrer au plus tôt des États-Unis.
— Apporte-moi l’un de mes faux passeports et une mallette avec un million en coupures diverses. Trouve un jet pour aller à Nassau, et passe au drugstore me prendre des pastilles pour que je retrouve ma voix !

La Crampe s’exécuta en un temps record, me laissant néanmoins le loisir de finir le champagne et le caviar, et de vomir ces mets dispendieux après avoir fumé un cigare. Au petit matin, j’embarquai dans un Falcon 2000 avec un million de dollars, un pistolet automatique et un passeport au nom de Stefano Brazzi, homme d’affaires, direction… les Bahamas !


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Tous les épisodes de Zanzi and the City :
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Un cadeau de Daniel C. Hall à Zanzi...


  
 
Modèle : Kamil Al-Hinai - © Kamil Al-Hinai
Publiée ici avec l'aimable autorisation de Kamil. Tous droits réservés.
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C’était hier, il y a deux mille ans. C’était il y a deux ans. J’avais encore les yeux éblouis par les mirages de Zanzibar, ce carrefour unique de l’Afrique, de l’Arabie et des Indes. Mon cœur était resté sur l’île d’Ujunga, tout imprégné des senteurs épicées des ruelles multicolores de Stone Town dont les accents bariolés me rappellent ceux de La Havane.

C’est alors que je t’ai croisé dans la réalité virtuelle de l’univers internautique. Comment oublier ce matin printanier où le temps s’est arrêté ? À travers les gigaoctets et le flux de la Toile, tout me conduisait vers toi, et tout te conduisait vers moi. Quelques mots échangés en swahili initièrent la magie qui, instantanément, s’opéra entre nous. Tu m’appris que ta mère était native de Zanzibar, que tes parents avaient vécu en Tanzanie et que toi, mon prince du désert, avait vu le jour en Oman, ce sultanat des sables aux confins de l’Arabie et des Émirats. Là-bas, il y a une ville qui porte ton nom : Al Kâmil. Kamil, ce printemps-là, fut pour moi le plus doux des prénoms. Comment expliquer cet amour qui naquit entre nous au fil de ces jours ? Tu disais que c’était le destin, le mektoub maghrébin, le kismet ottoman, une heureuse fatalité qui nous réunissait, et que les flèches de Cupidon avaient frappé ton cœur en voyant mon image.


Modèle : Kamil Al-Hinai - © Anthony Giorgio for Mondella
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Et moi, je me suis mis à rêver à l’impossible. J’essayai de percer le mystère des signes que les dieux nous envoyaient. Il ne pouvait y avoir de hasard. Un tel faisceau de concordances ne pouvait avoir qu’une seule signification : nous étions promis l’un à l’autre depuis la nuit des temps. Le sable brûlant qui s’écoule dans la clepsydre des âges ne tendait qu’à cette finalité : nous réunir pour l’éternité.

Pourtant, ce n’est pas sous le soleil de Mascate que nous nous sommes rencontrés, mais sous les brumes de Londres. Un parfum d’Empire dans une ville cosmopolite, l’ombre de Kipling sous le manteau de la reine Victoria, les multiples visages du Commonwealth et soudain, le tien comme une apparition céleste. Tes traits réguliers, la douceur de ton regard, la perfection de ta bouche, le hâle de ta peau… je n’avais jamais rien vu de plus beau. Lorsque tu m’as embrassé, j’ai fermé les yeux et me suis laissé embarquer pour Cythère.

Dans ton appartement éclairé par des bougies parfumées, l’Orient a déployé ses fastes pour recréer les charmes du désert. Une oasis sortie des sables, une tente de nomade plantée au pied de la dune sous les reflets argentés de la lune… tel était le décor féerique de notre amour naissant. La nuit tombée, ton doux visage s’est nimbé d’un rayonnement surnaturel. À cet instant, je n’ai plus respiré que par ton souffle. Je me suis désaltéré au ruisseau de ta bouche, nourri de ton corps, vêtu de ta peau.


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 Publiée ici avec l'aimable autorisation de Kamil. Tous droits réservés.
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Mais les mauvaises fées et les djinns sont jaloux du bonheur des mortels. Usant de leurs funestes sortilèges, ils se sont acharnés sur le nôtre, brouillant nos esprits et nos cœurs. Le ciel de notre amour s’est obscurci à la faveur d’un éloignement qui devait n’être que temporaire. Toi à Londres et moi à Paris, là résidait notre faiblesse. Si vite, je t’ai perdu. Il n’a suffit que d’une lune aux démons du passé pour transformer un au revoir en adieu.

Longtemps, très longtemps après ton départ, j’ai humé les précieuses essences de ton parfum d’orient. Prisonnier de ton charme, je m’enivrais inlassablement de leur odeur magique. Car tu étais l’Amour, et je t’appartenais. Et puis, un beau matin, je me suis aperçu que le flacon était vide. Il n’y avait plus de parfum, il n’y avait plus de larmes, n’était-ce une senteur résiduelle au fond de ma mémoire. Enfin, je pouvais contempler ton souvenir avec sérénité et me tourner vers l’avenir.

L’amour, pour toujours, est mon maître, et je suis son esclave. Mais un esclave libre. Le captif indocile des élans de mon cœur, l’amoureux insoumis et rebelle aux infortunes de la carte du tendre, partagé entre l’envie de rester et de partir, mais animé du profond désir d’aimer et d’être aimé. Un chapitre se referme, une nouvelle page s’ouvre que j’aimerais écrire à l’encre verte et bleue de Dina Margabim. Je vogue sur un frêle esquif en partance pour la banquise alors que je rêve de la chaleur bienfaisante de l’Océan Indien. Je m’éloignerai, peut-être, mais mon cœur demeurera à jamais là où réside mon amour. Désormais, où que j’aille, je me coucherai toujours là où se lève le soleil…


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 Publiée ici avec l'aimable autorisation de Kamil. Tous droits réservés.
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Pour lire le précédent épisode de Zanzi and the City, cliquez ici.

 



Ma vie est un savon. Bientôt, elle fera l’objet d’un film. Un producteur américain qui surfait sur le Net dans le cadre de ses activités professionnelles est tombé sur votre site préféré et a lu le récit de mes aventures. Mieux : il se trouvait lui-même au Beverly Hills Four Seasons au moment où des agents du FBI procédaient à mon arrestation. Ce n’est qu’ensuite qu’il a fait le lien entre l’événement et le récit. Depuis, il m’a contacté car il a envie de faire un blockbuster de cette aventure zanziesque.

Comme vous le savez, l’histoire n’est pas encore terminée puisque nous en sommes restés au moment où Matthew quittait le motel pour me permettre de m’enfuir et de partir à la recherche de mon visage. Cette quête m’occupe à plein temps et je ne m’octroie de pauses que pour consigner le plus fidèlement possible le récit des événements. C’est pourquoi il m’est impossible, comme cet éminent mogul me l’a demandé, de réfléchir de façon plus approfondie au casting que lui et moi avons commencé à élaborer.

Voilà pourquoi je m’en remets à vous, fidèles lectrices et lecteurs des Toiles Roses, pour nous aider dans cette merveilleuse entreprise. Nous tenons à vous y associer en lançant aujourd’hui un grand sondage pour savoir qui est le mieux à même de jouer tel ou tel rôle. Semblable démarche a déjà été organisée autrefois, en 1936, lorsque David O. Selznick avait acquis les droits d’adaptation de Autant en emporte le vent. Si le nom de Clark Gable avait rapidement fait l’unanimité pour interpréter Rhett Butler, en revanche, on se souvient que la quête de la Scarlett idéale avait duré près de trois ans.

Aujourd’hui, il nous faut déterminer qui va jouer mon rôle, mais aussi celui de Matthew et de l’Alien. Le producteur dont il est question (et qui tient à rester anonyme pour le moment, mais sachez cependant que c’est un poids lourd du 7e art, multi-oscarisé) tient à ce qu’un quatrième personnage, dont le rôle consisterait à être le narrateur de cette épopée, s’inscrive dans le scénario. Ce narrateur ne pouvant être que le maître de ce blog qui m’héberge si gentiment, il vous faudra aussi distribuer un acteur dans le rôle de Daniel C. Hall.

Vous trouverez ci-après quelques castings possibles. Je vous dirai aussi quelle combinaison a ma préférence. A vous, à présent, de choisir parmi celles-ci ou de déterminer la vôtre en proposant d’autres comédiens.

Casting Hollywood #1
Elijah WOOD as Zanzi
Jude LAW as Matthew
Hayden CHRISTENSEN as the Alien
And Philip Seymour HOFFMAN as Daniel

Casting Hollywood #2
Daniel RADCLIFF as Zanzi
Christian BALE as Matthew
Orlando BLOOM as the Alien
And Jack BLACK as Daniel

Casting Hollywood #3
Tobey MAGUIRE as Zanzi
Leonardo DiCAPRIO as Matthew
James McAVOY as the Alien
And Russell CROWE as Daniel

Sur le plan de la stricte ressemblance physique, le casting idéal serait, selon moi :
Tobey MAGUIRE (Zanzi)
Jude LAW (Matthew)
James McAVOY (l’Alien)
et Jack BLACK (Daniel).

Par ailleurs, je me suis amusé à imaginer un casting 100% françââââis pour une version bien de chez nous dont la réalisation pourrait être confiée à François OZON.

Je vous propose donc :
Malik ZIDI dans le rôle de Zanzi
Benoît MAGIMEL dans le rôle de Matthew
Melvil POUPAUD dans le rôle de l'Alien
Et Gérard DEPARDIEU dans le rôle de Daniel

D’autre part, une amie chilienne m’a signalé qu’il ne fallait pas être sexiste et qu’il pourrait être intéressant de faire jouer ce film uniquement par des actrices. Comme elle est d’origine latine, elle s’est amusée à concevoir une distribution avec des bombas latinas.

Voici le résultat :
Jennifer LOPEZ dans le rôle de Zanzi
Salma HAYEK dans le rôle de Matthew
Penelope CRUZ dans le rôle de l'Alien
Et Eva MENDES dans le rôle de Daniel
Réalisateur : Almodovar

Du coup, j’ai imaginé un casting d’actrices hollywoodiennes, des fois cette idée audacieuse plairait à mon producteur :
Keira KNIGHTLEY dans le rôle de Zanzi
Naomi WATTS dans le rôle de Matthew
Scarlett JOHANSSON dans le rôle de l'Alien
Et Kate WINSLET dans le rôle de Daniel

Enfin, juste pour le fun, je vous propose un casting encore plus audacieux, 100% black et 100% féminin (avec deux actrices oscarisées), dont le nom de code est « Dreamgirls » :
Beyoncé KNOWLES dans le rôle de Zanzi
Halle BERRY dans le rôle de Matthew
Whitney HOUSTON dans le rôle de l'Alien
Et Jennifer HUDSON dans le rôle de Daniel
avec la participation exceptionnelle de
Whoopi GOLDBERG dans le rôle de Queen of Sheba.


Pour lire le précédent épisode de Zanzi and the City, cliquez ici.


 

 
 

Il y a quelques temps de cela, alors que je me faisais refaire une beauté capillaire chez mon coiffeur attitré, en feuilletant des magazines je suis tombé sur un numéro de Paris Match. Le poids des mots, le choc des photos : tel était le slogan de la revue populaire fondée par Gaston Bonheur. Soixante ans après, la formule n’a pas changé. L’exemplaire que j’avais entre les mains reproduisait sur papier glacé une vision effroyable, de celle qui fait s’évanouir les chochottes et vomir ceux qui ont l’estomac fragile.

Le reportage en question parlait d’un soldat américain, un GI à peine entré dans l’âge adulte. Belle gueule d’étudiant propre sur lui, dans le style Beverly Hills 90210 ou Dawson’s Creek, le style qui fait craquer les jeunes filles outre-Atlantique. L’une d’elles y a succombé, d’ailleurs. Trois ou quatre ans plus jeune que lui, on la prendrait pour la parfaite Pom-Pom Girl, mais elle est tout autre, vous allez le découvrir. Ils se fréquentent, s’avouent leur amour. Vient le jour où le garçon est mobilisé pour partir en Irak. Il ne se dérobe pas à son devoir. Avant de partir, il pose un genou à terre, présente une bague de fiançailles à sa dulcinée et lui demande de l’épouser. Transportée d’allégresse, elle accepte.

Le mariage sera pour plus tard. D’abord, il faut servir sous les drapeaux, connaître la situation angoissante des prédécesseurs qui ont fait le Vietnam. À l’ombre de la bannière étoilée, le jeune homme débarque dans l’ancienne Mésopotamie. Il n’en reviendra pas intact. Une roquette ou une grenade, je ne sais plus, mais le résultat est le même. Une brutale déflagration, le véhicule militaire qui explose, et la vie qui bascule dans l’horreur. Certains de ses compagnons sont morts, lui est vivant… mais brûlé au troisième degré. Lorsqu’il arrive à l’hôpital, il est encore identifiable, mais les premières bandelettes posées sur ses plaies emporteront à jamais son joli visage.

Depuis, sa tête a doublé de volume, les oreilles et le nez ont disparu, et s’il a encore une bouche, il n’a plus figure humaine. Imaginez Élephant Man. En pire. Les images sont dures. Elles sont à la fois repoussantes et fascinantes. On pourrait dire que c’est obscène, une forme de voyeurisme morbide. Pourtant, le propos de l’article est de véhiculer un message d’espoir. Il s’agit de célébrer le triomphe de l’amour et de la vie sur la fatalité et la mort. La jeune fiancée du héros blessé ne l’a jamais quitté. Elle aurait pu le faire, d’ailleurs il le lui a proposé. Pour ne pas lui infliger « ça ». Mais elle est restée. Solide et inébranlable. Par amour pour lui. Elle dit que quand elle le regarde, à travers ce visage disparu sous les atroces brûlures, c’est l’amour qu’elle voit, et un cœur énorme qui bat. En l’occurrence, ce sont deux cœurs gros comme ça qui battent à l’unisson. Des cœurs purs et généreux qui s’aiment au-delà des apparences et de ce qui est périssable. Pour l’éternité. Ces deux héros ordinaires de l’Amour Vrai se sont mariés à l’automne dernier.

Tous, ou presque, nous avons un idéal. Certains préfèrent les blonds, d’autres les bruns, les roux. Il y a ceux qui « kiffent » les « rebeus » et les « blacks », ceux qui ont le fantasme du beau suédois, ceux qui préfèrent les charmes de l’Asie. Le prince charmant, tel que nous en rêvons, a de multiples visages. Chacun a cependant tendance à dresser un portrait-robot selon ses préférences, et tout y passe : de la taille à la couleur des cheveux et des yeux, en passant par les mensurations intimes et l’âge du candidat. Il est souvent bien difficile de trouver quelqu’un qui réponde à l’ensemble de nos pré-requis. Alors, on se contente de ceux qui s’en approchent. Mais l’insatisfaction n’est jamais loin, et l’herbe est toujours plus verte dans le jardin du voisin. Ainsi, pour peu qu’on croise quelqu’un d’autre qui semble « mieux », on quitte son compagnon, sa compagne, pour ce nouveau venu. Mais ce n’est jamais assez bien. Il y aura toujours, quoi qu’on fasse, un homme plus beau, une femme plus belle, et cet idéal inaccessible qui nous échappera sans cesse.

Si vous vous reconnaissez dans cette situation, si vous faites partie de celles et ceux qui se sentent frustrés parce qu’ils recherchent une perfection qui n’existe pas et qui s’évapore sous leurs yeux désabusés au moment où ils croient la toucher du doigt, suivez mon conseil : oubliez vos rêves et revenez à la réalité, déchirez ce portrait-robot du compagnon idéal que vous vous êtes fait, débarrassez-vous de vos critères de sélection, ouvrez les yeux… et laissez-vous surprendre ! Il n’est peut-être pas loin, mais bien plus proche que vous ne le croyez, le cœur qui vous fera vibrez. Il ne correspond pas forcément à l’image que vous vous en étiez faite, et il y a 9 chances sur dix pour qu’il n’y corresponde pas, mais il vous correspondra, au plus profond de vous-même. Lorsque vous aurez abandonné cette image et déchiré le voile des illusions, alors vous pourrez le reconnaître. Peut-être le connaissez-vous, ou pas encore, mais il ou elle aura, pour vous, le visage de l’amour.


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Aventure homoérotique déconseillée aux moins de 18 ans

 
 

Précédemment, dans Zanzi and the City : enlevé par des extra-terrestres, Zanzi a perdu son visage. Avec l’aide de Martin, il se rend à Los Angeles pour rencontrer un chirurgien esthétique mais son problème dépasse les compétences de celui-ci. Trahi par la belle-sœur de Martin, Zanzi tente d’échapper au FBI. Recueilli par un routier, il découvre que celui-ci est un flic fédéral qui le met en état d’arrestation…

 
Ainsi donc, je n’avais pas réussi à échapper au FBI ! Je dois reconnaître qu’ils sont vraiment très malins et savent employer les grands moyens. L’agent Sharp était prêt à me cuisiner toute la nuit. Je lui ai donc raconté les circonstances de mon enlèvement [voir épisodes 45 et 46 : Zanzi’s abduction] au moins cinq fois. Non, je n’affabulais pas. Pourquoi mentirais-je ? Lorsque l’agent Sharp me demanda de décliner mon identité, je lui remis mon passeport. Je vis son expression changer lorsqu’il remarqua ma photo.

— Vos yeux ont l’air si bleu…
— En réalité, ils sont quadricolores, répondis-je.
— Ah oui, comment cela ?
— Un mélange de bleu, de gris et de vert, avec des petits points marrons.
Sharp sembla troublé.
— Cela doit être très beau à voir. Vos yeux magnifiques, vos lèvres sensuelles, où cela a-t-il bien pu passer ?
— Je l’ignore, dis-je dans un soupir.

À cet instant, une larme se mit à couler sur la surface lisse de ma figure dévisagée.

— Quel phénomène étrange ! dit Sharp. Et vous dîtes que vous pouvez aussi manger et boire ?
— Oui, tout à fait. Aussi curieux que cela puisse paraître. Je dois être capable d’embrasser de même.

L’agent Sharp voulut en avoir le cœur net. En vrai professionnel, il s’approcha de moi et me dit :
— Embrassez-moi. Je suis incapable de trouver votre bouche, alors je vous laisse faire. Embrassez-moi ! Je veux savoir, je dois savoir !

Jamais il ne m’apparut aussi agréable d’obéir à un ordre. Matthew ferma les yeux lorsqu’il sentit mon souffle caresser ses lèvres et ses joues. Et je l’ai embrassé. Ce fut le baiser le plus extraordinaire de toute ma vie. Matthew poussa un gémissement et je le sentis frémir.
— Comment est-ce possible ? Mes supérieurs ne me croiront jamais.

Pour toute réponse, je me jetai sur lui et l’entraînai sur le lit, fermement décidé à lui montrer tout ce que ma bouche invisible était capable de faire. Ses lèvres humides, son cou halé, sa poitrine musclée… bientôt, pas un centimètre de sa peau ne put se soustraire à ma convoitise. En le voyant s’abandonner sous mes assauts, je sus qu’il adorait ce que j’étais en train de lui faire.
— Ta langue ! Je vois ta langue qui sort de nulle part. Oh, continue, ne t’arrête pas ! Oh ouiiiii…

L’agent spécial Matthew Sharp vivait la rencontre du troisième type dont il avait toujours rêvé. Quand j’eus fini d’exciter le dessus de sa ceinture, je m’attaquai à la partie inférieure qui m’offrait des formes supérieures. Il perla de son membre viril, déjà gonflé de désir, une première goutte de sueur que je dégustai avec gourmandise. Lorsqu’il vit sa bite s’enfoncer dans les abîmes sans relief de ma tête, comme s’il pénétrait la surface plate d’un chamallow ovale, Matthew gémit de plaisir. Il se cambra sous la pression que j’exerçais sur sa queue, tendue comme la corde d’un arc. Il mouillait telle une chatte sous la douce caresse d’une pluie d’été, et son désir imprégnait ma langue d’un goût savoureux dont mes papilles faisaient leur délice. Soudain, tout son corps se contracta, et dans un spasme, il poussa un cri sensuel et bestial, inondant ma gueule invisible de sa liqueur d’amour qui se répandit en de longs jets puissants…

Passé ce premier moment d’extase, je m’emparai de son corps car, si je n’avais plus de visage, j’avais encore tout le reste ! Si la police scientifique interrogeait les draps qui nous ont enveloppés cette nuit-là, elle pourrait vous révéler les détails de nos transports. Nous nous endormîmes aux premières lueurs de l’aube, exténués et consumés. Au milieu de l’après-midi, nous fîmes l’amour encore et encore, jusqu’au bord du soir.

Le moment était venu de nous quitter, et tandis qu’il se rhabillait, Matthew me rendit ma liberté.
— Je dirai à mes supérieurs que tu m’as échappé.

S’il avait pu voir mes yeux, il y aurait vu une immense gratitude.
— Zanzi, il faut que tu retrouves ton visage. Je veux que tu saches que cette journée fut merveilleuse et que pour moi, tel que tu es, tu auras toujours le visage de l’amour.

Je l’étreignis une dernière fois avant de le regarder s’en aller à l’horizon du soleil couchant. En lui disant adieu, je ne pus réprimer un sanglot. Une larme roula sur ma face uniforme et s’écrasa sur le pavé, où elle mourut sous les reflets du crépuscule.


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Ce n’est pas très confortable de vivre sans visage, surtout lorsque cette particularité est étonnante au point que, même sans yeux, je vois encore très bien, et que même sans bouche j’arrive encore à boire et à manger. La première fois qu’il m’a vu faire disparaître un bâtonnet de surimi dans mon néant facial, Martin a cru devenir fou. Très vite, il nous est apparu évident qu’il fallait cacher cette aberration de la nature. Je dissimulai donc mon non visage sous un masque.

Imprudemment, Martin avait mis sa belle-sœur, Caroline Dion, dans la confidence de mon infortune. Celle-ci avait entendu parler d’un chirurgien esthétique miraculeux officiant à Los Angeles. Le docteur Harry Glassman, qui fut pendant vingt ans l’époux de l’actrice Victoria Principal, avait la réputation de pouvoir accomplir de véritables exploits en chirurgie plastique et réparatrice. Malheureusement, mon cas éminemment complexe le laissa plus que perplexe. Il ne pouvait rien faire pour moi.

J’étais au désespoir, mais tant qu’à faire, c’est dans un hôtel cossu de Beverly Hills que je versais mes larmes. Le masque d’Hannibal Lecter étant par trop effrayant, je le troquai contre un masque de carnaval vénitien, et c’est sous l’incognito de comte Luigi Trani que je séjournais au Four Seasons.

Normalement, un aristocrate excentrique noyé dans une foule de milliardaires qui n’avaient rien à lui envier aurait dû passer inaperçu. Et c’est ce que je fis. Hélas ! C’était compter sans la trahison de Caroline Dion qui m’a vendu au FBI sans le moindre état d’âme ! Le deuxième soir, les Fédéraux débarquèrent en masse pour se saisir du mystérieux « homme sans visage ». Je n’eus pas le temps de prendre la poudre d’escampette.

Ceinturé par deux hommes en noir, j’étais conduit hors de l’hôtel et n’avais aucune issue… Mon esprit carburait à 200 à l’heure et soudain, au beau milieu du hall, je saisis ma chance et tombai le masque en poussant un horrible hurlement. Les deux agents spéciaux qui m’escortaient furent décontenancés, tandis que les clients témoins de la scène furent épouvantés. Une grosse dame de 150 kilos tomba dans les pommes, entraînant dans sa chute un groupe de touristes japonais qui commençaient déjà à flasher sur moi. Un tumulte fabuleux s’ensuivit, que je mis à profit pour m’enfuir.

Sitôt dehors, je m’emparai d’une puissante Mercedes roadster que je fis vrombir en 6e vitesse. Direction : droit devant moi, n’importe où. J’avais le FBI à mes trousses, et j’étais le héros d’une course poursuite sous les collines de Hollywood. En quelques minutes, j’étais devenu l’homme le plus recherché d’Amérique, tout ça parce que ces satanés Yankees sont attirés par le paranormal et parce qu’une arriviste Québécoise m’avait balancé pour seulement 10’000 dollars ! (Je vaux beaucoup plus, merde ! – note de Zanzi) Il paraît que c’est pour payer son opération des seins. Le Dr Glassman n’a pas tout perdu…

Par je ne sais quel miracle, j’avais réussi à prendre la route du Nevada et à semer les flics. Abandonnant la Mercedes sur le bas-côté de la route aux portes du désert, je fis du stop et fut pris… en pitié par un brave routier. Le bougre avait dû en voir de drôles au cours de sa vie, à moins qu’il ne fût déjà bien torché à la Budweiser, quoi qu’il en soit, il ne manifesta pas la moindre surprise en voyant (ou devrais-je dire, en ne voyant pas !) ma tête. Néanmoins, il devait être en partie lucide car non seulement il conduisait son truck sans le faire zigzaguer, mais en plus il se mit à me parler de la créature de Roswell. Il trouvait que je lui ressemblais…

Nous nous arrêtâmes à quelques kilomètres de Las Vegas pour faire étape dans l’un de ces motels bon marché qui sont nombreux sur les routes des Etats-Unis. Nous prîmes une chambre avec « two double beds », car mon routier bien sympa était du genre costaud qui prend toute la place. Il ressemblait tout à fait à ces brutes bourrues du Far West, mais il avait l’air gentil.

Quelle ne fut alors ma surprise lorsque son accent rocailleux du Kansas fit place à l’accent élégant de Boston, tandis qu’il se défaisait de son déguisement de routier ! Son épaisseur diminua de moitié, et, tel Jean Marais ôtant le masque de Fantômas, il retira une fausse peau sous laquelle se cachait une gueule d’amour vraiment glamour. Malheureusement, le beau mec BCBG (beau cul, belle gueule) qui se tenait devant moi à la place du gros « trucker » qu’il était encore cinq minutes auparavant me dit :
— Je suis l’agent spécial Matthew Sharp, et je vous arrête.

(To be continued…)

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L’intérieur du vaisseau ressemblait à une ruche bourdonnante. Des centaines d’aliens s’activaient dans tous les sens. Au niveau de sa conception, il n’avait rien de semblable aux élucubrations hollywoodiennes des films de science-fiction. Point de boutons lumineux multicolores ni de gadgets à gogo. Si j’osais cette comparaison hardie, un vaisseau spatial « Hollywood style » me fait l’effet d’une cathédrale gothique, alors que celui qui m’avait capturé faisait plutôt figure de cathédrale romane.

Simplicité et dépouillement, donc, mais qui n’excluaient en rien la haute technologie. Ces créatures d’un autre monde étaient en parfaite symbiose avec leur machine. Celui qui m’avait « captivé » dans tous les sens du terme me conduisit en un lieu dont je supposais qu’il devait abriter mon séjour à bord. Devant un mur d’une blancheur virginale, l’extra-terrestre fit, d’un geste circulaire de la main, s’ouvrir une porte qui n’était pas apparente. Nous empruntâmes un étrange couloir aux reflets bleu pastel qui, en réalité, se trouvait être un vortex. Le passage d’un point de vortex à un autre a ceci de surprenant qu’on ne sait s’il dure une seconde ou une éternité. Le transfert est instantané, mais tandis qu’il se produit, on a l’impression irréelle de vivre une vie entière et de traverser des milliers de paysages.

Lorsque nous atteignîmes l’autre bout, la porte du vortex s’ouvrit sur un jardin dont la féerie m’émerveilla. C’était la première débauche de couleurs au sein de cet environnement quasi monocolore qui m’entourait depuis mon entrée dans ce monstre d’acier. Une végétation luxuriante, sans commune mesure avec nos plantes terrestres, déployait ses fastes chatoyants devant mes yeux ahuris. Çà et là, des fleurs inconnues exhalaient un parfum rare et précieux, et des oiseaux indescriptibles tournoyaient au-dessus de nos têtes dans un concert de curieux gazouillis.

C’est alors que je dévisageai enfin mon joli geôlier. Ses traits réguliers avaient quelque chose d’humain, toutefois sa peau était de couleur bleu ciel et ses longs cheveux d’un noir de geai. Quant à ses yeux envoûtants, ils étaient mauves. Son allure était féline, il avait également de grandes oreilles pointues faites pour entendre dans le lointain, et des mains puissantes qui ressemblaient à la fois aux serres d’un aigle et aux pattes d’un lion. Son langage m’était incompréhensible, mais cependant, nous nous comprenions en esprit. Ses pensées pénétraient les miennes, et vice-versa.

Il m’attira contre lui, et dès ce moment, il n’y eut rien que je puisse faire pour lutter contre son magnétisme puissant. Toute résistance eut été vaine, aussi décidai-je de m’abandonner pleinement entre ses bras. Au moment précis où ses lèvres rencontrèrent les miennes, je n’aurais pas voulu être ailleurs dans toutes les galaxies. Tout se figea autour de nous tandis qu’il m’embrassait comme jamais nul ne le fit avant lui, et que son étreinte m’annihilait davantage. Tout mon être m’échappait et s’anéantissait dans cette rencontre fusionnelle. Soudain, dans un tourbillon de lumière céleste, nous fondîmes l’un dans l’autre et ne fîmes plus qu’un. Au sens littéral. Je m’étais volatilisé et lui aussi. À la place, un troisième être, la synthèse absolue de nous deux, faisait corps avec l’univers entier. Un être de perfection, aux proportions idéales. L’homme de Vitruve de l’espace.

Combien de temps cet état dura-t-il ? Je l’ignore. Tout comme j’ignore comment je me suis retrouvé aux abords de Matane. Le vaisseau spatial avait disparu, « il » avait disparu aussi, emmenant avec lui une partie de moi. Martin m’enveloppa dans un long manteau en peau de castor qui me couvrait intégralement de la tête aux pieds, et me conduisit à l’hôtel le plus proche. J’étais encore très faible et voyais dans ses yeux que quelque chose n’allait pas. C’est devant le miroir de la salle de bain que je compris la cause de son trouble. J’étais capable de voir, mais quelle déconcertante image : je n’avais plus de visage…

En s’envoyant en l’air avec un extra-terrestre, Zanzi a perdu la face

 

 

 

 

 

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Ma mémoire est troublée, confuse. J’ai encore du mal à me souvenir de tous les détails. Certains, sans doute, sont oubliés à tout jamais. Quand il m’a retrouvé inconscient aux abords de Matane, Martin ne m’a pas reconnu tout de suite. Seuls les vêtements que je portais au moment de ma disparition et mon passeport témoignaient encore de mon identité. Le choc fut rude. Tout d’abord, j’ai appris que tout le monde, lui le premier, me croyait mort ou, à tout le moins, mystérieusement disparu. Cela ne m’étonne pas. Ce qui m’est arrivé ce samedi 10 février est tout simplement ahurissant, et difficilement explicable. Aussi vais-je me contenter de narrer les faits, pour autant qu’il m’en souvienne, sans rien retrancher ni ajouter.

Après avoir décollé de Québec, j’ai effectivement changé mon plan de vol et décidé d’aller me poser sur l’île d’Anticosti pour y faire un touch and go d’une heure ou deux. Je prévoyais toujours de reprendre ensuite le trajet jusqu’à Gaspé où j’avais prévu de passer la nuit. C’est alors que tout s’est emballé. Une tempête de neige venait brusquement de se lever, réduisant fortement la visibilité. À mesure que nous approchions de l’île, le tableau de bord est devenu complètement fou, comme si nous traversions le fameux Triangle des Bermudes. Très inquiet, le pilote a réussi à faire poser l’appareil tant bien que mal. Aussi étrange que cela puisse paraître, il ne neigeait pas sur l’île. En revanche, la tempête faisait rage sur l’autre rive, le continent. La route de Gaspé nous sembla alors interdite. Je décidai donc de rester sur Anticosti, où il faisait un temps splendide mais où la nuit venait déjà de tomber.

Un habitant du coin vint nous voir pour nous proposer son aide. Il prétendait être mécanicien et pouvoir aider le pilote à réparer l’appareil. Je les laissai donc à leur besogne, profitant de l’occasion pour explorer les environs et trouver, si possible, âme qui vive avec un téléphone pour prévenir Martin car, bizarrement, mon cellulaire était tombé en panne en même temps que les instruments de vol. Alors que je m’étais éloigné de l’avion d’environ cinq cents mètres, une explosion me fit sursauter.

Revenant sur mes pas en courant, je trouvai le Cessna complètement détruit, des flammes déployant un large cercle autour des débris éparpillés. Qu’est-ce qui avait bien pu provoqué une telle explosion ? Je l’ignorais, mais savais que je ne devais pas m’attarder dans le coin. L’autochtone, qui venait de périr dans cette tragédie en même temps que le pilote, avait garé sa voiture un peu plus loin. Par bonheur, en bon nord-américain qu’il était, il avait laissé les clés sur le contact. Je démarrai en trombe pour aller chercher de l’aide.

Je devais avoir fait à peine un kilomètre lorsque la voiture s’arrêta soudainement. Le réservoir semblait plein, et il n’y avait aucune raison apparente pour que cette machine stupide me fasse le coup de la panne. Angoissé, je sortis du véhicule pour continuer à pied jusqu’à un hameau qu’un panneau indiquait à trois kilomètres de là. Je venais de faire quelques pas lorsque des lumières aveuglantes attirèrent mon regard vers le ciel. Je n’en croyais pas mes yeux ! Un énorme vaisseau spatial était en train de se poser devant moi. Éberlué mais aussi quasi hypnotisé, je n’ai pu m’empêcher de me diriger vers ce monstre d’acier d’un autre monde lorsque celui-ci s’ouvrit sur une lueur attirante d’où provenaient des chants mélodieux et ensorcelants. Ce moment intemporel et rare me rappela un épisode de Dynasty II – Les Colby :

Un alien d’une étrange beauté m’accueillit à l’entrée du vaisseau, laissant le sas se refermer sur nous…

 

(to be continued / à suivre)

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[Avertissement de Daniel C. Hall : Ce billet daté de décembre 2006 vient d'être retrouvé par un proche sur le disque dur de Zanzi à son domicile en France. Faut-il y voir un signe ? Un avant-goût du drame qui s'est joué au Canada ? Une conspiration ? Une fin intentionnelle et programmée ? Autant dire que ce post inédit et insoupçonné (voire post-mortem) a peut-être son importance dans cette triste disparition. Et c'est pour cela que je vous le livre aujourd'hui...]

 
 

 

Il y a des moments dans la vie où il faut passer à autre chose. « Tourner la page » a-t-on coutume de dire. Ou l’arracher, comme Karl Lagerfeld. Ou encore brûler le livre, détruire son œuvre. S’immoler en public. Et disparaître dans des volutes de fumée. Retourner au néant.

J’avais espéré, en vous faisant partager mes émotions, mes délires, mes coups de gueule et mes éclats de rire, créer un lien qui me manquait. Je voulais rejoindre une communauté, créer une interactivité et avoir la sensation d’exister enfin. Il n’en est rien. Je me sens plus vide qu’un coquillage abandonné sur la plage. Les impasses de ma vie professionnelle et la vacuité de ma vie privée ne me permettent plus de continuer. La force m’a quitté.

Le désespoir qui me ronge est d’autant plus profond et plus noir que pas la moindre lumière ne parvient à dissiper les ténèbres qui m’entourent. Dimanche dernier*, en allant voir ma nièce, j’étais physiquement présent mais moralement absent. Coquille vide. Les pleurs du bébé m’ont lassé avant de m’indifférer totalement. Je n’étais déjà plus là. Cette enfant de trois mois et demi n’a pu arrêter ma course à l’abîme.

L’heure est venue de tirer ma révérence, de baisser le rideau et de quitter la scène. Pour ne pas être victime de la fuite du temps, mais prendre de vitesse cet impitoyable assassin pour lui damer le pion. Ceux qui s’en réjouiront pourront s’ils le souhaitent allumer un grand feu de joie et danser sur mes cendres. Je m’en contrefous. Je n’étais personne, je n’étais rien. Je repars d’où je viens.

(*) Début décembre 2006 donc. Note de DCH


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[Avertissement de Daniel C. Hall : ce n’est pas sans émotion que je vous livre la dernière contribution que m’a fait parvenir Zanzi avant de disparaître au large de Terre-Neuve. Toute l’équipe du blog Les Toiles Roses est encore sous le choc.]

Mes lectrices et mes lecteurs savent à quel point le 14 février peut me perturber. La plupart des journaux quotidiens qui paraissent ce jour-là cèdent, depuis des années, à la manie de publier des messages d’amour de leur lectorat. C’est niaiseux, drôle ou sirupeux, mal écrit ou bien tourné, mais ça dégouline de bons sentiments écœurants. Bien évidemment, personne n’a jamais envoyé à La Voix du Nord ou à Libération ou à Jeune & Jolie un message d’amour à mon attention. Eh bien, allez tous vous faire foutre avec ce bordel de merde de fête commerciale à la con ! Ayez au moins la décence de respecter ceux qui souffrent de n’être pas aimés, arrêtez de vous bécoter sur les bancs publics, dans le métro, sur le trottoir, bref partout !  Beurk, vous me faites gerber avec vos démonstrations d’affection.

Je me calme…

Je me demandais sous quel angle j’allais bien pouvoir traiter un sujet aussi chiant que la Saint-Valentin. Alors, en hommage à Fabien (Oscar de la rupture crasse et salope et lâche de veille de Saint-Valentin 2005) et à Laurent (Oscar 2006) et à tous les autres nominés, voici comment je conçois une Saint-Valentin réussie :

Historiquement, il y a bel et bien eu un « massacre de la Saint-Valentin », à Chicago, le 14 février 1929. Al Capone avait commandité l’élimination de la bande des North Siders, des malfrats irlandais avec lesquels il était en rivalité. Jack McGurn, dit « La Sulfateuse », est chargé de réunir des tueurs pour anéantir la bande des North Siders et en particulier son chef, George Bugs Moran, dit « Moran le Branque ». Cet épisode constitua l’apothéose de la guerre des gangs dans le Chicago de la prohibition. Son retentissement inspira d’ailleurs l’intrigue de départ du film Certains l’aiment chaud (1959) de Billy Wilder, dans lequel Tony Curtis et Jack Lemmon sont témoins du massacre de la Saint-Valentin où les personnages historiques de « La Sulfateuse » et de « Moran le Branque » deviennent Spats Colombo ou « Colombo les Guêtres » (excellent George Raft) et « Johnny cure-dents ».

À défaut de pouvoir vous présenter la scène du massacre, j’ai réussi à dégoter le duo Curtis-Lemmon en travestis (dans leurs rôle de Joséphine et Daphné).

Dépêchez-vous messieurs-dames, vous allez manquer le train ! Tout comme moi, il y a longtemps, j’ai manqué le train de l’amour…

[Note finale de DCH : C'est beau, non ? C'est-y pas émouvant ? Moi j'ai la larme fatale... Et je me dis que tout est écrit, que nous sommes prédestinés... La preuve ? Zanzi a peut-être manqué le train, mais pas l’avion… hélas ! Belle épitaphe ? Mééé dites-moi pas que c’est pas vrééé…]


Pour lire le précédent épisode de Zanzi and the City, cliquez ici.


par le Capitaine Martin Tremblay-Laflamme(*)

 

Jeudi dernier, j’ai reçu de Zanzi un bref courriel m’annonçant son retour au Nouveau-Monde : « arrive à Trudeau demain 12h15 LT, prépare équipement ». Je savais depuis quelques jours qu’il projetait de revenir en terre canadienne afin d’y planifier son installation dans le courant de l’été prochain. J’ignorais seulement qu’il l’aurait fait si vite. Il n’aurait pas dû.

J’ai connu Zanzi en juillet 2005, au cours de son premier séjour à Montréal. Pas tout à fait le premier, mais disons le premier de ce millénaire. Il était tout feu tout flamme et ne tremblait devant rien, ce qui nous amusait beaucoup par rapport à mon patronyme très « Nouvelle France ». Nous avons sympathisé tout de suite. Je le sentais très enthousiaste par rapport au Québec et aux québécois, il me répétait souvent que son rêve serait de s’installer ici.

Le mois dernier, il a obtenu de son employeur une mutation au Nouveau-Brunswick. Ce n’était pas tout à fait ce qu’il aurait voulu mais c’était le plus près de la destination envisagée. Je sais qu’il a hésité, mais une fois sa décision prise, il a voulu aller très vite. Trop vite.

Le vol Air Canada 871 s’est posé avec une minute d’avance. Ça ne pouvait que plaire à Zanzi, cette ponctualité légèrement devancée. Quand je l’ai récupéré après la douane, j’ai été frappé de le voir si blafard et les traits tirés, il n’avait pas l’air d’aller bien.
— Martin, c’est fini la France. Je suis quasi au bout du rouleau. J’espère au moins qu’ici je pourrais renaître.

Ainsi donc, ce que je lisais dans son spleen mcbealien n’était pas faux. Zanzi avait changé. Son visage s’était durci et ses yeux avaient perdu leur éclat fabuleux.

Au lieu de prendre la correspondance d’Air Canada pour Moncton, il a décidé de louer un Cessna 421 « pour survoler la nature ». « J’ai envie d’admirer la neige de près » m’a-t-il dit. Nous avons bavardé toute la soirée. Il n’avait pas jugé utile de prévenir ses cousins de son arrivée « pour ne pas les déranger ».
— Je repartirai déjà dimanche, je suis attendu à Paris lundi soir.

Le Cessna a décollé de Montréal samedi midi. Peu après treize heures, il a fait étape à Trois-Rivières. Il en est reparti à 14h30. À 15h15 il s’est posé à Québec. À 17h, Zanzi m’a téléphoné :
— Je repars dans dix minutes. Je passerai la soirée à Gaspé.

À 17h35, nouvel appel : « J’ai changé d’avis, je pousse jusqu’à l’île d’Anticosti. Je t’appellerai de là-bas ! »

Les écrans de contrôle ont perdu le signal de l’appareil entre les Monts Chic-Chocs et le détroit d’Honguedo. La neige tombait, le blizzard soufflait, la visibilité était réduite. Impossible de lancer des équipes de nuit sur les traces de Zanzi. La brève et fulgurante tempête qui s’est déclenchée hier vers 18h a cessé peu après minuit. Ce matin, les recherches ont commencé dans le paradis blanc…

 

Note :
(*) de la police montée canadienne de la MRC de Montcalm

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