Parce que la fête ne sera pas au rendez-vous pour tout le monde, parce que certains lendemains de
réveillon sont difficiles (gueule de bois, foie encombré et cadeaux qui ne plaisent pas), cette petite vidéo invite à réfléchir sur la vraie signification de Noël. Dans "consommation", il y a
"con" et "sommation". Sommes-nous donc sommés d'être cons ?(Zanzi)
Ach ! le marché de Noël, ses petits chalets, son vin à chaud à la canelle, slurp. Fi de la crise ! Je
vais manger du caviar pour me sentir encore plus riche. Mais trève de considérations consuméristes loin de l'esprit de Noël. Quelqu'un a-t-il vu le chalet de Roméo et de Juju ? Je voudrais deux paires de boules et deux jolies bougies pour mon sapin ! ;-)(Zanzi)
White Christmas chanté par deux grands crooners : Bing Crosby et Frank Sinatra. Avec de jolies images en prime. J'ai même acheté un calendrier 2009 avec ces images. On ne les trouve qu'en
Amérique !(Zanzi)
Sa Majesté la reine du Canada vous présente ses bons vœux de Christmas. Certes, ce sont ceux de 2007.
Nobody's perfect. Mais reconnaissez que cela change des vœux présidentiels sur prompteur...(Zanzi)
Émission de Christophe Izard, pendant deux semaines, LesVisiteurs du Mercredi
devenaient Les Visiteurs de Noël.Ce tendre souvenir a la saveur d'un parfum d'autrefois, d'une enfance protégée, colorée et riante. Autrefois, il
n'y avait que trois chaînes à la télévision, mais des programmes de qualité ! De nos jours il y a des centaines de chaînes... Je vous offre cette carte postale d'un Noël comme on n'en voit
plus guère. (Zanzi)
Notre collaborateur et chroniqueur-star démissionnaire, retraité et
évanescent, Zanzi, a été retrouvé dans le Grand Nord Canadien par la reporter (rapporteuse ? reportrice ?) Megan Barrington Montgomery, de la sérieLe Cœur a ses Raisons, qui succède à
Criquette Rockwell dans cette interview décidément pas comme les autres…
Megan Barrington Montgomery : Bonjour Zanzi !
Zanzi (visiblement de mauvaise humeur) : Merde, elle m’a retrouvé.
MBM : Zanzi, comment allez-vous ?
Zanzi (recrachant un morceau de homard congelé) : Beurp.
MBM (consultant ses fiches) : Votre dernier billet de Zanzi and the City date du
23 septembre. Depuis vous avez publié le 7 octobre un témoignage dans le cadre de la série « Si j’étais », et un hors-série le 21 octobre. Et puis plus rien.
Pourquoi vous n’écrivez plus ?
Zanzi : Je n’ai plus envie d’écrire.
MBM : Pouvez-vous nous dire pourquoi ?
Zanzi : Pourquoi.
MBM : Merci. Alors, question suivante… (elle s’emmêle dans ses fiches) Allez-vous revenir sur
Les Toiles Roses ?
Zanzi : Je ne sais pas.
MBM (décontenancée) : Y aura-t-il une saison 4 de Zanzi and the
City ?
Zanzi (agacé) : Elle a déjà été écrite…
MBM (au bord de la panique) : Je voulais dire… euh… (essayant de reprendre
contenance) Est-ce que je suis bien dans caméra ?
Zanzi : Oui, c’est parfait.
MBM (soulagée, mais décoiffée) : Je voulais dire, écrirez-vous une saison 5 ?
Zanzi : Il n’y a que quatre saisons dans une année. Une cinquième bouleverserait l’équilibre
calendaire.
MBM (qui n’a pas compris la réponse et souris avec un air stupide) : Zanzi, pourquoi ce long
silence depuis plus de deux mois ?
Zanzi (enfin décidé à cracher le morceau, et pas de homard) : Alors voilà. Pour résumé, j’ai rompu
avec Andréa, j’ai été secoué par le suicide de mon collègue, cassé par un ami – je ne citerai pas de nom – qui me fait douter de mon avenir et du tournant que je veux donner à ma vie, et puis
merde ! je fais ce que je veux, j’avais besoin de prendre l’air, d’attraper un gros rhume par ce froid pôlaire, et de prendre mes distances car cela me donne un charme distancié.
MBM : Waouh !
Zanzi : Vous l’avez dit.
MBM : Donc, la saison 5 de Zanzi and the City, c’est pour quand ?
Zanzi (d’évidente mauvaise foi) : Je n’ai pas compris la question, Megan, pouvez-vous
répéter ?
MBM (haussant la voix) : La saison 5 de Zanzi and the City, c’est pour
quand ???
Zanzi (faisant mine de tendre l’oreille) : Parlez plus fort, je suis célibataire !
MBM (ouvrant la bouche pour beugler à la façon de Lara Fabian) : La saison 5…
Dans la cité des anges, quand le crépuscule tombe sur le boulevard, il arrive que certains s’endorment en sachant pertinemment qu’ils ne
verront pas l’aurore.
Il s’appelait Steven, il était des nôtres. Il aimait la vie et la mordait à pleines dents. La dernière fois que je l’ai vu, en juin dernier à
New York, il voulait encore m’emmener dans le genre de fête où l’on s’étourdit sur les rythmes les plus récents, où l’on danse jusqu’à l’aube, en espérant croiser le compagnon d’une nuit qui en
réalité n’est qu’un jour qui s’y substitue, le temps de rompre, entre ses bras inconnus, la monotonie de la solitude.
Steven était une « tête ». Avec son bagage universitaire, il aurait pu trouver un emploi en or. Juriste multi diplômé, il avait
renoncé à une carrière toute tracée dans de prestigieux cabinets pour devenir, à 30 ans, un simple secrétaire d’une grande entreprise française. Mais cette entreprise lui offrait la possibilité
de voyager et son rêve, c’était l’Amérique. Il parlait aussi l’espagnol, l’italien et l’espéranto.
Il s’est battu pour être affecté en Californie. La DRH a longtemps soufflé le chaud et le froid. Et puis, alors qu’il avait commencé à
planifier d’autres projets à San Francisco dans une optique de vie plus bohème qui l’aurait rapproché de Madame Madrigal et de Michael Tolliver, son vœu fut exaucé : il fut muté à Los
Angeles. Aujourd’hui, je me dis qu’il aurait mieux valu que ses pas l’aient conduit plus près de Barbary Lane que de Mulholland Drive…
Pendant deux ans, Steven s’est éclaté sous le soleil californien. Il était heureux. Et puis, l’été dernier, est arrivé son nouveau patron. Un
genre de maquignon qui achèverait volontiers les derniers mustangs du Nevada – en existe-t-il encore ? – , ces ultimes chevaux sauvages et libres que Clark Gable et Monty Clift attrapaient
au lasso dans Les Désaxés. Un homme autrefois important, ou qui plutôt se donnait de l’importance ; un roquet
qui était la voix aphone de sa maîtresse. En France, il est de tradition de récompenser les médiocres dont on ne veut plus en leur offrant une belle promotion. Voyez par exemple ce qui se produit
de-ci de-là avec la crise boursière internationale. Ce fut donc la côte ouest, là où la vie passe pleine de songes et d’illusions…
Rapidement, la pression exercée sur Steven par son nouveau chef de service, probablement ravi de jouer les despotes à qui il faut obéir au
doigt et à l’œil et qui ne supporte aucune contradiction, a pris les atours d’un harcèlement moral insidieux propre à saper les fondations les plus résistantes. Or, malgré sa haute carrure,
Steven était un colosse aux pieds d’argile. Un gentil Goliath face à un méchant David. Un être sensible, comme moi, comme nous tous, peut-être un peu plus fragile. Je sais ce qu’il a enduré
depuis trois mois pour l’avoir enduré moi-même pendant un an avec mon précédent patron, et bien que cette immonde ordure soit partie depuis 5 ou 6 semaines et que son remplaçant soit du genre
« cool » et à tout le moins normal, le mal est fait et j’en ressens les symptômes.
Samedi dernier, pendant que Juju et Roméo se croisaient en boîte de nuit, prêts à offrir le
spectacle d’une scène de ménage dont ils ont le secret, quelque part de l’autre côté de l’océan, une âme en peine, un esprit au bout du rouleau, préparait sa sortie de la vie.
Dans la cité des stars, Steven est parti comme une star. Médicaments et alcool, le cocktail tout en douceur qui ne figure pas sur la carte du
Zanzi’s Bar. L’histoire ne dit pas quelle était la composition de ce mélange magique qui met un terme à toute souffrance physique ou morale. À
quel point de non-retour sa détresse avait-elle pu le conduire pour qu’il ne lui fût plus possible d’envisager une autre option, et ainsi de renoncer à ses rêves, pour nous quitter en pleine
jeunesse ? Il a laissé un message à son ami, tout en s’assurant qu’il ne pourrait être sauvé. À moins que la seule manière de se sauver d’un monde barbare et impitoyable réside dans la
fuite. Un grand saut dans les ténèbres ou une échappée belle vers de nouveaux horizons où l’herbe est plus verte. Une capitulation ou un sursaut vers la victoire.
Sa mort brutale, incompréhensible, inattendue, résonne en moi comme un écho à mon propre abandon. Elle me donne aussi une piqûre de rappel,
pour me que je n’oublie pas que je n’ai pas vocation à me laisser broyer par le système, laminer par d’odieux petits chefs, ni à baisser les bras parce que ma vie n’est pas encore telle que je
voudrais qu’elle soit, mais que je dois au contraire redresser la tête et foncer me donner les moyens d’atteindre mes objectifs, quitte à tout plaquer. Mais pas comme lui, pas comme ça. En allant
de l’avant, vers l’aventure. Vers la vie.
Quand je suis parti de France il y a un an, je n’avais aucune intention d’y
revenir un jour, sauf avec une auréole de gloire et un gros compte en banque dissimulé dans un paradis fiscal, de sorte que je pourrais me partager entre ma résidence parisienne (qui serait bien
sûr un duplex moderne de 200 m2), mon cottage en Normandie, mon mas provençal ou ma villa dans le Lubéron, une autre près du Lac de Genève, pas très loin de chez Cleve, une autre à Lugano, en Suisse italienne, pour être le voisin de George Clooney, et une grotte troglodyte aménagée dans le Val de Loire, pour
goûter à la douceur du Jardin de France célébré avec nostalgie par Joachim du Bellay. J’aurais aussi un riad au Maroc, et naturellement un petit palais à Zanzibar, ma porte sur l’Océan Indien
d’où je rejoindrais ponctuellement La Réunion et Madagascar où, là aussi, j’aurais un chez moi.
Rien que ça. Vous voyez, je ne demande pas beaucoup à la vie. Juste d’avoir un point de chute à moi quel que soit l’endroit où je pose mes
valises.
Quand je suis parti de France il y a un an, je voyais l’Amérique du Nord comme le continent où, plus encore qu’un nouveau départ, je pourrais
enfin prendre mon envol dans la vie et réaliser mes rêves. La première année fut difficile à vivre. La deuxième, semble-t-il, s’annonce plus sereine. Mais c’est, dit-on, le cas pour tout
expatrié.
Quand je suis parti de France il y a un an, j’étais célibataire. J’avais laissé derrière moi un certain nombre d’amours mortes et de romances
inachevées. Mon cœur battait encore pour deux ou trois personnes, peut-être quatre, mais faute de pouvoir rester et, en outre, non retenu par quiconque, j’ai quitté sans me retourner ces
histoires qui ne pouvaient déboucher sur rien de concret.
Et puis, par un hasard que je n’attendais plus, en juin dernier j’ai rencontré Andréa. Au moment de notre rencontre, j’avais déjà pris la
décision de quitter mon actuelle profession à l’horizon de l’été 2009, afin de me donner les moyens de réaliser mes rêves et de tenter l’aventure tant qu’il en était encore temps. Cependant, je
venais de traverser six mois tellement pénibles que j’étais dégoûté du Canada et avais pris le parti de revenir en France, non sans avoir passé au préalable deux mois à Casablanca pour me
ressourcer chez ma sœur de cœur Zohra, et y puiser une inspiration pour me lancer dans mes œuvres.
J’étais dans cet état d’esprit lorsque j’ai rencontré Andréa, lorsque que nous avons passé ensemble trois jours romantiques à Paris, et lorsque je suis rentré début juillet à Moncton pour affronter les responsabilités qui m’attendaient
et allaient me bloquer là-bas durant toute la saison estivale. Aussi, le plus naturellement du monde, Andréa est-il parti du principe que j’allais revenir en France.
Comme vous le savez, ma vie ressemble à un savon, et les savons, ça glisse. Sinon, ce n’est pas drôle. Et l’équipe de scénaristes qui écrivent
Zanzi and the City, super-savon dont je suis le héros, ont bien évidemment choisi d’assombrir le ciel de mon personnage en l’assaillant de doutes et en lui faisant reconsidérer l’idée,
non de quitter son emploi actuel, mais de quitter le Canada l’année prochaine.
Je me suis souvenu dernièrement que, lorsque je suis parti de France il y a un an, je me suis dit que si j’y revenais sans avoir réalisé mes
rêves et mes ambitions, ce serait le constat de mon échec. Or, je dois bien reconnaître que c’est ce qui me pend au nez si je choisis de faire marche arrière ! À part l’amour que je
n’attendais plus, qu’est-ce que la France peut m’offrir, qu’elle ne m’a pas offert au cours de toutes les années qui ont précédé ? Et l’amour, lui, ne peut-il me rejoindre là où je
suis ?
Terrible problème du choix…
Andréa commence à Paris une carrière qui s’annonce aussi prometteuse que les nouvelles perspectives qui s’ouvrent ici devant moi. Faudra-t-il
que l’un d’entre nous se sacrifie ? Serons-nous capables de trouver un compromis ? Barack Obama sera-t-il élu Président des États-Unis ou bien Sarah Palin damera-t-elle le pion à
Hillary Clinton en devenant la première Présidente en juillet 2009 après que John McCain aura succombé à une crise cardiaque ? Carla imitera-t-elle Rachida et tombera-t-elle enceinte elle
aussi ? Ou est-ce vraiment l’excès de bière qui, selon ses propres dires, arrondit son ventre ?
La bière, je m’y suis mis depuis quelques semaines. Pensez donc, avec mes potes, on la trouve à un 1,50 $ dans un bar à deux pas de mon bureau.
La bière pour un euro, vous y croyez ? C’est possible, dans une province où le taux de croissance n’est pas à moins de 2 % comme en France, mais cousine avec celui de la Chine. Alors, nous
refaisons le monde autour d’une Alpine, d’une Mooshead ou d’une Alexander Keith. Demain soir, je vais leur faire goûter la Leffe Blonde, la bière de mon coin de pays en France (bon, d’accord,
elle est Belge, mais c’est ça l’Union Européenne !). On ne va pas chipoter. Même la Stella Artois est Belge et pourtant l’Artois, c’est en France ! Bref… encore une fois je m’égare
comme dans un hall…(de Daniel C. ! hahaha !)
J’en étais donc à énumérer toutes
les incertitudes qui planent autour de la saison 5 de Zanzi and the City. D’ailleurs, y aura-t-il seulement une saison 5 ? Les scénaristes se tritouillent la cervelle. Moi-même, je
ne sais plus où j’en suis. Tout serait plus simple si je n’étais pas un personnage réel. D’ailleurs, qui vous dit que je ne suis pas un personnage imaginaire ? Et que Nelfew, lui, est bien réel ! Ou que nous sommes tous les deux réels ou tous les deux imaginaires.
Vous n’y croyez pas ?
Vous n’y croyez plus ?
Vous voulez voir ce que ça donne ?
Regardez, j’appelle Nelfew, et il va me faire disparaître…
L’abruti que je devais supporter en tant que supérieur hiérarchique direct est enfin parti. Il s’en va sucer des bites à Amsterdam et se faire
fourrer dans les backrooms les plus glauques du pays du Gouda. Dire que je ne vais pas le regretter est un doux euphémisme. Les deux dernières semaines durant lesquelles il m’a fallu le
supporter, ce petit führer s’est montré particulièrement odieux. Évidemment, il n’a pas manqué de dresser de moi à son successeur un portrait des moins flatteurs, mais son remplaçant est, je
pense, assez intelligent pour faire la part des choses, et lorsqu’il commencera à se mêler à la population, il n’entendra dire de moi que du bien. Le temps se chargera donc de démonter les
allégations mensongères de son immonde prédécesseur…
J’ai encore du mal à me remettre du stress généré par ce fou ; il m’a fallu reprendre des anxios pour ne pas retomber au plus profond de
la détresse psychologique, mais il est vrai que j’ai ressenti les mêmes symptômes que lors de ma dépression hivernale de mars dernier. Comme j’aurais aimé avoir Andréa auprès de moi ! À défaut de casser la gueule au connard, il aurait su me réconforter le soir…
À présent, je commence à entrevoir les bons côtés du Canada par rapport à la France : coût de la vie moins chère, pression fiscale deux
fois et demi moindre, et le petit monde d’ici est assez sympathique. Tout fonctionne au relationnel. Et les amis de mes amis sont mes amis.
Récemment, j’ai joué au mitron avec Nick, qui vient ouvrir une boulangerie française dans la région. Il m’a fait les croissants les
plus délicieux que j’ai goûtés depuis mon départ de France. Ils sentaient bons la France. Les croissants ici sont produits en batterie industrielle et sont carrément dégueulasses. Mais le travail
bien fait d’un artisan, avec une bonne farine, du bon beurre à la normande… hmm, je me suis régalé ! Le label de l’artisanat français est de toute façon synonyme de haut de gamme,
et avec ses croissants au beurre, nul doute que Nick gagne l’argent du beurre !
Je deviens de plus en plus un pilier de bar. Lorsque je vivais à Paris, je passais de nombreuses soirées de solitude dont ma mémoire a effacé
les traces. Il était extrêmement rare que quelqu’un m’appelle pour me proposer une sortie. Juste comme ça, en toute amitié. Ici, c’est différent. Coup de téléphone de Nico : « Je prends
une bière avec Nick, viens nous rejoindre ». Juste un truc comme ça. Mais qui fait toute la différence.
Nico dirige le restaurant le plus smart de la ville pour le compte d’un businessman sans scrupules. Quand j’y vais, j’ai les boissons
gratuites… Qui m’offrirait l’open-bar à Paname ? L’autre soir, il m’a présenté à un ancien Premier ministre du Nouveau-Brunswick qui dînait en famille, et en toute simplicité, vêtu d’un
polo, d’un bermuda et chaussé de tongs ! Je n’imagine pas Dom de Villepin faire de même à Montmartre ou dans le XVIe chicos. Raffarin, peut-être… mais en province. Et ce soir-là,
je sirotais avec des amis et j’ai demandé à Stew, un jeune serveur bâti comme un joueur de hockey et, si j’en crois le relief de son pantalon à un endroit bien précis placé sous la ceinture,
monté comme un âne, de m’apporter une portion de frites maison. Je n’avais pas dîné, ayant l’appétit sans cesse coupé en raison des relations de travail délétères précédemment évoquées.
Néanmoins, la présence de personnes sympathiques avait éveillé une petite fringale. Avant de quitter le resto, je vais voir Stew et lui demande combien je dois pour les frites. « C’est
offert ! », m’a-t-il répondu dans un sourire. Qui dit mieux ?
À présent que les choses se déroulent normalement avec mon nouveau patron, et que mes amis me font entrevoir des possibilités intéressantes
d’établissement dans ce pays encore neuf et pas plombé par la bureaucratie et des millions de lois et de décrets comme l’est la France, l’idée de fixer ma base ici fait son chemin.
Beaucoup de choses changent, des remises en question surgissent çà et là, et si l’avenir s’annonce prometteur, l’angoisse de faire le mauvais
choix me complique l’existence. Et hop ! je reprends un anxiolytique…
Cela fait déjà un an que j’ai quitté la France pour le Canada. Aujourd’hui sonne l’heure du bilan.
J’ai de la difficulté à écrire ces lignes, car en ce moment tout n’est pas rose sur la toile de ma vie. Au niveau professionnel, je traverse
une zone de turbulences qui ne fait que conforter ma résolution de quitter le métier que je fais, et ce par n’importe quel moyen. Je vais y revenir.
Commençons par le Canada. M’a-t-on bien accueilli ? Assez bien, je dois en convenir. Les gens sont accueillants et pendant un an, j’ai
entendu régulièrement des « Bienvenue au Canada », « Bienvenue en Aacadie », « Bienvenue à Moncton ». Et toujours des « aimes-tu ça Moncton ? »,
aussi. Comme si les autochtones étaient inquiets de l’impression que leur ville pouvait me faire. Alors je réponds que oui, pour leur faire plaisir. Honnêtement, je ne peux leur répondre non, car
ne serait pas exact. En vérité, mes sentiments sont mitigés.
Certes, la vie ici n’a pas le côté trépidant de Paris. Cependant, sur le plan culturel ils sont très actifs et notamment au niveau musical. Je
vais vous donner un exemple qui vous prouvera que, malgré tout, je ne vis pas dans le trou du cul du monde. Le 28 septembre prochain, Sir Elton John, « Queer Mum », donnera un concert
exceptionnel au Colisée de Moncton. D’autres artistes réputés suivront courant octobre : Alice Cooper, Lenny Kravitz… Cependant les films qui passent dans les deux complexes de cinémas sont
à 99 % américains et le turn-over est tel qu’il faut se dépêcher car ils ne restent pas longtemps à l’affiche. Je viens d’en faire les frais en ayant trop tardé pour voir le 3e épisode
de La Momie qui a déjà disparu des écrans locaux.
Ma maison à Caribouland
La qualité de vie est appréciable. Pour le prix d’un studio ou d’un deux-pièces à Paris, on peut avoir une grande maison avec un jardin. Les
gens ne vivent pas les uns sur les autres. Il y a de l’espace pour circuler. On peut se nourrir sans se ruiner, et même se nourrir correctement, c’est-à-dire, sans courir le risque de devenir
obèse. C’est une question d’éducation ou de culture alimentaire. Sur un plan général, Moncton n’est pas ravitaillé par les corbeaux et l’on peut y trouver (presque) tout ce qu’on veut.
La ville compte plusieurs parcs et terrains de golf, est environnée de nature, et la mer est à moins d’une demi-heure de voiture (à l’échelle
du pays, c’est la porte à côté).
Au négatif, il faut du temps pour s’acclimater, et ce dans tous les sens du terme. J’ai beau avoir deux comptes bancaires et une Mastercard
Platine, les organismes de crédit ont refusé, lors de mon arrivée, de me faire bénéficier de paiements échelonnés pour des achats nécessaires. Le motif : il faut pour cela un
« historique de crédit » d’au moins six mois. La conséquence : avec l’hiver qui n’a pas tardé à surgir et le découragement qui s’ensuivit, j’ai laissé tomber et ma (trop) grande
maison n’est meublée qu’à 20 % (voire moins). Tous les projets d’aménagement que j’avais imaginés sont tombés à l’eau, et l’eau a gelé pendant l’hiver…
De plus, je n’ai pas encore trouvé le temps de faire un tour en la ville de Québec, et si cela continue, je laisserai passer les cérémonies de
son quatrième centenaire sans y avoir mis les pieds. Quelle pitié !
Il fallait bien que j’en parle un jour. Les savons, c’est quand même l’une de mes spécialités, même si Jag1366 vous a fait découvrir Ainsi
va le monde. Personnellement, j’aurais opté pour un titre plus voltairien : Le monde comme il va. Faisons simple et appelons As The World Turns comme on l’écrit en
Amérique : ATWT.
ATWT est l’un des plus anciens savons en cours de tournage. Le doyen des feuilletons à l’eau de rose est Guiding Light, diffusé à la
télévision depuis le 30 juin 1952, mais né sur les ondes radiophoniques en janvier1937 ! ATWT, quant à lui, est diffusé sur CBS depuis le 2 avril 1956. En voici le tout premier
générique.
La version suivante faisait directement référence à la marque de savon commanditaire, Procter & Gamble. Impensable en France ! C’est
un peu comme si le générique de Thierry La Fronde avait été barré d’une réclame pour Skip.
Le générique n’a vraiment commencé à devenir moderne et sexy qu’au tournant du millénaire. En voici la preuve.
Jusqu’à ce que l’année dernière, il adopte sa version actuelle. Vous reconnaîtrez le morceau musical qui accompagne les vidéos de
Jag1366.
Étant très paresseux, je ne vais pas vous faire l’historique de ce savon quinquagénaire qui n’a jamais eu l’honneur d’être diffusé sur les
écrans français. Je vais donc me contenter de l’étudier sous l’angle des Toiles Roses, sachant que ce feuilleton, s’il n’est pas le premier à parler d’homosexualité, est cependant un
pionnier en ce qu’il montre un couple gay : Luke Snyder et Noah Mayer. Ces deux-là sont faits pour s’entendre : ils ont 82 % de compatibilité sur le Lovecalculator.
Néanmoins, leur romance n’est pas un long fleuve tranquille. Ce couple est le préféré des fans d’ATWT, il tient le haut du pavé depuis des mois
sur le sondage hebdomadaire du magazine Soap Opera Digest. Malheureusement, les fans commencent à désespérer de la situation de nos héros qui, un an après le début de leur histoire
d’amour, ne l’ont toujours pas consommée sous la couette…
L’étrange chasteté prolongée de l’un des couples les plus populaires de la télévision est abordée sans détour par la revue CBS Soap In
Depth dans son numéro du 18 août au 1er septembre. Le thème en est : « Let’s get physical ».
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Ricky2345 s’émeut de ce que ATWT montre un couple d’adolescents hétéros, Parker et Liberty, perdrent ensemble leur virginité, tandis que Luke
et Noah sont cantonnés aux regards langoureux et aux baisers occasionnels. En clair, ça commence à bien faire ! Les fans ne l’expriment pas ainsi, mais ils pensent que cela devient
complètement irréaliste que nos héros n’aient pas encore fait cricon-criquette dans le lit de grand-mère Emma, ni le moindre 69 sur un ballot de paille dans l’écurie d’Holden.
RazzleDazzle se sent frustré(e) de ne pas voir nos jouvenceaux passer à l’étape suivante, naturelle dans toute relation. D’abord c’est la
paralysie de Luke qui les en a empêchés. Ensuite, ce fut le mariage de Noah avec Ameera, puis l’engagement de Noah dans l’armée, et à présent la crise au sein de la famille de Luke (Lily et
Holden sont séparés). Il ou elle se demande avec angoisse ce que les scénaristes timorés vont encore imaginer la prochaine fois pour retarder l’échéance. Pour Angie, il ne fait aucun doute que si
Luke et Noah consomment un jour leur amour, la scène se passera hors caméra. J’imagine Lucinda Walsh ouvrir une bouteille de champagne à l’hôpital en racontant l’événement de l’année au beau
docteur Chris Hughes, voire au comité directeur ! Elle nous sortirait alors cette réplique d’anthologie : « Enfin, mon petit-fils n’est plus puceau ! »
Que les choses soient bien claires : ATWT est un programme familial, et en aucun cas vous ne verrez jamais une scène d’amour entre deux
protagonistes telle qu’on en voit au cinéma. Pour ma part, je pense que de les voir se donner un baiser passionné, torse nu, puis s’effondrer sur la couette dans les bras l’un de l’autre, serait
amplement suffisant pour suggérer que, enfin, ils passent aux choses sérieuses ! Je crois même qu’un travelling sur Jake Silbermann embrassant la poitrine imberbe de Van Hansis et descendant
un peu plus bas serait de nature à expliciter l’acte irréparable qu’ils vont commettre. Ce faisant, je me demande si ce qui bloque les scénaristes serait de n’avoir pas encore décidé qui est
l’actif, qui est le passif, ou s’ils sont tous deux auto-reverse…
Cette scène attendue depuis longtemps ferait sans aucun doute exploser l’audimat, encore qu’elle chagrinerait Helen R., ménagère à Knoville,
Tennessee, qui n’approuve pas de voir deux hommes s’embrasser à la télévision, et souhaite encore moins les voir ensemble dans un lit. Encore une qui n’a pas compris les bienfaits apportés par la
télécommande… Teddy, quant à lui, pense que Luke et Noah ne devraient pas coucher ensemble. Il souhaite même les voir se séparer car, écrit-il, « Luke mérite de trouver un mec qui soit
plus à l’aise avec sa sexualité et qui aimerait Luke autant que Luke l’aime. Noah a tellement de casseroles au cul qu’il n’en vaut pas la peine » ! Voilà qui soulève un débat. Et
vous, mes chers fans, qu’en pensez-vous ?
Affaire à suivre, donc, grâce à mon collègue Jag1366 qui vous montrera les vidéos le temps venu. Sachez que depuis quelques semaines, Martha
Byrne ne joue plus le rôle de Lily Snyder. Elle a été virée du jour au lendemain après de nombreuses années de bons et loyaux services, et remplacée par la jolie Noelle Beck, déjà connue du petit monde des savons pour avoir incarné pendant dix ans le rôle de Tricia Alden dans
Loving (Amoureusement vôtre), feuilleton autrefois diffusé sur France 2 après Télématin et remplacé sur le même horaire, après la diffusion de son dernier épisode, par
Days of our Lives.
Dans l’actualité du savon, sachez que Casey Hughes (le turbulent fils de Margo, qui sortait avec Maddie avant d’aller en taule) s’est marié
avec Emily Stewart (qui couchait avec Dusty), mais leur mariage Las Vegas style a été promptement annulé. Sachez aussi que John James (ex Jeff Colby de Dynasty) revient dans le
rôle d’un médecin inquiétant.
Pour terminer, je vous livre un scoop en or : Dusty Donovan n’est pas mort ! Les fans de Grayson McCouch seront ravi-e-s de revoir sa
gueule canaille à partir du 24 septembre prochain. Nul doute que son retour spectaculaire du royaume des ombres donnera matière à de nombreux rebondissements qui, peut-être, empêcheront une fois
de plus Luke et Noah de jouer ensemble avec leurs zizis…
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Zanzi
Post scriptum : pour ma part, je trouve que le plus beau mec d’ATWT est sans conteste Agim Kaba qui interprète Aaron Snyder (demi-frère de Luke).Il
est too much, rhâââlovely !!!C’est normal : il est Verseau
3e décan comme moi. En deuxième plus beau mec, je vote Dylan Bruce alias Chris Hughes.
Vous avez tous en mémoire le mariage express du président Sarkozy avec Mademoiselle Carla Bruni, union célébrée rapidement et, a-t-on appris
par des oreilles indiscrètes, sur les conseils éclairés de Bernadette Chirac elle-même, qui y voyait le meilleur moyen de régler les questions protocolaires et de bienséance, notamment dans la
perspective de la visite d’État du couple présidentiel au Royaume-Uni. Si les mœurs ont évolué en Albion depuis l’affaire Wallis Simpson, et que par la force des choses Sa Gracieuse Majesté
Britannique accepte depuis belle lurette de recevoir des divorcés à sa table royale (autrement elle ne pourrait plus rencontrer trois de ses quatre enfants et, de son vivant, l’infortunée
princesse Margaret), il n’est cependant pas toléré qu’un Chef d’État parade à Buckingham et à Windsor au bras d’une simple concubine. À cet égard, il me plait à songer que la monarchie française
était beaucoup plus ouverte que la monarchie britannique et la Ve République. Pensez donc ! François Mitterrand obligé de cacher Madame Pingeot, de même que Chirac et Giscard
leurs frasques respectives alors que Louis XIV s’affichait le plus naturellement du monde avec Louise de La Vallière puis Athénaïs de Montespan (de noble naissance cependant), et que Louis XV
faisait pareillement la fortune des roturières à la cuisse légère que furent la marquise de Pompadour (née Jeanne-Antoinette Poisson) et la comtesse du Barry (née Jeanne Bécu). Il faut rendre
justice à Nicolas Sarkozy d’avoir fait voler en éclats le carcan d’hypocrisie qui entourait l’Élysée depuis 130 ans. Mais rassurez-vous : mon propos n’est pas de faire l’éloge de
« rupture ».
Je viens au contraire vous parler d’union, et si j’ai pris l’exemple Sarkozy-Bruni, c’est pour vous dire que l’on peut aller encore plus vite
en besogne. Il me fait plaisir de vous révéler qu’Andréa m’appelle tendrement « son mari », et cela depuis déjà un
mois. Ne me reprochez pas d’avoir omis de publier les bans et dérogé à toutes les prescriptions du code civil. Notre « mariage » n’est pas de nature à troubler l’ordre public
actuellement en vigueur, puisqu’il n’est que d’ordre privé et, osé-je le dire, d’essence spirituelle. Ni « petit ami », ni même « fiancé », nous avons donc brûlé les étapes
pour nous déclarer « mariés », n’ayant rien d’autre à signifier par ce vocable que l’union de nos cœurs.
Je me souviens qu’en 2002, l’un de mes ex m’avait déjà appelé son « mari ». Il en parlait à tous ses collègues, ses amis. C’est ainsi
qu’il me désignait quand il parlait de moi. Sans vouloir le vexer, je pense qu’il avait tendance à galvauder le terme, et s’il a appelé « mari » tous ses petits amis successifs, à ce
compte-là il a dû être marié plus souvent qu’Elizabeth Taylor et Lana Turner réunies ! De mon côté, je me souviens que je ne lui ai jamais donné ce qualificatif. Pour l’anecdote, notre
« mariage » n’a duré que six semaines…
Six ans plus tard, il y a quelque chose de changé au royaume de Zanzi. La maturité, l’expérience, que sais-je. Il y a cette volonté de
s’engager, la foi en l’autre, l’évidence que ce qui nous a mis en présence n’était pas le fruit du hasard. Il y a l’amour qui existe, pas un fantasme ni une chimère, mais la réalité, une réalité
qui nous aide à supporter l’éloignement provisoire. Et la communication, le dialogue, un échange quotidien à travers des messages écrits, des coups de téléphone et des vidéos du bout du monde.
Alors, oui, je le dis, je suis le mari d’Andréa et Andréa est mon mari. Nul besoin pour cela de déclaration à la mairie, ni du témoignage de tiers assistant à un événement particulier. Les
cinéphiles avertis se souviendront que dans « Tarzan trouve un fils » (1939) Jane-Maureen O’Sullivan désigne Tarzan-Johnny Weissmuller comme « son mari ». Mais quand diable la
cérémonie de mariage s’est-elle déroulée alors qu’ils n’ont pas quitté la jungle ?! Non, ce n’est pas le sorcier de la féroce tribu des Zambilés qui les a unis, mais leur amour, et sans
doute un baiser qu’ils se sont donnés dans le secret des profondeurs sylvestres. Peu importe si c’était le premier baiser, ou l’étreinte qui les fait s’enlacer à la fin du premier film, c’est
l’amour qui a scellé leur hymen, et rien d’autre.
Maintenant, s’il nous prenait à mon mari et moi l’envie d’officialiser notre union de fait, chose qu’en l’état actuel nous ne pourrions faire
en France, d’autres latitudes pourraient nous offrir un refuge. J’élimine d’emblée les Pays-Bas où mon patron actuel va être muté à la rentrée sans même avoir à traiter des suites de l’affaire
Minvielle puisque le dossier est classé, et la Belgique pas assez glamour (mais y aura-t-il encore une Belgique l’année prochaine ?). Il y a bien sûr le Canada, ses hivers neigeux, ses étés
pluvieux, ses chutes de Niagara… Bof. Il y a enfin l’Espagne, son soleil, ses couleurs chatoyantes, et enfin l’État du Massachusetts qui est en passe de devenir le « Las Vegas du mariage
gay » car n’importe quel couple quel que soit son lieu de résidence peut s’y marier, et la Californie… tout au moins jusqu’au référendum d’initiative populaire prévu en novembre prochain qui
risque d’annuler la loi qui autorise actuellement le mariage des couples de même sexe. La rumeur prétend qu’Ellen DeGeneres et Portia De Rossi (deux aristos de la télé américaine) s’y sont prises
pour épouse et femme le mois dernier !
Mais enfin, ce mariage-là, qu’est-ce que c’est ? Un engagement plus social que privé, un document administratif, une fête, tout cela
à la fois. Mais aussi un « je t’aime » qu’on prononce en public, un baiser au balcon du palais, un échange d’alliances griffées Cartier… Allez, peut-être bien qu’un jour nous y
viendront, mais je ne piaffe pas d’impatience d’y arriver car, du fond du cœur, c’est déjà fait.
Après les fêtes familiales, c’est le cœur serré que j’ai quitté, jeudi 3 juillet, ma toutoune Nicia [c’est le
diminutif de son chien (Note de Daniel C. Hall)] pour retrouver Andréa à Paris. Notre rencontre, la semaine précédente,
avait bouleversé mon emploi du temps. Déjeuners, brunchs et drinks par ailleurs non confirmés furent purement et simplement annulés. Tout à la ferveur de l’amour naissant, je décidai de me
consacrer entièrement à Andréa.
Notre première escapade en amoureux fut pour le Cimetière du Père-Lachaise. Chemin faisant, je reçus un appel courroucé de TiFrère qui m’avait
généreusement prêté son appartement. Il était sur le point de partir pour Rio de Janeiro afin de rencontrer le docteur Joao Ribeiro da Costa, élève spirituel du feu docteur Alvarez réputé dans la
blogosphère pour avoir « créé » Tri-Tinh Wan-Seng. TiFrère était donc en colère que je ne l’ai point encore appelé,
étant trop pris par mes retrouvailles avec Andréa qui lui dit que finalement je dormirai chez lui et non au presbytère (TiFrère est hébergé par l’archevêché).
C’est donc nantis de sa bénédiction que nous parcourûmes les allées du célèbre cimetière de l’Est, nous embrassant devant les dernières
demeures des gloires du passé : Balzac, Piaf, Salvador et une princesse Dolgorouki reçurent l’hommage de nos prières. En sortant de ce lieu reposant, nous faillîmes y retourner plus tôt que
prévu, manquant être empoisonnés par l’infecte nourriture d’un fast-food chinois nommé « KONG ». Deux comprimés de citrate de bétaïne nous sauvèrent la vie et nous pûmes ensuite nous
prélasser dans un parc, sous le regard bienveillant des badauds et d’une petite vieille qui montrait sa culotte sans la moindre gêne.
Nous rendîmes ensuite une visite à TiFrère, qui finissait de pré-préparer la rentrée scolaire dans une annexe de la Cité Universitaire. Le vent
se mit à souffler tandis que j’accusais le coup des chinoiseries de l’après-midi. Andréa et moi rentrâmes pour nous reposer et nous aimer dans le confort douillet de son studio. Comme nous avons
célébré la première semaine de notre rencontre, la nuit ne fut évidemment pas de tout repos.
Le lendemain matin, nous prîmes notre temps avant de nous mettre en route en direction de Montmartre. Nous fîmes étape à Drouot où nous
flânâmes (deux A avec accent circonflexe, qui dit mieux ?) devant les galeries et fîmes étape dans celle du marquis Valentin de Privas qui figurait parmi les invités du dîner du vicomte de
La Fresnais. Nous continuâmes à pieds jusqu’à la place de Clichy et j’emmenai mon amour voir mon ancien appartement. Je l’ai
présenté à ma gentille gardienne qui s’est demandée si ce jeune faisait partie de ma famille. C’est sous un soleil radieux que nous poursuivîmes notre route vers la butte, nous arrêtant dans un
restaurant italien pour un déjeuner en amoureux.
Nous reprîmes ensuite notre parcours, lentement, en direction de l’Hôtel de Ville pour l’exposition « Grace Kelly, Princesse de Monaco ».
Sagement, nous fîmes la queue comme tout le monde, renonçant à faire usage de nos passe-droits respectifs pour aller plus vite. À peine étions-nous entrés dans le Château que Daniel m’appelait
pour me demander si Andréa et moi avions fait certaines choses que la bienséance m’interdit de retranscrire en ces lignes. Si vous passez par l’Hôtel de Ville, allez voir cette expo sur Grace
Kelly, elle vaut le détour. C’est bien évidemment une sortie à faire de préférence en amoureux, car on en profite puissance dix. Certes, les fans de cinéma ou d’altesses royales ou encore les
yeux aiguisés repèreront certains anachronismes qui ont échappé à la vigilance du prince Albert, trop occupé à se demander s’il épousera un jour sa Charlène à lui, et à ses sœurs qui ont d’autres chats à fouetter. Mais les photos, les objets d’époque, les robes, les bagages,
les bijoux, les affiches de films, les lettres, et même les passeports diplomatiques dont un au nom de « Grace de Rosemont » raviront le cœur de midinette qui sommeille en chacun de
vous.
Après une halte espiègle dans un café sur les bords de la Seine, nous fîmes enfin une croisière en bateau-mouche pour admirer Paris vue de
l’eau. La pauvreté des commentaires du guide touristique était heureusement compensée par le charme inégalé que revêt une première croisière en amoureux dans la ville la plus romantique du monde.
À l’abri des regards indiscrets, dans le carré VIP du bateau, nous pûmes donner libre cours à notre passion. La nuit tombée, nous renonçâmes à aller à un concert de jazz, afin de regagner notre
nid d’amour.
Samedi, nous avons continué nos promenades pédestres dans les rues de Paris. De passage dans un café du 9e, nous fûmes témoins d’une
altercation entre un client et un barman. À mon grand regret, les deux matamores s’en tinrent aux mots et ne réglèrent pas leur différend sur le trottoir. Nos pas nous conduisirent ensuite Place
Vendôme dont nous fîmes le tour en léchant les vitrines des célèbres joailliers. Nous ne pûmes résister à la tentation d’entrer chez Cartier où le directeur, d’une exquise onctuosité, nous fit
admirer et essayer des alliances tout en nous faisant servir des rafraîchissements. Convenant néanmoins qu’il était encore tôt pour choisir nos anneaux, nous remerciâmes le directeur qui était
maquillé comme pour passer au JT, et reprîmes notre route vers le Louvre où nous attendait une amie d’Andréa.
Nue sous sa robe, la pétulante Bérénice nous conduisit jusqu’au Palais-Royal où nous prîmes des consommations sous les frondaisons du jardin,
tout en devisant sur nos amours respectives. L’après-midi passa comme un rêve et déjà nous étions au bord du soir. Après d’ultimes flâneries en l’île Saint-Louis, nous allâmes dans le Marais, non
que nous considérions une incursion dans cette jungle étrange comme un passage obligé de notre week-end romantique, mais parce que nous devions y honorer un rendez-vous.
Louis de La Fresnais, père putatif de notre histoire d’amour, nous avait invités au restaurant pour un dîner qui, à mon sens, avait valeur de
test et à l’issue duquel il ne put qu’être conforté sur l’état de nos sentiments. Andréa et moi finîmes la soirée dans le square près du Pont-Neuf et de la statue du bon roi Henri IV. Enjambant
les grilles heureusement basses qui en interdisaient l’accès à cette heure tardive, nous nous installâmes sur un banc pour rêver au clair de lune et des péniches finissant leurs tournées,
entourés par les rats (tatouille) qui pullulent à l’entour, nous imaginant faire mille coquineries au milieu de la nuit.
Dimanche matin il me fallut partir et subir, déjà, le stress du retour avec les distributeurs de billets en tous genres (RATP, banque) en panne
et pour finir un incident sur le RER B qui nous contraignit à prendre un taxi. À l’aéroport, une fois le dépôt des bagages effectués, nous prîmes un petit déjeuner bien français avant de nous
dire au revoir et de nous embrasser devant le check-point. Dès la frontière passée, le manque de l’autre nous étreignit respectivement, et le téléphone nous relia une dernière fois avant que le
grand oiseau de fer ne m’emporte dans ses flancs pour me ramener au Canada…
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