LES TOILES ROSES




Fiche technique :

Avec Lara Flynn Boyle, Stephen Baldwin, Josh Charles, Alexis Arquette et Martha Gehman. Réalisé par Andrew Fleming. Scénario : Andrew Fleming. Directeur de la photographie : Alexander Gruszynski. Compositeur : Thomas Newman.
Durée : 90 mn. Disponible en VO, VOST et VF.


Résumé :

Eddy et Stuart partagent la même chambre dans leur campus universitaire. Suite à une erreur administrative, le troisième colocataire se trouve être une fille, Alex. Rapidement, les sentiments prennent place dans leurs vies, des sentiments croisés... Cette improbable situation va finalement les rapprocher pour le meilleur et pour le pire.

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L’avis de Dr Devo de Matière Focale :
Le sujet est inscrit dans le titre : lors d’une rentrée universitaire, trois étudiants sont amenés à partager un logement sur le campus – un macho fêtard (Stephen Baldwin), un jeune à l’homosexualité encore refoulée (Josh Charles) et une superbe jeune femme (Lara Flynn Boyle), qui va naturellement tomber amoureuse du gay, lequel est lui-même attiré par son colocataire qui pour sa part n’est pas indifférent aux charmes de, etc. On est donc, une fois de plus, face à un « film de college », genre fréquemment visité sur mon site (voir Slackers ou Les Tronches par exemple), et qui est loin de provoquer chez moi l’enthousiasme, ou du moins, pas systématiquement –je n’aime pas American Pie, par exemple. Ce qui ne m’empêche pas de reconnaître les caractéristiques et le potentiel d’un genre à part entière, bien qu’il soit typiquement américain, et donc assez peu reconnu dans nos contrées (malgré quelques tentatives d’imitation redoutables du type Sexy boys), et même d’avoir beaucoup de sympathie (College attitude) ou parfois d’estime (Les Lois de l’attraction, ou le superbe Rushmore, à mes yeux le meilleur travail de Wes Anderson) pour une partie de ces films.

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Pourquoi ? Sans doute, tout simplement, parce que le film d’Andrew Fleming m’a semblé assez réussi – je n’aurais peut-être pas fait l’effort d’y jeter un œil si mes collègues ne m’avaient pas promis un très bon film, et j’avoue honnêtement que je n’en attendais pas grand-chose. D’autant plus que Fleming ne m’avait jusqu’alors pas impressionné par ses talents de cinéaste avec des films comme Panics ou encore, avec toujours un pied dans le film de « college », The Craft (Dangereuse alliance), film médiocre qu’il faut tout de même faire l’effort de voir pour la très belle performance de la trop rare Fairuza Balk.

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Attention : je ne suis pas en train de dire que 2 garçons, 1 fille, 3 possibilités est une merveille de mise en scène, loin de là : la réalisation n’a d’autre qualité que celle d’être fonctionnelle dans un registre purement illustratif. Mais les comédiens font un excellent travail, et apportent beaucoup de spontanéité au récit. Plus encore, la sexualité, qui dans ce genre de film est toujours omniprésente mais dans une approche assez creuse et parodique, est ici abordée de façon frontale, non sans parfois une certaine gravité ; le film traite de l’érotisme, de la sensualité, avec un indéniable tact, qui parvient à rendre assez touchant un métrage qui ne dérape, à l’occasion, que dans quelques scènes de comédie plus maladroites ou dans certains dialogues un peu téléphonés (dont une voix-off un rien lénifiante). La vraie limite du film, c’est surtout sa mise en scène conventionnelle (séquences-montages d’une insondable banalité, références appuyées à Jules et Jim, qui est un film que je déteste), mais on sent un projet sincère, qui n’évacue pas certains aspects très cruels du récit (le trio humilie une fille un peu cruche dans une séquence drôle et méchante à la fois) et qui parvient à développer un ton relativement personnel et attachant dans le cadre d’un genre aux pentes bien savonneuses. Un peu fabriqué, certes, mais loin d’être inexistant.

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L'avis de Surfeur51 :
Cette histoire d'une amitié amoureuse entre trois étudiants dans un campus américain, précurseur d'un genre qui allait fleurir dans les années suivantes, est d'un niveau beaucoup plus relevé que les American Pie et autres Allumeuses ! Les dialogues sont savoureux, et les situations cocasses mais crédibles. Alex, la fille, est attirée par Eddy, un garçon sensible et réservé, un peu intello, mais gay. Donc malgré le caractère extraverti, macho et grossier de Stuart, c'est plutôt vers lui qu'Eddy est attiré, alors que Stuart lorgne sur la belle Alex qu'il rêve de mettre dans son lit... Cette situation où les attirances physiques contrarient les connivences intellectuelles, et où l'amitié doit composer avec les peines de cœur et une certaine jalousie, conduit à des rebondissements scénaristiques traités à la fois sur les modes comiques, tendres, romantiques et quelquefois sérieux. Ce méli-mélo inextricable est aussi à l'origine de la seule vraie faille du scénario, à savoir trouver une fin satisfaisante. Ni triste, ni heureuse, la fin laisse le spectateur un peu sur sa... faim.

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Les trois acteurs principaux sont absolument parfaits dans leur rôle, d'un grand naturel (à aucun moment on ne se dit qu'ils jouent la comédie), et l'alchimie entre eux est étonnante. Ils sont tellement dans leur rôle que le réalisateur leur a laissé improviser de nombreuses scènes. Alex (Lara Flynn Boyle), d'abord contrariée de se retrouver avec deux garçons, révèle une nature généreuse, au caractère affirmé, légèrement extravertie (son hobby est de jouer au théâtre), un rien exhibitionniste. Eddy (Josh Charles) est sérieux et réservé. Il ne prend d'ailleurs conscience de son homosexualité qu'en côtoyant ses deux colocataires. Quant à Stuart (Stephen Baldwin), il est excessif, pas très fin, un tantinet macho et limite obsédé sexuel.

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Ces trois caractères dissemblables se rapprochent néanmoins dans une amitié sincère, que les attirances sexuelles vont compliquer. Le scénario approfondit essentiellement cette dualité amitié-sexualité, ce qui donne l'occasion à plusieurs épisodes d'un érotisme assez poussé, mais jamais gratuit. Ce ne sont d'ailleurs pas les scènes de nudité qui sont les plus osées (la baignade dans le lac est plutôt sage), mais celles où le réalisateur cadre les orgasmes d'Alex sur son visage particulièrement expressif. Les comédiens se sont d'ailleurs apparemment lancés sans retenue dans leur rôle, comme nous le révèle le réalisateur dans ses commentaires. Andrew Fleming fait preuve de beaucoup de tendresse envers son attachant trio de personnages, et il a inséré dans le scénario de nombreuses anecdotes personnelles vécues quand lui-même était en faculté. Son traitement de l'homosexualité masculine est par ailleurs d'une grande modernité pour un film tourné en 1993.

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Cette petite comédie n'a pas eu le succès qu'elle mérite, peut-être de part son classement restrictif lié au caractère érotique des scènes et à certains propos à la limite du scabreux. Mais cette peinture alerte, amusante et sans temps mort des rapports amour-amitié de jeunes adultes est une réussite notable, à voir ou revoir avec délectation.

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Jeu 29 jui 2010 Aucun commentaire