LES TOILES ROSES

   


(4.24)


Récemment je suis retourné en France, délesté de Jason qui n’appréciait pas que je parle de lui et du squash dans ces pages. Je vous rassure, notre rupture se fit dans la douceur et le professeur de musique disparut de mon paysage comme s’il n’avait jamais existé…

Je suis donc revenu en France pour la troisième fois de l’année (ô mon pays comme tu peux me manquer !), ayant cette fois une bonne raison de le faire puisque j’étais attendu au baptême de ma nièce et à l’anniversaire anticipé du mariage de mes parents (à lire dans le prochain épisode). Jeudi 26 juin, je fus invité à un dîner mondain chez le vicomte Louis Le Fol de La Fresnais, fondateur du cercle littéraire où ce billet fut lu dernièrement et où j’obtins mon premier succès d’auteur. J’étais amusé par la perspective de revoir, après une dizaine d’années, l’un de mes anciens professeurs, l’éminent Frédéric de Teyssieu, comte d’Empire, chevalier de l’ordre de Saint-Nicolas et homme d’une érudition inépuisable.

Je me faisais une joie d’enfant à l’idée de voir la tête que ferait le comte Frédéric en me revoyant après tant d’années. Las ! Le vicomte Louis avait vendu la mèche. J’en fus donc pour mes frais, mais ne boudai pas mon plaisir d’évoquer de vieux souvenirs du siècle dernier (et accessoirement du 19e siècle aussi) et d’écouter à l’envie la glose prodigieuse du maître du gai savoir et de la philosophie aristotélicienne appliquée à l’économie contemporaine (je suis sûr que certains ont déjà décroché mais je rappelle que vous êtes sur un blog de qualité auquel contribue Bernard Alapetite !). Ce faisant, je badinais en même temps avec mon autre voisin de table, un séduisant marseillais au sourire carnassier et à la peau ambrée, étrangement dépourvu de l’accent de la cannebière qui hante les films de Marcel Pagnol et la mémoire collective du cinéma français depuis Raimu et Fernandel. Par respect pour son anonymat, je vais l’appeler Marius.

Champagne, canapés, œufs de caille, vins blanc et rouge aux arômes subtils et aux bouquets raffinés pour accompagner le saumon de l’Atlantique « Palais de l’Ermitage », au riz basmati sur lit d’agrumes et sauce Restauration (époque Charles X), convives armoriés, meubles antiques, tous les ingrédients d’un dîner parfait étaient réunis pour flatter les cinq sens de votre serviteur. Seul mon sixième sens était émoussé car, pas l’ombre d’un instant, je ne vis venir ce qui suivit ces agapes gratinées.

Dès que les invités nés sous l’Ancien Régime et la Belle Époque eurent pris congé du maître de maison, ne demeurèrent que les plus jeunes, tous venus en ce monde après la Deuxième Guerre mondiale et avant l’invasion du Koweït par l’Irak de Saddam Hussein. Le dernier carré groupé autour de son amphitryon reprit qui du blanc, qui du champagne, et une dose de chocolat de bon goût pour se parfumer la bouche au cacao. Dopé par l’eau-de-vie, Marius entreprit de séduire le jeune et ténébreux italien Andréa. Ses racines florentines me renvoyait aux portraits d’époque Renaissance des magnifiques Médicis, inoubliables grands-ducs de Toscane dont l’illustre semence donna deux reines à la France.

Peu après que le vicomte Louis se retirât en ses appartements pour laisser la jeunesse donner libre cours à ses désirs printaniers, je quittai à mon tour cette joyeuse assemblée pour goûter, croyais-je naïvement, un repos bien mérité avant que d’entamer le marathon familial du week-end. Aussi fus-je surpris autant que troublé de voir Marius et Andréa débarquer dans mon boudoir. Cependant ils repartirent aussi vite qu’ils étaient entrés, suivis peu après par Lord Louis qui vint me souhaiter la bonne nuit, s’attardant lascivement sur les draps qui, après tout, étaient les siens. Le jeune duo revint et nous fûmes alors quatre sur la couche royale et sous l’œil du jeune maître d’hôtel, attendant que quelque chose de décisif se produise.

Louis de La Fresnais nous abandonna dans l’expectative pour rejoindre Morphée dans son grand lit à baldaquin. Marius se lança à l’abordage d’Andréa avec une audace de pirate barbaresque qu’il paya cher : le beau florentin ne voulut point se laisser conquérir et se tourna alors vers moi. Tel le Rescator secourant la belle Angélique, je le pris dans mes bras protecteurs et le rassurai de mes baisers fondants. Le flibustier de la Bonne Mère capitula et s’en alla la tête basse (et la queue entre les jambes), nous laissant seuls, Andréa et moi, en proie à nous-mêmes, vivant un instant magique que ni l’un ni l’autre n’attendait plus.

L’aube nouvelle nous cueillit au terme d’une nuit sans sommeil dans le calme de ce matin d’été. À peine réalisions-nous alors qu’un miracle venait de se produire dans nos vies : nous étions tombés en amour…


TO BE CONTINUED…


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Mer 9 jui 2008 1 commentaire
I koz supR b1 le loui 14 l'Zanz !
Sindy Cender - le 09/07/2008 à 11h59