Fiche technique :
Avec Chad Allen, Sean Carey, Moneca Delain, Woody Jeffreys, Jack Wetherall, Kirsten Williamson et Matthew Rush. Réalisation : Ron Oliver. Scénario : Mark Saltzman, d’après le livre éponyme de Donald Stevenson. Directeur de la photographie : C. Kim Miles. Montage : Tony Dean Smith. Musique : Bill Buckingham et Ronnie Way.
Durée : 98 mn. Disponible en VO et VOST.
Résumé :
Don Strachey (Chad Allen), un détective privé gay, est contacté pour enquêter sur la tentative de meurtre commise à l’encontre de John Rutka (Jack Wetherall), un journaliste du Web gay, qui s’est fait une foule d’ennemis en « outant » des personnalités qui auraient bien aimé que leur homosexualité restât secrète. Rutka a été blessé par balle dans son propre salon, puis visé par un cocktail Molotov, mais Strachey, qui n’a jamais approuvé ses méthodes, le soupçonne d’avoir mis en scène lui-même ces agressions avec l’aide de son petit ami. Il commence par refuser l’enquête que voudrait lui confier John Rutka. Toutefois, lorsque Rutka est enlevé, assassiné et brûlé dans une grange de la région, le limier s’en veut d’avoir refusé d’enquêter sur ces menaces. Un peu tard, au prix de sa sécurité et de celle de son compagnon, le détective cherchera le coupable parmi les gens sur lesquels le journaliste quinquagénaire accumulait des dossiers agrémentés de photos compromettantes (notables locaux, prêtres soupçonnés de pédophilie, politiciens de droite...)
L’avis de Bernard Alapetite (Eklipse) :
Donald Strachey, détective privé homosexuel, est le héros des sept romans écrits entre 1981 et 1996 par Richard Stevenson. L’enquêteur vit en couple avec l’attaché politique d’une sénatrice, à Albany, État de New York. Albany a été le décor des romans d’un écrivain plus célèbre, William Kennedy.
Le roman adapté ici était le quatrième de la série. La critique évoque le sens de l’humour de cette série policière mais cela se retrouve fort peu à l’écran. Humour très au premier degré, comme le sont les emprunts visuels et musicaux au cinéma noir des années cinquante. La musique est omniprésente et toujours lourdement signifiante.
Toute l’équipe, à commencer par le réalisateur Ron Oliver, est issue du monde de la télévision. À l’exception d’une vraie vedette porno, Matthew Rush, dans une fugitive apparition nous gratifiant de sa nudité pile et face aussi appétissante qu’inutile pour la progression du scénario, tous les autres acteurs sont de vieux routiers des séries. On reconnaîtra dans le rôle de l’ambigu Rutka, Jack Wetherall, qui incarnait l’oncle Vic dans la série culte Queer as Folk – dont Ron Oliver a réalisé un épisode, où il était beaucoup plus convaincant que dans ce film. Chad Allen, ex-interprète de Matthew Cooper, dans Docteur Quinn, femme médecin, est l’un des rares acteurs américains ouvertement gays, l’amusant est qu’il a été victime lui-même, il y a quelques années, d’un outing. En 1995, en plein tournage de la série Docteur Quinn, femme médecin, un tabloïd américain diffuse une photo de l'acteur embrassant un garçon dans une piscine. Il est alors forcé de révéler son homosexualité. Depuis, tout en poursuivant sa carrière d'acteur et de producteur de pièces de théâtre, il est devenu un activiste gay important, récoltant de l'argent pour de nombreuses causes gays. Malheureusement il n’a pas les épaules, au sens propre comme au sens figuré, pour incarner le détective vedette d’une série. Il a au moins le mérite de ne pas surjouer comme la quasi totalité de la distribution…
Une suite, Shock to the System, a déjà été tournée par la même équipe et un troisième épisode est en préparation !
L’intrigue est plutôt convenue mais elle est scénarisée de manière assez efficace, ce qui maintient l’intérêt jusqu’au dernier quart d’heure, où l’histoire s’avère moins superficielle qu’on pouvait le croire.
Third Man Out est produit par Here!, la première chaîne gay américaine. Elle a déjà produit Dante's Cove et Hellbent ! Il ne dépare pas, malheureusement, le reste du catalogue de cette chaîne qui brille par sa médiocrité. La réalisation est plate et si les images sont propres et lumineuses, on n’y décèle pas une seule idée de mise en scène. Le principal défaut du film réside dans la mollesse du montage qui étire chaque scène, ce qui est un comble pour un film policier.
Peu original est ce volontarisme très marqué d’inscrire l’intrigue dans un groupe emblématique d’une époque et de la faire coller avec un fait de société à la mode, ici l’outing. Dans notre bonne vieille télévision hexagonale, il y a près de cinquante ans, Les Cinq dernières minutes ne faisait pas autre chose.
Je déplorais, dès sa naissance, que PinkTv ne s’engage pas dans la production, se contentant de diffuser des œuvres produites par d’autres, et n’achetant même pas des fictions étrangères si elles n’avaient pas été déjà traduites par ailleurs, en somme faisant presque toujours son marché seulement en France et payant que chichement les producteurs. En voyant les programmes produits par son homologue américaine, on est presque satisfait que la chaîne française se soit montrée, pour l’instant, aussi frileuse en terme de production.
On se demande ce qui domine chez l’éditeur dvd français, Optimale, lorsqu’il appose sur le facing de la jaquette : « PREMIER POLAR GAY » : la malhonnêteté ou l’ignorance ? Par charité chrétienne, choisissons l’ignorance. Rappelons-lui que les estimables River made to drown in (dvd Studio Canal), In the flesh (dvd BQHL), Endgame (dvd Antiprod), Like it is (dvd BQHL)... et que l’exceptionnel No night is too long sont aussi des polars gays, tous antérieurs au film qu’il édite, par ailleurs de manière professionnelle, avec un bon making of….
Si vous aimez les détectives gays, lisez et relisez les romans de Joseph Hansen (édités chez Rivage), plutôt que de voir Third Man Out.
Pour plus d’informations :
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