Histoire de l’homosexualité :
02. Le statut des homosexuel(le)s
dans le monde
JULIEN GELLY
Émission Ce n’est que
de l’amour n°3 (21/12/10)
Julien Gelly n’a que 22 ans et brille (autant que son désormais fameux
sourire ravageur) en Master d’Histoire Contemporaine à Nancy. Si jeune et pourtant très engagé, il est conseiller municipal de Le-Bouchon-sur-Saulx dans la Meuse, vice-président et secrétaire de
l’association Équinoxe 54 et chroniqueur de l’émission Ce n’est que de
l’amour sur RCN. Ce sont ses chroniques que nous publions dans leur intégralité dans cette nouvelle rubrique.
Daniel Conrad : Peux-tu nous dresser un état des lieux concis
de la situation et des droits des homosexuel(le)s dans le monde ?
Julien Gelly :D’abord, deux cas de figures catégorisent les droits des homosexuels dans le monde du point de vue du droit des
différents pays.
* Soit le droit des pays n’aborde pas l’homosexualité ou bien ils la pénalisent.
* Soit le droit reconnaît les homosexuels.
Dans le premier cas, l’homosexualité est considérée comme une maladie mentale ou un crime religieux (par
exemple pour les pays d’islam aujourd’hui ou par le passé, en France avant la Révolution française). C’est acte sexuel entre deux hommes qui est condamné et par extension, les homosexuels.
Dans le second cas, les homosexuels sont donc reconnus légalement en tant qu’ayant une orientation sexuelle
portée vers les individus de même sexe qu’eux à la différence des hétérosexuels, mais ce n’est pas pour autant qu’ils bénéficient de droits équivalents (tel que la reconnaissance officielle de
leurs couples, le droit au mariage, le droit à l’adoption, à la procréation médicalement assistée etc.) ou bien que les propos ou les actes homophobes sont condamnés (les propos homophobes ne
sont par exemple condamnés en France que depuis 2004).
De nos jours, certains pays condamnent encore les homosexuels à la
peine de mort. Quels sont-ils ?
En 2010, les homosexuels sont officiellement passibles de la peine capitale dans une dizaine de pays (peine
qui est appliquée ou non, mais qui est spécifiée comme telle dans la loi). Ils sont principalement situés en Afrique et au Moyen-Orient et pour beaucoup fortement influencés par la charia, la loi
islamique : Afghanistan, Arabie Saoudite, Bahreïn, Djibouti, Émirats arabes unis, Iran, Irak, Mauritanie, Nigeria (États musulmans du nord), Pakistan, partie méridionale de la Somalie
(contrôlée par les rebelles islamistes), Soudan, Tchétchénie et Yémen. Récemment, des hommes ont été condamnés à mort en Iran et au Nigéria pour homosexualité.
De nombreux pays jugent-ils l’homosexualité comme
illégale ?
Ce nombre est passé de 77 l’an dernier, à 76 puisque l’Inde a quitté cette liste. Pour mémoire, l’ONU
reconnaît 200 pays dans le monde, ce qui signifie qu’environ 40 % des États condamnent l’homosexualité. Je le répète, c’est l’acte sexuel qui est condamné par la loi, ce qui explique que dans
certains pays, on puisse observer des hommes se promener main dans la main dans la rue, ou trouver des lieux ouvertement gays ou lesbiens (encore que les relations sexuelles entre femmes aient
toujours été considérées différemment et tant en droit qu’en fait, moins pénalisées que les relations entre hommes). Cela n’empêche pas que ces États soient ouvertement homophobes (rejettent les
homosexuels). La plupart des condamnations sont des peines de prison et des amendes, encore que les prisonniers, notamment les hommes soient souvent humiliés et maltraités physiquement. Pour ne
citer que quelques États jugeant l’homosexualité illégale, citons les pays du Maghreb, nombre d’États africains, le Bangladesh, la Malaisie ou Singapour en Asie, et un seul territoire en Europe
(cependant non reconnu par la communauté internationale : la partie turque de l’île de Chypre).
Cela signifie donc qu’une courte majorité des États reconnaissent les
gays et les lesbiennes d’un point de vue légal ?
En effet. Nous pouvons les estimer à 120 environ, mais ce n’est pas pour autant et c’est important de le
préciser, que la société ne reste pas homophobe dans ces pays. Les personnes homosexuelles peuvent y subir divers actes de discrimination dans la rue comme des insultes, voire des agressions.
Elles peuvent être aussi discriminées à l’emploi. En effet, un certain nombre d’États encore à ce jour ne pénalise pas l’homophobie. Parmi les pays qui reconnaissent les homosexuels, il y a
l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire ou la République démocratique du Congo en Afrique, le Canada, les États-Unis et les pays d’Amérique latine, les États européens, la Chine et l’Australie par
exemple.
Parmi ces pays, une poignée autorise le mariage des gays et des
lesbiennes…
Il y a deux choses :
* Dans certains pays existent des partenariats entre personnes de mêmes sexes offrent des droits du mariage
plus ou moins importants et nombreux, sans pour autant que leur union soit appelée « mariage ».
* Dans d’autres pays, et ils sont rares pour l’instant mais la plupart situés en Europe et proches de la
France, les couples homosexuels peuvent se marier au même titre que les couples hétérosexuels et jouir des droits traditionnels du mariage tels que nous les entendons.
Les pays offrants des partenariats aux couples de même sexe sont par pour en citer quelques-uns :
Israël, la France (depuis 1999 grâce au Pacte civil de solidarité, le Pacs), l’Allemagne et l’Australie.
Actuellement, seuls 10 pays autorisent les couples de même sexe à se marier. Je les classe dans l’ordre
chronologique : les Pays-Bas d’abord, depuis 2001, puis la Belgique, le Canada, l’Espagne, l’Afrique du sud, la Norvège, la Suède, et enfin depuis cette année, l’Argentine, l’Islande, le
district fédéral de Mexico et le Portugal. Certains États américains permettent aussi le mariage homosexuel comme le Massachusetts.
Et quelques pays avancés permettent aussi l’adoption par les
couples de même sexe…
La question de l’adoption est complexe car un certain nombre de pays autorise l’adoption par des
célibataires, hétérosexuels comme homosexuels en théorie. C’est le cas de la France par exemple. En pratique, il est presque impossible à un célibataire gay ou à une lesbienne d’adopter un enfant
s’il est révélé comme tel car on soupçonne souvent que c’est une tentative cachée d’adoption par un couple.
Dans le monde, 10 pays permettent aux gays et aux lesbiennes d’adopter des enfants et de se voir reconnaître
de façon égale les droits parentaux sur leurs enfants. C’est le cas de l’Afrique du sud, de la plupart des provinces canadiennes et quelques parties des Etats-Unis, de la ville de Mexico depuis
cette année et de certains endroits du Brésil, d’Israël, de l’Andorre, de la Belgique, du Danemark depuis quelques mois là aussi, de l’Espagne, de l’Islande, des Pays-Bas, de la Norvège, du
Royaume-Uni, de la Suède et d’une partie de l’Australie.
Bien que le droit ne suive pas toujours les aspirations des couples à se marier comme n’importe quel citoyen
ou à adopter des enfants, ces questions sont souvent le sujet de vives polémiques. Les États-Unis et la France par exemple, n’en sont pas épargnés. Souhaitons que les choses changent pour
la nouvelle année et que dans le climat de préparation de l’élection présidentielle de 2012, les candidats des différents partis apportent des droits pour les gays et les lesbiennes dans leurs
hottes… Ou dans leurs programmes !
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