Fiche technique :
Avec Thomas Dekker, Juno Temple, Roxane Mesquida,
Chris Zylka, Kelly Lynch, Haley Bennett, James Duval, Jason Olive, Andy Fischer-Price et Brandy Futch. Réalisation : Gregg Araki. Scénario : Gregg Araki. Directeur de la
photographie : Sandra Valde-Hansen. Compositeurs : Vivek Maddala, Mark Peters, Ulrich Schnauss et Robin Guthrie.
Durée : 86 mn. Sortie en salles le 6
octobre.
Résumé :
Smith mène une vie tranquille sur le campus ‒ il traîne avec sa meilleure amie, l’insolente
Stella, couche avec la belle London, tout en désirant Thor, son sublime colocataire, un surfeur un peu simplet ‒ jusqu’à une nuit terrifiante où tout va basculer.
Sous l’effet de space cookies ingérés à une fête, Smith est persuadé d’avoir assisté à
l’horrible meurtre de la Fille Rousse énigmatique qui hante ses rêves. En cherchant la vérité, il s’enfonce dans un mystère de plus en plus profond qui changera non seulement sa vie à jamais,
mais aussi le sort de l’humanité.
L’avis de Frédéric
Mignard :
Araki revient à ses comédies nihilistes des années 90 et déploie une tension érotique et
dramatique qui fait mouche à chaque fois. Bref, le gros fantasme de la rentrée !
Malgré une reconnaissance artistique très tardive (les critiques ont commencé à s’intéresser
à lui avec le magnifique Mysterious Skin en 2005, Gregg Araki persiste et signe dans le genre de la comédie adolescente métrosexuelle trash qui l’avait fait connaître dans les années 90
(Doom generation ; Nowhere). Sans chercher même un instant à s’approcher de l’excellence émotionnelle et dramatique de Mysterious Skin, il s’adonne à ce qu’il
kiffe le plus. Déshabiller des jeunes comédiens de tous sexes dans un environnement pop acidulé sur des dialogues cultes et des ressorts narratifs comico-absurdes et nihilistes !
Bref, l’esprit, dans la construction d’une carrière homogène et singulière, est celui de ses
films d’antan : dans la radicalité, sans aucune ambition grand public. Araki préfère déglinguer toutes les règles du bon sens et excelle à lever le majeur à tous les parangons du bon goût
(il remercie John Waters dans les crédits, ce n’est pas un hasard). Après tout, son film se veut être une apologie du chaos qui mène à un kaboom final, en français un gros boum ou un
mémorable big bang !
S’il faut que jeunesse se passe, celle d’Araki, elle, demeure. Il aime donc toujours filmer
la sensualité juvénile, créer une tension sexuelle irrésistible. Le point névralgique de cette chronique d’une fin du monde annoncée par un rêve, est sans surprise un campus où les jeunes
s’adonnent aux joies du sexe désinhibé et à la dope sans se prendre la tête sur les conséquences morales ou mêmes seulement mentales de leurs actes. Étudiants, les protagonistes sont pour une
fois un peu moins socialement paumés que dans ses précédents opus. Thomas Dekker, vu dans Heroes ou Terminator : les chroniques de Sarah Connor, est le héros central de ces
baisouilles à deux, trois, entre filles ou entre garçons. Il incarne à lui seul le désir dans un enchevêtrement de fantasmes qui manipulent sans cesse les spectateurs. L’onirisme éveillé,
l’imaginaire de branlette et les cauchemars lynchiens se mélangent à la trame principale, brouillant toujours plus les pistes du linéaire.
Dans ce sens, le cinéaste assimile les différents genres que les ados adorent. Il insère une
scène de concert rock extatique ou des séquences de thriller fantastique pour certaines carrément angoissantes, et multiplie les romances de teen comédies sur le campus qu’il détourne par des
dialogues érotico-sulfureux, mais jamais gras. Certes, ici l’ado bourrée vomit sur les pompes du bellâtre dans les toilettes d’une boîte, mais on n’est jamais dans la scatologie grasse d’un
American Pie.
Dans ce joyeux bordel où l’on croise des sorcières, de mystérieux assassins portant des
masques d’animaux, un gourou déguisé en Jules César, un colocataire surfeur du nom de Thor qui essaie l’autofellation, Kaboom amuse. Il fascine et éblouit aussi par son intrinsèque
beauté. Mais, vers la fin, quand le désordre est définitivement établi, il perd volontairement de son pouvoir de séduction pour devenir le plus gros n’importe quoi cinématographique de l’année.
Et on se dit qu’il est quand même dommage que l’aboutissement ne soit juste qu’amusant. Car si on aime énormément cet aspect de la carrière d’Araki, on lui préfère quand même ses zones
d’ombre.
Après Cannes en mai dernier, le film sera présenté à Deauville au début du mois de
septembre.
L’avis de Voisin blogueur :
À l’approche de ses 19 ans, Smith (Thomas Dekker) fait un étrange rêve. Il y traverse un couloir et croise le chemin de deux filles
inconnues avant d’arriver jusqu'à une mystérieuse porte… Réveillé, le jeune homme finit par rencontrer dans « la vraie vie » les deux énigmatiques jeunes femmes. L’une s’appelle Lorelei
(Roxane Mesquida) et s’avère être la nouvelle girlfriend de la meilleure amie de
Smith, la piquante Stella (Haley Bennett) ; l’autre finit par disparaître
et Smith pense assister à son enlèvement ou meurtre (il n’est sûr de rien car il était totalement défoncé). Que se passe-t-il donc sur le campus ? Les incidents bizarres se succèdent et
Smith commence à croire qu’il est au cœur d’une véritable conspiration… En attendant, il tue le temps avec des préoccupations bien de son jeune âge : il fantasme sur son coloc hétéro surfeur
décérébré ; Thor, est sur une piste romantique avec un jeune étudiant gay ; couche avec une fille à pédés (la délicieusement paumée London interprétée par Juno Temple). Sauteries et énigmes… Kaboom ?
Présenté en séance spéciale à Cannes 2010 (où il reçut la toute première
« Queer Palm »), Kaboom était particulièrement attendu par les fans de Gregg Araki. Avec son pitch faisant la part belle à une jeunesse sexuellement libérée et défoncée,
les amateurs étaient en droit de s’attendre à un retour du réalisateur, digne de ses premiers films rock’n roll, The Doom Generation ou Nowhere (pour ne citer qu’eux). Si on trouvera bien des correspondances, des ressemblances,
force est de constater que Kaboom est aussi mainstream que The Doom generation était underground. Ici, exit la jeunesse sexy et sauvage et bonjour la jeunesse des années
2000 : jeunesse méchée, lisse, toujours habillée à la dernière tendance. Plus pop que rock, Kaboom se regarde avec envie, comme une irrésistible sucrerie. Tout le monde y est beau
et rigolo, la musique est branchée puis populaire, on parle beaucoup de sexe mais on en montre peu…
Nul doute que Kaboom paraitra comme une « comédie sous acide » pour ceux
qui n’ont jamais vu une des précédentes œuvres de son auteur. Mais pour ceux qui le suivent depuis ses débuts, ce divertissement savamment dosé apparaîtra comme un peu trop sage. Et si on
s’éclate pendant sa vision, si on ne peut s’empêcher d’exploser de rire face à certaines répliques qui ont tout pour être cultes, pas certain que l’œuvre dans son ensemble le deviendra. Pour
autant, faut-il faire la fine bouche ? Non, certainement pas. Car le film reste un pur concentré de fun et on retrouve bien la « patte Araki » à partir de la seconde moitié du
métrage, celle où tout part doucement en vrille, où le campus aseptisé devient le terrain de jeu d’un vrai film de défoncé, riche en second degré, en situations absurdes et en rebondissements
aussi improbables que jouissifs. Mention spéciale à Roxane Mesquida, amusante et
sexy, digne héritière de Rose McGowan.
Les personnages sont tous amusants et attachants, le scénario riche en histoires de cœur et de
cul dans lesquelles chacun pourra se retrouver et surtout, mine de rien, Gregg Araki livre un portrait maitrisé et décalé sur la peur d’une jeunesse en fuite, logiquement vouée à s’achever tôt ou
tard. Sur la mystérieuse porte que Smith voit dans son rêve, il y a un 19. Derrière elle, un bouton qui pourrait déclencher la fin du monde. Le monde adulte, c'est la fin, la mort. En faisant un
petit pas dans ce nouveau monde (celui où on ne peut plus passer ses journées à être défoncé ou se branler en pensant à son colloc hétéro), en quittant le rêve pour la réalité et les
responsabilités, c’est une page qui se tourne… Le sujet est traité avec tellement de fantaisie que l’on oubliera de ronchonner sur le fait que c’est un Araki un peu mineur pour mieux se réjouir à
l’idée que Kaboom permettra à beaucoup de se plonger dans l’univers d’un cinéaste éternellement adolescent.
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