par BBJane
Hudson
Votre BBJane Hudson préférée vous propose sa sélection de films idéaux pour
une semaine d'Halloween très gay-frightly...
1) HOUSE OF WAX
(L'Homme au masque de cire, André De Toth,
1953)
Ni plus ni moins que le film qui suscita ma passion pour le cinéma fantastique et ma fascination pour
Vincent Price. Comme vous l'avez tous vu, je ne vous dirai pas qu'il raconte comment un émule d'Alfred Grevin,
devenu fou après l'incendie de son musée, en recrée un tout neuf à partir de cadavres dérobés à la morgue du coin, qu'il recouvre de cire (les cadavres, pas la morgue). Remake d'un classique de 1933, House of Wax fut tourné en 3 Dimensions (selon le processus des images anaglyphiques) par un cinéaste borgne qui ne put jamais profiter des
effets de relief, puisque, comme chacun sait, les borgnes, ça voit tout en plat. Vincent Price y peaufine le personnage d'esthète névropathe qu'il promena à l'écran tout au long de sa carrière
dans l'épouvante. Quand il ne parle pas amoureusement à ses statues, il poursuit Phyllis Kirk dans les rues brumeuses
d'un New York ressemblant à s'y méprendre à Whitechapel, ou apprend à Frank Lovejoy comment sculpter une grimace d'agonie
sur le visage d'un supplicié. Quand sa future victime lui martèle la tronche à coups de poings, sa face tombe en morceaux, révélant le terrifiant maquillage de grand brûlé réalisé par George Bau (et non son frère Gordon, comme le prétend le
générique). Son assistant, répondant au nom férocement inventif d'Igor, est joué par un Charles Buchonski pas encore
pseudonymisé en Charles Bronson.
Vincent Price maquillé par George Bau
Comme l'écrivait F. A. Levy dans un brillant article de la revue Starfix n°2 : « Le film pose, avec certes l'ironie macabre de rigueur dans un film d'épouvante, la question même de la création artistique, et annonce, bien en avance, le débat qui ne
manque pas de se poser aujourd'hui à propos des films de gore. Jusqu'où l'art doit-il et peut-il imiter la réalité, particulièrement lorsque celle-ci est repoussante ? » La scénario se
tape également le luxe d'une réflexion sur le jeu des apparences et les ambiguïtés du réel : les personnages de cire cachent des corps de chair, les êtres de chair passent pour des statues de
cire. Pour débuter dans la cinéphilie fantastique, avouez que j'aurais pu tomber plus mal... Notons que le film fit l'objet d'un excellent plagiat treize ans plus tard, dont il est question
ci-dessous. En revanche, le très bon House of Wax de Jaume Collet-Sera n'a pratiquement rien à voir avec le film de De Toth,
hormis un titre original similaire. Là encore, méfions-nous des apparences...
La bande-annonce (où l'on ne voit pas une seule image du film, mais où l'on peut entendre une
partition composée tout exprès par Max STeiner) : c'est ici.
2) CHAMBER OF HORRORS (La Chambre des horreurs, Hy Averback, 1966)
Le film s'ouvre par cet avertissement solennel :
« Mesdames et messieurs, le film que vous allez voir aujourd'hui contient des scènes si
terrifiantes, qu'un avertissement sérieux doit être donné au public. À cet effet, il a été établi un signal visuel et auditif au départ des quatre scènes d'horreur, aussi terribles
qu'impressionnantes. Un éclair rouge sera pour vous le signal visuel. Et le bruit d'un klaxon, le signal auditif. Fermez les yeux en voyant l'éclair rouge ! Détournez-vous en entendant le bruit
du klaxon ! »
En 1966, ce bon vieux gimmick à la William
Castle devait faire son effet sur les petits n'enfants et accentuer l'impact de séquences plus elliptiques qu'horrifiques. Aujourd'hui (et depuis pas mal de lustres), il est surtout
désopilant, mais n'entame en rien la beauté de cette bande extravagante. À la fin du XIXème siècle, Jason Cravette, un gentleman dépravé, est arrêté pour avoir voulu épouser le cadavre de sa
fiancée, étranglée par ses soins. Condamné à perpét, il parvient à s'évader du train qui le mène en prison, en sectionnant sa main droite menottée à la roue de freinage d'un wagon. Peu de temps
après, il réapparaît sous une nouvelle identité, bien décidé à se venger de ceux qui l'ont condamné. Son arme : un poignet-prothèse sur lequel il adapte une panoplie de coutelas, hachoirs,
crochets, et autres objets tranchants. Son surnom : « Le Boucher de Baltimore » ! (avouez que ça vous en colle plein l'imaginaire, autant que l'éclair rouge et le bruit du klaxon !)
Patrick O'Neal
Chamber of Horrors fut conçut par la Warner comme
le pilote d'une série télévisée inspirée par House of Wax. Au final, c'est le
climat général du film d'André De Toth qui est conservé, plutôt que son intrigue et ses personnages. Le trio de criminologues amateurs chargé de résoudre l'affaire dirige un musée de cire
consacré à l'histoire du crime. Pas question ici de sculpteur fou trempant ses victimes dans des cuves de cire bouillante. En revanche, le sublime Patrick O'Neal, dans le rôle du vengeur dément, effectue un numéro éminemment pricéen, retrouvant tous les maniérismes, froncements de sourcils et gestes
onctueux du Maître. Cette composition aurait logiquement dû faire de lui l'une des nouvelles icônes du cinéma d'épouvante, n'eut été le refus des chaînes de télévision de diffuser cette bande
jugée trop extrême (nécrophilie et dépeçages n'étaient guère au goût du jour), qui n'eut finalement droit qu'à une distribution bâclée en salles. Dommage : l'œuvre est visuellement splendide, le
sujet traité de façon très grinçante, et les trois enquêteurs (incarnés par Cesare Danova, Wilfrid Hyde-White et le nain José René Ruiz) ne manquaient
ni d'étoffe, ni d'originalité. Un bijou à redécouvrir d'urgence (disponible en Zone 1).
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3) SLEEPAWAY CAMP (Massacre au camp d'été, Robert Hiltzik 1983)
Ce film abyssalement crétin, sublimé en version française par un doublage québécois au pittoresque accentué,
constitue un parfait exemple de plaisir (très) coupable. Son résumé peut aisément tenir en 5 mots : « massacre au camp d'été » (ça tombe bien, c'est son titre). Le script, plus ténu qu'un
encéphalogramme d'Arielle Dombasle, rassemble donc : un été, un camp de campigne pour jeunes campeurs, et le
massacre desdits jeunes campeurs. Tout l'intérêt du film réside dans l'identité du tueur. Un peu aussi dans son mode d'action, bucolique et rural, vu le cadre de l'intrigue (pour les
alzheimeriens : un camp de campigne estival pour campeurs). Par exemple, à un moment donné, le tueur tue au moyen d'un essaim de guêpes qu'il laisse tomber dans les chiottes où sa victime coule
un bronze en toute insouciance. C'est original, c'est frais, et ça ne manque pas de piquant. À un autre moment donné, il (le tueur) profite de son passage en cuisine pour plonger un importun dans
une marmite d'eau bouillante. Le spectateur inverti (qui en vaut deux) ne manquera pas de noter avec émotion le goût du réalisateur pour les jeunes garçons qui s'ébattent sans rien sur le râble
(avec quand même le minimum acrylique syndical entre cuisses et bas-ventre), et trouvera peut-être la chose suspecte. Il sera confirmé dans ses intuitions par les images finales (« traumatisantes
» m'écrivait récemment Valentine Deluxe), d'autant moins attendues que gratuites : le tueur se révèle être un trans
(ou une ?... ou un travesti ?... ou un hermaphrodite ?... on ne sait...) Dans un plan fulgurant d'abruptitude (?), nous voyons celle que tout nous
désignait comme une gentille jeune vierge effarouchée brandir l'arme de son dernier forfait, nue comme un ver, le zigouigoui ballottant gaiement dans la brise estivale. Je me sens d'autant moins
coupable de vendre la mèche que cette révélation est le seul intérêt du métrage, et mérite d'ailleurs d'être connue avant son visionnement pour mieux en apprécier la farfelure (Ségolène, sort de
mon corps !) À voir près d'un feu de camp en faisant griller des marshmallows.
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4) A NIGHTMARE ON ELM STREET PART 2 :
FREDDY'S REVENGE (La Revanche de Freddy, Jack SHOLDER, 1985)
Freddy, le croquemitaine-en-chef des années 80, sort ses griffes pour la deuxième fois dans ce film de
Jack Sholder, non plus pour taillader de la pucelle en chaleur, mais pour lacérer la mauvaise conscience d’un jeune pédé
placardisé. Las de squatter les cauchemars de donzelles acnéiques, notre Grand Brûlé préféré tente ici de pénétrer la sphère du réel par l’entremise d’un charmant blondinet, Jesse, dont il
s’approprie le corps. Possession surnaturelle ou schizophrénie d’un teenager mal dans son slip kangourou et rêvant de boxers Calvin Klein ? La question
reste ouverte, de même que les plaies infligées par Freddy à la brochette de twinks passant à portée de ses lames. On ne peut qu’être sidéré par
l’homophilie décomplexée de cet hymne aux pectoraux glabres et aux aisselles moites, où les symboles phalliques pleuvent plus dru que les mecs dans la chanson des Weather Girls. Moins effrayant que le premier opus de la saga, le film nous offre néanmoins deux scènes
mémorables : le labourage dorsal du prof d’éducation physique, ligoté sous la douche par une corde à sauter ; le jaillissement de Freddy hors du corps de Jesse, sous l’œil éberlué d’un pote
inapte à calmer ses ardeurs. Avec sa horde de bogosses torses nus, ses touffeurs de vestiaires et la chaleur musquée de ses chambres d’ados en pleine poussée de testostérone, La Revanche de Freddy anticipe d’une bonne décennie l’horreur en calbute pratiquée
par l’éphèbologue David DeCoteau.
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5) CURSE OF THE QUEERWOLF (Mark Pirro,
1988)
Avec un titre pareil (La Malédiction du pédé-garou), on sait tout de
suite où l'on met les escarpins. Amateurs de lycanthropes ou adversaires des stéréotypes gays, passez votre chemin : ce film n'est résolument pas pour vous. Un indice qui ne trompe pas : le
loup-garou vedette des films Universal s'appelait Larry Talbot ; il est ici rebaptisé Larry Smalbut (Petitderge) – c'est tout dire... Ce séducteur invétéré lève un soir une donzelle qui s'avère
être un travesti atteint d'homothropie. Mordu aux fesses, il devient queerwolf à son tour dès que la lune est pleine. Mark Pirro connaît indubitablement ses classiques, et se sent d'autant plus à l'aise pour les saccager gayment. Lors de sa transformation en folle-garou,
notre hétéro voit ses poignets plier irrésistiblement tandis que ses ongles s'allongent en virant au carmin, que sa bouche se farde de lipstick, et que
son fessier se bombe délicieusement sous son jean. Ses nuits sont hantées de cauchemars où il se fait violer par une bande de bouseux échappés de Delivrance. Pour empêcher sa métamorphose, la voyante de service lui remet une amulette à
l'effigie de John Wayne. La horde de villageois en colère est remplacée par un quarteron d'homophobes qui ne se séparent
jamais de leurs torches enflammées, même lorsqu'ils vont bouffer au resto ou téléphoner dans une cabine. Au lieu des traditionnelles balles d'argent, ils sont armés d'un gode du même métal dont
ils menacent le postérieur du monstre (« Il faut l'enfoncer dans cet endroit obscur où aucun homme n'est jamais censé être allé », explique l'un des
vengeurs). Un exorciste appelé en renfort tente de calmer le possédé en lui balançant, en guise d'images pieuses, des photos de Burt Reynolds, de Mr T, et de Clark Gable. Le vénérable Forrest J. Ackerman, éditeur de "Famous
Monsters of Filmland", et l'épouvantable Conrad Brooks, cachetonneur vétéran de la série Z d'épouvante, font des
apparitions-éclair au milieu du foutoir. À la fin, le héros se retrouve en taule pour avoir tué la voyante gypsie, et tandis que le générique se déroule, nous l'entendons s'initier aux coutumes
de ses camarades de cellule. Comme le remarquait un commentateur de l'imdb : nous sommes ici dans du cinéma de « derrière-garde ». Qui délire sec, et sans vaseline.
L'hilarante scène de transformation.
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6) CLOWNHOUSE (Victor Salva,
1988)
Premier long-métrage de Victor Salva
(après son court Something in the Basement en 1986, et bien avant sa
reconnaissance internationale avec Jeepers Creepers), Clownhouse fut le premier film d'horreur à être projeté au prestigieux festival du cinéma (pseudo) indépendant de Sundance. Pas mal pour un slasher
tardif lorgnant férocement sur le Halloween de John Carpenter, mais substituant un trio de lunatiques en cavale et grimés en clowns au tueur solitaire et masqué de blanc du modèle. Autre substitution
: les victimes ne sont pas d'accortes pétasses aux panties accueillants, mais trois frérots chamailleurs en pleine crise d'adolescence. C'est suite au
tournage de ce film que le père Salva fut condamné à trois ans de taule (il purgea 15 mois) pour rapports oraux avec un mineur – le dodu Nathan Forrest Winters, alors âgé de douze ans. On pourrait s'abstenir de rappeler le fait à chaque évocation du film, si ce dernier ne trahissait de
façon aussi transparente les obsessions de son auteur. Fréquents décrochages de la caméra vers le slip du cadet des frangins (qui apparaît aussi cul nu), fétichisme uro, ados dessapés fuyant la
menace d'adultes concupiscents : Clownhouse a tout de la confession angoissée, et parle à son cœur défendant de peurs bien moins
conventionnelles et balisées que celles revendiquées par le scénario. La hantise du jeune Casey pour les clowns fait écho à celle du cinéaste pour ses propres démons, et, significativement, c'est
en s'identifiant à son enfant-victime que Salva nous (et se) révèle combien pédophilie rime avec nostalgie d'un état d'enfance impossible à étreindre. Moins efficace et maîtrisé que ne le prétend
sa réputation, Clownhouse distille néanmoins une savoureuse atmosphère nocturne et automnale (l'action se déroule quinze jours après
Halloween, que les gosses tentent de faire perdurer en laissant un faux pendu se balancer à l'arbre du jardin), en particulier lors de son générique, superbe.
Visible en intégralité sur YouTube (mais qualité médiocre...)
Téléchargeable ici (V.F.)
7) TRICK 'R TREAT (Michael Dougherty,
2007)
Le nec plus ultra du Halloween flick. Sa structure évoque la
tradition du film à sketchs, à ceci près que les cinq histoires effroyables qui nous sont racontées (plus une lors d'un flash-back glaçant) s'imbriquent plus ou moins par un habile effet gigogne.
Dans une petite ville en proie à la frénésie d'Halloween (c'est peut-être la première fois que l'événement est filmé comme une telle fiesta, un peu à la façon de la Fête des Morts mexicaine), un
tueur d'enfants commet son ultime forfait, un vampire profite de la bamboula générale pour agresser ses victimes au grand jour (pardon : « au grand nocturne »), un cercle de louves-garous s'offre
une garden party sanglante, un groupe de gamins s'amuse à réveiller les spectres d'un affreux accident, et un vieil alcoolo mal luné reçoit la visite d'un
enfant-citrouille trop porté sur les friandises. Scénariste et réalisateur, Michael Dougherty fait montre d'un sens
sidérant des « ambiances atmosphériques », sans jamais sacrifier le rythme pour autant (la bande ne dure que 80 minutes, trépidantes de bout en bout). Pour ne rien gâter, il n'hésite pas à se
montrer politiquement très incorrect (le meurtre du mioche vaut son pesant d'humour saumâtre) et inventivement roublard (l'élimination du vampire). L'amour du genre et l'ivresse de filmer
éclatent au détour de chaque séquence, et deux grands comédiens nous livrent des prestations de haute volée, en prenant manifestement un panard colossal : Dylan Baker en assassin pédophobe compulsif et BCBG, Brian Cox en cousin
biberonneur et débraillé d'Ebenezer Scrooge. À la fois insolent et classe : de l'horreur haut de gamme.
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