Voici venu le temps
de
l'Idéologie Gay
!
par Sabrina Shami Lafourcade
de Les Anti-culture
gay
Après avoir opportunément libéré la sexualité de ses entraves et inventé de nouveaux modes de vie, les
homosexuels français s'attellent désormais depuis ces deux dernières décennies à la construction d'une communauté gay.
Du coup, le mouvement homosexuel, polarisé jusqu'à présent contre le sida, réinvestit le terrain
identitaire. La Lesbian & Gay Pride, marche annuelle homosexuelle, l'atteste : entre les pom pom girls, les go-go-dancers, les drag queens et les chars décorés aux couleurs arc-en-ciel
(emblème gay), on attend chaque année à Paris, plus de 200 000 homosexuels venus de toute l'Europe pour défiler, le cœur léger, et affirmer leur « fierté gay ».
De même, on observe l'émergence d'une culture gay, avec son lot de films dédiés, de séries pour nous
les dames (The L Word), de romans spécifiques... Ce mouvement culturaliste a trouvé son penseur : le sociologue Pierre Bourdieu (éminemment connu des étudiants en Sciences de l'éducation
comme moi !), qui se proposait d'insuffler en France les « Gay & Lesbian studies », c'est-à-dire d'imaginer des départements universitaires ou des laboratoires de recherche
consacrés à la culture gay. Étonnant itinéraire : après avoir défendu les revendications corporatistes des cheminots, le théoricien intuitif de la « reproduction scolaire » s'ait mis à rêver
secrètement d'un « bac pédé »!
Voici donc l'idéologie gay. Quand elle consiste à défendre un folklore amusant ou la très conceptuelle
Gay Pride, quand elle prend la forme d'un simple culte pour les sous-vêtements ou d'une passion folle pour la techno, cela ne porte pas à conséquence (quoi que cela me fasse doucement rire !).
Mais quand cette idéologie débouche sur des messages d'injonction, incite les identités individuelles à se figer et les cloisons entre les groupes à se durcir, quand elle encourage la désignation
de porte-parole, demande aux individus d'« avouer » leur homosexualité, d'en être fier ou de faire leur coming out, il est possible de se poser des questions.
S'interroger tout d'abord sur le sens des revendications. Pourquoi réunir plus de 200 000 gays et
lesbiennes à Paris, si on se contente de brandir comme slogan un consensuel et creux « Pour une vraie citoyenneté européenne » et afficher par contre aux yeux de tous une image de dépravation
(mecs à moitié à poil déguisés en bonne sœurs, filles exhibant des godes à la ceinture) qui restera celle collée aux homos par la masse populaire ??? Pourquoi prétendre promouvoir le monde
associatif et le militantisme, quand la Gay Pride devient une opération de super-consommation, qu'elle est organisée par une société commerciale aux objectifs moins militants qu'économiques et
quand, en lieu et place de revendications, on trouve le merchandising : des tee-shirts, des montres et des serviettes de bain aux couleurs arc-en-ciel ???
S'interroger ensuite sur le sens de la culture gay. Faut-il voir d'un bon œil cette folie hypermoderne
qui consiste à créer un ghetto culturel ? Faut-il approuver un projet qui participe à l'enfermement et non au dialogue, au cloisonnement et non à l'ouverture sur le monde ? S'interroger enfin sur
les ambiguïtés de la communauté gay. Ne présuppose-t-on pas, en la célébrant, que la minorité homosexuelle est forcément bonne, idyllique, et surtout homogène ? N'oublie-t-on pas que les parcours
d'entrée et de sortie dans l'homosexualité sont extrêmement variables, les uns passant par la bisexualité, d'autres se mariant et d'autres en effet qui le sont, comme moi, depuis la naissance et
qui ne se privent pas pour autant des questions originelles de cette homosexualité : l'étais-je ou le suis-je devenue en mode réactionnel à un héritage social (Bourdieu, là encore !)
?
En définitive, loin de la propagande de l'idéologie gay et des impasses de la culture gay, il est
peut-être temps de défendre concrètement et efficacement les droits des homosexuels et pour cela privilégier l'individu avec son libre choix, plutôt que le groupe et son caractère parfois
aliénant. Chaque homosexuel doit se construire lui-même, être capable de maîtriser seul son rapport au monde, y compris, comme moi, s'il le souhaite, en restant en dehors de la communauté gay ‒
ou au contraire en s'y insérant. Mais, si l'on parle d'insertion, ne serait-il pas idéal de chercher avant tout l'insertion à la société globale, la société dans son ensemble où la frontière
hétéro/gay serait enfin gommée ??!!!!
Article reproduit avec l'aimable autorisation de
l'auteur.
Prodigieuse jouissance en lisant ce texte ! Tout ce que je suis bien incapable de verbaliser, mais qui parle à mes tripes !
Toute ma vie, je me suis battu pour avoir une vie NORMALE, comme tout un chacun. Parfois le prix à payer a été très lourd. Je l'ai dit dans ces colonnes.
Et puis je suis allé voir le groupe FaceBook... Et là, j'ai été mal à l'aise. Clivage. Putains de clivages. Pourquoi faut-il, en affirmant des vérités fondamentales, jeter au pilori d'autres groupes, d'autres pensées, d'autres comportements ??
Je ne serai jamais sur un char de la Gay Pride, ou alors en costume cravate en tenant par la main mes futurs petits-enfants... Je me suis battu, et je me bats encore dans la limite de mes faibles moyens, pour l'indifférence, c'est vrai. Mais la Queer en paillettes avec une plume dans le cul est mon frère (ou ma soeur...). Elle fait juste quelques frasques que je n'approuve pas, mais je l'aime quand même. Surtout si il (elle) a un beau cul...
Tout ça pour dire : non, je ne m'embrigaderai pas dans un groupe qui montre du doigt un autre groupe ! Merde ! Nous sommes (nous tous !) déjà une minorité ! Respectons les différences !
Ceci dit, je discuterais bien avec l'auteur(e) de cet article. Evidemment.
Cette "libre parole" est un billet foncièrement réactionnaire lu avec consternation.Je me suis de mandé si ce billet n'avait pas sa place dans le rayon "homophobie/homophilie"....
Marre de lire, d'entendre cette dénonciation permanente des organisations collectives qui ont permis de défendre des droits... Mais historiquement, si chacun avait pu s'en sortir seul sans passer par ces structures, elles n'auraient pas existé. Quant au "droit à l'indifférence", seule la jeunesse que je prête à l'auteur(e) du haut de mes 40 ans, l'excuse. Cela n'existe simplement pas: Dans notre monde, il faut parfois s'affirmer pour exister.
A Paris, s'embrasser avec mon homme, c'est naturel.En province, fusillés du regard par les passants,c'est un acte militant qui affirme qu'on existe, qu'on a le droit de se fiare un bécot, comme tous les amoureux que nous croisons. Le droit à l'indifférence? non ! des droits égaux dans nos différences.
P.S: Je rappelle que la "culture gay" est aussi, voire d'abord une "contre-culture".