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Dans l'ombre de
JANN HALEXANDER


Jann Halexander est un chanteur franco-gabonais. Il est également pianiste, acteur et producteur. Le chanteur Jann Halexander naît le 13 septembre 1982 à Libreville (Gabon, Afrique centrale). Ancien étudiant en géographie à Angers, dans le Maine-et-Loire, il prend un pseudonyme que lui inspire la personnalité de l'artiste sud-africaine Jane Alexander, dont les sculptures représentent des êtres hybrides. Il est issu d'un couple mixte — père gabonais, mère française — ce qui se fait ressentir au travers de ses créations. Pour découvrir son univers, Jann a accepté de rejoindre l'équipe du blog Les Toiles Roses avec cette chronique qui vous transportera loin dans l'imaginaire fécond et délicieux de ce grand artiste.


02. Vaguement noir, vaguement blanc,
après tout quelle importance ?


Mon métissage…

Jann Halexander

 

Vaguement noir, vaguement blanc,

Après tout quelle importance,

Il était l'un ou l'autre tout le temps

Pétri de sa libre conscience

Pourvu d'une bien étrange face,

Mais que voulez-vous qu'on y fasse,

Il était plutôt misanthrope,

Et vivait comme un lycanthrope

 

R.

Le Mulâtre est mort en marginal,

Dans son village natal,

Le mulâtre est mort heureux dans l'âme,

Toute sa vie fut une flamme !

 

Vaguement pauvre, vaguement riche,

C'était un précaire bourgeois,

Vous savez c'que c'est quand on triche,

Et que personne ne le voit

C'était un homme si accompli,

Qu'il déroutait les mal appris,

Il savait aimer sa vieillesse,

Ses derniers instants d'allégresse

 

R.

 

Il eut une enfance morose,

Des souvenirs d'enfant gâté,

Un peu de neige, un peu de rose,

De l'enfance il s'est acquitté,

L'adolescence fut difficile,

On le prenait pour un débile,

Aimant les hommes, aimant les femmes,

Ayant des caprices de vieille dame

 

R.

 

Pas encore mort, encore en vie,

Mais un artiste ça anticipe,

En vous je suscite l'envie,

Tout en gardant certains principes,

Je prends les angoisses dans mon cœur,

Et je valse avec le malheur,

Belle est ma petite vie sur terre,

Pas besoin de faire une prière !

 

Le Mulâtre n'est qu'un marginal,

Mais quand il parle des autres il parle de lui,

Il parle de vous,

Le Mulâtre n'a pas choisi son village,

Où il mourra la prochaine nuit

Où il mourra la prochaine nuit.

 

Jann Halexander by © Cécile Quénum Photographe.

 


Cette chanson, je l'ai écrite en 2006. Elle est toujours intégrée dans mes récitals. Elle me résume bien, je pense. Et à travers elle, je m'adresse à vous.

Je suis un homme métis. Un Mulâtre. Un homme de couleur. Un homme brun. Un Blanc avec du sang noir, un Noir avec du sang blanc. J'aurais pu être moitié jaune moitié blanc, moitié juif moitié arabe, qui sait. Je suis noir/blanc. Et cette situation me convient très bien. Mon métissage, je le crie, je le vis, je le chante, je l'assume. Et à ceux et celles que je dérange (et il y a des métis, parmi ces gens, nota bene), je chante : « Je vous emmerde ! »

Je suis né le 13 septembre 1982 d'un homme noir protestant gabonais et d'une mère blanche athée française, de bonne famille, avec du sang noble. Je suis franco-gabonais. J'ai toujours été clair là-dessus. Et quand on essaye de me faire passer pour Gabonais OU Français, je coupe court à ce genre d'attitude, que je trouve nauséabonde.

Mon meilleur ami, au lycée français de Libreville, était métis, comme moi. Père noir, mère blanche. Il n'y a pas de hasard, dit-on ? J'ai entendu, lu, vu beaucoup de choses sur les conditions de vie difficiles des Métis au Congo, au Burundi… Bon, il faut dire aussi qu'au Congo, il y a eu une sorte d'Apartheid officiel. Cela dit, on surnommait Port-Gentil, la capitale économique du Gabon la ville du Petit Apartheid et c'est vrai que là-bas, Blancs comme Noirs regardaient mes parents, ma sœur et moi avec beaucoup d'agressivité. Nous avons appris à vivre avec et garder ça pour nous, car lorsque je racontais tout cela aux Blancs comme aux Noirs, ils ne comprenaient pas, ils ne voulaient pas voir, ni savoir, on me disait que je mentais, que j'exagérais, car dans le fond, on m'en voulait de faire comprendre aussi bien aux uns et aux autres qu'il fallait savoir balayer devant sa porte. Et le Gabon n'a jamais été tendre avec les étrangers, y compris les Européens. C'est un pays dur. C'est un pays assez… occidentalisé. Le touriste européen lambda qui rêve d'exotisme chaleureux risque d'être perturbé quand il débarque à l'aéroport moderne et froid de Libreville.

Le métissage est un sujet terrible, vaste, complexe qui demande des millions et des millions de pages. Là, je ne dis que l'essentiel. Et suis curieux de voir ce que l'avenir réserve. Tenez, j'y pense, ma sœur (avec qui j'ai une grande complicité) travaille chez un fleuriste. Un client, blanc, est venu voir le patron et lui a demandé si c'était « bien raisonnable d'employer une mulâtre à la caisse ». Il a bien dit mulâtre. Ce genre d'anecdote, des millions de gens le vivent régulièrement. Allez raconter ça au Noir qui ne voit que le racisme anti-noir, au Juif qui ne voit que l'antisémitisme, etc.

Car il faut être clair : ce n'est pas parce qu'on est de couleur qu'on est noir. C'est une idéologie pourrie. Et ce n'est pas parce qu'on a du sang blanc qu'on est blanc. Est-ce si difficile de laisser place aux nuances ? J'ai choisi de ne pas choisir. Et j'assume sans difficulté aucune. Et mes proches, famille, amis, comprennent très bien. Je comprends cela dit les Métis qui craquent et qui choisissent. J'en ai connu… mais très vite, ils sont rattrapés par la réalité. Mon père a été franc avec ma sœur et moi : « Vous êtes métis et ce sera ainsi jusqu'à la mort. » Quand on est petit, c'est sûr, c'est du langage brut, mais au moins c'est bien rentré dans nos petites têtes. J'en veux à ces individus qui font des enfants avec une personne de culture différente et qui font tout pour éduquer l'enfant sur les bases d'une seule culture. Il y a des couples mixtes qui enlèvent toute possibilité de double identité à leurs enfants. C'est scandaleux. Pourquoi faire des enfants alors ?

Être brun, je le vis bien, tellement bien que je ne voudrais rien être d'autre. Je suis très bien comme je suis. Je ne supporte pas quand certains insinuent que les gens de couleur seraient tellement plus heureux s'ils étaient blancs. Tout est question d'éducation. On ne m'a pas éduqué à me haïr. Il m'arrive de faire des UV en hiver pour avoir une peau encore plus foncée. C'est un luxe que je me permets. Il y a des Noirs aussi qui font des UV et ils ont bien raison. Ça montre bien qu'ils n'ont pas de complexe sur leur couleur de peau. Après tout, le racisme c'est le problème de ceux et celles qui le sont, racistes. Y compris le racisme intériorisé.

Ne pas choisir. C'est un luxe suprême.

Quand mon père pêchait le poisson dans les eaux du fleuve Ogouée à Lambaréné, au Gabon, ma mère apprenait le piano et faisait avec mes grands-parents de longs voyages en Europe. Le mariage mixte c'est aussi le croisement, le mélange de cultures qui remontent à la nuit des temps. Je suis conscient qu'il existe beaucoup de Métis planqués. Des frustrations. Anecdote, il y a 4 ans, sur un forum consacré au sujet (le métissage), l'administratrice à mon sujet disait : « Pour qui se prend-il cet illustre inconnu ? Il se prend pour le porte-parole des Métis ? » Absurde. C'était elle qui avait créé le forum, parlait d'elle, menait les débats, c'était elle « la porte-parole » et moi je n'étais même pas membre de ce forum. Peut-être trouvait-elle que j'empiétais sur son territoire ? Je suis le porte-parole de tout le monde et personne. Maintenant c'est vrai que je reçois chaque mois des témoignages de métis, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes.

On peut être maçon, blanc, hétéro et se retrouver dans ce que je chante. C'est arrivé et c'est tant mieux. On peut être métis et passer totalement à côté. Dans mes chansons, pièces de théâtre, films, je parle aussi du métissage dans l'intimité. Pas dans la posture revendicative. En chanson, c'est inattendu pour beaucoup : je fais de la chanson à texte on ne peut plus classique d'apparence. Le monde de la chanson est plutôt blanc, c'est un fait. Je fais partie des taches (il y a aussi Maïk Darah, pour qui j'ai une grande estime). J'aurais dû rejoindre les clichés : prendre une guitare ou esquisser des pas de danse so sexy. Faire de la soul, du rap, du funk, du ragga, du reggae, du dance hall, du slam. Ou lieu de ça, je chante comme Yves Montand et j'emmerde mon entourage en clamant mon amour pour les chansons d'Anne Sylvestre ou Jacques Brel.

Le métissage, assumé, étend l'horizon des possibles. La journaliste gabonaise de Radio Africa, Eugénie Diecky, m'avait invité et après avoir diffusé ma chanson « A Table » m'avait dit durant l'émission que ce que je faisais n'était pas de la musique authentiquement gabonaise. J'ai répliqué : « Reste à savoir comment on définit l'authenticité gabonaise ou française ! » Ridicule. Je préfère en rire quand j'évoque cela, mais dans le fond, c'est triste.

J'apprécie beaucoup la façon dont Barack Obama assume ses origines plurielles. Moins la façon dont certains mouvements noirs se l'approprient. Il aurait été républicain, ces mêmes mouvements ne se seraient pas gênés pour dire que c'est parce que sa famille était blanche en partie. Enfin, l'élection d'un homme de couleur, métis, est un choc salutaire pour le monde entier. La première puissance mondiale est dirigée par un homme dont le père s'occupait des troupeaux, enfant, au Kenya, en Afrique. Le symbole est violent et nous allons avoir des surprises en France aussi, je le pense sincèrement. 

La France est une nation conservatrice. Mais il n'y a qu'en France, pour le moment, que j'arrive à m'exprimer librement. Je n'ai pas de comptes à rendre en tant qu'artiste. C'est important…

Tant de destins de métis sont brisés : alcoolisme, déprime, drogue, avortement car grossesses trop lourdes à porter, parfois même meurtres (Guy Georges).

Je suis revenu en France, en 2000. La majeure partie de ma famille est française. Blanche. Du côté paternel, presque personne. Mon père, c'est déjà bien. Côté blanc, tout va bien. Quand mon oncle de Vendée est mort, la tradition voulait que les hommes de la famille portent le cercueil. Ce n'était pas facile mais je l'ai fait.

Mon pays natal, le Gabon, a des défauts mais je refuse de critiquer ce pays devant des Occidentaux, noirs ou blancs, avides d'afro-pessimisme. Une nation bouge, évolue, il y a des guerres, des violences, des périodes de prospérité. Regardez les États-Unis, ils n'ont plus la puissance qu'ils avaient. De même le gentil noir et le méchant blanc, c'est du pipeau.

Dans la famille blanche, il y a beaucoup de fantômes, de gens morts depuis des décennies mais on parle d'eux comme s'ils étaient morts la veille. L'institutrice de ma grand-mère, à Saint-Nazaire, durant l'occupation, était une Mulâtresse de Martinique. Un jour, les SS rentrent à l'école. Ils prennent un couple d'instituteurs juifs, dénoncé par un autre couple qui a pris la fuite en Suisse à la Libération. Le couple juif a été envoyé en camp de concentration, n'est jamais revenu. La métisse n'a pas été prise. Les gens de couleur n'étaient pas la cible systématique des Nazis. Mais souvent, cela dit, pour un rien, ils pouvaient être envoyés en camp. Quant aux soldats de couleur vaincus, ils étaient exécutés. Serge Bilé en a bien parlé dans son ouvrage sur les Noirs dans les camps nazis. Dans la France de Vichy, il se trouvait des notables de couleur pour soutenir Pétain tout comme il y avait des résistants. C'est cela la France : c'est le pays de Pétain et d'Alexandre Dumas à la fois. C'est le pays capable du pire comme du meilleur.

… Pour finir, j'aime les hommes et les femmes, même si j'ai une préférence pour les hommes. J'aime les hommes « de couleur » et les femmes blanches. Mais je ne suis pas sectaire dans mes affinités. Mes parents s'y sont habitués. Papa noir encre de chine et Maman blanche porcelaine…

 

TO BE CONTINUED...

 

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Les photographies, textes et paroles sont © D. R. Ils sont reproduits avec l'autorisation de Jann Halexander. Tous droits réservés.

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