Il faut préciser aussi que cette étude se penche exclusivement sur l'amour entre hommes, et passe la plupart du temps sous silence
l'histoire de l'amour entre femmes, caractérisée elle par une carence plus grande encore au niveau des sources et par une trajectoire historique sensiblement différente.
Au terme "homosexualité", ce concept adopté par la médecine à la fin du XIXe siècle somme toute bien infortuné, a été préféré "amour entre hommes", dans l'espoir de recentrer le débat
d'abord sur l'amour avant la sexualité, et de se démarquer des définitions juridiques et médicales qui, même si elles sont devenues incontournables, circonscrivent malheureusement le
phénomène de manière prépondérante et biaisée.
Ce travail se propose de retracer l'histoire de l'amour entre hommes en Europe sous l'angle juridique, médical, social et culturel depuis l'Antiquité jusqu'à nos jours, avec en toile de
fond le poids d'un double héritage : la culture gréco-romaine et la morale judéo-chrétienne. Si les paragraphes qui ouvrent l'étude se contentent de survoler les premiers siècles, un accent
particulier est mis sur l'époque qui débute à la Révolution française pour finir à la montée du nazisme dans les années 1930 et la Deuxième Guerre mondiale.
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K. M. Kertbeny
(1824-1882),
inventeur du mot
"homosexualité"
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Dans un premier chapitre, il est brièvement fait état des relations entre hommes dans les sociétés pré-chrétiennes, notamment dans la
Grèce et la Rome antiques. La deuxième partie retrace la montée du christianisme et le début des persécutions pendant le Moyen-Âge. Puis, dans un troisième chapitre, nous examinons les
périodes de la Renaissance et de la Réforme protestante pour arriver au Siècle des Lumières avec l'apparition de la morale bourgeoise. Quatrièmement, c'est le monde moderne du XIXe siècle
qui est passé en revue, avec notamment un panorama de la répression pénale des relations sexuelles entre hommes et la narration des parcours de deux pionniers du mouvement de libération
homophile moderne, Heinrich Hössli et Karl Heinrich Ulrichs, ainsi que le destin infortuné du Roi Louis II de Bavière, symbole à bien des égards des vues de l'époque sur l'amour entre
hommes. Dans le chapitre V, il est exposé comment la médecine, et en particulier la science nouvelle de la psychiatrie, a apposé le label "d'homosexuel" sur les personnes ayant des rapports
intimes avec des membres de leur sexe, et ce avec une double tendance : alors qu'en Allemagne, sous l'impulsion de Magnus Hirschfeld, se constitue le premier mouvement socio-politique de
libération homosexuelle, en Autriche-Hongrie s'affirme la tendance à la catégorisation pathologique, notamment sous l'influence de Richard von Krafft-Ebing et de Sigmund Freud et sa cohorte
de disciples. Il est ensuite fait état, dans le sixième chapitre, de plusieurs scandales de moe urs qui ont durablement marqué l'opinion publique au début du siècle passé, notamment le
procès d'Oscar Wilde en Angleterre et l'affaire Eulenburg en Allemagne, avant de survoler, dans une septième partie, la production artistique et le parcours de certains artistes amoureux
des garçons jusqu'au début de la Première Guerre mondiale. Dans une huitième partie, sont évoqués les premiers succès de l'émancipation homosexuelle, notamment dans la République de Weimar
des années 1920, avant que la montée du national-socialisme lui fasse subir un revers brutal, et que débute la persécution des hommes aimant les hommes. Le dernier chapitre de cette étude,
qui, il faut le préciser, émane de la plume d'un non-historien qui ne saurait prétendre analyser l'Histoire avec le regard d'un académicien chevronné, analyse sommairement la période du
retour du conservatisme de l'après-guerre jusqu'aux Gay Pride et à la reconnaissance légale de ce début de XXIe siècle.
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Arthur Rimbaud
(1854-1891)
Dans les camps de concentration nazis, les détenus homosexuels portaient le triangle rose sur leurs uniformes de prisonniers
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Dans les chapitres qui suivent sont exposées quelques voix du passé, connues et inconnues, qui ont à leur manière écrit un pan de
l'histoire d'une certaine forme d'amour; retracés les parcours de quelques visionnaires, de fabuleux artistes, de médecins et de rois, d'une poignée d'opportunistes, d'un sac plein de
malheureux et de coupables, d'une dizaine de vilipendés, de plusieurs innovateurs, et enfin de certains charlatans. Je laisse le soin au lecteur de juger quelle étiquette il apposera sur
les noms cités lors cette traversée de siècles. Quelles que soient ces personnes, elles sont à la source de nos vues sur la question aujourd'hui encore.
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Magnus Hirschfeld
(1868-1935)
psychiatre et sexologue, activiste gay allemand
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NOTA BENE: les ouvrages utilisés pour ce travail sont répertoriés dans la bibliographie
Ce travail est l'oeuvre de Stéphane Riethauser. Il sera publié en 10 parties sur le blog Les
Toiles Roses avec son autorisation. Qu'il en soit chaleureusement remercié. Stéphane est joignable sur le site de lambda
éducation.
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