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Laurent Fialaix

 

Laurent Fialaix, ne sachant pas mentir, avoue volontiers être né juste avant l’invention du MP3, des téléphones portables, de l’internet, des lecteurs DVD, de la téléréalité et de la livraison de pizzas à domicile. Ses premières années, il les passa donc à attendre que quelqu’un veuille bien inventer tout ça. Et ça lui a paru long, très très long…
Depuis ? Devenu journaliste, entre autres occupations il lit, écoute des disques, voit des films avant tout le monde… ce qui lui permet de frimer un peu de temps en temps (mais toujours raisonnablement !). Il rencontre aussi des people. Des stars vieilles ou jeunes, vraies ou fausses, en devenir ou déjà oubliées… Et il arrive même que ça le fasse rire ou que ça l’émeuve !
Par ailleurs, auteur, il a publié un premier livre, entre roman et récit : Nos Bonheurs fragiles (éd. Léo Scheer) sorti à la rentrée 2009. D’ailleurs, il se pourrait bien qu’à l’époque, Les Toiles Roses vous en aient parlé…

 

03.

Les Lits en diagonale  d'Anne Icart :

un hymne à la différence...

 

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Je sais bien que je vais enfoncer une porte ouverte, mais il est bon parfois de rappeler quelques évidences : certaines rencontres changent nos vies. Durablement. Peut-être même pour toujours. Celle que j’ai faite une nuit de l’été 2009 est de cet ordre. C’était avec un livre. De ceux dont la presse nationale n’a pas beaucoup parlé parce que traiter de la différence, du handicap (même de façon tendre, émouvante, mais jamais triste), ça gêne nos petits conforts, ça chamboule, ce n’est pas glamour, pas très vendeur. Ils se trompent, bien sûr. Le succès de ce livre est là pour leur prouver ! Mais comment leur faire comprendre ?… Comment leur dire la nécessité de ce témoignage ? L’uppercut que j’ai reçu cette nuit-là a sans doute été le plus doux que j’ai jamais connu. Le plus rassurant, surtout. Presqu’une caresse. 

Cette caresse s’appelle Les Lits en diagonales, le premier roman d’Anne Icart (éd. Robert Laffont). Un livre plein d’amour, de générosité, d’immensités… Une ode à la différence, à toutes les différences. Une leçon de tolérance qu’il faut absolument lire. Et faire lire.

L’histoire ? Celle d’Anne qui, dans les années 70, vit dans l’admiration de son frère aîné, Philo. Son modèle, son double, sa référence. Jusqu’au jour – de ces jours qu’on n’oublie jamais puisqu’ils nous transforment pour toujours – où elle apprend que Philo ne grandira jamais comme les autres. Qu’il est « différent ». Une différence qu’on ne dit pas, qu’on cache trop souvent, qu’on regarde de travers. Comme toutes les autres, ou presque. Forcément, l’annonce est ravageuse. La fillette devra s’en débrouiller. Seule. Parce qu’on est toujours seul face à une telle vérité, même entouré par la chaleur des siens. Puis, le temps passe. En même temps que la petite sœur se transforme en grande protectrice, Anne devient femme. Avec une vie à construire, Philo toujours près d’elle. Comment pourrait-il en être autrement ?...

« J’ai quitté Thomas le lendemain de mes trente ans. (…) Je n’aimais pas la manière dont il te regardait. La manière dont il ne te regardait pas », écrit Anne Icart aux premiers instants de son livre. Tout est dit dans ce premier paragraphe. Tout du poids du regard des autres, des jugements à l’emporte-pièce, des silences qui toisent.

Allez, je vais tout vous dire. En refermant ce livre, les larmes sur mes joues, pour la première fois de ma vie j’ai éprouvé l’irrépressible besoin d’écrire à un auteur. Juste pour lui dire merci d’avoir écrit ce qui se dit si rarement, ce qui ne se lit jamais. Tellement d’échos. Elle sait lesquels. À 4 heures du matin, je me suis mis devant mon ordinateur, et via la boîte mail de son éditrice j’ai fait ce que j’avais à faire. Depuis, Anne Icart est entrée dans ma vie. Son éditrice aussi, d’ailleurs. Elles y auront une place pour toujours.

Pour conclure, avant de la laisser répondre aux questions que je lui ai posées pour Les Toiles Roses, je voulais dire à Anne une nouvelle fois merci. Publiquement, cette fois. Au nom de tous ceux qui sont jugés « différents ». Au nom de tous les parents d’enfants qu’on considère « hors normes ». Au nom de leurs frères ou de leurs sœurs. Les Lits en diagonale est un si beau repère pour tous ceux que le sujet concerne.

En lisant l’interview qui suit vous comprendrez, j’en suis sûr, pourquoi je suis fier qu’elle m’ait offert son amitié. Je suis même prêt à parier que vous m’envierez. Au moins un peu. Anne Icart est une si belle, si grande personne…

 

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INTERVIEW D’ANNE ICART

Par Laurent Fialaix

 

Les Toiles Roses : Comment est née l’idée de ce livre ?

Anne Icart : Une impulsion, ou une pulsion, incontrôlable. Un besoin subit de dire à mon frère Philippe que je l’aimais comme il était, qu’il existait à mes yeux, et que j’étais fière d’être sa sœur.

 

Pourquoi maintenant ?

Je n’ai pas de réponse. Mais peut-être que le temps de comprendre et d’accepter cette situation particulière était passé, et que celui de dire était venu. J’ai obéi à un ordre totalement viscéral et sentimental. Qui ne m’a pas donné le choix de l’heure !

 

Pourquoi un roman et pas un récit ?

Peut-être parce que le roman est plus « universel » que le récit. Même si je racontais mon histoire et celle de Philippe je voulais surtout raconter une histoire, celle d’un frère et d’une sœur qui s’aiment malgré leurs différences. Sans penser qu’elle pouvait être unique. Mais, là non plus, je n’ai pas vraiment choisi ni réfléchi à la forme. Les mots sont venus comme ça.

 

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Les Lits en diagonale est le témoignage d’une femme qui doit se construire aux côtés d’un frère aîné jugé « différent ». Quelles émotions, quelles peurs peut-être, traverse-t-on lorsqu’on est enfant ?

Tout se fait par étapes. Il y a d’abord la petite enfance, très heureuse et très protégée. Je ne savais pas à, cette époque, que Philippe était différent. Et je ne le voyais pas. Pour moi, il était mon grand frère et donc, forcément, mon héros. Puis, il y a l’étape où l’on apprend et où il faut assimiler et comprendre, ce qui n’est pas forcément facile à 7 ans. C’est peut-être l’étape la plus longue et la plus compliquée. Pour moi, ça s’est concrétisé par la fin du monde, la fin de mon monde d’enfant, le début d’un monde sans héros. Je pense que je me suis sentie très seule (et je crois que j’ai gardé de cette époque une capacité immense à me satisfaire de la solitude), sans doute frustrée et très en colère. J’en ai aussi beaucoup voulu à ma mère, que j’ai rendue responsable de ce « malheur » puisque c’est elle qui m’a expliqué la différence de Philippe.

 

Et à l’adolescence ?

C’est une étape difficile, une période où l’on veut être comme les autres, ne surtout pas être différent, se fondre dans la masse. Moi, à la question « Et ton frère ? », j’avais toujours du mal à répondre. La honte s’est beaucoup dissimulée là, derrière cette petite phrase anodine qu’on se pose les uns les autres sans faire attention. Pour moi, elle était terrible. Sans doute que beaucoup de choses se sont cristallisées à ce moment-là mais je n’en ai eu conscience que des années plus tard. Quand j’ai compris que je n’étais pas allée jusqu’au bout des rêves que j’avais à cet âge-là. Je le dis sans regrets.

 

Le début est très fort. A-t-on parfois le sentiment de « sacrifier » sa propre vie pour celle de son frère ?

Non, je n’ai jamais eu le sentiment d’avoir sacrifié ma vie pour Philippe. D’ailleurs, j’ai une vie en dehors de lui ! Je me suis juste dit ‒ et je me dis toujours ‒ que c’est comme ça, que c’est ma vie. La vie. On peut toujours se dire qu’elle aurait pu être différente. Je pense que beaucoup le font. Mais ça ne sert pas à grand-chose. Le mieux étant quand même de se satisfaire de ce qu’on a, surtout quand on se dit que ça aurait pu être pire. Et le plus à plaindre, si toutefois on veut plaindre quelqu’un, ce n’est quand même pas moi !

 

Le regard des autres a-t-il parfois été pesant ?

Oui. Souvent. Encore maintenant. C’est d’ailleurs de l’extérieur que sont toujours venus les moments les plus durs et les plus cruels. Mais au fond je me dis que je tiens peut-être trop compte du regard des autres. Après tout, que nous importe ce que les autres pensent ? Au pire, ils pensent du mal de Philippe et ce sont des cons. Au mieux, ils le regardent avec indulgence, et c’est sur ceux-là qu’il faut se concentrer. Donc, c’est aussi à soi de faire la part des choses.


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Et la culpabilité ?

Elle a été lourde à porter pendant longtemps mais aujourd’hui, j’en ai terminée avec elle. J’ai arrêté de m’interdire d’avoir des sentiments partagés vis-à-vis de Philippe. Je suis parfois excédée par lui, parfois jalouse de lui, mais je me dis que ce sont-là des sentiments humains que tous frères et sœurs qui se respectent ont les uns pour les autres. Finalement, c’est en ayant ces sentiments-là et en les assumant que je l’aime le plus, puisque je le traite comme un frère « normal », en me fichant pas mal de sa différence !

 

J’imagine que ce livre a changé des choses en toi…

Oui, bien sûr, certaines choses ont changé, mais peu finalement. Le quotidien reste le même, Philippe surtout reste le même, et c’est très équilibrant. Les Lits en diagonale n’ont rien changé à mes rapports avec lui, parce que lui se fout royalement que j’ai écrit un livre ! Ça ne change pas sa vie, même si ça a un peu changé la mienne. Moi, j’ai retrouvé une certaine paix, une sorte de sérénité face à la vie en général. Je n’ai plus rien à dire de mon histoire, je lui ai rendu justice, j’ai réglé mes comptes avec elle, je peux passer à autre chose.

 

Et avec tes parents, tes amis ou connaissances ?

C’est surtout par rapport à mes parents que je sens une différence. Je crois qu’ils sont heureux que j’aie parlé de Philippe, que je lui aie (en quelque sorte) rendu cet « hommage », que j’en aie refait un héros. Ils sont heureux aussi que j’aie parlé tout court. De ce qu’on ne s’était jamais dit et qui nous a soulagés. Du handicap. Ils ont aussi pris conscience de beaucoup de choses qui les aident peut-être à mieux comprendre ma vie, mes choix, pourquoi j’ai eu tant de mal à trouver l’équilibre. Ils savent maintenant que si je ne faisais pas les choses, ce n’était pas par paresse mais parce que j’avais les « pieds dans le béton ».

Vis-à-vis des autres, je me sens toujours la même et je crois être toujours la même pour eux. Pour ceux que j’aime et qui m’aiment. Certains m’ont dit que j’étais courageuse d’avoir écrit cette histoire, d’autres que j’étais une fille bien. Je souris. Je ne me crois ni courageuse ni meilleure que les autres. Je suis une femme tout ce qu’il y a de banal ! Mais très sentimentale c’est vrai. Et très optimiste.

 

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As-tu eu des réactions des différences associations liées aux handicaps ?

Oui, j’ai reçu des lettres très émouvantes des directeurs de l’Unapei, de l’Apei, du CAT de Philippe. C’est d’autant plus touchant que je me sens vraiment toute petite à côté d’eux qui consacrent leur vie aux personnes handicapées avec une bonté et une patience admirables.

 

Comment, selon toi, peut-on aider à l’acceptation de la différence dans notre société où il reste encore tant à faire en ce domaine ?

Tu as raison Laurent, il reste beaucoup de progrès à faire en la matière. Les mentalités évoluent doucement, mais on est encore tellement loin d’un monde où la différence serait considérée comme « naturelle ». Parce qu’elle l’est. Ça me fait penser à la discrimination positive. Il y a quand même le mot « discrimination » dans cette formule. Tant qu’on aura besoin de mesures en ce sens, tant qu’on aura besoin de rappeler aux gens que les femmes existent, que les homosexuels existent, que les immigrés existent, que les handicapés existent, c’est que la société ne les aura pas encore acceptés à part entière. Tout ce qui est différent inquiète, ce n’est pas nouveau. Et les discours sur l’eugénisme prouvent aussi que la majorité souhaiterait un monde bien lisse et bien uniformisé. Un monde parfait où tout le monde se ressemble, où chacun ne pense qu’à son pré carré. Ça me rend vraiment perplexe sur la capacité que l’homme peut avoir d’accepter son prochain tel qu’il est. La nature n’est pas parfaite et c’est tant mieux, sinon, on s’emmerderait ferme !

Alors quelle solution à ça ? Tu avoueras que ce n’est pas facile de répondre ! J’aurais tendance à croire que plus on parlera du handicap, plus on le mettra en avant (au travail, au quotidien), plus les mentalités auront une chance d’évoluer. Il y a des avancées en ce sens, et c’est bien… même si c’est encore trop peu. Alors il ne faut pas se décourager.  Ce que je pense, c’est qu’un monde sans Philippe aurait été certainement bien moins beau et bien moins riche.

 

Daniel et Laurent remercie Anne Icart de nous avoir offert des photos familiales et personnelles pour illustrer cet article. Nous vous demandons, au cas où vous voudriez en reproduire une pour un billet sur ce livre ou cet article, de demander l’autorisation écrite de l’auteur. Merci d’avance.

 

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Laurent Fialaix (9 mars 2010)

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