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Le Père Docu s'appelle Gérard Coudougnan, il est né en 1962 et a pour qualification « enseignant-documentaliste », vous savez la dame qui râle au C.D.I. (centre de documentation et d'information) : c'est lui. Pour des raisons indépendantes de sa volonté, il est en ce moment éloigné de son lieu de travail habituel mais a toujours un C.D.I. (contrat à durée indéterminée) avec les bouquins pour qui il a une vraie A.L.D. (affection de longue durée).

Au hasard de ses lectures, il a croisé Marc-Jean Filaire puis Môssieur Daniel C. Hall (« The Boss ») qui lui a proposé de regrouper ici quelques « recensions » d'ouvrages à thématique LGBT.

Toute remarque, toute suggestion sera la bienvenue. Les avis, sous forme de commentaires, pour échanger des points de vue encore plus !

La bibliothèque rose est ouverte… vous avez lu Le Club des Cinq d'Enid Blyton ? Claude, le « garçon manqué » est peut-être alors votre première rencontre avec une petite lesbienne ou une future transgenre ? Ah bon, vous n'avez pas connu les Bibliothèques Rose et Verte ? Qu'importe, entrez (couverts !) ici et faites ce que vous voulez entre les rayons, ne soyez pas sages ...

 

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Antonio Manuel, Par amour, Atlantica, 2009, 269 p., 20 €.

 

J'ai lu Par amour comme on observe une immense tapisserie du XVIIIe siècle...

Antonio Manuel est l'héritier des plus grands maîtres lissiers de la manufacture espagnole de Santa Bàrbara. Ce jeune écrivain sait tisser les mots sur son métier d'homme de lettres. Son carton, son programme n'apparaissent pas dès les premières pages de ce travail dense et aux mailles finement ouvragées. Avec un peu de recul se distinguent des grandes lignes : l'amour en est, comme le titre l'indique, l'ordonnateur majeur. Amours d'un homme pour d'autres hommes, vécues sans aucune culpabilité mais avec de grandes interrogations sur l'étendue, les limites, les perspectives et les couleurs de ces personnages secondaires, les partenaires. Au premier plan se situent les parents : la mère, source tarie et ceux à qui l'œuvre est dédiée : le père espagnol illettré et viscéralement homophobe (1) et la grand-mère aimante.

Le style peut être rattaché à diverses écoles : Freud (avec des touches lacaniennes et doltoiennes), les principes du yoga et Jésus Christ, fils d'un dieu d'amour, qui a ressuscité Lazare.

Des écrivains jouent un rôle : Annie Ernaux, Madeleine Chapsal et Dominique Fernandez (1).

Les coloris sont violents et contrastés : les fils de la trame narrative ont été trempés dans le sang et les excréments ainsi que dans divers aliments (ingurgités ou régurgités) et des doses variables d'anxiolytiques et d'antidépresseurs. Le blanc lacté fait cruellement défaut à l'auteur qui recourt régulièrement au gris de son psychanalyste.

Antonio Manuel a remis plus de cent fois son ouvrage sur le métier à tisser les descriptions, les émotions, les aspirations, les déceptions, les affections.

Chaque mot, chaque phrase est un travail minutieux : les mots importants sont traités à la loupe étymologique, les personnages reviennent régulièrement préciser un profil que le maître lissier n'hésite pas à recadrer dans une nouvelle perspective à partir d'éléments de la toile de fond qui viennent modifier l'angle de vue. Un aplat devient un relief, un détail une pièce centrale.

Le corps de l'œuvre est celui de l'auteur : un champ de batailles où les étreintes sensuelles à deux ou trois sont aussi puissantes que le combat mené contre une maladie qui entraîne le narrateur dans des introspections douloureuses où se succèdent boulimie et anorexie :

« Mon corps exprime ce que je ne puis entendre. Il met en maux tout le maudit des mots, tout le rance du sentiment, le ferment de toute rancune. Ni haine, ni amertume, certifie ma parole. Mais mon corps désavoue cette vérité fourbe, juste bonne à tromper ma logique, ma raison. » (p.101)

Par amour est le poignant récit d'un combat entre cœur et corps, raison et passions. Le tableau d'un maître qui sublime ses douleurs dans une prose ciselée au scalpel. Rêves et cauchemars, sans doute plus près de la réalité d'un homme que de la fiction d'un narrateur qui réussit à nous entraîner vers une ligne d'horizon. Il est évident que cette écriture en a défini le cadre et les perspectives.

 

(1) http://www.lestoilesroses.net/article-32794391.html

 

POUR EN SAVOIR PLUS :

Le blog de l'auteur :

http://antoniomanuel.over-blog.com/

Pourquoi écrit-il ?

http://sites.google.com/site/leslivresdantoniomanuel/a-la-question-de-savoir-pourquoi-j-ecris

Le site de l'éditeur :

http://www.atlantica.fr/

 

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INTERVIEW D’ANTONIO MANUEL

par  Gérard Coudougnan

 

 

Les Toiles Roses : Bonjour Antonio, pourrais-tu te présenter à nos lecteurs ?

Antonio Manuel : Cette question m'évoque immédiatement la citation de Jacques Lacan ‒ dont je viens de lire le commentaire proposé par le philosophe Kévin Krantz dans son excellent ouvrage Le Soleil se lèvera-t-il demain ? : « Si un homme qui se croit un roi est fou, un roi qui se croit un roi ne l'est pas moins ».

En effet, c'est une question qui risque de me réduire à la réponse que je vais faire. Je ne me définirai pas, pour éviter le piège, par celui que je ne suis pas ou pense ne pas être, mais j'essaierai de ne pas me réduire à ma fonction sociale d'enseignant de lettres modernes, le premier élément de réponse qui me vient à l'esprit, après mon nom, quand on me demande qui je suis.

J'aimerais pouvoir me présenter, en cette circonstance, en me désignant, avec la même tranquille certitude qu'en répondant « professeur de lettres modernes », comme un écrivain. Je prends la peine de préciser cela parce qu'effectivement, pour moi en tout cas, et pour les personnes qui ne me connaissent pas intimement ou qui n'ont lu ni mon blog, ni mon site, ni mon roman, cela ne va pas de soi. Peut-être parce que je ne vis pas de ce travail d'écriture, et, c'est lié, parce que ce premier roman publié, bien qu'édité assez facilement, n'a pas bénéficié de la publicité nécessaire à sa diffusion et à ma reconnaissance en tant qu'écrivain.

Je suis donc professeur de lettres modernes, écrivain, professeur de yoga, à l'occasion, et je fais fonction de documentaliste depuis la rentrée scolaire. J'ai 42 ans. Je suis officiellement célibataire et je souffre d'une maladie de Chron. J'évoque la pathologie dont je suis atteint parce qu'elle est invalidante, d'une part, et conditionne donc ma vie, mais aussi et surtout parce qu'elle n'est pas assez connue, bien que de plus en plus fréquente comme toutes les maladies auto-immunes, et mérite qu'on en finance la recherche plus généreusement (1).

 

Mais Antonio, tu sais bien que la plupart des auteurs ont un autre travail (souvent, comme toi, dans l'enseignement). Peu nombreux sont ceux qui ne vivent que de leur plume. Faire éditer son premier roman à compte d'éditeur est déjà une reconnaissance. Ne crois-tu pas que ton livre, par sa thématique et son style, ne pourra toucher qu'un public forcément limité ?

Je suppose que par sa thématique tu fais allusion à l’homosexualité du narrateur. C’est vrai que le narrateur est homosexuel mais l’intimité forte que la narration à la première personne crée entre ce personnage et le lecteur me semble propice à l’abolition de toute altérité.

D’ailleurs le point de vue interne adopté introduit le lecteur dans le for intérieur du protagoniste depuis lequel le monde lui est donné à voir, à déchiffrer, à comprendre. Aussi l’identification du lecteur avec le narrateur favorise-t-elle le dépassement des frontières qui délimitent l’espace que sa différence en matière de sexualité pourrait étirer entre eux et participe-t-elle à la résolution de l’énigme que l’autre constitue trop souvent à nos yeux. 

Lire un roman c’est souvent essayer de découvrir ce qui se dissimule derrière l’opacité d’autrui. Et puis je pense, comme Baudelaire dans le poème liminaire du recueil des Fleurs du mal, intitulé « Au lecteur », ou Hugo dans sa préface des Contemplations, que le « je » est une personne interchangeable : au « je » du narrateur se substitue avec aisance celui du lecteur. Il devient ainsi instantanément, infailliblement, involontairement l’instance énonciative du récit dès qu’il en entreprend la lecture : « Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère ! » ; « Quand je vous parle de moi je vous parle de vous. Insensé qui crois que je ne suis pas toi ! ». L'expression de ce qu'il y a de plus intime en soi mène à l'universalité.

Pour ce qui est du style, si d’une certaine manière on peut le définir comme un écart par rapport à la norme, la transcription de la singularité d'un regard, celui du narrateur, à la fois précis et imagé, poétique et réaliste, je ne le crois cependant pas un obstacle à la lecture du roman qui en sélectionnerait le lectorat parmi l’élite intellectuelle, instruite et cultivée. J’en veux pour preuve son acquisition par plusieurs bibliothèques municipales de la région où il fait partie des 20 % de livres les plus empruntés. 

 

Ton roman est une autofiction : à quels jeux se livrent le je autobiographique et le je de fiction ?

Je comprends très bien ton emploi du mot « jeux »mais je le réfute. Il ne s'agit en aucune façon d'un jeu. Dès l'instant où j'écris « je », j'ai la sensation libératrice d'être moi dans mon intimité la plus honteuse, la plus sale, la plus impudique et dans le même temps de trahir celui que je suis du fait même de l'écriture. Je suis bien le narrateur du roman Par amour, néanmoins le choix des mots, la recherche d'une mélodie, d'un rythme, la quête d'un ailleurs stylistique me défigurent. Sans parler du souci de l'efficacité narrative ‒ que je considère comme une beauté plastique, comparable à la fascination éprouvée devant un tableau ou une sculpture ‒ qui déforme le réel vécu.

Il n'est donc pas question d'un jeu entre la fiction et la réalité de ma vie. J'utiliserais, au contraire, le mot « drame » dans sa polysémie : l'usage du « je »rend possible la création d'une action, celle d'écrire et de décrire une réalité jusqu'alors virtuelle qu'on appelle ordinairement « fiction ». Drame encore que cette condamnation de l'auteur d'autofictions à se dire pour exister.

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Dans cette partie de cache-cache, la recherche de la qualité stylistique, la quête d'une perfection littéraire est-elle un élément qui réunit réalité et fiction ou un défi qu'il incombe au nouvel être issu de cette fusion d'affronter ?

À la première partie de la question je répondrais, sans hésitation, par l'affirmative. Il n'y a pas de fiction possible si ne s'impose pas « une manière absolue de voir les choses », ainsi que Flaubert définit le style. Le style réunit la réalité et la fiction dans la mesure où il la crée.

Deux de mes frères ont rompu tout lien avec moi, en partie, parce qu'ils n'ont pas compris cela. Ils ont pris le style pour argent comptant. Autrement dit, ils ont considéré mon roman comme un vulgaire témoignage sur ma vie et n'ont pas du tout apprécié qu'il soit public, alors que la quête d'une perfection littéraire m'a nécessairement contraint à transfigurer la réalité, à l'altérer, puisqu'il s'agissait d'écrire une autofiction et non une autobiographie. Dans cette partie de cache-cache, ils n'ont pas su discerner le vrai du faux, la part du rêve de celle du réel.

En ce qui concerne la seconde partie de la question, je serais moins catégorique. Il est vrai qu'écrire ne transforme pas seulement le monde décrit mais aussi l'écrivain. Le défi est avant tout d'écrire, d'« oser écrire » pour reprendre le titre d'un livre de Madeleine Chapsal. Une fois, celui-ci relevé, le roman achevé, je ressens d'abord une libération sans commune mesure. Celle d'un devoir, vital, achevé. Puis, un tourment s'empare de moi. Lui ai-je été fidèle ? Ai-je vraiment respecté cette vérité ineffable qu'il m'incombe de révéler ? Suis-je réellement digne de les tutoyer ceux-là que j'aime, que j'ai aimés, cette famille qui comprend les noms des écrivains qui me sont chers ? Suis-je parvenu à faire encore quelques pas sur le chemin de ma vie et à accompagner le lecteur dans son propre cheminement existentiel ? Là est le véritable défi. Il nous incombe à tous: réussir à vaincre ou du moins à donner un peu plus de sens à l'absurdité de notre humanité, vivre pour mourir.

Alors parce que, comme tu le dis, du livre est né un nouvel être, je suis à même de marcher encore, « Je peux faire quelques pas / sans tomber / je viens de loin ». Eluard exprimait ce « dur besoin de durer » merveilleusement bien. Je peux poser sur ma vie un regard plus apaisé.

 

Il y a plusieurs séparations, plusieurs exils dans ton texte : une vie unifiée et un chemin régulier sont-ils des thèmes ennuyeux ou tout simplement inaccessibles ?

J'ignore ce qu'est une vie unifiée. Sans doute parce que la mienne ne l'est pas. Les séparations et les exils auxquels tu fais référence sont involontaires. La rupture du narrateur avec G. survient brutalement, de façon inattendue. Elle est une violence, peut-être salutaire, qui lui est infligée. Il la subit et il en souffre, passionnément. La séparation d'avec sa grand-mère maternelle, qu'il a toujours considérée comme sa mère d'adoption, le don quémandeur d'amour fait par sa mère biologique à sa propre mère, résulte de son décès alors qu'il est âgé de six ans. Cette disparition reste insensée pour lui car aucun adulte ne prend soin de la rendre signifiante. Ainsi, il n'assiste pas à ses funérailles mais est envoyé à l'école comme un jour ordinaire. Son obsession de la mort des siens, de sa mère en particulier, de tous ceux qu'il aime, et le fait qu'il vive toute séparation inhabituelle de façon maladive, dans la peur de perdre l'autre, dans l'angoisse de ne plus jamais le revoir, s'enracine dans ce traumatisme de son enfance. Le cancer fulgurant qui emporte son père en une semaine réactive cette ancienne blessure et lui permet d'intégrer l'idée de la mort sur le plan symbolique. Si l'on ne peut concevoir sa propre mort, comme l'explique Freud, la disparition définitive de son père lui enseigne que le deuil est moins pénible lorsque l'on comprend que le défunt reste en soi présent et que l'écriture l'éternise.

Pour ce qui est de l'exil, le texte en rappelle trois circonstances. Le premier exil, celui qui dramatisera les deux autres, est métaphorique. Il ne concerne pas directement le narrateur mais s'inscrit dans l'histoire des siens sous la forme d'une tragédie. Contraint, douloureux, c'est un déracinement qui élabore dans l'imaginaire familiale une mythologie conférant à la décolonisation de l'Algérie la dimension d'un tabou. Mythologie parce que l'Algérie devient progressivement une utopie, le non lieu d'un bonheur indicible. Tabou du fait de la souffrance que provoque son évocation.

Le narrateur nourrira toute sa vie une fascination ambigüe, une nostalgie sans cause pour cet orient méconnu mais néanmoins familier, proche comme peut l'être au réveil le souvenir rêvé d'un amour intense.

Le déménagement durant son adolescence, ce départ du nord de la France pour le sud, retentit, pour lui, comme la répétition d'un cauchemar.

Sa mutation professionnelle du sud de la France pour le nord cette fois, étrange et décevant retour aux sources, constitue le troisième et dernier avatar de cette série d'exils.

Il n'y a donc là aucun divertissement recherché comme remède à l'ennui d'une existence monotone parce que trop bien réglée. Ce sont plutôt les aléas d'un parcours imposé.

 

Quels rites, religieux ou spirituels, te paraissent les plus importants comme axes de l'existence de ton narrateur et/ou de toi même ?

Je n'aime pas le formalisme et l'aspect doctrinaire des religions. Mon narrateur s'est constitué un ensemble de croyances et de pratiques culturels ou cultuels qui sont le fruit de ses errements spirituels et de ses trouvailles bénéfiques.

Le yoga est une de ces pratiques que nous avons en commun mon narrateur et moi-même. Le terme d'axe convient parfaitement à cette philosophie qui a pour but, à mes yeux, d'orienter l'être vers le centre de transparence qui est en lui. De lui permettre de se relier à ce qu'il a de plus sacré, cette part d'éternité que l'on peut nommer Dieu ou bien énergie vitale, selon ses convictions.

Il m'est apparu comme une pratique complémentaire à celle de la psychanalyse dans la mesure où, par le biais des asanas ou postures, il laisse parler le corps afin de lui restituer son vrai langage au détriment de celui appris par les injonctions éducatives. Verticalité me semble être le mot qui résume l'ambition du yoga tel que je le conçois : étirement d'une colonne vertébrale qui tend à faire du corps la flamme qui brûle vers Dieu, de l'homme un trait d'union entre la terre et le ciel.

La lecture du Nouveau Testament avec la figure solaire, révolutionnaire, et infiniment bienveillante du Christ inspire également beaucoup le narrateur de Par amour. Elle pose à côté du modèle du Bouddha, celui d'un autre « éveillé vivant ». Le fascine surtout le cryptage poétique du langage du Christ qui réveille en lui une nouvelle puissance d'exister.

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L'homosexualité est-elle un élément qui a un rôle, une place (laquelle ?) dans ces axes de vie ?

Mon homosexualité guide tous mes choix. Je la crois à l'origine de ma pathologie parce que je l'ai lue dans le regard de mon père et entendue dans ses propos répétés comme une hérésie, un crime impardonnable, une tare, une abjection.

Je ne sais pas si je me suis haï d'emblée d'être la cause possible d'une telle ignominie en cas de révélation publique ou de découverte involontaire par autrui de cette appartenance à une minorité sexuelle ou bien si je l'ai détesté, lui, en premier. Le fait est que son désaveu s'il avait su, il me l'a introjecté dans l'organisme en une perfusion de chaque instant.

Faire une psychanalyse, pratiquer le yoga, écrire bien sûr, m'aident à réaliser une sorte de transfusion. Je tente de relever la tête, de me tenir bien droit pour pouvoir faire face au Père.

 

Tu travailles actuellement dans le Centre de Documentation et d'Information d'un établissement scolaire : quelles joies, quelle frustrations, quels sentiments en général t'apporte ce rôle d'intermédiaire entre des jeunes en construction et la place que peut jouer la lecture dans cette ouverture au monde ?

Cette question recoupe mes préoccupations actuelles. J'ai lu depuis le mois de septembre une infinité de romans destinés aux adolescents dans l'espoir d'en découvrir quelques uns qui vaillent la peine de les inciter à les lire. Aucun ne m'a vraiment enthousiasmé. J'ai fini par me dire que cette catégorisation était avant tout commerciale et qu'un roman pour adolescent est un roman que les adolescents prennent plaisir à lire. Le problème reste entier puisque, excepté les livres relevant du genre à la mode de l'héroïc fantasy dont certains élèves sont particulièrement friands, la plupart d'entre eux ne lisent que par obligation scolaire.

Je me sens donc frustré et je connais des heures de résignation avant d'être repris par l'exaltation à l'idée qu'en pénétrant dans le CDI, ils jouissent du bonheur potentiel inouï d'affronter le monde entier grâce à la lecture de quelques livres essentiels. Et s'il s'agit d'une de ces quelques journées de joie où un élève vient emprunter l'un des romans que j'ai exposés, accompagnés de quelques lignes de présentation incitatives, je me dis que tout n'est pas perdu.

 

Merci Antonio et meilleurs vœux de réussite.

 

(1) Site de l'A.F.A. : http://www.afa.asso.fr/


Note de Daniel C. Hall : Si les éditeurs ou les auteurs (auto-édités ou non) souhaitent envoyer un service de presse à Gérard en vue d’une critique sur ce blog, merci de prendre contact avec le chef Daniel C. Hall qui vous communiquera ses coordonnées :
lestoilesroses@hotmail.fr.


TO BE CONTINUED…

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