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16.

QUAND JÉSUS EST UNE FEMME (PRESQUE) COMME LES AUTRES...

Papy Potter

 

Papy Potter est né en pleine folie hippie de parents qui ne l'étaient pas. Depuis lors, il vit au milieu de ses arbres avec son adorable pirate des trains, tout au bord d'un marais nommé « du ru d'amour ». À quelques kilomètres de là, s'étend une vaste forêt où il travaille. Dans le chaudron rose, comme il est devenu vieux (il a presque 40 ans) et que Moudulard a fermé ses portes depuis longtemps, il glose sur le lien sulfureux et amoureux liant les gays aux diverses spiritualités du monde.


Jésus ? Une femme ? Qu’est-ce qu’il va encore nous inventer, le chaudronneux ? vous entends-je penser.

Laissez-moi vous conter d’abord l’événement qui se trouve à l’origine de ce billet. Il y a quelques mois, nous nous sommes rendus à Notre Dame à la Rose, à Lessines, en Belgique, afin d’y découvrir les plantureux jardins de plantes médicinales. Tant que nous y étions, nous avons également visité le musée qui, autrefois, était un hôpital et un couvent. Nous choisîmes la visite « version longue » qui s’est avérée être un vrai délice de découvertes.

Aujourd’hui, l’endroit retrace tout un pan de l’histoire médicale et hospitalière. Rien que pour cela, le musée se montre d’une précieuse richesse culturelle. Par ailleurs, de nombreuses œuvres d’art accueillent le visiteur. Parmi elles, le tableau « des lamentations » est, à lui seul, une vraie curiosité. Son auteur est, hélas, inconnu, le tableau n’étant pas signé. Toutefois, dès que je l’aperçus, un détail attira tout de suite mon regard. Et non des moindres. Le Christ barbu, nu de poitrine, était pourvu d’une très étrange caractéristique. En effet, il avait des seins… de femme. Vous n’imaginez pas ma stupeur lorsque je découvris ce tableau. Le conservateur a eu la gentillesse de m’envoyer ce document de très grande qualité :

 

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Le guide du musée a eu la gentillesse de me fournir une étude concernant cette peinture. Elle date en fait du XVIème siècle et aurait été commandée par la sœur supérieure de l’époque. Cette représentation montre très clairement un Christ muni d’une poitrine de femme, le doigt désignant d’ailleurs ces seins comme pour attirer l’attention du spectateur sur eux. L’artiste a donc nettement voulu représenter un Christ à la fois homme et femme. On imagine le scandale qu’une telle représentation a pu causer à l’époque. Et pourquoi aussi elle fut « corrigée » au XIXème siècle.

La question est alors : « Pourquoi un Christ muni de seins ? »

L’idée qui vient la première à l’esprit est la louable intention d’exprimer que le Christ est venu pour sauver l’humanité toute entière. Donc, pas seulement les hommes. Mais également les femmes. Et qu’à ses yeux, hommes et femmes sont égaux, comme ils le sont dans son cœur. Il est aussi possible que l’artiste ait voulu présenter le Christ comme « fiancée » de l’humanité. Voire exprimer une forme de maternité (avec sa Résurrection, le Christ « accouche » d’une humanité « nouvelle », différente). Il est aussi « nourricier », il allaite l’humanité du lait de son amour, il la nourrit de ses paroles. Sa souffrance se compare alors à celle d’un accouchement. Toute une mystique maternelle s’incarne donc au « sein » de cette représentation. Très vivante et très riche. Une mystique où le Christ est aussi « notre Mère ». Voilà une réflexion que l’on retrouve par exemple chez Mechtild de Hackenborn (au XIVème siècle) ou Julienne de Norwich (au XVème siècle).

Rappelons aussi que Saint Ambroise de Milan, le précepteur de Saint Augustin, écrivait déjà au IVième siècle : « Nous sommes nourris, par le lait spirituel du Christ. Le Christ est la fiancée qui a consacré le mariage avec l'humanité, nous a portés dans ses entrailles, nous a enfantés et nous a maintenus en vie par son propre lait... » Détail important : les religieuses de Lessines étaient des augustines.

On peut imaginer également l’aide mystique que constitue un tel tableau pour des religieuses. Il est en effet important pour elles de pouvoir s’identifier au Christ, de le rejoindre, de le « vivre ».  N’oublions pas qu’une iconographie a une valeur d’abord contemplative. Elle doit servir de support à la méditation des sœurs.

Par ailleurs, de nombreuses représentations de la dernière cène montrent Saint Jean (le disciple préféré) penché sur la poitrine du Christ. On sent une tendresse particulièrement profonde entre eux, un amour qui déborde de Jésus, une affection quasiment maternelle.

Toute une mystique existe donc où Jésus n’est pas seulement le fils, il est aussi, et contre toute attente, « la mère ». Et donc, oui, Jésus y est également femme.

Les Christs androgynes sont relativement rares, c’est vrai, mais ils existent. Étrangement, le plus célèbre est sans doute… celui de la carte du Monde, dans le tarot. Il est somme toute évident de songer que la femme au milieu est tout simplement, bien, une femme. Oui, mais, alors… pourquoi cette femme est-elle représentée entourée des symboles des quatre évangélistes ? Divers auteurs n’hésitent pas à avancer que cela s’explique tout bonnement par le fait que cette femme n’est autre que le Christ lui-même. Un Christ que sa Résurrection a rendu mère d’une humanité nouvelle. Et que c’est précisément la raison pour laquelle cette carte suit celle du Jugement dans la logique du tarot. Elle incarnerait la victoire de l’amour du Christ.

 

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Cette hypothèse est loin de faire l’unanimité, vous vous en doutez. D’autres disent que cette femme qui semble danser, toute nue, au milieu de l’arcane du Monde serait en fait… Marie Madeleine (of course) et non le Christ. Info ? Intox ? Je connais suffisamment le tarot pour affirmer que ce n’est pas demain la veille qu’on en aura cerné tous les mystères. Toutes les suppositions restent possibles de ce point de vue. La seule chose qui me semble certaine est qu’effectivement le tarot soit d’inspiration religieuse. Ceux que cela intéresse trouveront d’autres éléments sur ce lien :

http://www.camoin.com/tarot/Tarot-Marie-Madeleine-Magdala.html

Mais revenons à nos moutons. Des Christs androgynes, dans le genre de celui de Notre Dame à la Rose, on en trouve également ailleurs. Par exemple, sur ce vitrail représentant le jugement dernier, sur une rosace du couvent des cordeliers à Châteauroux.

 

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Peut-on dire que ces Christ soient asexués ? Non, au contraire, ils sont très sexués, je trouve. Barbus avec une poitrine de femme. Ils sont androgynes dans le sens premier du terme : homme ET femme. Comparables du même coup à certaines représentations du diable. D’où sans doute le scandale qu’ils peuvent provoquer et qui entraîne, parfois, le fait qu’on camoufle « ces seins que l’on ne saurait voir… »

 

Cabbale_Tarot_Le_Diable.jpg

 

Je poursuivis mes recherches et allai de surprise en surprise. En avançant dans mes lectures, je découvris ainsi un nombre peu négligeable de saintes aux histoires méconnues. Et surtout au caractère transgenre avéré…

Par exemple, on sait que certaines saintes assumèrent une identité masculine au cours de leur existence monacale. Ainsi en est-il de Sainte Euphrosine (http://fr.wikisource.org/wiki/Sainte_Euphrosine), de Sainte Eugénie d’Alexandrie :

http://carmina-carmina.com/carmina/Mytholosaintes/eugenie.html

et de Sainte Pelagie :

http://www.abbaye-saint-benoit.ch/voragine/tome03/151.htm

Plus récemment, on trouve Vasil Popovici, un moine roumain du XIXème siècle du monastère de Tzibukani dont on découvrit à sa mort qu’il était femme. Il existe également Catalina de Erauso, la célèbre « nonne soldat » : http://fr.wikipedia.org/wiki/Catalina_de_Erauso.

Cela va même parfois plus loin que le travestissement. Des barbes poussèrent  à certaines religieuses, comme Sainte Galla, Sainte Paule d’Avila et Sainte Wilgefortis :

http://translate.google.be/translate?hl=fr&langpair=en%7Cfr&u=http://en.wikipedia.org/wiki/Wilgefortis

Parfois grâce à l’intervention du Christ lui-même.

Peut-on imaginer que ces saintes barbues répondent, d’une certaine manière à ces Christs pourvus de seins ? Je l’ignore, c’est une hypothèse. Après tout, pourquoi pas ?

Dans le même ordre d’idée, je vous invite également à songer à ce verset étonnant de l’Evangile apocryphe que l’on prête à Saint Thomas :

Au verset 117, Jésus dit de Marie Madeleine : « Moi, je l’attirerai pour la rendre mâle, afin qu’elle aussi devienne un esprit vivant pareil à vous (ses apôtres), les mâles. Car toute femme qui sera faite mâle entrera dans le Royaume des Cieux ».

Étrange, non ? Que penser de cette phrase ? Est-ce à dire que seuls les hommes entreront dans le Royaume des Cieux ? Serait-ce à corréler avec toutes ces saintes qui devinrent hommes ou qui se conduisirent comme tels ? Ne disait-on pas jadis que les femmes doivent se taire dans l’assemblée des Chrétiens ? Certaines femmes prirent-elles l’habit des hommes pour dépasser cette espèce de tabou pesant sur les femmes ? Je l’ignore totalement. Je peux juste en émettre la supposition.

Cela dit, d’autres discours existent. Certains disent en effet que la véritable chute de l’être humain fut d’être séparé en deux. Les deux sexes s’incarnèrent, on le sait, dans des corps différents. Il y a l’homme et il y a la femme. Adam et Eve. La venue du Christ devait donc sauver l’humanité en restaurant l’androgynie initiale.

Dans l’évangile apocryphe de Thomas cité tantôt, Jésus dit, verset 27 :

« Lorsque vous ferez des deux un, et que vous ferez l’intérieur comme l’extérieur et l’extérieur comme l’intérieur, et le haut comme le bas, et si vous faites le mâle et la femelle en un seul, afin que le mâle ne soit plus mâle et que la femelle ne soit plus femelle, alors, vous entrerez dans le Royaume des Cieux .»

Au Verset 109, on lit aussi : « Lorsque vous ferez que les deux soient un, vous deviendrez fils de l’homme et si vous dites, montagne, déplace-toi, elle se déplacera ! »

Dans un autre texte apocryphe, celui de Philippe, on peut lire : « Le Christ est venu pour rétablir ce qui a été ainsi séparé au commencement et réunir à nouveau les deux. »

Restaurer l’androgynie initiale de l’humanité… Voilà qui éclaire différemment ces Christs androgynes et ces saintes devenues barbues, ne trouvez-vous pas ?

On dira que ces évangiles sont apocryphes et je répondrai que c’est vrai, en effet. Cependant, Saint Maxime affirmait au VIème siècle l’androgynie du Christ et le retour de l’humanité à cet état lorsque viendrait la fin des temps. De même, la lettre de Paul aux Gallatiens ne dit-elle pas de son côté qu’il n’y a ni homme ni femme car nous sommes unis dans le Christ ?

Johannes Erigena, un théologien du Xème siècle, pensait de son côté que, par la Résurrection, Jésus avait expérimenté le retour à l’androgynie initiale, ce à quoi il nous appellerait lui-même à la fin des temps.

Par ailleurs, le fusionnisme, un mouvement religieux du XIXème siècle fondé par Jean Baptiste de Torreil affirmait que nous nous rapprochons, de vie en vie, d’une existence plus androgyne et plus proche de Dieu.

Enfin, Ganneau est, lui, le fondateur d’un mouvement spirituel appelé Evadisme et visant à reconstituer l’union d’Adam et Eve telle qu’elle l’était avant leur séparation (d’où le nom Evadisme). Il croyait donc en l’existence d’un être androgyne primordial. Le mouvement réclamait aussi l’égalité de l’homme et de la femme sur un plan social et spirituel.

Cela nous éloigne fort de la pensée religieuse chrétienne traditionnelle, je vous le concède. Toutefois, voilà des penseurs, des religieux, des mouvements, qui parlent de l’androgynie du Christ. Ils le voient homme ET femme, débarrassé au moment de sa Résurrection du déterminisme sexuel dans lequel nous sommes nés. Et pourquoi pas ? L’idée est-elle si dérangeante ? Nous nous trouvons alors à bien des lieues d’une idéologie sexiste refusant à la femme les aspirations spirituelles auxquelles elle a droit. Car (et là, c’est moi qui me pose juste la question) si le Christ est homme ET femme, pourquoi les femmes ne pourraient-elles pas accéder à la prêtrise ?

On peut aller plus loin encore. Finalement, avec l’idée d’un Christ androgyne, nous nous éloignons aussi d’une spiritualité séparant les rôles masculins et féminins au point de mépriser les plus efféminés des hommes et les plus masculines des femmes. Nous nous trouvons en face d’une idéologie très différente, qui invite l’homme à retrouver sa part de féminité et la femme sa part de masculinité.

Voilà où j’en suis dans mes réflexions. C’est un tableau qui m’y a conduit. Un de ces rares tableaux, accroché dans un ancien couvent, en Belgique, qui me fait écrire aujourd’hui : « Christ, pour bien des gens, n’était pas seulement un homme. Il était aussi une femme. » Et le mystère de sa mort et de sa Résurrection est tout à fait central à ce niveau. Le tableau de Notre Dame à la Rose représente une descente de croix ou une mise au tombeau. Et le vitrail de Chateauroux illustre le Jugement dernier. Il se trouve justement que c’est par sa mort et sa résurrection que le Christ a exprimé, on vient de le voir, son androgynie. De même qu’il est annoncé que c’est à la fin des temps que l’humanité retrouvera la sienne. Ces œuvres d’art ont donc bien un sens.

Je ne sais pas vous, mais moi, un Christ barbu avec des seins, je le trouve plutôt sympathique. Parce que plus proche de l’humanité. De TOUTE l’humanité, et pas seulement des hommes.

Alors, que montrent ces Christs androgynes ? Jésus-Mère ? Jésus entièrement humain (donc aussi femme) ? Ou tout simplement Jésus libéré du déterminisme sexuel de son incarnation ?

Peu importe, finalement. Ils sont, je trouve la superbe expression d’une tendresse, d’un amour, plein, entier, simplement vrai.

 

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Pour terminer ce billet, sachez qu’il existe un ouvrage présentant notamment des peintures modernes de Jésus androgynes :

http://www.amazon.fr/Art-That-Dares-Jesus-Christ/dp/1933993294/ref=sr_1_2?ie=UTF8&s=english-books&qid=1268828225&sr=8-2

 

Plongez dans les précédents « Chaudrons roses »

 

TO BE CONTINUED...
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