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Jean Le Bitoux :

Le guêpier des années Gai Pied  (2/2)


Jean Le Bitoux, né en 1948 à Bordeaux, est un journaliste français.

Issu du baby boom des années 50, Jean le Bitoux est une figure du militantisme homosexuel français. Fondateur du journal Gai pied en 1979, il n'a cessé depuis de lutter pour la reconnaissance et les droits des homosexuels en France.

C'est à Nice, au sein du mouvement homosexuel local, que Jean Le Bitoux fait ses premières armes de militant. Monté à Paris, il est candidat aux élections législatives de 1978, puis crée en 1979 le journal Gai Pied avec l'aide de quelques amis. Mis en minorité en 1983 pour des raisons économiques, il démissionne du journal avec la quasi-totalité des journalistes. Le journal continue sans lui et disparaitra en 1992, après 541 numéros.

Jean Le Bitoux s'investit également dans la lutte contre le sida, en participant à Aides dès 1985. Il fait partie d'une association qui se propose de créer à Paris un Centre d'archives gaies, avec le soutien de la Mairie de Paris. Très attaché à l'histoire et à ses oublis, il milite activement pour la reconnaissance de la déportation homosexuelle par les nazis au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Intellectuel et activiste, Jean Le Bitoux fut parfois vu comme un carrefour entre les médias et les intellectuels, philosophes ou écrivains, dont la pensée pouvait enrichir les revendications politiques du mouvement homosexuel.

 

 

Lire la première partie

 

Gai Pied va selon moi devenir alors médiocrement parisien, tout juste bon à faire rêver la province comme ceux qui n'osent pas ou ne peuvent pas avoir cette vie de rêve gay, visibles le jour et branchés la nuit. L'ennui s'installe. Les pages de mode succèdent aux confidences érotiques. Des reportages colonialistes nous parlent de garçons pas chers sous le soleil. Un quatre pages photo orne désormais les pages centrales. Des gays épanouis et si possible célèbres se font photographier dans leurs intérieurs parisiens. L'écrivain Jack Thieuloy nous explique que si on drague un mexicain, mieux vaut planquer son portefeuille. Le suivisme politique fait le reste. Désormais, des milliers de lecteurs n'achètent plus Gai Pied que le rythme hebdomadaire a de plus dérouté. Car il n'y avait pas, loin s'en faut, d'information hebdomadaire de l'homosexualité. À moins que cette décision soit celle de faire cracher quatre fois par mois les annonceurs comme les lecteurs. Un rythme insoutenable. Finalement, on n'achète Gai Pied que de temps en temps, environ une semaine sur trois. Cela dépend aussi de la couverture, et si elle n'est pas sexy ou titre sur le sida, les ventes chutent. Gai Pied est dans le piège qu'il s'est construit. Le guêpier que j'avais inventé avec Michel Foucault se refermait sur lui-même.GLB

De son côté, l'équipe sortante tentera de lancer en 1984, dès l'année suivante, un mensuel sur l'identité masculine dans l'axe des réflexions d'Elisabeth Badinter qui écrira un ouvrage fondamental quelques années plus tard intitulé « XY » Avec mon ami Pierre de Ségovia, j'avais par ailleurs suivi aux Hautes Etudes des réflexions sur ce sujet et écrit un essai que nous avions soumis à Michel Foucault pour une préface, mais c'était quelques mois avant sa disparition. Il s'agissait pour nous, comme pour la phrase qui servait d'exergue à Gai Pied, d’« échapper au guêpier des ghettos ». Travailler par exemple, et non plus seulement au sein d'un média gay, à la question de notre genre davantage qu'à celle de notre spécificité érotique. Malgré ses apparences, ce projet était profondément féministe. Le titre de ce mensuel en kiosque s'intitulait Profils. Il parut avec des articles de Jean Baudrillard, Nicolas Bréhal, Dominique Fernandez, Yves Navarre, Juan Pineiro ou Claude Olievenstein. On y retrouve également les premières contributions de jeunes journalistes comme Christine Bravo ou Christophe Martet. Philippe Brooks avait de son côté retrouvé la dernière interview de Roland Barthes, que nous avons publié.


L'échec de Profils fut patent, qui ne tînt que deux numéros et qui me convoqua devant les tribunaux avec 100 000 euros de dettes potentiellement imputables sur mes biens personnels. En fait, il n'y avait pas de lectorat : les gais s'attachaient de plus en plus à leur fraîche liberté identitaire, et les hétérosexuels n'avaient toujours pas digéré les irruptions sociales du féminisme et de l'homosexualité masculine.

En outre, aucun soutien médiatique ne parla de cette tentative de presse. Les journaux gays ne dirent pas un mot au sujet de cette aventure de presse, sauf évidemment quand le titre fut décédé, pour étrangement regretter qu'une parole ainsi disparaisse. J'avais pour ma part annoncé en 1982 le lancement de Samouraï dans Gai Pied malgré de virulentes réticences de l'équipe de direction : un simple respect d'information, quand bien même cela ferait de la publicité pour un concurrent. La presse homosexuelle utilisa le même procédé d'étouffement quand je lançai ensuite Mec Magazine en 1988 ou la revue culturelle h en 1996, un trimestriel qui existera deux ans et qui est davantage cité dans les ouvrages de réflexion aujourd'hui qu'hier dans les magazines gais d'alors. Aujourd'hui la presse masculine en kiosque, en regard de Profils il y a presque vingt ans, se porte bien. Nous avions eu raison trop tôt, et cela se paye toujours très cher.



Dans l'éditorial de Gai pied au cul, ce journal pirate rédigé par les démissionnaires de Gai Pied et notamment diffusé au sein de l'UEH de 1983, j'avais pronostiqué que le Gai Pied avait désormais son sida. Il survivra toutefois durant presque dix ans, mais sous perfusion financière du minitel, principalement le 3615 GPH, un rendez-vous lucratif complété par Gai Pied voyages, par Gai Pied boutique, ou par des ventes d'albums photographiques à l'échelle européenne. Gai Pied n'était plus qu'une grande surface de consommation, aux rayons fournis, aux antipodes des textes fondateurs du mouvement homosexuel. Pour autant, la concurrence était là, qui menaçait. L'allié d'hier, David Girard, s'était à son tour lancé dans la presse homosexuelle gratuite puis en kiosque, avec pas moins d'une demi-douzaine de titres. La direction de Gai Pied se lança alors dans la diffusion dans tous les lieux gais d'un gratuit, Paris Capitale. Ce sera un gouffre financier, comme pour de nombreuses autres aventures de la SARL éditrice de Gai Pied, les Editions du Triangle Rose. Son lectorat, pour un titre toujours leader sur le marché entre 1985 et 1990, se fera contradictoirement de plus en plus restreint. Il est vrai qu'issus d'une première scission de Gai Pied en 1981, Jacky Fougeray, René de Ceccaty, Gilles Barbedette et leur équipe, en lançant Samouraï puis Illico, avaient déjà écorné le monopole de Gai Pied en kiosque.


À partir de 1984, l'équipe restante de Gai Pied rappelle volontiers dans ses colonnes son glorieux passé, mais la censure s'était installée. On évite de citer le nom de quelques fondateurs ou démissionnaires. Pour les dix ans de Gai Pied paraît en 1989 un numéro spécial qui évoque sur des dizaines de pages l'histoire incroyable de ce journal. Le lisant, je réalisai que j'avais disparu, que je n'avais jamais existé. Une protestation de Daniel Defert, parue quelques numéros plus tard, s'étonnera dans le courrier des lecteurs que la direction de Gai Pied ose gommer ceux qui ne leur plaisent pas ou plus en pratiquant le gommage de l'histoire comme les staliniens retouchaient leur photos pour faire disparaître les opposants victimes de leurs purges.

Mais le pire n'était pas encore arrivé. Ma disparition de la mémoire journalistique avait amplifié la rumeur de mon décès par le sida dont certains me savaient atteint. Ruiné et isolé, je ne fréquentais alors plus les lieux gais où se construisent les rumeurs, où se font et se défont les réputations et les jugements à l'emporte pièce. Poussant parfois la porte d'un bar, j'apprenais que l'on était bien content de me voir, m'ayant cru emporté depuis longtemps par l'épidémie. On n'avait pas attendu que je sois mort pour m'enterrer. Parfois, quand d'autres se présentaient à l'entrée de Gai Pied rue Sedaine, des étudiants, des journalistes ou certains chercheurs étrangers qui souhaitaient me rencontrer apprenaient également que je n'étais plus de ce monde.

La protestation de Daniel Defert, fondateur de l'association Aides, ne changea rien à cette détestable attitude, aux antipodes de tout respect des êtres et de l'histoire. Trois ans plus tard, un best off des plus importants articles de Gai Pied fut édité. Si mes entretiens avec Jean-Paul Sartre ou Michel Foucault figuraient en bonne place, il avait été décidé que je ne devais pas être au courant de cette parution. J'ai souvenir d'avoir perturbé le cocktail de lancement de cet ouvrage au Cirque d'hiver. On finit par m'offrir deux numéros du best Gai Pied avant que je ne sois expulsé par le service d'ordre, mon ami Emeric tentant de s'interposer à toute brutalité supplémentaire.

Je me suis depuis beaucoup interrogé sur la haine, la négation de l'autre et le mépris de l'histoire. Cela a sans doute enrichi mes écritures, dans ces années-là, sur la question de la déportation. Des années plus tard, au début des années 90, quand je rejoignis à nouveau le mouvement homosexuel pour la Gay Pride ou pour le lancement du Centre Gay et Lesbien de Paris, Gai Pied Hebdo était toujours en kiosque, qui ironisa cruellement chaque semaine sur ces réalisations associatives et collectives, attisant les rivalités entre les associations. Parfois le journaliste de Gai Pied restait à la porte de nos discussions tant nous savions le sort réservé à nos initiatives de la part d'un journal qui était pourtant directement issu de la dynamique du mouvement homosexuel.

L'avant-dernier numéro de Gai Pied se vendit moins bien que le premier numéro, treize ans plus tôt. Il était temps de fermer boutique, ce qui fut fait en octobre 1992, au 541ème numéro. La pompe financière du minitel n'avait pas cessé d'éponger les dettes et n'en pouvait plus. Ce n'était plus un journal, c'était un média assisté par des ressources indirectes. Le rapport au lecteur était falsifié d'autant. Une dernière formule avait bien été lancée, Eric Lamien ayant eu mandat d'inventer un nouvel axe journalistique, beaucoup plus militant, avec un pliage qui rappelait les premiers numéros. Il s'y épuisa car les militants ne revinrent pas et les derniers lecteurs n'y comprirent plus rien. L'équipe se laissa licencier en obtenant de prendre la parole dans les derniers numéros, chacun racontant son histoire avec Gai Pied. Ce ton émotionnel empêcha sans doute une occupation des locaux ou des procès sanglants comme lors de notre scission. Après quelques dernières tentatives de presse hasardeuses comme Projet X ou Café et après la vente de son réseau minitel, l'empire Gai Pied finit par être liquidé. Reste le débat sur les archives de ce journal, historiquement précieuses même si elles ne fonctionnent plus depuis dix ans. Elles sont actuellement en négociation pour le projet du CADHP, le Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris, qui devrait ouvrir d'ici deux ans dans notre capitale (en 2002, Ndlr).

De plus, quittant en 1983 la dynamique politique et associative pour une stricte exploitation du créneau gay, Gai Pied ne sut pas très bien quoi faire de sa gestion indirecte de certains rendez-vous de cette génération et à la dérive depuis la fin du CUARH. Un temps, Gai Pied les assuma, ce qui le relia absurdement à son histoire ancienne le bal du 14 juillet sur les quais de la Seine, le guide Gai Pied, le service Gai Pied emploi, le salon des associations gaies et lesbiennes ou un soutien logistique annuel à l'élaboration de la marche homosexuelle.


Plusieurs questions perdurent concernant les « Années Gai Pied » comme on dit parfois. La première d'entre elles concerne le sida. Aurions-nous démissionné si nous avions réalisé l'ampleur de cette épidémie ? En 1983, le virus venait tout juste d'être identifié par l'équipe du professeur Luc Montagnier et les voies de la contamination venaient à peine d'être définies, et le test n'existait pas. L'AZT puis les trithérapies étaient encore très loin. Nos amis n'étaient pas encore décédés de façon violente et rapide comme ce sera le cas jusqu'à la fin des années 80. De plus, le débat qui nous avait opposé était un débat politique.

Ce n'était pas un débat de santé publique ou communautaire, comme on a pu le lire par erreur. Nous avions publié dès les premiers numéros de Gai Pied de nombreux dossiers médicaux, mais ils étaient plutôt prophylactiques, autour des MST. D'autres articles étaient axés sur l'histoire de la répression médicale ou sur le coup de main habituel que les médecins et les sexologues fournissaient depuis des décennies aux familles et à l'ordre moral. Concernant ces années, on évoque souvent les écritures hasardeuses du président de l'AMG, l'Association des Médecins Gais, dans Gai Pied. On parle moins de l'interview que j'avais alors réalisé, celui d'un malade du sida, le premier dans la presse française, dès juillet 1982. Les médecins qui écrivaient dans le journal avaient tenté de me persuader de ne pas faire cette rencontre, qui eut lieu chez lui, rue de Clignancourt. Il décédera rapidement. Bien plus tard, après quelques propos irresponsables de Guy Hocquenghem dans Gai Pied, une chronique du quotidien du sida, animée par Franck Arnal et Pierre Kneip sera un véritable soutien pour les personnes atteintes. Nous, équipe sortante, n'avons mesuré que plus tard l'ampleur de la catastrophe. Mais nous n'étions plus à Gai Pied. Et nous avons unanimement regretté que ce journal emblématique de par son lien atypique avec ses lecteurs ne choisisse pas d'être un vecteur convainquant pour être au centre d'une vigoureuse incitation à la prévention contre le sida.


Quelques mois après cette démission collective, les contacts entre ceux qui restaient à Gai Pied et l'association Aides, qui venait de se fonder en 1984, seront catastrophiques. Pour ma part, je m'étais investi comme volontaire à Aides dès 1985, chargé avec Frédéric Edelmann et Jean-Florian Mettetal de l'information dans les bars gays du Marais. En 1985 également, deux ans après notre démission de Gai Pied, nous vînmes à l'Université d'été de Marseille, avec Daniel Defert, où Gai Pied était absent, expliquer ce que nous commencions à savoir et à comprendre du sida, non sans rencontrer de véritables résistances auprès de certains militants.

 

Plus tard, avec les associations gaies et lesbiennes de Paris, nous pûmes reprendre pied dans une Gay Pride dévoyée par d'uniques slogans publicitaires. Gai Pied n'appelait même plus à participer à la marche. Je fus élu démocratiquement en 1988, avec Catherine Marjollet et Dominique Touillet, au bureau d'une Gay Pride parisienne qui deviendra ensuite nationale et régionale, et qui connait aujourd'hui le succès que l'on sait. L'année suivante, en 1989, pour la première fois, Aides défilera dans la marche ainsi qu'Act-Up, qui venait de se fonder. Le dialogue entre le mouvement homosexuel et celui de lutte contre le sida put ainsi reprendre. Il durera sept ans, avant de se briser à nouveau sur l'opération coup de boule d'Act Up Paris au Sidaction de 1996, qui ruina pour longtemps les associations de lutte contre le sida.


Que conclure après ce bref exposé sur l'histoire de Gai Pied, le premier que je fais ainsi devant vous, dix ans après sa disparition et presque vingt après ma démission ? (en 2002, Ndlr) Dire qu'il est toujours difficile d'en parler. Peut-être aussi parce que Gai Pied est devenu un mythe. Parce que son lecteur a eu un rapport émotionnel, souvent identitaire avec ce journal. Pour moi, l'aventure de Gai Pied, en tout cas celle que j'ai vécu, entre 1979 et 1983 est une des fiertés de ma vie, dans le sens où ce journal a également donné du courage, des références historiques et culturelles ainsi que les moyens de se rencontrer à ses lecteurs, c'est-à-dire à toute une génération qui osa demander Gai Pied un jour à un kiosquier. Cette aventure était collective et faite d'indéniable courage, d'un côté comme de l'autre.

La scission de 1983 me marque toujours pour ses doses de trahison, de volonté d'oubli, de rejet et d'irrespect fondamental. Le Gai Pied tomba dans le guêpier du consumérisme, de la désinformation et du parisianisme. L'unique hebdomadaire homosexuel au monde des années 80 et 90, est donc mort pour avoir abandonné son projet social.


 

Gai Pied appartient à l'histoire d'une génération. Depuis, elle a sans doute vieilli. Mais je préfère me souvenir de cette génération de militants, d'étudiants ou de jeunes enseignants qui se sont investis dans Gai Pied. Car ce journal a de plus été dans le même temps une formidable école de journalisme. Ces journalistes, qui sont restés solidaires, sont aujourd'hui dans tous les médias radio, presse ou télévision importants de ce pays. Mais mon émotion est toujours là car autant les premières années de Gai Pied ont comblé toute une génération avec ce courage de se lancer dans l'écriture et d'autres d'oser l'acheter en kiosque, autant nous restons tristes de cette fin de Gai Pied.


 

Ce journal ne méritait pas cette fin. J'ai aimé vous le dire.

Merci.





Article publié avec l'amicale autorisation de © Jean Le Bitoux.

Un grand merci à France QRD et à Donald Suzzoni.
Première publication sur France QRD.
 
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