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Le commentaire de Salim Kechiouche :

 


Pour Grande École, je suis plus mature, plus consciencieux, trop peut-être. Robert est très technique. Pour moi c'est une étape. Avant je n'avais pas le trac, là c'est la première fois que j'avais le trac, je connaissais mon texte par cœur six mois avant, trou noir avant de tourner. C'est un rôle de composition, pour lequel j'ai dû changer la voix, plus douce, c'est un rôle plus gentil. C'est un vrai travail. Il fallait que je me mette en position de faiblesse, de demande, genre le petit candide. Un jour ça m'a fait chier, je suis revenu au style caillera et Robert a crisé, d'autant plus que je lui avais donné « le vrai Mécir » aux répétitions, parce que je savais que c'était cela qu'il voulait. Le réalisateur, c'est le maître dans le vaisseau, c'est lui qui a écrit son truc. Si on a t'a donné une Super 5, c'est pas le lendemain que tu roules en Porsche. Ça l'embêtait aussi de me demander de ne pas sortir de l'enclos.En voyant le film je me dis vraiment que ce n'est pas moi, c'est un personnage, c'est Mécir, je ne connais pas son nom. Le personnage est là, il est incarné, je suis content par rapport à ça, j'ai essayé de le servir au maximum. C'est vrai que j'avais eu le trac mais ça a servi le rôle, cette pression mise par Robert a sûrement servi à ce que le personnage soit juste. Ce trac venait des concessions que je devais faire par rapport à ce personnage. Parfois, ses réactions par rapport à sa vie m'énervaient, ça ne pouvait pas être moi.En ce qui concerne la coupe, mes cheveux étaient plus lisses et ça donnait au personnage ce côté lisse, qui subit, même si d'un autre côté, c'est quelqu'un qui s'assume socialement, qui bouge, qui vit, il travaille, il a sa carte bleue. Ce rôle, c'est un retour sur les écrans avec un film d'auteur, Robert Salis, que je respecte et qui respecte beaucoup ses comédiens. Je sais que j'ai vraiment partagé une bonne expérience.

© Pascal Faure pour salimkechiouche.com


Fiche technique :
Avec Grégori Baquet, Alice Taglioni, Jocelyn Quivrin, Salim Kechiouche, Elodie Navarre, Arthur Jugnot, Yasmine Belmadi et Eva Darlan. Réalisation : Robert Salis. Scénario : Robert Salis et Jean-marie Besset, d’après l’œuvre de Jean-Marie Besset. Directeur de la photographie : Emmanuel Soyer.
Durée : 110 mn. Disponible en VF.




Résumé :
Un groupe de jeunes gens intègre l'une des grandes écoles où se forment les futurs dirigeants et où s'entrouvrent les portes du pouvoir. Ils sont la crème des étudiants et constitueront l'élite de demain.
Mais la vie a toujours plus d'imagination que nous. Grandes écoles, oui, grands amours aussi, difficiles à vivre parfois. Le trouble du je et du jeu, des sentiments, de l'esprit et de la chair désinhiberont leurs certitudes. Ils devront faire avec eux-mêmes, devenir ce qu'ils sont et s'apercevoir que l'école qui est grande n'est peut-êyre pas celle annoncée.


L’avis de Media-G :
Malgré les apparences, l'intrigue ressemble curieusement à celle de Maurice (James Ivory-1987), où un aristocrate britannique tombait sous le charme – sans conclure – d'un de ses copains étudiants de Cambridge. Puis, bravant les barrières sociales, tombait dans les bras d'un ouvrier et se découvrait tel qu'il était. La ressemblance s'arrête là.
Prenant le décor d'une quelconque école supérieure de commerce déshumanisée, Grande École entend parler de la Grande École de la Vie, donc du travail et celle de l'amour. Partant d'un sujet pourtant intéressant et peu traité dans le cinéma français (hormis à travers des gaudrioles effroyables à la Sexy Boys) le film trahit très rapidement ses origines théâtrales et se plante tout droit dans le décor.
Les personnages sont réduits à des caricatures monofacettes : l'ambitieux, la manipulatrice, le travailleur coincé... sans jamais essayer de voir au-delà des apparences. Seul Paul (Gregori Bacquet, formidable), torturé dans l'âme entre ses idéaux en train de se morceler et sa sexualité vacillante, donne lieu à une véritable étude de caractère. Mécir (Salim Kechiouche, épatant et émouvant) reste lui fidèle à ses convictions : c'est bien le seul qui sorte digne de cette histoire. Peu dupe de sa qualité d'objet de désir, il se laisse prendre au piège de ses émotions. Mais reste un tantinet prisonnier du cliché du bel arabe fantasmé les mains dans le plâtre : le film se prend un peu les pieds dans le tapis des clichés qu'il souhaite décrire.


Le rythme languissant n'arrange en rien cette impression de lourdeur démonstrative. Chaque effet est appuyé d'un dialogue explicatif (genre explication de texte au cas où personne n'aurait compris), le ton engoncé dans un montage mou. Ça traîne, ça se pose des questions, ça ne répond jamais : on tourne en rond, acteurs, histoire comme spectateur. La cerise sur le gâteau, ce sont les dialogues : ampoulés, déclamés comme au théâtre, ils tombent régulièrement à plat, oubliant que le passage au cinéma s'accompagne de l'oubli de la scène et que les acteurs n'ont pas à articuler comme des bêtes pour se faire entendre. Résultat : des scènes supposées emplies d'émotions (la scène d'explication finale) provoque l'hilarité de par le peu d'emprise sur la vie réelle.
Et l'amour dans tout ça ? L'amour... hum... le film ne lésine en scènes de cul à tous les étages. Peu avare en nudité masculine, on est gratifié de deux scènes de douche après un match de water-polo. Dont l'une supposée représenter le trouble du héros. Trop longue pour être honnête, elle apparaît totalement gratuite. La sexualité apparaît survoltée dans les scènes hétérosexuelles mais sensuelle, un peu hors du temps et onirique dans celles homosexuelles. Vision hédoniste d'un moment suspendu dans le temps, aboutissement du désir, cet impossible objet.


Comme dans tout film français parlant de sexualité compliquée par le désir, d'ordre et de désordre (amoureux ou professionnel), les héros ne savent pas choisir. Comme le dit le héros à la fin « je veux choisir de ne pas avoir le choix ». Mouais, un peu facile. la conclusion est au diapason du film : incapable de choisir entre théâtre et cinéma, le cul entre deux chaises d'une sexualité non épanouie. Cette description d'un monde industrialisé à outrance dans ses choix de société où les rapports sont prévus à l'avance, demeure statique, démonstrative, d'une lourdeur emphatique qui mène à un ennui grandissant. C'est très dommage car il y avait matière à moins verber et à agir plus : indécrottable prétention auteurisante à la française.
Le héros du livre et du film Maurice, prenait une décision radicale : celle de s'assumer. Celui de Grande École ne sait pas (ne veut pas ?) prendre cette décision, tout comme le film qui ne sait pas (ne veut pas ?) s'assumer comme tel.
Pour terminer, Robert Salis est le réalisateur de l'inénarrable documentaire sur le naturisme Vivre Nu – À la recherche du paradis perdu. Son dernier film, Grande École, est terminé depuis longtemps mais a peiné afin de trouver un distributeur et une fenêtre de sortie.
Grande École est sorti en DVD chez Optimale.


L’avis de Polo :
Une grosse déception que ce film qui aborde pourtant l’homosexualité d’une manière assez originale à travers la vie d’un groupe d’étudiants en grande école, promis à un avenir professionnel radieux.
Des textes qui ne sont pas sans rappeler les classiques du théâtre que nous avons tous étudiés au lycée mais qui, à l’instar de séries comme celle très célèbre du nom de Dawson’s Creek, sont parfois difficiles à imaginer dans la bouche de protagonistes aussi jeunes. Bref, un texte bien trop littéraire qui nous permet de ne pas oublier une seconde que ce film est l’adaptation d’une pièce de théâtre, ajoutant de la difficulté à la compréhension de ce scénario parfois pesant. La trame de fond reste limpide mais ce sont tous ces petits dialogues parallèles qui paraissent confus car inadaptés aux personnages.
Il ne suffit pas de montrer quelques corps masculins nus ou à demi nus pour faire d’un film « gay themed » un bon film. Il n’en demeure pas moins que cette petite touche sympathique reste un des attraits principaux de ce film dans lequel on se réjouit de revoir l’acteur Salim Kechiouche, que nous avons déjà pu suivre avec beaucoup de plaisir lors de son apparition dans le film Les Amants criminels de François Ozon ou plus récemment dans Le Clan de Gaël Morel.
Contrairement à d’autres sentiments dont on ressent moins la sincérité à travers leurs jeux, les acteurs, réussissent parfois à faire passer la sensualité de certaines scènes, malgré un texte ne leur permettant pas vraiment de s’exprimer en étant très crédibles mais il n’en reste pas moins que leur jeu est souvent plat ce qui rend certains passages plutôt désagréables.
Le thème était pourtant intéressant : Exprimer le contraste que l’on peut trouver dans ces très grandes écoles entre les certitudes de futurs dirigeants et les doutes qu’on peut avoir à un âge où tout se bouscule facilement.
Les deux points positifs de ce film restent à mon avis la nature des sentiments troubles que peut avoir le personnage principal pour son colocataire mais surtout la touche de fraîcheur apportée une fois de plus par Salim Kechiouche qui mériterait qu’on lui offre sa chance d’avoir son premier rôle.


L’avis de Olivier Valkeners :
Était-il vraiment besoin de prouver qu'une œuvre théâtrale s'adapte mal au cinéma ? Si cela était le cas, ce film en est la preuve ultime ! Bon d'accord, je schématise, il est vrai que de nombreuses pièces à succès se sont vues adaptées brillamment à l'écran. Mais définitivement pas celle-ci ! Des garçons de bonne famille, Paul, Louis Arnault et Chouquet (!), pétris de valeurs et de certitudes, intègrent une grande école de commerce où ils vont être formés à devenir les futurs dirigeants du monde moderne. Mais avec la cohabitation naissent sentiments et troubles. Choc des cultures et des classes, désirs charnel, intellectuel, rien ne va plus au royaume du certain et Paul perd pied.
Dès le générique, on a envie de rire. Avec un titre qui avance vers le spectateur pour emplir l'écran, comme ça se faisait dans les années 80, on sent toute la dimension de grandeur et de théâtralité pompeuse que le réalisateur a voulu insuffler à son film. Et peut-être aussi le fait qu'il n'ait plus réalisé de fiction depuis 84 ! On ne sait si c'est par ambition artistique ou pour s'éloigner du réalisme des documentaires filmés entre temps par Salis, mais bien qu'ayant été retravaillée, la pièce n'a nullement l'air d'avoir été adaptée ! Les acteurs, aussi bons soient-ils, ont un mal fou à se dépêtrer des dialogues littéraires au langage châtié et malgré tout le talent qui les habite, peinent à nous faire croire au naturel de leurs mots et des situations, poussées jusqu'à l'insupportable dans le ridicule.


Alors, bien sûr, c'était dans l'intention du réalisateur que de conserver un style théâtral par l'usage du jeu et de décors propres à la scène, afin de déstabiliser le spectateur et lui faire ressentir le trouble émotionnel des personnages, mais si le concept peut paraître intéressant, le résultat est loin d'atteindre les espérances d'une présentation sur papier. Dans quelle mesure un film peut-il être personnel au point d'en devenir inaccessible ? Je ne suis pas en faveur d'un cinéma commercial (loin de là) qui privilégierait les attentes d'un soi-disant grand public, mais lorsqu'on réalise une œuvre cinématographique, aussi artistique que puisse être la démarche, n'est-elle pas destinée à un public ? Est-ce qu'en cinéma, on peut rester aussi égoïste dans l'écriture d'une œuvre qu'on pourrait l'être dans une autre discipline ? Et si même c'était le cas, le minimum ne serait-il pas d'au moins le faire un peu correctement ?!
Entre la mise en lumière des décors aussi naturels que la décoloration des protagonistes et le montage de scènes surjouées, on ne sait que choisir ! Peut-être les choix musicaux, énormes et lourds, ruinant les séquences, l'une après l'autre, transformant notamment cette scène de douche au vestiaire en vulgaire et pathétique matage de culs quand elle devrait signifier le paroxysme du trouble ressenti par Paul, le personnage principal. Grégori Baquet a bien du mal avec son Paul, et seul Jocelyn Quivrin réussit plus ou moins à s'en sortir avec naturel. Une distribution de jeunes acteurs/trices au talent indéniable que l'on se doit de saluer, vu le caractère périlleux de l'exercice !
Un film à oublier, mais des comédiens à suivre.


L’avis de Oli :
Trois colocataires sur le campus d’une grande école de commerce, dont deux ont une copine. Des considérations humanistes ou financières sur le monde du travail, des pulsions homosexuelles naissantes, un petit jeu au sein d’un couple sur qui séduira un tiers. Et en toile de fond, une tentative de réflexion sur les sentiments humains, prétention audacieuse de la part du scénariste.
Tiré de la pièce éponyme, ce film a essayé d’en garder le style théâtral, avec le jeu de langue presque racinien (« Andromaque, que ne me prêtes-tu pas ton polycopié de finance sur les swaps ? »). Sous couvert de justification par le milieu huppé qui fréquente cette école, censé parler couramment XVIe. Mouaif, admettons. Seul le beur ouvrier (Salim Kechiouche) a un langage normal, tant mieux pour lui. Pour le reste, faut aimer les incohérences et les inaboutissements. Une certaine dénonciation des préjugés en matière sentimentalo-sexuelle contrebalancée par un discours caricatural sur les grandes écoles. On n’est sûr que d’une chose : le scénariste n’y a jamais mis les pieds. Et sinon, comme écrivait ma prof de philo quand je présentais une copie insuffisante : « des pistes intéressantes qu’il faut davantage creuser ».
N’y aller que pour les sexes masculins visibles, le reste n’a pas grand intérêt.


L’avis de Zvezdo :
Ce film est une soupe peu homogène de choses ratées et réussies...
Pour ceux qui l'ignoreraient, c'est l'adaptation d'une des pièces les plus personnelles de Jean-Marie Besset. (Je vous recommande sa très jolie interview ; il dit drôlement que Les Lettres sont suspectes (...) moins que des cours de danse, mais plus que des leçons de piano et ne sent pas très en accord avec la vision bisexuelle du désir que véhicule le film – ouf!!!!!)
J'ai vu avec enthousiasme tout le théâtre de Besset depuis Ce qui arrive et qu'on attend que nous étions allés voir en meute à Montparnasse en 1993; et j'ai vu Grande école au théâtre 14, sans doute au moment de sa création. J'ai lu depuis que Guillaume Canet et Romain Duris ont joué le rôle ; je n'en ai pas le moindre souvenir, ils devaient être beaucoup plus jeunes, et totalement inconnus. En tous cas, j'ai le souvenir que c'était formidablement bien joué, ce qui n'est pas le cas dans le film.
J'y vois deux défauts principaux (au film) : 1) trop de maïzena, 2) des acteurs trop fadasses, pas vraiment crédibles.
Trop de maïzena, trop de sauce, trop de kitsch. Dès que le réalisateur ne sait plus quoi faire, on a droit à des effets ridicules (effets de miroirs, etc. La seule chose amusante dans ce registre, ce sont les gambettes de nageurs vus à l'envers; en reflet dans l'eau :-). Sur le plan de la musique, c'est une compile de tubes classiques mal assortis (Bizet, Puccini), sans que soit assumée la moindre ironie. La scène où le héros dissimule mal son trouble dans les vestiaires de la piscine face à l'objet de son désir dure des plombes... et c'est filmé comme un mauvais clip, pas de trouble, rien, que de l'eau qui coule.
Les filles sont fadasses, modèle Star’ac. Le héros (Grégori Baquet) n'est pas mauvais, mais, je vais être horrible, il a au moins 2 défauts : 1) il n'a pas l'âge du personnage et çà se voit, 2) il se teint les cheveux et ça se voit aussi.
C'est dommage, parce que le sujet me touche : le passage de la province à Paris, la vaine attirance pour un garçon hétéro. Les scènes avec Salim Kechiouche, le jeune beur, sont très bien, on croit au personnage, à l'enthousiasme et la rage mêlées.
Je pense que les pièces de Besset sont plus intéressantes qu'une simple description sociologique ; c'est du bon théâtre, qui supporte bien de bons acteurs. Je crois, j'espère qu'il n'y a pas besoin d'avoir fait une école de commerce ni prépa à Ginette pour les apprécier (je n'ai fait ni l'un ni l'autre, je tiens à le préciser...)
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