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URGENT : Gays, militants et résistants !

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Communiqué Les "Oublié(e)s" de la Mémoire - 11/5/2010

 

Le 25 novembre 2005 disparaissait Pierre Seel, Français déporté en raison de son homosexualité. Il fut le seul à s’exprimer publiquement sur son vécu et lutta pour la reconnaissance de la déportation des homosexuels.

Le 23 février 2008, la municipalité de Toulouse et Les "Oublié(e)s" de la Mémoire, soutenus par le tissu associatif L.G.B.T. (lesbiennes, gaies, bi et trans) local, procèdent à l’inauguration d’une rue "Pierre-Seel" dans sa ville d’adoption.

Le 25 novembre 2008, Jean-Marie Bockel, Secrétaire d’État et Maire de Mulhouse, répond favorablement à notre souhait de voir créer dans sa ville un lieu mémoriel consacré à Pierre Seel. En effet, c’est à Mulhouse que Pierre Seel grandit et que sa vie bascula lorsqu’il fut convoqué par la Gestapo le 3 mai 1941, prélude à son emprisonnement puis son internement au camp de Schirmeck-Vorbrück six mois durant.

De concert avec les associations locales Autre Regard, David & Jonathan et Aides, notre association a travaillé avec l’équipe municipale, pour qu’une plaque commémorative voit le jour à Mulhouse. Cette plaque est placée aujourd’hui en façade du théâtre municipal, côté square Steinbach, et honore non seulement Pierre Seel mais aussi les autres Mulhousiens anonymes, arrêtés et déportés pour motif d’homosexualité.

Presque cinq ans après la disparition de Pierre Seel, réalisent ainsi une autre première nationale en obtenant la reconnaissance publique d’autres déportés pour motif d’homosexualité et en inscrivant celle-ci dans le patrimoine mémoriel français.

Depuis 2006, nous travaillons également avec les Institutions, les Déportés et leurs associations, pour l’apposition d’une plaque commémorant l’ensemble des internés et déportés pour motif d’homosexualité sur le site de l’ancien camp de concentration de Natzweiler-Struthof, aujourd’hui Nécropole Nationale.

Philippe Couillet,
Président national Les "Oublié(e)s" de la Mémoire


Le programme autour de l’inauguration

 

Samedi 15 mai 2010

- 14 heures 30 Séance publique et gratuite du film "Paragraphe 175" au Cinéma ’Le Palace’ Réservation recommandée. Contact : 06.17.14.65.04 - odlm68@yahoo.fr

- 17 heures Inauguration de la plaque commémorative au Théâtre municipal suivie d’un vin d’honneur Salle des Colonnes (Hôtel de Ville)

Séance de dédicace de la biographie de Rudolf Brazda, dernier survivant connu des "Triangles Roses", en sa présence.

- 20 heures 30 Concert donné au Temple Saint-Étienne par le chœur ’Pélicanto’ (Strasbourg).

Dimanche 16 mai 2010

- 14 heures - rendez-vous à la fontaine, rue du Sauvage Promenade dans le centre de Mulhouse, sur les pas de Pierre Seel.

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Communiqué de presse du vendredi 7 mai 2010 :

 

Pour la deuxième année, une opération nationale de lutte contre l’homophobie a été lancée par la Ligue de Football Professionnel avec le soutien du Ministère des Sports, auprès des clubs de Ligue 1 et de Ligue 2, lors de la 37ème journée de championnat de France le 7 et 8 mai 2010

 

Il a été proposé aux présidents des clubs professionnels de :

— signer la Charte conte l'homophobie,

— passer le clip vidéo, co-financé par la Ligue, sur les écrans de leur stade, ainsi que sur leur site internet,

— présenter la journée mondiale contre l'homophobie avant le match par le speaker,

— enfin, faire une photo d'avant match avec les joueurs des deux équipes, devant une banderole, « Carton rouge à l'homophobie ».

 

 

De cet appel, seul un club de Ligue 1 a répondu présent : Montpellier et un club de Ligue 2 : Le Havre.


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Nous devons souligner la surprise qui a été la nôtre lorsque nous avons appris que le président de Montpellier, Louis Nicollin, avait décidé de passer le clip vidéo contre l'homophobie dès ce samedi au stade de la Mosson. Louis Nicollin s'est également engagé à signer la Charte très prochainement, un engagement fort que nous saluons à sa juste valeur.

Nous sommes également très heureux de constater que Le Havre, le club formateur de notre parrain, Vikash Dhorassoo, s'engage à nos côtés.

 

Malgré ces avancées réelles, nous considérons que cette deuxième journée mondiale de lutte contre l'homophobie dans le football français est un échec.

 

Qu'attendent les autres clubs professionnels pour agir avec nous, de concert avec la Ligue ?

 

En janvier dernier un documentaire de Michel Royer diffusé sur Canal+, avait pour titre : Sports et Homosexualités, c'est quoi le problème ? La question reste manifestement d'actualité, malgré quelques progrès notables ici ou là (pour rappel les quatre clubs signataires : Paris Saint-Germain, Auxerre, Nice et Saint-Etienne).

 

Nous lançons donc un appel solennel aux 34 autres clubs de Ligue 1 et Ligue 2 pour qu'ils s'associent à ce combat.

 

Il n'est jamais trop tard !

 

Paris Foot Gay

Maison des Associations

BP 44 – 5, rue Perrée – 75003 Paris

Tel: 06.68.42.30.30

www.parisfootgay.com



Jean Le Bitoux :

Le guêpier des années Gai Pied  (2/2)


Jean Le Bitoux, né en 1948 à Bordeaux, est un journaliste français.

Issu du baby boom des années 50, Jean le Bitoux est une figure du militantisme homosexuel français. Fondateur du journal Gai pied en 1979, il n'a cessé depuis de lutter pour la reconnaissance et les droits des homosexuels en France.

C'est à Nice, au sein du mouvement homosexuel local, que Jean Le Bitoux fait ses premières armes de militant. Monté à Paris, il est candidat aux élections législatives de 1978, puis crée en 1979 le journal Gai Pied avec l'aide de quelques amis. Mis en minorité en 1983 pour des raisons économiques, il démissionne du journal avec la quasi-totalité des journalistes. Le journal continue sans lui et disparaitra en 1992, après 541 numéros.

Jean Le Bitoux s'investit également dans la lutte contre le sida, en participant à Aides dès 1985. Il fait partie d'une association qui se propose de créer à Paris un Centre d'archives gaies, avec le soutien de la Mairie de Paris. Très attaché à l'histoire et à ses oublis, il milite activement pour la reconnaissance de la déportation homosexuelle par les nazis au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Intellectuel et activiste, Jean Le Bitoux fut parfois vu comme un carrefour entre les médias et les intellectuels, philosophes ou écrivains, dont la pensée pouvait enrichir les revendications politiques du mouvement homosexuel.



Lire la première partie

 

Gai Pied va selon moi devenir alors médiocrement parisien, tout juste bon à faire rêver la province comme ceux qui n'osent pas ou ne peuvent pas avoir cette vie de rêve gay, visibles le jour et branchés la nuit. L'ennui s'installe. Les pages de mode succèdent aux confidences érotiques. Des reportages colonialistes nous parlent de garçons pas chers sous le soleil. Un quatre pages photo orne désormais les pages centrales. Des gays épanouis et si possible célèbres se font photographier dans leurs intérieurs parisiens. L'écrivain Jack Thieuloy nous explique que si on drague un mexicain, mieux vaut planquer son portefeuille. Le suivisme politique fait le reste. Désormais, des milliers de lecteurs n'achètent plus Gai Pied que le rythme hebdomadaire a de plus dérouté. Car il n'y avait pas, loin s'en faut, d'information hebdomadaire de l'homosexualité. À moins que cette décision soit celle de faire cracher quatre fois par mois les annonceurs comme les lecteurs. Un rythme insoutenable. Finalement, on n'achète Gai Pied que de temps en temps, environ une semaine sur trois. Cela dépend aussi de la couverture, et si elle n'est pas sexy ou titre sur le sida, les ventes chutent. Gai Pied est dans le piège qu'il s'est construit. Le guêpier que j'avais inventé avec Michel Foucault se refermait sur lui-même.GLB

De son côté, l'équipe sortante tentera de lancer en 1984, dès l'année suivante, un mensuel sur l'identité masculine dans l'axe des réflexions d'Elisabeth Badinter qui écrira un ouvrage fondamental quelques années plus tard intitulé « XY » Avec mon ami Pierre de Ségovia, j'avais par ailleurs suivi aux Hautes Etudes des réflexions sur ce sujet et écrit un essai que nous avions soumis à Michel Foucault pour une préface, mais c'était quelques mois avant sa disparition. Il s'agissait pour nous, comme pour la phrase qui servait d'exergue à Gai Pied, d’« échapper au guêpier des ghettos ». Travailler par exemple, et non plus seulement au sein d'un média gay, à la question de notre genre davantage qu'à celle de notre spécificité érotique. Malgré ses apparences, ce projet était profondément féministe. Le titre de ce mensuel en kiosque s'intitulait Profils. Il parut avec des articles de Jean Baudrillard, Nicolas Bréhal, Dominique Fernandez, Yves Navarre, Juan Pineiro ou Claude Olievenstein. On y retrouve également les premières contributions de jeunes journalistes comme Christine Bravo ou Christophe Martet. Philippe Brooks avait de son côté retrouvé la dernière interview de Roland Barthes, que nous avons publié.


L'échec de Profils fut patent, qui ne tînt que deux numéros et qui me convoqua devant les tribunaux avec 100 000 euros de dettes potentiellement imputables sur mes biens personnels. En fait, il n'y avait pas de lectorat : les gais s'attachaient de plus en plus à leur fraîche liberté identitaire, et les hétérosexuels n'avaient toujours pas digéré les irruptions sociales du féminisme et de l'homosexualité masculine.

En outre, aucun soutien médiatique ne parla de cette tentative de presse. Les journaux gays ne dirent pas un mot au sujet de cette aventure de presse, sauf évidemment quand le titre fut décédé, pour étrangement regretter qu'une parole ainsi disparaisse. J'avais pour ma part annoncé en 1982 le lancement de Samouraï dans Gai Pied malgré de virulentes réticences de l'équipe de direction : un simple respect d'information, quand bien même cela ferait de la publicité pour un concurrent. La presse homosexuelle utilisa le même procédé d'étouffement quand je lançai ensuite Mec Magazine en 1988 ou la revue culturelle h en 1996, un trimestriel qui existera deux ans et qui est davantage cité dans les ouvrages de réflexion aujourd'hui qu'hier dans les magazines gais d'alors. Aujourd'hui la presse masculine en kiosque, en regard de Profils il y a presque vingt ans, se porte bien. Nous avions eu raison trop tôt, et cela se paye toujours très cher.



Dans l'éditorial de Gai pied au cul, ce journal pirate rédigé par les démissionnaires de Gai Pied et notamment diffusé au sein de l'UEH de 1983, j'avais pronostiqué que le Gai Pied avait désormais son sida. Il survivra toutefois durant presque dix ans, mais sous perfusion financière du minitel, principalement le 3615 GPH, un rendez-vous lucratif complété par Gai Pied voyages, par Gai Pied boutique, ou par des ventes d'albums photographiques à l'échelle européenne. Gai Pied n'était plus qu'une grande surface de consommation, aux rayons fournis, aux antipodes des textes fondateurs du mouvement homosexuel. Pour autant, la concurrence était là, qui menaçait. L'allié d'hier, David Girard, s'était à son tour lancé dans la presse homosexuelle gratuite puis en kiosque, avec pas moins d'une demi-douzaine de titres. La direction de Gai Pied se lança alors dans la diffusion dans tous les lieux gais d'un gratuit, Paris Capitale. Ce sera un gouffre financier, comme pour de nombreuses autres aventures de la SARL éditrice de Gai Pied, les Editions du Triangle Rose. Son lectorat, pour un titre toujours leader sur le marché entre 1985 et 1990, se fera contradictoirement de plus en plus restreint. Il est vrai qu'issus d'une première scission de Gai Pied en 1981, Jacky Fougeray, René de Ceccaty, Gilles Barbedette et leur équipe, en lançant Samouraï puis Illico, avaient déjà écorné le monopole de Gai Pied en kiosque.



À partir de 1984, l'équipe restante de Gai Pied rappelle volontiers dans ses colonnes son glorieux passé, mais la censure s'était installée. On évite de citer le nom de quelques fondateurs ou démissionnaires. Pour les dix ans de Gai Pied paraît en 1989 un numéro spécial qui évoque sur des dizaines de pages l'histoire incroyable de ce journal. Le lisant, je réalisai que j'avais disparu, que je n'avais jamais existé. Une protestation de Daniel Defert, parue quelques numéros plus tard, s'étonnera dans le courrier des lecteurs que la direction de Gai Pied ose gommer ceux qui ne leur plaisent pas ou plus en pratiquant le gommage de l'histoire comme les staliniens retouchaient leur photos pour faire disparaître les opposants victimes de leurs purges.

Mais le pire n'était pas encore arrivé. Ma disparition de la mémoire journalistique avait amplifié la rumeur de mon décès par le sida dont certains me savaient atteint. Ruiné et isolé, je ne fréquentais alors plus les lieux gais où se construisent les rumeurs, où se font et se défont les réputations et les jugements à l'emporte pièce. Poussant parfois la porte d'un bar, j'apprenais que l'on était bien content de me voir, m'ayant cru emporté depuis longtemps par l'épidémie. On n'avait pas attendu que je sois mort pour m'enterrer. Parfois, quand d'autres se présentaient à l'entrée de Gai Pied rue Sedaine, des étudiants, des journalistes ou certains chercheurs étrangers qui souhaitaient me rencontrer apprenaient également que je n'étais plus de ce monde.

La protestation de Daniel Defert, fondateur de l'association Aides, ne changea rien à cette détestable attitude, aux antipodes de tout respect des êtres et de l'histoire. Trois ans plus tard, un best off des plus importants articles de Gai Pied fut édité. Si mes entretiens avec Jean-Paul Sartre ou Michel Foucault figuraient en bonne place, il avait été décidé que je ne devais pas être au courant de cette parution. J'ai souvenir d'avoir perturbé le cocktail de lancement de cet ouvrage au Cirque d'hiver. On finit par m'offrir deux numéros du best Gai Pied avant que je ne sois expulsé par le service d'ordre, mon ami Emeric tentant de s'interposer à toute brutalité supplémentaire.

Je me suis depuis beaucoup interrogé sur la haine, la négation de l'autre et le mépris de l'histoire. Cela a sans doute enrichi mes écritures, dans ces années-là, sur la question de la déportation. Des années plus tard, au début des années 90, quand je rejoignis à nouveau le mouvement homosexuel pour la Gay Pride ou pour le lancement du Centre Gay et Lesbien de Paris, Gai Pied Hebdo était toujours en kiosque, qui ironisa cruellement chaque semaine sur ces réalisations associatives et collectives, attisant les rivalités entre les associations. Parfois le journaliste de Gai Pied restait à la porte de nos discussions tant nous savions le sort réservé à nos initiatives de la part d'un journal qui était pourtant directement issu de la dynamique du mouvement homosexuel.

L'avant-dernier numéro de Gai Pied se vendit moins bien que le premier numéro, treize ans plus tôt. Il était temps de fermer boutique, ce qui fut fait en octobre 1992, au 541ème numéro. La pompe financière du minitel n'avait pas cessé d'éponger les dettes et n'en pouvait plus. Ce n'était plus un journal, c'était un média assisté par des ressources indirectes. Le rapport au lecteur était falsifié d'autant. Une dernière formule avait bien été lancée, Eric Lamien ayant eu mandat d'inventer un nouvel axe journalistique, beaucoup plus militant, avec un pliage qui rappelait les premiers numéros. Il s'y épuisa car les militants ne revinrent pas et les derniers lecteurs n'y comprirent plus rien. L'équipe se laissa licencier en obtenant de prendre la parole dans les derniers numéros, chacun racontant son histoire avec Gai Pied. Ce ton émotionnel empêcha sans doute une occupation des locaux ou des procès sanglants comme lors de notre scission. Après quelques dernières tentatives de presse hasardeuses comme Projet X ou Café et après la vente de son réseau minitel, l'empire Gai Pied finit par être liquidé. Reste le débat sur les archives de ce journal, historiquement précieuses même si elles ne fonctionnent plus depuis dix ans. Elles sont actuellement en négociation pour le projet du CADHP, le Centre d'Archives et de Documentation Homosexuelles de Paris, qui devrait ouvrir d'ici deux ans dans notre capitale (en 2002, Ndlr).

De plus, quittant en 1983 la dynamique politique et associative pour une stricte exploitation du créneau gay, Gai Pied ne sut pas très bien quoi faire de sa gestion indirecte de certains rendez-vous de cette génération et à la dérive depuis la fin du CUARH. Un temps, Gai Pied les assuma, ce qui le relia absurdement à son histoire ancienne le bal du 14 juillet sur les quais de la Seine, le guide Gai Pied, le service Gai Pied emploi, le salon des associations gaies et lesbiennes ou un soutien logistique annuel à l'élaboration de la marche homosexuelle.



Plusieurs questions perdurent concernant les « Années Gai Pied » comme on dit parfois. La première d'entre elles concerne le sida. Aurions-nous démissionné si nous avions réalisé l'ampleur de cette épidémie ? En 1983, le virus venait tout juste d'être identifié par l'équipe du professeur Luc Montagnier et les voies de la contamination venaient à peine d'être définies, et le test n'existait pas. L'AZT puis les trithérapies étaient encore très loin. Nos amis n'étaient pas encore décédés de façon violente et rapide comme ce sera le cas jusqu'à la fin des années 80. De plus, le débat qui nous avait opposé était un débat politique.

Ce n'était pas un débat de santé publique ou communautaire, comme on a pu le lire par erreur. Nous avions publié dès les premiers numéros de Gai Pied de nombreux dossiers médicaux, mais ils étaient plutôt prophylactiques, autour des MST. D'autres articles étaient axés sur l'histoire de la répression médicale ou sur le coup de main habituel que les médecins et les sexologues fournissaient depuis des décennies aux familles et à l'ordre moral. Concernant ces années, on évoque souvent les écritures hasardeuses du président de l'AMG, l'Association des Médecins Gais, dans Gai Pied. On parle moins de l'interview que j'avais alors réalisé, celui d'un malade du sida, le premier dans la presse française, dès juillet 1982. Les médecins qui écrivaient dans le journal avaient tenté de me persuader de ne pas faire cette rencontre, qui eut lieu chez lui, rue de Clignancourt. Il décédera rapidement. Bien plus tard, après quelques propos irresponsables de Guy Hocquenghem dans Gai Pied, une chronique du quotidien du sida, animée par Franck Arnal et Pierre Kneip sera un véritable soutien pour les personnes atteintes. Nous, équipe sortante, n'avons mesuré que plus tard l'ampleur de la catastrophe. Mais nous n'étions plus à Gai Pied. Et nous avons unanimement regretté que ce journal emblématique de par son lien atypique avec ses lecteurs ne choisisse pas d'être un vecteur convainquant pour être au centre d'une vigoureuse incitation à la prévention contre le sida.



Quelques mois après cette démission collective, les contacts entre ceux qui restaient à Gai Pied et l'association Aides, qui venait de se fonder en 1984, seront catastrophiques. Pour ma part, je m'étais investi comme volontaire à Aides dès 1985, chargé avec Frédéric Edelmann et Jean-Florian Mettetal de l'information dans les bars gays du Marais. En 1985 également, deux ans après notre démission de Gai Pied, nous vînmes à l'Université d'été de Marseille, avec Daniel Defert, où Gai Pied était absent, expliquer ce que nous commencions à savoir et à comprendre du sida, non sans rencontrer de véritables résistances auprès de certains militants.

 

Plus tard, avec les associations gaies et lesbiennes de Paris, nous pûmes reprendre pied dans une Gay Pride dévoyée par d'uniques slogans publicitaires. Gai Pied n'appelait même plus à participer à la marche. Je fus élu démocratiquement en 1988, avec Catherine Marjollet et Dominique Touillet, au bureau d'une Gay Pride parisienne qui deviendra ensuite nationale et régionale, et qui connait aujourd'hui le succès que l'on sait. L'année suivante, en 1989, pour la première fois, Aides défilera dans la marche ainsi qu'Act-Up, qui venait de se fonder. Le dialogue entre le mouvement homosexuel et celui de lutte contre le sida put ainsi reprendre. Il durera sept ans, avant de se briser à nouveau sur l'opération coup de boule d'Act Up Paris au Sidaction de 1996, qui ruina pour longtemps les associations de lutte contre le sida.


Que conclure après ce bref exposé sur l'histoire de Gai Pied, le premier que je fais ainsi devant vous, dix ans après sa disparition et presque vingt après ma démission ? (en 2002, Ndlr) Dire qu'il est toujours difficile d'en parler. Peut-être aussi parce que Gai Pied est devenu un mythe. Parce que son lecteur a eu un rapport émotionnel, souvent identitaire avec ce journal. Pour moi, l'aventure de Gai Pied, en tout cas celle que j'ai vécu, entre 1979 et 1983 est une des fiertés de ma vie, dans le sens où ce journal a également donné du courage, des références historiques et culturelles ainsi que les moyens de se rencontrer à ses lecteurs, c'est-à-dire à toute une génération qui osa demander Gai Pied un jour à un kiosquier. Cette aventure était collective et faite d'indéniable courage, d'un côté comme de l'autre.

La scission de 1983 me marque toujours pour ses doses de trahison, de volonté d'oubli, de rejet et d'irrespect fondamental. Le Gai Pied tomba dans le guêpier du consumérisme, de la désinformation et du parisianisme. L'unique hebdomadaire homosexuel au monde des années 80 et 90, est donc mort pour avoir abandonné son projet social.


 

Gai Pied appartient à l'histoire d'une génération. Depuis, elle a sans doute vieilli. Mais je préfère me souvenir de cette génération de militants, d'étudiants ou de jeunes enseignants qui se sont investis dans Gai Pied. Car ce journal a de plus été dans le même temps une formidable école de journalisme. Ces journalistes, qui sont restés solidaires, sont aujourd'hui dans tous les médias radio, presse ou télévision importants de ce pays. Mais mon émotion est toujours là car autant les premières années de Gai Pied ont comblé toute une génération avec ce courage de se lancer dans l'écriture et d'autres d'oser l'acheter en kiosque, autant nous restons tristes de cette fin de Gai Pied.


 

Ce journal ne méritait pas cette fin. J'ai aimé vous le dire.

Merci.





Article publié avec l'amicale autorisation de © Jean Le Bitoux.

Un grand merci à France QRD et à Donald Suzzoni.
Première publication sur France QRD.
 



Jean Le Bitoux :

Le guêpier des années Gai Pied  (1/2)


Jean Le Bitoux, né en 1948 à Bordeaux, est un journaliste français.

Issu du baby boom des années 50, Jean le Bitoux est une figure du militantisme homosexuel français. Fondateur du journal Gai pied en 1979, il n'a cessé depuis de lutter pour la reconnaissance et les droits des homosexuels en France.

C'est à Nice, au sein du mouvement homosexuel local, que Jean Le Bitoux fait ses premières armes de militant. Monté à Paris, il est candidat aux élections législatives de 1978, puis crée en 1979 le journal Gai Pied avec l'aide de quelques amis. Mis en minorité en 1983 pour des raisons économiques, il démissionne du journal avec la quasi-totalité des journalistes. Le journal continue sans lui et disparaitra en 1992, après 541 numéros.

Jean Le Bitoux s'investit également dans la lutte contre le sida, en participant à Aides dès 1985. Il fait partie d'une association qui se propose de créer à Paris un Centre d'archives gaies, avec le soutien de la Mairie de Paris. Très attaché à l'histoire et à ses oublis, il milite activement pour la reconnaissance de la déportation homosexuelle par les nazis au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Intellectuel et activiste, Jean Le Bitoux fut parfois vu comme un carrefour entre les médias et les intellectuels, philosophes ou écrivains, dont la pensée pouvait enrichir les revendications politiques du mouvement homosexuel.


 

En avril 1979, lorsque sort dans 2000 kiosques de France le premier numéro du mensuel Gai Pied, la situation politique est extrêmement tendue. Un an plus tôt, les élections législatives ont été perdues par la gauche, contrairement à toutes les prévisions. Giscard a refusé sa grâce au dernier condamné à mort et les mouvements d'extrême gauche sont aussi virulents que victimes de sévères répressions.


Dans ce climat liberticide, de nombreux militants homosexuels décident pourtant de ne plus privilégier l'activisme militant et choisissent de s'investir dans le lancement d'un média de presse d'information, de liaison et de visibilité homosexuelles. Cette présence en kiosque est en effet un défi politique en soi, alors que toute la presse homosexuelle a été interdite l'année précédente et que Libération ou le Nouvel Observateur sont régulièrement traînés devant les tribunaux pour oser publier des petites annonces de rencontre. Ces militants qui vont devenir des journalistes, appartiennent aux GLH, les Groupes de Libération Homosexuels, et principalement au GLH Politique et Quotidien de Paris. De nombreux responsables des GLH dans les régions deviendront les correspondants de Gai Pied.

Quelques mois plus tôt, un camp d'été avait réuni les protagonistes de ce projet, au Maazel, en Provence. Nous avions annoncé ce camp d'été et de travail notamment par une petite annonce dans Libération. La police s'en était inquiétée, qui était venue nous rendre visite dans ce manoir du XVIIe siècle à moitié en ruines que son propriétaire, un ami d'Avignon, nous avait laissé pour l'été avant de le mettre en vente, définitivement haï par tout le pays. Nous y vécûmes à une trentaine, avec une fête tous les soirs. Une nuit, tous les pneus de nos voitures furent lacérés. Sur la place du village, un car de police nous observait ostensiblement à l'heure du pastis. Mais nous avions l'habitude, et nos réunions de travail, en journée, furent très fructueuses. Nous n'avions pas lieu d'être intimidés par une certaine hostilité locale, car ce n'était pas notre premier camp d'été. J'avais déjà chroniqué sur une page entière dans Libération celui de l'année précédente avec nos amis d'Amsterdam les Rooie Flikkers, un rassemblement qui avait également suscité quelques secousses telluriques en plein pays du Quercy.

Pour ce projet de journal, nous disposions du soutien de nombreux intellectuels. Ils avaient été très attentifs à nos années précédentes d'agitation politique, notamment en janvier 1978 lors du festival de films de la Pagode, lorsque nous avons été à la fois victimes d'une interdiction gouvernementale, de l'attaque d'un commando d'extrême-droite et de deux manifestations de rue réprimées par la police, l'une aux Tuileries et l'autre en pleine nuit rue Sainte-Anne.

Guy Hocquenghem et moi-même étions alors candidats à Paris et en campagne pour les élections législatives de mars 1978, avec également Alain Secoué et François Graille. L'attaque du deuxième festival de films gais et lesbiens de Paris, après celui de Frédéric Mitterrand dans le 14e arrondissement, n'était pas anodine car elle nous visait : après avoir frappé les spectateurs et emporté la caisse, les néonazis nous avaient en effet physiquement menacés dans un communiqué de presse. Pendant la campagne nous ne dormions plus chez nous.

Nous demandions principalement l'abrogation de l'article 331 du maréchal Pétain. Notre but : que les médias relaient notre revendication. De nombreux articles de presse concernant nos candidatures nous sauvèrent la mise tandis que nous n'espérions rien du résultat des urnes, n'ayant même pas de bulletins de vote. De son côté, le sénateur Caillavet nous entendit le premier, qui déposa pendant cette campagne électorale une proposition d'abrogation de cette loi vichyste. Les intellectuel/les nous avaient alors soutenu, telle cette pétition concernant nos candidatures homosexuelles, signée notamment par Xavière Gauthier, Arrabal, Jean-Louis Bory, Yves Navarre, Copi, Gilles et Fanny Deleuze, Félix Guattari, René Schérer, Maurice Nadeau, Madeleine Renaud, Christiane Rochefort, Simone de Beauvoir, André Glucksmann, Marcel Carné ou Marguerite Duras. Ils continuèrent donc à nous soutenir.

Au cours d'un de nos dîners d'amitié, je parlai de ce projet de presse au philosophe Michel Foucault. Je maintiens qu'il me proposa lui-même le titre de Gai Pied pour ce mensuel. Il écrivit dans le premier numéro un article sur les homosexuels et le suicide. En outre, avant Gai Pied, pendant Gai Pied et après, il répondit toujours positivement à toutes mes demandes d'entretien. Dans le numéro deux et le numéro trois, un grand entretien avec Jean-Paul Aron interdira également à la censure de frapper. Puis Tony Duvert proposera des mots croisés et Yves Navarre une chronique culinaire. Pour fêter dignement la première année de Gai Pied, Jean-Paul Sartre acceptera un long entretien qui permettra à notre journal d'acquérir une audience conséquente de qualité et de référence au delà de nos réseaux.

Ce "paratonnerre" de soutien intellectuel et culturel de Gai Pied, ainsi solidement mis en place, permit pendant des années, malgré des photos, des récits, des petites annonces ou des opinions qui décoiffaient, à ce journal sulfureux auquel s'identifiait toute une génération, de ne pas être inquiété par la justice. J'ai souvenir qu'un jour, au hasard d'un entretien pour le Gai Pied, le ministre de l'Intérieur Gaston Deferre nous avait fait gentiment savoir en off qu'il nous faudrait des fois relire certaines petites annonces qui risquaient tomber sous le coup de la loi. Et quand, presque dix ans plus tard, un de ses successeurs à l'Intérieur crut avoir enfin la peau de Gai Pied, Charles Pasqua fit une lourde erreur, le ministre de la culture de son propre gouvernement, François Léotard, se désolidarisant de cette censure de presse moraliste d'un autre âge. L'affaire fut enterrée, au dépit de tous les homophobes de la classe politique.

L'équipe fondatrice de Gai Pied avait par ailleurs choisi de faire une coupure entre journalisme et militantisme. Cela ne fut pas toujours bien compris. J'avais pour ma part, au sortir des éprouvantes élections législatives de 1978, démissionné du GLH et signé un témoignage dans Libération au titre d'inspiration situationniste : "De la misère relationnelle en milieu mili-tante". Une fois ce projet de presse ficelé, nous sommes allés dans l'automne 1978 le présenter à une réunion nationale homosexuelle non loin de Lyon où se retrouvaient les GLH des régions et les CHA, le Comités Homosexuels d'Arrondissement de Paris, qui avaient succédé au dernier GLH de Paris, le GLH PQ. Nous avons déclaré que, ce projet étant également professionnel, nous souhaitions dégager du salariat pour consolider cette aventure. L'idée que notre engagement social ose s'appuyer sur du salariat offusqua de nombreux militants homosexuels. La sortie des années soixante-dix était décidément difficile. C'est pourquoi, dans l'été 1979, tandis que la première université d'été de Marseille s'ouvrait et que Gai Pied était déjà en kiosque, Jacky Fougeray, rédacteur en chef de Gai Pied et moi-même décidâmes de plutôt nous rendre à Francfort pour le rassemblement du mouvement homosexuel allemand, dans un campus universitaire avec Gay Pride dans la ville.



Le CUARH fut fondé à cette première UEH de Marseille. Entre les anciens militants de Gai Pied et ceux du CUARH s'exprimera souvent un rapport aigre-doux avec de nombreux droits de réponse. Le CUARH, hormis faire abroger l'article 331, ce qu'il réussit par des manifestations incessantes, décidera de lancer son propre mensuel, Homophonies, sans doute insatisfait de la place que lui laissait le Gai Pied dans ses colonnes. Refusant longtemps de publier des annonces de rencontre ou des nus masculins qui agressaient les lesbiennes du journal du CUARH, Homophonies, alors qu'il abordait vaillamment comme nous la délicate question de la pédophilie, critiquera également l'insuffisante mixité de Gai Pied, ses photos qui exhibaient des sexes masculins et ses petites annonces par trop sexistes, sans vouloir comprendre le défi ainsi porté face à la censure.

Toutefois, tout le temps où je dirigeai Gai Pied Hebdo, une chronique lesbienne fut régulièrement publiée, libre d'expression, et même si nous savions que la proportion de lesbiennes qui lisait notre hebdomadaire était extrêmement minoritaire, de l'ordre de 1 à 2%. Plus largement, j'ajouterai qu'en quatre ans de direction de Gai Pied, je ne subis jamais un procès pour falsification de propos ou pour obstruction à la liberté d'expression. Je m'en honore alors que plusieurs centaines de personnes, connus ou inconnus, publièrent leurs écrits dans Gai Pied entre 1979 et 1983.

Le contenu de Gai Pied se partageait entre l'information internationale, politique et des régions, la critique culturelle, le soutien de nombreux artistes, les petites annonces et le courrier des lecteurs que je suivis personnellement quatre ans durant, échangeant notamment avec le malaise grave de certains d'entre eux. Car pour moi, Gai Pied était d'abord le journal de ses lecteurs. Tous les ans, des rencontres avaient lieu dans les principales villes de France, et je sautais souvent dans des trains pour rencontrer ceux qui ne vivaient pas les facilités de la vie parisienne, pour entendre aussi les critiques de lecteurs qui le trouvaient trop ou pas assez militant.

Question finances, le démarrage de Gai Pied avait bénéficié pour son lancement de traites solidaires concernant l'imprimerie de la Ligue Communiste Révolutionnaire. Il avait également bénéficié de plus d'un an d'hébergement dans mon appartement du 188 Boulevard Voltaire, temps au bout duquel nous pûmes louer une minuscule boutique au 64 de la rue de la Folie Méricourt avant d'investir, dans les années Mitterrand, le local plus confortable du 45 de la rue Sedaine, toujours dans le onzième arrondissement de Paris. Quant au premier salarié, ce fut le standardiste qui cumulait également les fonctions d'accueil, d'information et d'orientation. Le succès sera au rendez-vous, révélant également des vocations, confirmant des intelligences et des carrières journalistiques. Les ventes mensuelles s'élevèrent à plus de 30.000 exemplaires au printemps 1982.

 

Un insidieux débat, celui de l'argent, fera basculer l'histoire de ce journal. D'abord très réticent, je finis par admettre qu'un passage à l'hebdo de ce mensuel ne pouvait qu'accroître sa force d'impact au niveau politique et médiatique. Mais le rythme publicitaire s'emballa. On me signala amicalement qu'une publicité valait des milliers de lecteurs potentiels. Il fallait choisir entre un lectorat désormais captif mais pas exponentiel et les ressources faramineuses d'un champ publicitaire qui s'ouvrait. Pourtant, et malgré mes efforts notamment auprès des éditeurs, cette utopie marqua rapidement le pas. La manne publicitaire se limita donc à suivre l'expansion économique du milieu gay dont nous avions ouvert et soutenu bon nombre de nouveaux espaces de liberté en tant que militants, quelques années auparavant. A la direction, m'inquiétant d'une médiocrité qui nous menaçait, un responsable du journal me répliqua : "Après tout, les homosexuels n'ont que la presse qu'ils méritent!". Les lecteurs étaient injuriés, les journalistes étaient humiliés.


Avec le passage à l'hebdo, à l'automne 1982, la publicité gay avait tout envahi : la couverture, des publi-reportages qui copiaient notre maquette, les pages de consommation qui renvoyaient à la publicité, des fausses petites annonces, etc. David Girard y faisait paraître à prix d'or ou par complicité des encarts ("David, 20 ans, masseur") qui ressemblaient fort à de la prostitution. Nous n'avons jamais retrouvé son diplôme de kinésithérapeute au tribunal de commerce. Du coup, de nombreux prostitués demandaient à leur tour à être publiés. En tant que gérant et directeur de la publication, je risquais des peines de prison ferme pour proxénétisme. Je demandais donc la démission du responsable de la publicité, que j'obtins. Mais je n'eus jamais accès aux stratégies des négociations publicitaires. C'est alors que je me posai la question de continuer à être responsable d'un bateau ivre.

L'on indiqua également à l'équipe journalistique qu'il fallait cesser de critiquer des établissements qui annonçaient dans le journal. Certains saunas et certaines boites de nuit, qui annonçaient grassement dans notre hebdomadaire, pratiquaient pourtant le racisme ou la discrimination de l'âge. Politiquement au sens large, ce n'était pas plus simple. La célèbre couverture de Mitterrand avec sa déclaration et l'interrogation sur sept ans de bonheur fut chèrement acquise en direction. Plus tard, lors des massacres de Sabra et Chatila, après une épique protestation, on nous permit de publier in extremis un article qui était resté longtemps bloqué à la direction alors que Le Monde publiait en une un célèbre reportage de Jean Genet sur cette tuerie et présent parmi ces cadavres.

Nous devions cesser d'être politiques. Notre passé militant n'était plus évoqué, même entre nous. Comme un passé honteux, alors que la modernité nous appelait. De plus le rythme hebdomadaire obligeait l'équipe journalistique à écrire pour quatre ou cinq numéros à l'avance. L'actualité n'avait plus de hiérarchie, de sens, de relief alors que le militantisme était en crise et que le sida n'allait pas tarder à faire ses ravages.

 

En juillet 1983, nous fûmes une trentaine à démissionner de Gai Pied et nous sommes venus nous en expliquer ici, devant l'université de Marseille. Nous avions imprimé en 24 heures un petit journal d'explication intitulé "Gai Pied au cul". Un vote en Assemblée Générale nous avait mis en minorité au terme de batailles frontales d'une rare violence psychique et verbale, assorties de menaces sociales. L'AG avait désavoué la majorité des journalistes. Je fus le seul à la direction à soutenir leur protestation et le seul salarié à démissionner avec eux. Les autres votèrent, notamment les administratifs et les investisseurs, arguant de la fragilité financière du journal contre notre projet de restaurer une éthique journalistique en péril dans cette historique aventure. Mais il était trop tard : Foucault, Fernandez, Aron ou Duvert avaient déjà cessé de collaborer.

Nous démissionnons aussi car nous pensons que nos lecteurs sont abusés chaque semaine. Parmi ceux et celles qui décident de quitter ce journal, il y a Françoise d'Eaubonne, Yves Navarre, Olivier Drouault, Dominique Robert, Yves Edel, Jean Georges, Antoine Perruchot, Angélique Kouroulis, Daniel Guérin. Il y a également la totalité des correspondants régionaux dont Yves Chatelier, Georges Andrieux, Pierre de Ségovia, ou internationaux comme Jordi Petit à Barcelone, Dennis Altmann à Sydney, Philippe Adam à Berlin ou Alain-Emmanuel Dreuilhe à New-York. L'affaire fit grand bruit : dans la presse française, on n'avait jamais vu une telle équipe, soit plus de trente personnes, claquer ainsi la porte, et un fondateur démissionner de son propre journal. Contrairement au procès contre Hersant qui venait d'avoir lieu concernant Le Figaro, notre équipe journalistique ne put faire valoir la clause de conscience. Le tribunal estima sans doute qu'il s'agissait là d'une querelle interne.

 

 
Article publié avec l'amicale autorisation de © Jean Le Bitoux.
Un grand merci à France QRD et à Donald Suzzoni.
Première publication sur France QRD.
 

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Jean Le Bitoux, fondateur de Gai Pied et grand militant homosexuel, est mort la nuit dernière, selon les informations de nos amis de Yagg.com. Il était né à Bordeaux en 1948. Monté à Paris, il fut candidat aux élections législatives de 1978. Jean Le Bitoux avait fondé le magazine Gai Pied en 1979. Il avait fait l'honneur de collaborer au blog Les Toiles Roses lors de notre mois spécial pour les 40 ans des émeutes de Stonewall. Nous en reparlerons plus longuement très vite pour lui rendre hommage. L'équipe de Les Toiles Roses, très triste, s'associe à ses proches, ses ami(e)s, ses lecteurs(trices) et pense que tout homosexuel(le) doit se sentir peiné(e) par cette perte... Car nous lui devons  toutes et tous beaucoup...

 

Suite au témoignage de Yoann Lemaire et à son combat contre l'homophobie dans le milieu du football (amateur et professionnel), le président Jean-Pierre Escalettes de la Fédération Française de Football vient de répondre à la lettre ouverte du Paris Foot Gay, relayée par le blog Les Toiles Roses, concernant l'attitude d'un joueur du FC Chooz et de l'inertie du comité et du président de ce club. Nous vous livrons cette réponse :

 

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Blogué par nos amis de Têtu : 

L'avion du président polonais s'écrase : l'homophobe Kaczynski est mort

Par Blaise Gauquelin samedi 10 avril 2010, à 11h11 | 358 vues

 

Lech Kaczynski, le président le plus ouvertement opposé aux droits des homosexuels en Europe, a péri ce matin, dans le crash de son avion en Russie.



Il y a des hasards sordides : Lech Kaczynski (photo) se rendait dans l'ouest de la Russie pour se recueillir sur les tombes de 22.000 officiers polonais, exécutés par la police de Staline lors de la seconde guerre mondiale. Le président polonais a péri, avec sa femme, sur les lieux mêmes du drame, dans l'épaisse forêt de Katyn, près de Smolensk, avec des dizaines de familles, venues pour participer à une cérémonie officielle, 70 ans après le drame.

L'émotion est très vive ce matin en Pologne, le dernier bilan faisant état de 132 mort dont plusieurs membres du gouvernement, des autorités militaires et bancaires du pays.
Parmi les victimes, Lech Kaczynski, catholique fervent, était connu des défenseurs des droits de l'homme pour être le dirigeant européen le plus fermement opposé à l'avancée des droits des homosexuels et des transsexuels en Europe. Opposé au traité de Lisbonne, il avait bloqué l'adoption par son pays de la Charte des droits fondamentaux en 2008 (lire notre article).


Loi homophobe et interdiction de gay prides

 
En 2007, avec son frère jumeau Jaroslaw, alors Premier ministre, il avait souhaité instaurer une loi interdisant «la propagande homosexuelle dans les écoles». Opposé à l'égalité entre couples homosexuels et hétérosexuels, il avait interdit, à deux reprises, des gay prides à Varsovie, lorsqu'il était encore maire de la capitale.

Lech Kaczynski avait été élu à la présidence de la Pologne en 2005 (lire notre article).

 

Photo AFP


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« Les Étoiles Roses [sic] : Sous des apparences nunuches, une subversion Rose plus dangereuse encore que la Rouge !

"De l'art de faire imploser une société " (selon eux, "de faire évoluer les mentalités" !)

On remarquera sur leur site un drapeau d'alliance avec les Juifs, et d'alliance avec les Musulmans.

Nous connaissons leur discours à ces gauchos qui iront nous considérer comme un exemple de la "haine de soi", sauf que "notre" identité nous ne la situons pas dans notre froc !

Nous ne sommes ni fier d'avoir eu la vie que nous avons eue, ni honteux, car nous avons beaucoup appris, même si ce fut au péril de notre vie, et de notre âme ! » Extrait de ce sympathique billet consacré à notre blog, notre équipe et nos lecteurs sur le blog de LE GOFF, Risposte Catholique.

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(Blogué hier soir par nos amis de Veryfriendly)

 

Vous avez élu les meilleurs blogs gays et lesbiens : voici les résultats !

Après une consultation de plusieurs mois, les internautes de Veryfriendly ont proposé des dizaines de sites pour élire le meilleur blog gay ou gay-friendly et le meilleur blog lesbien ou lesbo-friendly. Voici les résultats !

 

Meilleur blog gay ACTU :

LE BLOG GAGNANT EST :

http://tbiet.blogspot.com/ : L'homme est un concept, actu et sexy à 31 % des voix.

 

LE BLOG GAGNANT EST :

http://www.lestoilesroses.net/ : Les Toiles Roses est presque un site, rédigé par Daniel Hall et son équipe, traitant de toute l'actualité culturelle (ciné, télé, livres...) à 54 % des voix.

 

Meilleur blog gay SEXY :

LE BLOG GAGNANT EST :

http://www.bloggay.com/blogs/www.karim/: Photos sexy et rigolotes à 55 % des voix.

 

Meilleur blog gay PERSO :

LE BLOG GAGNANT EST :

http://blog.matoo.net/ : Un blog qui parle de tout, mais qui assume totalement son côté "blog de pédé" (sic), à 54 % des voix.

 

Meilleur blog lesbien ACTU :

LE BLOG GAGNANT EST :

http://lezstrasbourg.over-blog.com/ à 31 % des voix.

 

Meilleur blog lesbien CULTURE ET SOCIÉTÉ :

LE BLOG GAGNANT EST :

http://au-dela-du-gaydar.skyrock.com à 70 % des voix.

 

Meilleur blog lesbien PERSO :

LE BLOG GAGNANT EST :

http://cmouadelph.over-blog.com/ : La vie c'est comme une boite de chocolats, à 37 % des voix.

 

Toute l’équipe du blog Les Toiles Roses vous remercie de vos votes et se sent fière de travailler à faire évoluer les mentalités à vos côtés… MERCI.

© GayClic.com

Blogué par nos amis de GayClic.com :

Les organisateurs du Kiss-in annoncent que suite aux menaces proférées par des catholiques intégristes, le Kiss-in parisien, qui devait se dérouler dimanche 14 février à 14h sur le parvis de Notre-Dame, aura finalement lieu place Saint-Michel (devant la fontaine), la préfecture de police ayant « vivement conseillé d'annuler l'événement » pour des raisons de sécurité.
Voici le mail que nous a fait parvenir Arthur, l'un des organisateurs de l'événement, et qu'il nous semble important de publier dans son intégralité :


Le mouvement des kiss-in contre l'homophobie a été impulsé en juin 2009 en vue de faire accepter l'homosexualité au sein de la société, loin des clichés qui participent à un rejet parfois haineux et violent, à la peur, et à la honte de soi. Pendant cinq minutes, des gens viennent échanger des baisers avec leur partenaire afin d'interpeller les passants et de revendiquer le droit d'aimer sans se cacher. L'événement a lieu ponctuellement, de manière fraternelle et pacifique. Il se veut capable de rassembler les homosexuels dans leur diversité, ainsi que les bisexuels, les hétérosexuels, les transsexuels, au delà de toute divergence politique et religieuse. Le mouvement est né de plusieurs étudiants citoyens, et non pas d'un cadre associatif, et encore moins d'un prétendu lobby extrémiste homosexuel. Sans slogans et sans bannières, il ne s'agit pas d'une manifestation mais d'un happening sympathique et amical, qui ne se dresse pas contre une catégorie de la population mais CONTRE l'homophobie en général et POUR le respect de l'amour.
Le kiss-in du 14 février à Paris était initialement prévu sur le parvis de Notre-Dame (qui est, puisqu'il faut le préciser, un lieu PUBLIC), et n'avait pas pour vocation d'agresser, ni même de provoquer l'Église et les catholiques.
Toutefois, les menaces qui pèsent sur ce mouvement et leurs participants en disent long sur la prétendue bienveillance de nos détracteurs envers les personnes homosexuelles, et nous prouvent que le lieu, s'il n'a pas été choisi pour faire polémique, permet bel et bien d'interpeller l'Église catholique et l'ensemble des religions, et de pointer du doigt un malaise profond de notre société. Nous voulons avoir le choix de nous embrasser où nous le voulons, quelle que soit notre orientation sexuelle. Nous préférons croire que les menaces ne proviennent que d'une minorité de catholiques réactionnaires, et ne pas les amalgamer à l'ensemble des catholiques. Nous croyons fermement en la compatibilité entre foi et homosexualité.
Au delà de la polémique, ces groupes catholiques dits « traditionalistes » ont lancé sur différents sites et blogs des appels à la haine et à la violence à l'encontre des participants du kiss-in au pied de Notre-Dame. La préfecture de police nous a vivement conseillé d'annuler l'événement, prétextant qu'elle craignait des actes de « violence grave », et nous alertant sur la difficulté qu'elle aurait à assurer notre sécurité ce jour-là.
Deux solutions s'offraient alors à nous : nous obstiner – la sécurité des participants aurait été mise en péril
ou annuler l'événement, cédant de ce fait à la peur face aux menaces de violence. Mais ces catholiques « traditionalistes », s'ils peuvent faire reculer le gouvernement en matière de lutte contre la discrimination à l'école en demandant l'interdiction du court-métrage « Le Baiser de la lune », pourront-ils dire également : « nous avons empêché les homosexuels de s'embrasser dans les lieux publics » ? Cela est inacceptable.
Nous choisissons donc une troisième voie, et appelons tous les participants à se replier sur un autre lieu, voisin du premier : la place Saint-Michel. Ainsi, nous serons en vue de la cathédrale, sans donner à nos détracteurs l'opportunité de nous taxer de provocateurs.
Rendez-vous à 14h devant la fontaine Saint-Michel !


Arthur

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