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ET LES FILLES, ALORS ?





L'EXPLOSION DES MAMANS LESBIENNES

DANS LES SÉRIES TÉLÉVISÉES



Une chronique d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 


Queer as folk


Les américains restent à ce jour les précurseurs en matière de visibilité homosexuelle dans les séries télévisées. Et même si les lesbiennes ont mis plus longtemps à s’imposer, elles ont connu un véritable âge d’or avec la présence sur les écrans de Mélanie et Lindsey dans la série Queer As Folk, de Willow et Tara puis Kennedy dans Buffy contre les Vampires, de Kerry Weaver dans Urgences et des héroïnes de The L-Word.


http://www.afterellen.com/archive/ellen/TV/Photos/melanielindsaygus.jpg

Queer as folk

 

Malheureusement, une augmentation de la visibilité n’entraîne pas inévitablement une croissance intéressante des histoires relatives aux lesbiennes. À ce titre-là, les américains ont été les premiers à s’ennuyer de l’habituel coming out. Ils ont souhaité diversifier les trames et se sont alors engouffrés dans la voie toute tracée de l’homoparentalité.

Il faut reconnaître qu’en 1993 lorsque Meredith Baxter obtenait une nomination aux Emmy Awards pour son rôle dans Others Mothers, une histoire où un jeune garçon avait deux mères lesbiennes, le sujet était révolutionnaire et nouveau. À cette époque, la visibilité lesbienne en était encore à ses balbutiements et il était invraisemblable d’aborder la question de l’homoparentalité tant l’homosexualité posait déjà problème.

Et pourtant, à partir de cet instant, les lesbiennes désirant devenir mères se sont peu à peu multipliées sur le petit écran. NYPD Blue a ouvert la marche avec Abby et Kathy, ont suivi Melanie et Lindsay (Queer As Folk) puis Kerry et Sandy (Urgences) sans oublier Bette et Tina dans le récent The L-Word. Et encore, il ne s’agit que des séries, les téléfilms tels Deux mères pour un enfant, Les Liens du Cœur, Bobbie’s Girls… ont également abondé dans ce sens.

Il apparaît clair que lorsque les américains ont commencé à ne plus savoir quoi faire des lesbiennes, ils se sont précipités sur cette trame de l’homoparentalité avec délectation. Attention, je n’ai rien contre la représentation de cette question à la télévision bien que le parti pris soit, la plupart du temps, trop politiquement correct. Je n’ai rien non plus contre la maternité chez les lesbiennes. Je constate juste qu’on ennuie moins les hommes avec cette trame.


Urgences

 

Il semble qu’aujourd’hui les termes de "femmes" et de "mères" soient à nouveau extrêmement liées au point d’oublier que l’épanouissement personnel ne se réalise pas uniquement à la maison avec la famille et les enfants. En se focalisant sur cette question, les auteurs enlèvent une certaines légitimité aux homosexuelles qui ne semblent exister qu’à travers leur progéniture. N’est-ce pas cette idée que les femmes et les féministes ont combattu si violemment pendant des années ?

Je n’ai rien contre le fait que deux femmes, qui s’aiment et qui sont en couple depuis longtemps, songent à avoir un enfant (bien que Kerry et Sandy de la série Urgences aient brûlées les étapes me semble-t-il). Je n’ai rien non plus contre la question de l’insémination artificielle vécue par Bette et Tina et qui correspond à ce que beaucoup de lesbiennes vivent (même si ça réussit un petit peu trop vite). Et encore moins de réticences contre le fait qu’une mère se batte au tribunal pour que ses droits sur l’enfant qu’elle a élevé mais qui a été porté par sa partenaire soient reconnus comme dans Les Liens du Cœur. Mais il y a une limite. Une limite qui est sur le point d’être dépassée.


Bobbie's Girl


J’avoue que le fait qu’autant de lesbiennes soient mères de famille dans les fictions télévisées m’agace un peu. Mais ce qui m’agace le plus, c’est que les histoires sont toujours les mêmes et qu’on va finir par se lasser et ne plus supporter de se voir asséner ces questions d’homoparentalité, surtout les fervents défenseurs des valeurs chrétiennes (entre autre et les autres, bien évidemment). Si nous, lesbiennes, commençons à fatiguer… les homophobes, eux, vont finir par disjoncter.


The L-word

 

En plus, excusez-moi du peu, mais vous ne verrez pas de parents plus conventionnels et réactionnaires à la télévision que les couples de lesbiennes. Même le pasteur Camden et sa famille (7 à la Maison) sont plus ouverts et plus tolérants. Proches de la perfection, ces couples paraissent intouchables. Les deux principales intéressées sont systématiquement belles, intelligentes, proches sans trop l’être, ont réussi parce qu’elles ont une belle maison et un emploi dont on ne parle jamais et qui leur laisse beaucoup de temps libre. Elles ont tout pour être heureuses… il ne leur manque qu’un enfant.

Et quand bien même cette question de l’homoparentalité arrive à rendre l’homosexualité plus « visible » et « normale » en montrant des femmes qui se préoccupent plus de leur progéniture que de leurs propres vies, la saturation guette.


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Les Liens du cœur

 

Et les français, qui ont tout compris et ont toujours cinq ans de retard sur leurs homologues américains, viennent de trouver la question de l’homoparentalité géniale ! Si, si, si.

En janvier 2006, durant le premier épisode de la saison 6 d'Une Famille Formidable intitulé « Rien ne va plus », Nicolas Beaumont (Roméo Sarfati), le fils de Jacques (Bernard Le Coq) et Catherine (Anny Duperey), annonçait à ses parents et à tous les téléspectateurs qu’il était le géniteur de l’enfant que portait sa voisine et amie Laura, interprétée par Anne Malraux. Laura, lesbienne et en couple depuis quelques temps avec Natalia (Sandrine Rigaux).

Les parents Beaumont, après avoir appris la nouvelle, quittaient leur fils sous le choc et n’arrivaient pas à s’en remettre, surtout que le couple de Nicolas avec son ami Jean-Marc ne semblait pas aller très bien. Leur fils gay était simplement le géniteur de l’enfant de ses voisines lesbiennes ! Jusque-là, c’était relativement clair.

Malheureusement, tout se complique à la naissance de l’enfant. Laura, qui a l’impression que Natalia ne la comprend plus, se rapproche de Nicolas, heureux de jouer le père… qu’il n’est pas. Il tombe sous le charme de son enfant, qui n’est pas réellement le sien mais pas non plus celui de Natalia et finit par le kidnapper.


Une famille formidable (Laura et Natalia)

 

Après une fuite en Espagne, Nicolas retrouve finalement la raison et rend leur enfant à Laura et Natalia. Mais il a beaucoup de mal à se faire à l’idée qu’il n’a aucun droit sur son fils. Pas de quoi pavoiser, d’autant plus que la représentation de l’homoparentalité est très loin de me satisfaire. Et puis alors le Nicolas, depuis le temps qu’il joue les fils immatures, inconscients et irresponsables, il pourrait grandir un peu.

Le couple de lesbiennes est peu représenté. Elles apparaissent très gentilles dans ce premier épisode, heureuses de la grossesse et proches, puis leur relation se complique à la naissance. Et finalement, elles virent totalement folles, paranoïaques et agressives quand leur fils est kidnappé (ce que l’on peut comprendre en même temps). Rien de très reluisant en somme.


Une famille formidable (Laura, Nicolas et le petit Louis)

 

Je passe volontairement sur la question du téléfilm La Surprise d’Alain Tasma. Dans celui-ci, une femme de quarante ans interprétée par Mireille Perrier, divorcée et mère d’une adolescente succombe au charme d’une jeune brocanteuse, Claude, jouée par Rachida Brakni. Elle se retrouve obligée d’en parler à sa fille Justine (Chloé Coulloud) qui prend très mal la nouvelle. Rien à dire à part que les américains rendent les mères de famille, seules et nouvellement célibataires, lesbiennes depuis des années. Ils ont commencé avec la mère de Roseanne dans la série Roseanne en 1996, puis ont continué avec la mère de Steve dans Beverly Hills 90210 en 1999 et la mère d’Harrison dans Popular. Un schéma éculé où même si ces femmes ne tiennent pas le rôle principal de l’histoire, contrairement à La Surprise, elles découvrent leur homosexualité tardivement. Et puis, elles sont sympathiques et ont les aiment malgré tout, étant donné qu’elles sont les mamans de nos héros préférés. Steve n’ira-t-il pas jusqu’à frapper un crétin pour protéger la réputation de sa « maman », la seule femme qui l’ait toujours aimé ? Mais laissons cette question de côté pour nous intéresser à une autre représentation française d’homoparentalité.


Avec la série Diane Femme Flic, les auteurs de TF1 ont abordé brièvement et lamentablement cette question durant l’épisode « Bourreau de Travail ». Non, pas avec Bimbo (Vanessa Guedj) qui semble avoir oublié qu’elle a dit qu’elle était lesbienne dans l’épisode pilote. Non, avec une superbe commandant nommée Jessica Lotti (Camille Panonacle) qui fait du charme au capitaine Bochko (Joël Zaffarano). Elle semble tout d’abord lui faire des avances, l’invite à dîner, se laisse embrasser et avant que les choses n’aillent plus loin déclare qu’elle aime les femmes et veut un enfant de lui.

Bien évidemment, au départ, personne n’aime cette femme, elle appartient à la BRB, met des bâtons dans les roues à Diane (Isabelle Otero), l’héroïne, et fait une erreur monumentale de jugement qui permet aux braqueurs de se sauver. Elle a beau être belle, ça ne fait pas tout. Le capitaine est lui sous le charme et s’éloigne de son équipe pour se rapprocher de la jeune femme. Au début, le téléspectateur la trouve même « louche » et pense qu'elle est associée aux malfaiteurs.

Lorsque Jessica avoue finalement qu’elle « aime les femmes », le téléspectateur réalise qu'il a été conditionné pour ne pas apprécier le personnage. Le capitaine Bochko, lui, est surpris et ne comprend pas pourquoi elle l’a allumé de la sorte (nous non plus d’ailleurs). La jeune femme déclare qu’elle veut un enfant qui ait un père et qu’elle veut que ce soit lui. Bochko est flatté mais demande à réfléchir. Il réalise qu’il ne peut pas faire un enfant de cette manière même si Jessica lui a avoué qu’elle pourrait aller jusqu'à « coucher avec lui ».


Tous les papas ne font pas pipi debout

 

Jessica Lotti, loin d’être une représentation positive, est un personnage déprimant. Tout d’abord, elle n’est jamais qualifiée de « lesbienne » ou « d’homosexuelle ». On est sur TF1, en première partie de soirée, il ne faut surtout pas choquer. Donc on se contente de dire qu’« elle aime les femmes ». Ensuite, on passe sur le fait qu’elle soit incompétente au travail parce qu’elle est plutôt bien habillée mais la manière dont elle drague le père potentiel et qu’elle lui dit la vérité… est lamentable. En plus, je vous assure qu’elle sourit quand il l’embrasse sur la bouche. Et ça, c’est étrange pour une lesbienne, non ? Mais le pire réside à mon avis dans le fait qu’elle veut un enfant seule, pas de compagne, rien. Elle veut un « bébé toute seule ». Lamentable et déprimant, je vous dis. Si encore on savait copier les bonnes choses correctement. Mais non, même pas.

Pourtant, des téléfilms intéressants et forts abordant la question de l’homoparentalité, les français savent faire ! Tous les papas ne font pas pipi debout diffusé en 1998 sur France 2 et Des Parents pas comme les autres en 2001 sur M6 ont traité avec efficacité, naturel et tolérance de cette difficile question. Loin d’être idylliques, ils ont tous deux dépeint une réalité méconnue et touchante. Mais pourquoi faut-il obligatoirement que ces représentations positives et riches soient ponctuelles et éphémères ?

Vivement que les américains retrouvent leur inspiration et que les français retrouvent leur frilosité en matière de visibilité lesbienne jusqu’à une prochaine bonne idée.

 

Isabelle B. Price (2008)




MENTIR POUR MA CAUSE...

 

Un billet d'humeur d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 



Mentir c’est mal, on vous a tous élevé en vous endoctrinant de la sorte je suppose. En tout cas, c’est ce que mon père et ma mère ont fait et extrêmement bien je dois l’avouer. Encore un de ces préceptes judéo-chrétiens à la mords-moi-le-nœud. Et mes parents m’ont d’ailleurs tellement répété cette maxime qu’ils ont fini par me rallier à leur club. Et pourtant, je travaille à apprendre à mentir. Je vous assure.

Enfin bon, bref. Ce jour maudit où j’ai une nouvelle fois désespéré de ne pas savoir mentir est arrivé. Non pas qu’il y a eu mort d’homme, loin de là d’ailleurs. Mon ego a simplement pris un sacré coup au point de vaciller.

Le lieu du délit : ma ville natale perdue au cœur des volcans d’Auvergne, la date : le lendemain du 14 juillet, l’heure : le milieu de l’après-midi… Le reste, on s’en fout. De ces détails aussi d’ailleurs on se moque, mais ça fait croire que je vais parler de quelque chose d’important.

Donc j’aide ma mère à faire les courses au supermarché. Vive les vacances en famille. Je cible le produit sur la liste, je repère le rayon, je localise mon objectif et je fonce. Ma mère se plaint très vite que je suis très rapide et concentrée, trop efficace même au point qu’elle ne peut pas s’arrêter et flâner dans son rayon préféré des sous-vêtements. Je fais la fille qui n’entend pas. On n’est pas là pour traîner non plus. On fait les courses. C’est chiant de faire les courses. Plus vite on aura fini, plus vite on sera rentrées.

Le caddie™ est bientôt plein et nous nous dirigeons vers les caisses. On se faufile dans la queue et l’attente débute. Le problème des petites villes, je ne le dirais jamais assez, c’est l’incroyable capacité que vous avez à connaître au moins une personne lorsque vous patientez bêtement quelque part. Chez moi, je ne patiente jamais bêtement. Mais chez mes parents, tout le temps. Et ça n’a pas manqué : qui se trouve dans la file juste à côté de nous ? La voisine.

Notre gentille voisine s’approche et nous fait claquer la bise. Le sujet des vacances arrive rapidement sur le tapis et j’explique que j’ai une semaine de repos. Trop long d’expliquer que l’hôpital public refusant de me payer mes heures supplémentaires préfère me donner des jours quand ça l’arrange pour faire baisser un compte d’heures sup’ qui aurait la capacité de relancer l’économie française mais de ruiner le gouvernement par la même occasion. Donc, j’ai une semaine que je passe ici.

On ne s’extasie pas sur mon travail, il est pas gai mon travail. On préfère s’extasier sur la petite fille de la voisine. Et oui, c’est pas tous les jours qu’on est grand-mère. Donc la conversation glisse gentiment sur ce sujet agréable. Ma mère s’émerveille tendrement. Je sais un peu ce qu’elle pense de l’homoparentalité et c’est pas folichon. En même temps, comme je n’ai pas non plus d’avis arrêté, on évite d’en parler. Et puis de toute manière, on n’en est pas encore là !

Donc au moment de nous quitter, parce que décidément la file avance, la voisine se tourne vers moi et me pose la question. Vous savez, LA question.

Non, pas cette question-là. Non, elle ne me demande pas si j’ai un petit ami, celle-là est réservée à ma tante. Non, elle ne me demande pas si j’ai un fiancé, celle-là elle est réservée à ma grand-mère. Non, elle ne me demande pas si je vais avoir un bébé, celle-là elle n’est pas encore réservée, je suis trop jeune.

Non, en fait elle ne m’a pas posé la question qui désespère à chaque fois que l’on croise quelqu’un dans la rue qui ignore que vous faites partie de la grande famille des homos célibataires et fiers de l’être. Non, elle m’a posé LA question débile que je voulais éviter, tellement j’avais honte de moi.

« Qu’est-ce qu’il t’est arrivé au bras ? »

Ben oui, j’avais un bandage en bas du biceps, juste au-dessus du pli du coude, qui faisait le tour de mon bras.

Là mes amis, je n’ai rêvé que d’une chose. Savoir mentir. J’ai hésité une fraction de seconde. Une demi seconde. Que pouvais-je répondre ?

Une balle perdue en sortant de la banque. J’ai eu chaud, c’est pas passé loin. On n’en a pas parlé à la télévision parce qu’il y a des otages, donc il ne faut pas paniquer les ravisseurs. Ou alors une morsure de serpent. On a évité l’hospitalisation de justesse, le bras c’est près du cœur. C’était pendant une randonnée, un serpent est tombé d’une branche pile sur mon biceps. Pas le temps de réagir. Ou alors un coup de couteau dans la rue en voulant aider une vieille dame qui se faisait voler son sac. Ou alors un tatouage et dans la foulée, je fais mon coming-out, ça paraîtra crédible avec la montre de mec, le bracelet de force et le débardeur. Oui… mais maman va me tuer.

Aucune de ces hypothèses ne parvenant à me convaincre, je me suis vue dire la vérité. Et la vérité, elle n’est pas à mon avantage du tout.

« Je me suis brûlée avec la plaque du four en sortant ma pizza surgelée. »

Regard interrogateur de la voisine. Le même que celui de ma mère quand elle a su. Parce que se brûler à ce niveau-là en sortant une pizza, faut le faire. Sourire désolé de ma part et tentative de justification.

« J’ai pas compris non plus. Mon bras était au milieu. Il traînait là je ne sais pas comment. »

Éclat de rire de la voisine. Au moins ça l’a fait rire. Ma mère me regarde, désespérée. Et moi, j’ai simplement pensé que dans moins de deux semaines j’allais avoir 25 ans et que j’ai intérêt à apprendre à mentir un minimum si je veux pouvoir sauver la face. Non parce que là, ce genre de raison, ça ne va jamais passer.

Alors si vous me le demandez, je me suis accrochée à un clou rouillé pendant les travaux de mon appartement. Pas grand-chose mais comme j’étais en plein mouvement, ça a pas mal entaillé la peau. J’en ai bien pour deux semaines de bandage.

Et pendant qu’on y est, l’homme idéal, je le cherche, je le cherche, je fais que ça de le chercher…

 

Isabelle B. Price (16 juillet 2008)





LA REPRÉSENTATION LESBIENNE

DANS LES SÉRIES TÉLÉVISÉES


 

3. Et la France dans tout ça ?


 

Une chronique d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 


Et la France dans tout cela, me direz-vous ? La France… Et bien, elle est trop occupée à se moquer du puritanisme américain et de la censure omniprésente outre-atlantique pour oser ne serait-ce que créer une série nouvelle au concept innovant. Chez nous les séries se nomment P.J., Avocats et Associés, Léa Parker, Sous le Soleil et l’idée même d’un personnage lesbien récurrent n’est pas envisageable. La représentation homosexuelle sur le petit écran passe en France par la diffusion de séries étrangères. À ce titre, The L-Word et Queer As Folk font les beaux jours de Canal +.




La France n’ose pas aborder l’homosexualité de manière régulière. Elle préfère traiter ce sujet durant 90 minutes, la durée moyenne d’un téléfilm. Et des téléfilms intéressants, nous en produisons. À ce titre, Un Amour de Femme diffusé sur M6 en 2001 a séduit le public français et étranger. Jeanne (Hélène Fillières) est une femme mariée et mère d’un petit garçon qui rencontre un jour Marie (Raffaëla Anderson), une danseuse, dont elle tombe amoureuse. Confrontée à un choix, elle privilégie l’amour aux apparences.



Produit la même année, Clara cet été-là est un téléfilm destiné aux adolescents. Centré sur la vie de Clara (Selma Brook), il nous fait découvrir son questionnement sur sa sexualité durant un été, dans un camp de vacances. Clara cherche à savoir qui elle est et qui elle aime, couche avec un garçon avant de succomber au charme de Sonia (Salomé Stevenin), une lesbienne sûre d’elle et indépendante.

 



Deux autres téléfilms plus revendicateurs et ancrés dans la société actuelle abordent la question de l’homoparentalité. Des Parents pas comme les autres, diffusé en 2002 sur M6 (encore elle), présente la vie d’Olympe, une adolescente amoureuse d’un garçon. Un début simple et connu, malheureusement compliqué par l’histoire familiale complexe et non assumée des parents de la jeune fille. Enfant d’un gay fier et d’une lesbienne honteuse, Olympe (Louise Monot) fait tout pour briser la loi du silence qui règne dans sa famille.

Dans la même veine, Tous les papas ne font pas pipi debout aborde la question de l’homoparentalité. Sorti quelques années plus tôt, en 1998 sur France 2, ce téléfilm présente un couple de femmes qui s’aiment, Dan (Natacha Lindinger) et Zoé (Carole Richert). Elles élèvent ensemble leur fils, Simon (Corentin Mardaga), porté par Zoé. Mais du haut de ses dix ans le jeune garçon cherche à connaître ses origines et souhaite rencontrer ce père qui lui manque tant. Avec pudeur et sensibilité, Tous les papas ne font pas pipi debout offre le portrait touchant de deux femmes amoureuses perdues parce que l’enfant qu’elles ont désiré plus que tout les rejette. Une histoire forte et bouleversante.



En février 2007, France 2 (l’autre chaîne adepte des téléfilms gays) diffusait le très beau téléfilm La Surprise. Marion (Mireille Perrier), une femme de quarante ans qui s’ennuie auprès de son mari, décide un jour de divorcer. Après cette séparation que sa fille ne comprend pas,  elle rencontre une jeune femme dont elle tombe amoureuse. Succès critique et publique, cette très belle histoire d’amour remporte le prix du Public au Festival de Luchon en 2006.

Des représentations lesbiennes pas si frileuses qu’on voudrait bien le croire mais relativement récentes. Pourquoi la France a-t-elle autant tardé pour aborder la question de l’homosexualité dans ses fictions ? On a beau se moquer des lobbyings de pression catholiques américains, il n’en reste pas moins que ce pays a commencé beaucoup plus tôt que nous. Comment justifier un tel décalage ?

Je pense que le principal frein à la visibilité homosexuelle en France concerne la question de la différence. Notre pays s’est construit sur trois grands principes : la liberté, l’égalité et la fraternité. En contradiction, notre télévision, pour plaire au plus grand nombre, a longtemps reflété une société blanche, jeune, catholique et conservatrice. L’apparition des personnages noirs et métis récurrents n’est pas si lointaine que cela.

Or l’homosexualité est beaucoup plus inquiétante pour la société « normale », solidaire et unie, que la diversité ethnique. Elle propose un type de vie alternatif qui, à lui seul, met en péril cette idée de communauté nationale homogène. Représenter cette population à l’écran serait reconnaître son existence et, en allant plus loin, lui donner une certaine légitimité.

Et cette idée, les fictions françaises commencent juste à la comprendre. C’est ainsi que depuis quelques années, depuis le début des années 2000 seulement, se mettent en place des personnages lesbiens secondaires dans des téléfilms connus et plébiscités.

 

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Lieutenant Charlotte Marszewski (Alice Béat)


La série-téléfilm Commissaire Moulin est la première à avoir pris le risque en faisant du lieutenant Charlotte Marszewski (Alice Béat), l’une des collègues de Moulin (Yves Rénier), une lesbienne. Lorsque le personnage apparaît, comme tous les seconds rôles, il n’est pas question de sa vie privée, de sa famille ou de sa vie sexuelle. Seul le héros, Moulin, a le droit à une vie hors du commissariat. Mais petit à petit, Charlotte prend de l’importance jusqu’à ce qu’elle déclare à Moulin être homosexuelle et amoureuse d’une collège, flic comme elle mais membre d’une autre brigade. Le coming-out est fait en douceur comme celui de Kerry Weaver (Urgences). C’est un personnage jusqu’à présent hétéro qui devient homo. Le public l’aime déjà alors le risque est minimisé. Moulin, en père protecteur, répond à Charlotte de taire cette information parce que les lesbiennes ne sont pas encore bien acceptées dans la police. Charlotte suit cette consigne après avoir eu droit à un tout petit baiser durant cet épisode. Baiser qui permet au suspect de se sauver et vaut à la jeune femme les remontrances de son patron. Depuis, Charlotte n’a plus de petite amie et sa sexualité reste inexistante et taboue.

 

http://tv.numericable.fr/ImCon/Arti/23201/1504060903.JPGCécile Perrier (Vanessa Guedj)


Il en est de même pour Cécile Perrier (Vanessa Guedj) baptisée Bimbo dans la série Diane, Femme Flic. Elle est lesbienne, tous ses collègues sont au courant. L’information est connue et à ce titre, elle s’amuse beaucoup à l’arrivée de son nouveau collègue, Micky. Durant un épisode entier, elle fait croire à tout le commissariat qu’ils sont ensemble alors qu’elle est homo. Micky est mal à l’aise et cherche à se défendre jusqu’à ce qu’il découvre la réalité et en rit. Malheureusement, ensuite, silence radio. Aucune autre mention de la sexualité de Bimbo, aucune petite amie. Rien. Pire même. Durant l’un des derniers épisodes « Ange Déchu » diffusé le 13 avril 2006, Bimbo se contente de déclarer à la question de son patron : « Vous croyez que vous donnez une bonne image de la police, vous ? », « Moi, je suis le quota femme. Intouchable. » Ce à quoi son collègue Micky rajoute « Moi, le quota beur. Intouchable. » Et le quota gay, ils connaissent ?

 

http://www.tele7.fr/var/t7j/storage/images/diaporama/galerie-photos-de-notable-donc-coupable/isabelle-renauld/1839993-1-fre-FR/isabelle_renauld_image_diaporama_paysage.jpg

Lauren Valmont (Isabelle Renauld)


Brigade spéciale, un autre téléfilm « feuilletonesque » a bien tenté de proposer un personnage principal homosexuel en la personne de Lauren Valmont (Isabelle Renauld). Commandant de la Brigade spéciale et profileur, Lauren est lesbienne et se contente de le confier naturellement à sa collègue Claire (Delphine Rollin) durant l’épisode « Enfance Volée ». Elle s’est endormie en voiture alors que Claire conduit et se réveille à peine lorsqu’elle déclare : « Tu vois, c’est pour ça que je conduis pas. Je m’endors toujours en voiture. Avec Barbara c’était pareil. » Claire demande qui est Barbara et Lauren spécifie qu’il s’agit de son ex. Deux phrases dans un épisode qui représentent beaucoup pour le public lesbien, mais passeront totalement inaperçues. Sauf pour la comédienne Isabelle Renauld qui se défendra dans toutes ses interviews d’être homosexuelle. Des fois que l’on fasse l’amalgame entre une actrice et une profiler lesbienne et commandant de police !

Côté séries, la France accuse un important retard. Prisonnière du format 90 minutes, elle a refusé durant très longtemps de se calquer sur le système américain qui a plébiscité dès les années 50 le format série de 50 minutes. Accusées d’être une sous culture sans audace ni créativité à la solde du capitalisme américain, les séries ont très longtemps été décriées par la critique principalement cinéphile.


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Seulement, le succès des séries américaines dès la fin des années 90 et le génie de leurs auteurs ont rapidement amené les chaînes à diffuser ces programmes et à les copier. P.J. n’est qu’une vulgaire copie de NYPD Blue. Son couple lesbien présent dans quelques épisodes sera inintéressant au possible et bourré de clichés. Amoureuse de sa collègue Nadine Lemercier (Valérie Bagnou-Beido), Tina (Nadège Beausson Diagne) commence par lui offrir des fleurs de manière anonyme. Le temps passe et les jeunes femmes se rapprochent. Elles passent leurs week-ends ensemble et dorment régulièrement l’une chez l’autre. Enfin… on l’imagine à travers les dialogues. Rien n’est visible, aucun baiser, aucun geste d’intimité. Finalement, Tina s’avère trop possessive et envahissante. Après une énième crise de jalousie et une mutation, Nadine et rassurée et retourne à sa vie d’hétéro bien rangée.


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Plus belle la vie, basée sur les soap opéras américains, a certes proposé un, puis deux couples gays stables à travers Thomas Lenoir (Laurent Kerusore) et le policier Nicolas Barrel (Alexandre Thibault puis Nicolas Herman) son amant tué en février 2007 remplacé ensuite par le juge Florian Estève (Franck Borde) mais également une lesbienne folle, Christelle Le Bihac (Valentine Carrette puis Juliette Wiatr). Nièce de Charlotte (Hélène Médigue), l’une des héroïnes, cette adolescente de 17 ans sera internée en hôpital psychiatrique après avoir poursuivi de ses assiduités Luna, une amie de sa tante et l’avoir harcelée. En 2006, un nouveau couple de méchants apparaît, il s’agit de Gabriel Mercoeur (Didier Menin) et de sa femme Karine (Nathalie Grandhomme). Ils souhaitent tous les deux s’approprier le domicile de Céline Frémont (Rebecca Hampton) pour en faire un centre médical. Prêts à tout pour parvenir à leurs fins, ils s’arrangeront pour que Céline soit attirée par Karine qui la drague ouvertement. Alors qu’elles s’apprêtent à coucher ensemble, la présence de Gabriel retient Céline, qui ne réalise pas encore qu’elle a été manipulée. Heureusement, ce couple pervers aura la fin qu’il mérite et les bons et les justes gagneront finalement.

La surprise viendra de l’arrivée lors de l’épisode 915 du 14 mars 2008 du personnage de Virginie (Virginie Pauc). Cette jeune femme, chef de chantier pistonnée par sa petite amie adjointe à la mairie de Marseille, entre par la grande porte à l’entreprise Phénicie. Elle se lie d’amitié avec Céline qui contre toute attente tombera amoureuse d’elle et décidera d’explorer ses sentiments. Une histoire rafraîchissante, loin des poncifs du genre, qui amène Céline à s’interroger sur les étiquettes et le fait d’être homo ou hétéro.


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Dans un registre similaire, le feuilleton Cinq Sœurs sur France 2 a tenté d’introduire une romance lesbienne. Diffusé à 18h15 du lundi au vendredi pour concurrencer Plus belle la vie, ce feuilleton est centré sur la famille Matéi. Autour du père veuf, évoluent cinq filles et bientôt un garçon. Alors que le meilleur ami d’Elise (Charlotte Becquin) est ouvertement gay et ne cache pas qu’il vit avec un homme qu’il aime, que le frère de Laurent (Denis Cherer), le mari de Bénédicte (Théa Boswell) est un transsexuel, la plus jeune sœur, Emmanuelle (Julia Cecillon), hésite à être lesbienne. Elle embrassera par trois fois sa meilleure amie, Katia (Esther Comar) une jeune fille marginale et rebelle qui assume son homosexualité avant de réaliser qu’elle l’aime. Elles feront l’amour, mais incapable d’assumer ce qu’elle ressent et le regard des autres, Manu la laissera partir en Angleterre. Entre temps, 71 épisodes l’auront vu se fourvoyer avec un garçon, dire blanc et penser noir, jouer au chat et à la souris…


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Quand au baiser du téléfilm Le Maître du Zodiaque entre Natacha Lindinger et Claire Keim (alias Eva Trammel et Esther Delaître), il laissait deviner à tout connaisseur l’identité du tueur. Dans les téléfilms à suspense français, les méchantes continuent à se trahir en embrassant les héroïnes.

Finalement, en France, nous produisons d’excellents téléfilms abordant le thème de l’homosexualité mais il nous reste encore un long chemin à parcourir pour que nos séries atteignent un jour les niveaux britanniques et américains.


Isabelle B. Price (2008)




QUE JE PROPAGE LA PAROLE DE DIEU...

 

Un billet d'humeur d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 



Je suis une femme moderne. J’ai une adresse e-mail. Rectification, j’ai trois adresses e-mail. Une pour les pubs et les jeux débiles que je suis amenée à faire quand l’envie m’en prend et qui est regorge donc de publicités en tout genre. Si je ne passe pas la vider au moins une fois tous les deux ou trois jours, je me retrouve rapidement avec 50 spams. La seconde est une adresse professionnelle si un jour je décide de changer de métier, pourquoi pas, et qui me permet de communiquer avec l’association, les collègues etc. La troisième est celle dédiée à mon site internet. Oui, je sais, je suis une fille extrêmement bien organisée.

Bref, ce matin-là, motivée, je faisais donc le tour de mes boites et sur la première, celle du site, je suis tombée sur plusieurs mails et sur un petit message en courrier indésirable. Je suis une terrible curieuse qui ne peut s’empêcher de regarder ce qui se cache un peu partout. Donc j’ai été jeter un coup d’œil sur ce mail indésirable. Rien de plus agréable que d’assouvir sa curiosité quand, en plus, on sait que potentiellement ce peut être dangereux. Ne dites rien à mon frère, s’il savait, il me tuerait.

Le nom de l’expéditeur ne me disait rien, normal, c’était en courrier indésirable me direz-vous. L’intitulé de l’objet « Bonjour, » était un bon début. Je choisis donc d’ouvrir le message.

La lecture m’a surprise au plus haut point, et je vais donc la partager avec vous. Avant tout, pour vous situer la scène, il était 7h30, je venais de m’habiller rapidement et j’avais collé ma casquette sur ma tête pour retenir mes cheveux indisciplinés au réveil (et parfois le reste du temps quand ils décident que la coiffure que je veux faire ne leur convient pas). Donc je m’assois sur ma chaise, fait chanter « Umbrella » à tue-tête à Rihanna (chacun ses faiblesses) tout en m’étirant et en baillant. Et j’ai découvert ça :


« Bonjour, (bon début, ça change de mes ‘Salut’ et ce n’est pas plus long à écrire. Ça fait très cultivé aussi, vous ne trouvez pas ?)

Je suis Mme suzanne komo d'origine Angolaise. (Bonjour Madame ! Vous savez, vous avez le droit de mettre des majuscules à votre nom et à votre prénom. Moi, personnellement, j’adore les majuscules. Regardez comme ça rend mieux : Isabelle B. Price, c’est mieux que isabelle b. price, non ?) Je fus marié à Mr thoé komo qui a travaillé avec les forces marines l'Angola pendant neuf ans avant qu'il ne decède en 2002. (Même si j’arrive un peu tard, je suis vraiment désolée et je vous présente toutes mes condoléances. Un deuil est toujours horrible et comme dirait mon médecin, le Docteur Allison Cameron : « Quand quelqu’un de bien meurt, il est normal d’avoir de la peine. ») Nous étions mariés pendant onze années sans enfant. (Si vous ne vouliez pas d’enfant, c’est votre choix. J’ai des amies qui en veulent, d’autres qui n’en veulent pas. L’important, c’est de vivre en accord avec ses choix) Il est mort après une brève maladie qui a duré seulement quatre jours. (Ça, c’est foudroyant, ça n’a pas dû être facile pour vous de vous préparer à cette terrible douleur. Désolée) Avant sa mort nous étions tous les deux chrétiens veritable. (Il faut un accent et un « s » à « veritable » et je suis heureuse de le savoir. Parce que les faux chrétiens ça existe ? Racontez-moi que je crâne devant ma grand-mère) A sa mort que j'ai décidé de ne pas me remarier ou obtenir un enfant en dehors de ma maison matrimoniale chose que defend la bible. (Ravie de l’apprendre. En même temps, il n’est mort qu’il y a six ans, vous n’êtes pas pressée non plus, si ?) Du vivant de mon défunt mari, il a déposé la somme de $6.5 Millions americain (six million cinq cent milles Dollars americain) dans une banque d'abidjan ici en Côte d'Ivoire. (C’est très gentil à vous de me mettre au courant. Et aussi de l’avoir écrit en toutes lettres. Parce que dès qu’on dépasse certaines sommes, je m’y perds un peu. En tout cas, ça fait des sous ! Félicitation à vous !) Actuellement, cet argent est toujours avec la banque. (En même temps, vous en faîtes ce que vous voulez) Récemment, mon docteur m'a informé du fait que je souffrirais d'une maladie sérieuse: le cancer. (Ah désolée. Ce n’est pas une bonne nouvelle, effectivement. La bonne nouvelle, c’est qu’avec les traitements actuels et la localisation du dit cancer, il y a d’excellentes chances de survie. Prenez le cancer de la thyroïde par exemple. Si il a été décelé tôt, c’est un bon pronostic. Vous en êtes où ? Ganglions ? Métastases ? Je peux vous conseiller d’excellents centres en France si vous avez besoin, n’hésitez pas) Le mal qui me dérange le plus est l'hypertension. (Mmmm période de déni. Je peux comprendre. Je connais aussi des psychologues si vous avez besoin. Mais pourquoi elle vous dérange tant que ça votre hypertension ? Expliquez-moi ?)

Après avoir su mon état j'ai décidé de donner ce fonds à une église ou à une personne qui utilisera cet argent tel que je l'instruirais. (Votre état, votre état, vous dites que ce qui vous gêne le plus c’est l’hypertension. Un holter, un traitement et tout rentrera dans l’ordre de ce côté-là. Mon problème serait plutôt de l’autre côté. Enfin comme le dit mon autre médecin, le Docteur Gregory House : « Je dis ça, je dis rien. » Pour l’argent, je suis ravie d’apprendre que vous êtes une femme extrêmement généreuse. Êtes-vous certaine de ne pas vouloir l’utiliser pour vous soigner ?) Je recherche donc une église ou une personne de confiance qui mettra ces fonds aux services des orphelinats,veuves, propageant ainsi la parole de Dieu et faire en sorte que l'oeuvre de Dieu soit maintenue. (Alors là, ça risque d’être un peu plus compliqué. Autant je connais des hôpitaux, autant des Églises de confiance… c’est pas mon point fort, je le reconnais. Des personnes de confiance. J’en ai plusieurs qui m’entourent mais je ne suis pas certaine qu’elles connaissent des Églises. Voulez-vous que je me renseigne ?) La bible declare qu'est bénie la main qui donne. (Ma mère et mon père aussi le disent. C’est de là qu’ils le tiennent ! Ils m’ont caché des choses ! Ah bravo !)

J'ai pris cette décision parce que je n'ai aucun enfant qui pourrait hériter de cet argent et les parents de mon mari ne sont pas chrétiens. (Vous n’allez pas vouloir rencontrer mes parents alors. Ils ne sont pas chrétiens non plus et pourtant je peux vous dire qu’ils valent le détour. Ils sont géniaux !) je ne veux pas que les efforts de mon mari soient dilapidés par des non-croyants. (Oui, je comprends votre point de vue. En même temps, je ne veux pas faire la fille qui ne vous croit pas, loin de moi cette idée… mais juste comme ça… pour savoir… Votre mari militaire, il a fait comment pour réunir autant d’argent seul. Ça n’est pas un héritage, il ne devait pas être autant payé que cela… Mmmm) Je ne veux non plus une situation où cet argent sera employé dans les choses du monde; raison pour laquelle je prends cette décision. (Les choses du monde ? Il faudrait être un peu plus explicite s’il vous plait. Du style un tremblement de terre, un tsunami, des inondations ? Vous avez raison. Ne nous dispersons pas. Les veuves et les orphelins. J’ai connu une combattante, il y a quelques années, elle s’appelait Xena, elle se battait pour les veuves et les orphelins. Elle faisait ça bien, vraiment. Elle avait une amie… qui était Reine. Vous auriez pu leur faire confiance les yeux fermés. Dommage que vous n’ayez pas écrit plus tôt. Depuis, Xena est morte. Le difficile chemin de la vie. Gabrielle continue de se battre mais le cœur n’y est plus. Je crains qu’elle nous fasse un deuil pathologique… Excusez-moi de vous ennuyer avec ça. Je comprends que vous ayez d’autres chats à fouetter) Je ne craint point la mort par conséquent que je sais où je vais. (Je ne veux pas corriger toutes vos fautes parce que j’en fais beaucoup mais quand même, c’est limite là. Vous savez où vous allez aller ? Mmmm. Ah le Paradis ! Sorry) Je sais que je vais être dans le royaume du seigneur. (Vous lui passerez le bonjour de ma part parce qu’il y a de très grandes chances... Bon, d’accord, aucune, niet, pas la moindre chance que je le rencontre) Exode 14 verset 14 dit :"le seigneur défendra ma cause et je demeurerai dans sa paix". (Vos citations sont moins sympas que les miennes mais je ne vous en veux pas) Dès que je reçois votre réponse je vous enverrais le contact de la banque ici à abidjan. (Pourquoi faire ? Holàlàlà. Ça va pas être possible. Je ne suis pas une personne de confiance, moi) Je joindrai également une lettre d'accord qui vous prouvera que je suis le proche parent de mon defunt mari lors du depot de cet argent. (Bin vous devez avoir votre carte d’identité, non ? Le gros avantage du mariage. C’est pour ça que les homos demandent les mêmes droits que les hétéros, ici, en France) Je veux que vous et votre église priiez toujours pour moi parce que le seigneur soit toujours mon berger. (Oui, alors là madame, je m’excuse mais il faut que nous parlions sérieusement. Personnellement je ne prie pas. J’ai été baptisée uniquement pour faire plaisir à mon grand-père qui était mourrant et je n’ai jamais été au catéchisme de ma vie. Je faisais du BMX (il était jaune et vert fluo) dans les rues de mon village pendant que les autres apprenaient la Bible par cœur. Mon Église, je n’ai pas d’Église, quelques centaines de lesbiennes qui lisent mes écrits tout au plus. Puis alors cette idée que le Seigneur soit votre berger (j’ai mis un S majuscule parce qu’on parle d’un type bien quand même) je partage pas vraiment, quoi… Enfin… Ne le prenez pas mal… Mais je pense qu’on est tous maître de notre destin et tout et tout…)

Mon bonheur est que j'ai vécu une vie de digne chrétien. (Je suis ravie pour vous, sincèrement) Celui qui qui veut servir le seigneur doit le servir dans l'esprit et la vérité. (Vous en connaissez plus que moi sur le sujet) Veuillez demeurer toujours dans la prière toute votre vie. (Là, comme je vous disais… la prière et moi… ça fait deux…) Contacter moi à l'adresse e-mail ci-dessus pour plus d'informations, veuillez me rassurer que vous agirez en conséquence comme je l'ai évoqué ci-haut. (Alors il faut que vous sachiez, je n’ai rien contre les veuves et les orphelins mais bon les problèmes actuels du monde sont aussi importants. Et pour être honnête, je dois vous dire une petite chose à mon sujet qui risque de vous surprendre. En plus de ne pas être une chrétienne accomplie, il se trouve que je vis plus ou moins dans le péché. Ah non, c’est vrai, je suis une femme. Je crois qu’ils ne disent rien sur moi dans la Bible parce que les femmes sans les hommes ne sont rien. Heu… donc… je suis homosexuelle. Ne vous braquez pas comme ça. Respirez ! Attention à votre hypertension, mince ! Je suis quelqu’un de bien. Mais il faut que vous compreniez que nous n’allons pas au même endroit. Vous aurez le droit aux anges, aux ailes et tout le tralalala. Et moi, je serai en débardeur noir moulant, de la sueur qui ruisselle le long de mes muscles fins en train de casser des pierres, de mettre du bois à chauffer et je ne sais plus quoi d’autre au rythme de Queen et en discutant avec Marguerite Yourcenar. Ne vous inquiétez pas pour moi, vu le nombre que nous serons en Enfer et le peu que vous serez là-haut, on n’aura pas trop de travail pour vous chauffer. Non, mais c’est vrai. On organisera des tours de garde, et quand on ne travaillera pas, on se délectera de voir les autres travailler, torses nus ou en brassières, l’air de rien…) Tout en espérant recevoir votre réponse que Dieu vous benisse. (Merci pour la bénédiction, même si elle n’est pas si importante que ça à mes yeux, vous avez l’air d’y tenir. Et puis ça me fait plaisir d’être bénie par Dieu. Vous savez quand j’imagine Dieu c’est comme l’a dit je ne sais plus qui : c’est une femme, noire et lesbienne) Actuellement,je reside dans un hotel d'abidjan en Côte d'Ivoire. (Et moi je suis une infirmière française qui passe son temps libre à retaper l’appartement miteux dans lequel elle vit et à s’occuper de son petit site Internet) Veuillez donc me répondre à l'adresse suivante SVP:suzannekomo1@yahoo.fr (Je ne pense pas que ce soit nécessaire finalement, si ?)

Vôtre soeur en Christ,

Mme.suzanne komo, »


Donc voilà, c’était ce message-là. Vous n’avez pas tout compris à cause de mes commentaires ? Je sais, je ne sais pas me tenir. Non mais c’est vrai, on ne le voit pas sur ma tête… mon site… que je suis une lesbienne athée et bavarde ?


Isabelle B. Price (2008)





LA REPRÉSENTATION LESBIENNE

DANS LES SÉRIES TÉLÉVISÉES


 

2. Des Britanniques sans tabou...


 

Une chronique d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 


Même si la plupart des français considèrent les américains comme les maîtres actuels en matière de séries télévisées, la production anglaise est cependant loin d’être médiocre… au contraire. Moins victime de la censure omniprésente aux États-Unis, elle a tout autant contribué à la visibilité homosexuelle sur le petit écran. En effet, les réalisations sont plus dépendantes des producteurs et des chaînes qui les achètent que des publicitaires diffusant leurs annonces. Cet état de fait a rapidement amené les britanniques à créer des séries de qualités extrêmement décomplexées.


 

Dans une Angleterre conservatrice et rigide où l’homosexualité a pourtant était dépénalisée en 1967, parler de relations entre personnes du même sexe reste un énorme tabou. Et pourtant, en 1999, Russel T. Davies ose la série Queer As Folk. Cette mini série basée sur un groupe d’amis trentenaires homosexuels révolutionne la représentation gay anglaise. Un grand pas pour l’homme et une invisibilité monstrueuse pour les lesbiennes. Alors que Stuart (Aidan Gillen) et Nathan (Charlie Hunnam) s’affichent dans de longues scènes de sexe sans tabou ni complexe, les deux lesbiennes de la série, Romey (Ester Hall) et Lisa (Saira Todd) sont ennuyeuses, moralisatrices et conservatrices. Un comble pour cette série audacieuse et maîtrisée de bout en bout.
Diffusée sur Channel 4 dès le 23 Février 1999, la série fait un véritable tabac mais s’attire les foudres des groupes chrétiens conservateurs. Les hommes politiques sont quant à eux choqués par l’âge de Nathan, le personnage principal d’à peine 15 ans. À l’époque, la loi interdit toute relation homosexuelle aux moins de 16 ans alors que les relations hétérosexuelles sont autorisées dès 14 ans. La communauté gay s’insurge également contre ce qu’elle considère comme une caricature et s’oppose à la série. Mais le succès est au rendez-vous et une seconde saison voit le jour. Durant ce double épisode, les lesbiennes sont plus absentes que jamais.



Heureusement, la même année apparaît sur les écrans britanniques la série Bad Girls traduite Les Condamnées chez nous. Créée par Ann MacManus, Eileen Gallagher et Maureen Chadwick, elle se déroule à Larkhall, une prison anglaise où se côtoient détenues et gardiens. Les prisonnières telles Shaz, Denny, Shell, Zandra ont commis des actes plus ou moins graves allant du simple vol à la fraude en passant par le meurtre. Enfermées, elles découvrent un univers où leur vie dépend autant de leur force que des gardiens qui les surveillent.

Cette série, plusieurs fois vainqueur aux Quick TV Awards et écrite tel un soap opéra, présente tout au long de ses huit années d’existence plusieurs personnages lesbiens. Parmi eux, Nikki (Mandana Jones), une lesbienne courageuse et fière condamnée à la prison à vie pour l’assassinat d’un policier qui s’apprêtait à violer sa petite amie. Nikki est une femme solitaire et intelligente qui assume sa sexualité et possède un réel pouvoir sur les autres détenues qui l’écoutent. Elle se rapproche sensiblement de la nouvelle directrice, Helen Stewart (Simone Lahbib), et finit par tomber amoureuse de cette dernière. Helen, séduite malgré elle par la prisonnière, annule son mariage et démissionne pour que ses actes soient en accord avec ses principes. Elle reviendra à Larkhall après avoir accepté ses sentiments pour Nikki et mettra tout en œuvre pour la faire libérer. Harcelée par Jim Fenner (Jack Ellis), un gardien manipulateur et arrogant, Helen rompt plusieurs fois avec Nikki avant de réaliser qu’elle aime profondément la détenue.



Cette première relation lesbienne marque la série de son empreinte et cette dernière devient une référence en matière de représentation lesbienne. À la fois romance tendre et sensuelle, elle doit se heurter à l’horreur de la prison et du pouvoir. La relation lesbienne suivante entre Roisin (Siobhan McCarthy) et Cassie (Kellie Bright) n’atteint jamais le même niveau. Il est bien sûr question d’amour, de famille, de coming-out et de drogue mais l’on est moins touché. Après de nombreux autres personnages gays, plus variés et complexes que jamais, la série offre, en fin de course, la superbe romance entre Pat (Liz May Brice), une bisexuelle condamnées pour meurtre et Sheena (Laura Rogers), une douce jeune femme emprisonnée à cause de la drogue. La première refuse de tomber amoureuse de peur de souffrir alors que la seconde accepte d’explorer ses sentiments jusqu’au bout.

Pour la première fois une série basée sur un grand nombre de personnages ose proposer plusieurs lesbiennes successives abordées de la même manière que les personnages hétéros. Un traitement identique, des histoires complexes et passionnantes, des personnages profonds et variés, sont autant de qualités qui font le succès de la série.



Deux ans plus tard, en 2001, l’Angleterre renoue avec le style mini série comme pour Queer As Folk. Créée par Rikki Beaddle-Blair, Metrosexuality est une série riche et décomplexée avec des personnages hauts en couleurs. Kwame (Noel Clarke) a 17 ans et deux pères séparés, Max (Rikki Beadle Blair) et Jordan (Karl Collins) qu’il tente par tous les moyens de réconcilier. Malheureusement Jordan est amoureux d’un nouvel homme et cela complique bien les choses. Metrosexuality est certes principalement centrée sur des hommes, mais a l’avantage de présenter deux couples de lesbiennes. Il y a d’abord la sœur de Max, Cindy (Carleen Beadle) qui vit en couple avec Doris (Dee Dee Samuels) et leurs deux enfants. Lorsqu’elles parviennent à se séparer de leur progéniture pour le week-end, leur premier réflexe est de faire l’amour dans toute la maison.

En plus de Doris et de Cindy, il y a Jaye (Pui Fan Lee) et Flora (Preeya Kalidas). Deux jeunes filles qui rêvent de ne pas s’impliquer et de baiser en toute liberté, « comme les mecs ». Et même si leurs histoires ne sont pas au centre de la série, elles ont le mérite d’être là et de présenter des lesbiennes comme on n’en a jamais vu. Deux femmes ensemble avec des enfants qu’elles ont désirés et deux adolescentes ensemble sans l’être réellement. Homoparentalité et prévention des MST chez les lesbiennes sont ici abordées sans complexe ni pudeur.



Ce traitement, loin de la morale bien pensante et des schémas traditionnels, se retrouve dans la série Hex, la Malédiction sortie en 2004. Thelma (Jemima Rooper) est une adolescente amoureuse de sa meilleure amie, Cassie (Christina Cole). Elle rêve que leur relation devienne plus qu’amicale mais Cassie, même si elle connaît les sentiments de Thelma, ne le souhaite pas. Lorsque Thelma est assassinée par un ange maléfique, elle devient un fantôme et découvre les pouvoirs magiques de Cassie.



En tant que fantôme, Thelma se met à hanter la faculté, à s’immiscer dans les rêves de Cassie et à la mâter sous la douche. Elle adore faire des blagues nulles sur les hommes et rencontre un jour une autre fantôme lesbienne dont elle tombe amoureuse. Empreinte de fantastique, d’ésotérisme, de magie et d’humour, Hex obtient un succès mérité lors de sa première saison avant de totalement se perdre en intrigues incompréhensibles lors de la seconde. Avec son look particulier hésitant entre punk et gothique, son humour décapant et sa noirceur désenchantée, Hex, la Malédiction s’adresse aux jeunes de manière intelligente ce que peu de séries savent faire.



Mais la véritable révolution en matière de séries télévisées et de représentation lesbienne anglaise intervient le 7 juin 2005 avec l’arrivée de Sugar Rush. Adaptée du roman éponyme de Julie Burchill, la série se concentre sur la vie de Kim (Olivia Hallinan), une adolescente de 15 ans amoureuse de sa meilleure amie, Sugar (Lenora Crichlow). Malheureusement Sugar est une vraie nymphomane qui couche avec tous les garçons qui croisent sa route. À grands renforts de flashs back et de voix off, Kim nous parle de son désir pour Sugar, de ses sentiments, de ses peurs, de ses doutes et nous entraîne dans sa vie. La première saison est centrée sur cet amour impossible entre les deux adolescentes et la série couronnée de succès obtient un International Emmy Awards. Channel 4 (toujours elle) commande donc une seconde saison.

Un an et demi a passé. Kim a aujourd’hui 17 ans et bien qu’elle tente de se convaincre du contraire, rien n’a changé. À part le fait qu’elle assume d’être lesbienne et qu’elle a définitivement fait une croix sur Sugar. Elle rêve d’amour et rencontre Saint (Sarah-Jane Potts), une jeune femme de 25 ans travaillant dans un sex shop pour femmes. D’incompréhensions mutuelles en rendez-vous ratés, toutes les deux parviennent finalement à sortir ensemble. Loin des clichés habituels, leur relation est dépeinte avec un naturel et un réalisme jamais vu pour une relation homosexuelle. Elles se rencontrent, se plaisent, se découvrent, se séparent avant de s’avouer leur amour mutuel.

Même si les sentiments sont au centre de la série, l’aspect sexuel n’est jamais ignoré. Saint travaille dans un sex shop et Kim n’a couché qu’avec deux femmes auparavant, ce qui fait qu’elle appréhende de ne pas être à la hauteur. Les scènes peu vêtues et les scènes de lit sont nombreuses et ne tombent jamais dans le voyeurisme. Plus nerveuse, réaliste, amusante et européenne que The L-Word, Sugar Rush est une série séduisante et innovante.



Plus récemment, la chaîne BBC a diffusé en Janvier 2008 une nouvelle série, Mistresses, centrée sur un groupe d’amies trentenaires. Toutes entretiennent ou ont entretenues des liaisons extraconjugales. Jessica (Shelley Conn), l’un des personnages principaux, est chargée par son patron, un homme marié qui trompe sa femme avec elle d’organiser un mariage lesbien entre Alex (Anna Torv) et Lisa (Alys Thomas). La relation amicale qui se tisse entre Jess et Alex devient rapidement plus forte et toutes les deux couchent ensemble. Jessica, qui s’était toujours satisfaite de son rôle de maîtresse, se met à souhaiter plus alors qu’Alex ne peut pas ne pas épouser Lisa. Une situation complexe et romantique, interprétée avec bio par deux excellentes actrices qui a permis le succès la série, reconduite pour une seconde saison.



Aborder la manière dont les anglais représentent l’homosexualité de façon décomplexée, riche et sans tabou, en omettant les deux adaptations des romans de Sarah Waters serait une erreur. En 2002, la BBC adapte le livre Tipping The Velvet. Plébiscitée par le public, cette mini série permet à la chaîne de battre des records d’audience avec plus de 5 millions de téléspectateurs. La série se déroule à la fin du XIXe siècle dans l’Angleterre victorienne et reprend les grandes lignes du roman. Même si des aménagements ont dû être fait, la série parvient à restituer le climat, les décors, les sentiments et les combats qui avaient fait le succès du livre.



Après ce pari gagné, la chaîne lance l’adaptation d’un autre roman de Sarah Waters, Fingersmith. Là aussi, le public est conquis par les aventures de Sue et Maud. Les scénaristes parviennent une nouvelle fois à transposer cette histoire dense tout en préservant son âme. Grâce à ces deux adaptations et à la troisième, en cours de tournage, les romans lesbiens sortent du placard et deviennent de véritables mines d’or pour les producteurs. Visibilité quand tu nous tiens !


 

À SUIVRE…

Isabelle B. Price (2008)




TOUT EST DANS LES CHAUSSURES...

 

Un billet d'humeur d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 



Cet après-midi, entre deux orages et alors qu'un rayon de soleil perçait les nuages, ma mère m'a confiée après une éprouvante conversation sur la mort et la famille que deux de ses amies avaient des filles lesbiennes. Après avoir bien pleuré en nous livrant sur les précédents sujets, je ne pensais pas que cette révélation me ferait autant rire. Ce n'est pas tant l'« aveu » qui m'a fait rire que la manière dont ma mère me l'a présenté.

Elle a commencé par quelque chose du genre : « Isabelle, il faut que je te dises que deux de mes amies m'ont fait jurer sur la tête de Dieu de ne dire à personne que leurs filles sont lesbiennes. » Déjà, je tiens à dire que je n'ai jamais juré sur la « tête de Dieu » et que cette expression, courante d'après ma mère, date de son enfance. Ensuite, j'ai pensé que deux amies avec une fille lesbienne plus ma mère, ça fait un sacré nombre d'homosexuelles dans cette petite ville. Heureusement que je l'ai quittée (la ville, pas ma mère !).

J'ai demandé à ma mère si elle leur avait répondu qu'elle aussi avait une fille lesbienne mais qu'elle avait le droit de le dire. Ma mère m'a alors regardé comme si cette idée ne l'avait jamais effleurée (j'adore ma maman) et m'a tout simplement avouée que non, elle n'y avait pas pensé.

Elle a poursuivi en disant que l'une le vivait très mal et que la seconde l'avait plutôt bien accepté. La fille de cette dernière a une nouvelle « amie », comme la baptisent ma mère et son amie inconnue. Un jour, cette jeune femme, qui doit avoir à peu près mon âge je suppose, a demandé à sa mère si elle voulait les accompagner et faire les magasins avec elles pour acheter des chaussures.

Ma mère a très bien imité son amie, ravie de faire du shopping avec sa fille. En même temps, elle fait exactement cette tête-là quand moi, je le lui demande. Je subodore que c'est une particularité génétique des mamans que d'aimer faire les magasins pendant des heures et que la mienne n'est définitivement pas une exception.

Ladite amie de ma mère, heureuse, a donc décidé d'accompagner sa fille et son « amie », mais a alors ajouté une réplique magnifique du genre : « Le haut ça va, le pantalon ça passe encore, mais il est hors de question que tu achètes des chaussures de lesbiennes. » Mon fou rire a débuté à cette réplique. L'amie de ma mère a continué à s'enfoncer en disant : « Je ne parle pas d'acheter des chaussures pointues ou des chaussures à talons mais quelque chose d'un peu plus féminin. »

J'imagine très bien la fille de cette femme regarder ses pieds l'air incrédule en disant : « Pourquoi, qu'est-ce qui ne va pas ? Tu n'aimes pas ? » C'est systématiquement ce que je réplique à ma mère quand elle me dit que je suis bien habillée, ce qui arrive un peu plus souvent depuis quelques années que je fais des efforts, mais que mes chaussures sont une horreur.

J'ai beau tout essayer et dire ce que je veux, on en revient toujours à cette question existentialiste des chaussures. Alors j'avoue, j'ai des goûts musicaux de chiottes, j'apprends tout juste à m'habiller correctement mais il est hors de question que je change de chaussures et que je choisisse des pompes qui ne me correspondent pas et où je suis mal à l'aise. Ce qui fait que je continue à mettre d'imposantes baskets (je chausse tout de même du 41) ou de « gros godillots » comme les nomment ma mère, à savoir des chaussures montantes d'allure… je le reconnais, un brin masculin et militaire.

Mais là, ô miracle, j'ai découvert que je ne suis pas la seule. Je ne suis pas unique. Je ne suis pas exceptionnelle. Et au moins une autre fille à travers le monde, enfin à travers la France pour réduire le champ d'investigation, se farcit les mêmes réflexions. Merci ! Merci beaucoup à toi, parfaite inconnue de parvenir comme moi à survivre à ce genre de réflexions. Ça me réchauffe le cœur de découvrir que je ne suis plus seule.


 Isabelle B. Price





LA REPRÉSENTATION LESBIENNE

DANS LES SÉRIES TÉLÉVISÉES


1. Les précurseurs américains.



Une chronique d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 


L'image “http://www.toutelatele.com/IMG/breveon7540.jpg” ne peut être affichée car elle contient des erreurs.The L-Word

Aux États-Unis, la représentation homosexuelle à la télévision s’est initiée dès la fin des années 70 principalement du côté masculin. Rappelons-nous des personnages secondaires gays introduits dans des séries comme Dallas, Dynastie, Melrose Place… et elle a tout simplement explosé durant les années 90.


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Xena, Princesse Guerrière débarque sur les écrans américains en 1995. Spin-off (série dérivée) de la série Hercule, elle conte les histoires de Xena (Lucy Lawless), une prestigieuse princesse autrefois cruelle et maléfique qui lutte aujourd’hui pour la protection de la veuve et de l’orphelin. En quête de rédemption, elle parcourt la Grèce Antique aux côtés de Gabrielle (Reneé O'Connor), sa meilleure amie, une barde bavarde et maladroite. Xena est une femme forte, stoïque, calme, calculatrice et meurtrière. À son opposé, Gabrielle est douce, sensible, bavarde, gauche et refuse de tuer. Leur dichotomie fait leur force et le public lesbien est rapidement séduit par ces deux héroïnes.


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Les auteurs prennent conscience du potentiel de cette relation particulière. Seulement, ne pouvant prendre le risque de s’attirer les foudres des conservateurs, ils vont exceller dans l’utilisation des « subtexts ». Ces « subtexts », comprenez « sous-entendus » en français vont faire le succès de la série. D’accolades en déclarations d’amour voilées, Xena et Gabrielle ouvrent la voie à une plus grande visibilité.


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Mais le coming-out tant attendu intervient dans une autre série télévisées à succès, Ellen. Nous sommes en avril 1997 et Ellen DeGeneres est l’héroïne depuis quatre saisons de son sitcom. Seulement l’audience est en perte de vitesse et la jeune femme, productrice de la série, propose alors un « coup médiatique » à la chaîne. Elle souhaite faire son coming-out depuis quelques temps déjà et a imaginé de le faire grâce à son personnage. L’idée séduit ABC qui accepte. Durant le double épisode « The Puppy Episode », Ellen déclare à l’Amérique entière « Yes. I’m gay ».


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La machine est lancée. Il est trop tard pour faire marche arrière. Les annonceurs et la chaîne retiennent leur souffle alors que le public plébiscite ce double épisode. Le succès est à la fois communautaire et financier. Pour la première fois, une série télévisée offre la possibilité de parler ouvertement d’homosexualité. Même si Ellen est annulée une année plus tard, la révolution est en marche.


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Beaucoup moins médiatique et toujours oubliée, c’est la même année que la série Relativity nous offre le premier baiser lesbien entre deux personnages récurrents. Créée par Jason Katims à qui l’on doit Roswell et produite par Edward Zwick et Marshall Herskovitz (Angela 15 ans et Once & Again), Relativity est une série américaine centrée sur Isabel Lukens (Kimberly Williams) et Léo Roth (David Conrad), un jeune couple qui s’est rencontré lors de vacances en Italie. Autour d’eux gravitent famille et amis dont Rhonda (Lisa Edelstein), la sœur lesbienne de Léo. Rhonda est le premier personnage lesbien récurrent présenté comme tel dès le début et appartenant à la distribution principale !

Malgré ses nombreuses qualités, Relativity peine à séduire le public et ses épisodes sont diffusés sans attirer l’attention, dans une indifférence totale. Pourtant, ce 11 janvier 1997 durant l’épisode « The Day the Earth Moved », a lieu le premier baiser lesbien dans une série télévisée. Rhonda et Suzanne s’embrassent amoureusement, sensuellement et naturellement sans aucune forme de sensationnalisme ou de fantasme masculin. Le pari est gagné et le tollé général n’a pas lieu. En effet, la série comme les autres productions de Zwick et Herskovitz prêche à des convaincus qui ne sont ni offusqués ni offensés. Les conservateurs se plaignent mais leurs attaques sont loin d’être aussi virulentes que celles à l’encontre d’Ellen.

Même si la visibilité lesbienne a mis plus longtemps à apparaître sur le petit écran, le premier baiser homosexuel sera féminin. Inégalités entre les hommes et les femmes, fantasme masculin, acceptation différente sont autant de spécificités qui entraînent des dichotomies dans les représentations gays et lesbiennes. Cela d’autant plus qu’aujourd’hui encore, les relations lesbiennes tendent à être niées sexuellement par certains qui s’imaginent que deux femmes ensemble le sont parce qu’elles n’ont pas trouvé l’homme qui leur convient…


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Et pourtant, malgré tous ces obstacles, la télévision américaine connaît une visibilité lesbienne accrue au cours des années 2000. Tout d’abord grâce à la magnifique série Buffy contre les Vampires créée par Joss Whedon. Apparue sur les écrans américains en 1997, cette série met en scène les aventures de Buffy Summers (Sarah Michelle Gellar), l’élue qui a été choisie pour combattre les vampires, démons et autres forces de l’ombre. Elle est aidée dans sa bataille par ses meilleurs amis, Alex (Nicholas Brendon) et Willow (Alyson Hannigan). Willow est une adolescente timide, secrète, réservée et amoureuse d’Alex depuis toujours. N’ayant aucune chance avec lui, elle tombe sous le charme d’Oz (Seth Green), un joueur de basse et informaticien de génie à ses heures perdues. Mais Oz est un loup-garou qui la quitte pour apprendre à maîtriser son pouvoir. Entrée à la faculté et devenue une sorcière ne demandant qu’à apprendre, Willow intègre un groupe de magie. Là, elle fait la rencontre de Tara (Amber Benson) durant l’épisode 10 de la saison 4 « Hush ». Nous sommes en 1999.


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Durant le reste de la quatrième saison, la relation entre Willow et Tara se développe sans que rien ne soit montré. Tout est sous-entendu mais l’audience gay a compris. La scène du sort de la rose, qui semble vouloir dire au premier abord que le sortilège est difficile, apparaît d’un autre côté comme la métaphore d’un puissant orgasme. Cette représentation métaphorique est un exemple flagrant de la mise en scène de leur relation. Le premier baiser entre les deux jeunes femmes passe totalement inaperçu en février 2001 dans l’épisode « The Body ». Tara rassure la personne qu’elle aime avec un baiser doux et tendre qui empêche Willow de sombrer après le décès de Joyce (Kristine Sutherland), la mère de Buffy et seule figure maternelle de la série. En 2002, la série déménage sur la chaîne UPN et les auteurs deviennent moins frileux. La relation Willow-Tara est mise à égalité avec les autres. Point culminant de cette visibilité, Willow devient folle et menace de détruire le monde après avoir perdue Tara, la femme qu’elle aime. Allant encore plus loin, la septième et dernière saison offre un montage durant l’épisode « Touched » où Willow et Kennedy (Iyari Limon) font l’amour passionnément en même temps que Alex et Anya (Emma Caulfield), Faith (Eliza Dushku) et Wood (D.B Woodside) alors que Buffy s’endort gentiment dans les bras de Spike (James Marsters). Tout cela à grand renfort de piercing sur la langue…


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En mars 2002, Zwick et Herskovitz, encore eux, offrent également un couple lesbien dans la série Once & Again. Katie (Mischa Barton), seize ans avoue son amour à Jessie (Evan Rachel Wood), quinze ans, à travers une lettre et l’adolescente est perturbée et bouleversée par cette découverte. Confrontée à ses sentiments, elle embrasse sa meilleure amie dans un épisode magnifique et inoubliable. Malheureusement, la série sera arrêtée quelques mois plus tard, ne laissant pas aux auteurs le temps de développer cette histoire.


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Urgences, la série à succès, « transforme » Kerry Weaver (Laura Innes), médecin chef et hétéro en lesbienne au cours de la saison 7 avec l’arrivée du Docteur Kim Legaspi (Elizabeth Mitchell). Maggie Doyle (Jorja Fox), plus féministe que lesbienne avait ouvert la voie quelques années plus tôt. Là, Kerry explore ses sentiments pour Kim dans une saison 7 réussie et complexe. La huitième saison, elle, ne convaincra pas avec la relation de Kerry et Sandy Lopez (Lisa Vidal), une femme pompier. En manque d’imagination, les auteurs resservent rapidement une recette réchauffée qui ne trompe personne et enlisent Kerry Weaver dans une mythologie peu intéressante : un désir d’enfant aboutissant à une fausse couche, l’accouchement de Sandy qui refusait de porter un enfant, la mort de Sandy, la bataille de Kerry contre ses beaux-parents pour la garde de son fils… Seul l’épisode 14 de la 11e saison réussira à réintéresser. Kerry retrouve sa mère naturelle et toutes les deux sont confrontées à la difficile question de la religion et de l’homosexualité. Et contre toute attente, Kerry rencontrera une productrice télévisée, Courtney Brown (Michelle Hurd) dont elle tombera amoureuse dans la 13e saison. Elle partira vivre avec elle quand elle sera renvoyée du Cook County par le Docteur Luka Kovac.


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Aux États-Unis, les adolescents et les jeunes adultes restent à la fête en matière de représentation homosexuelle et bisexuelle. Que ce soit avec Newport Beach, Les Frères Scott, Dark Angel et South Of Nowhere, ils sont majoritairement plus représentés.

Mais la véritable révolution en matière de représentation lesbienne à la télévision intervient sur la chaîne Showtime en 2004 avec la série The L-Word. Centrée exclusivement sur des lesbiennes bourgeoises de Los Angeles, elle conte les histoires de Bette Porter (Jennifer Beals), en couple avec Tina Kennard (Laurel Holloman) depuis plus de 7 ans et rêvant d’un enfant avant de la tromper, de la perdre et de la retrouver ; de Jenny (Mia Kirshner) qui arrive en ville et retrouve l’homme qu’elle aime, Tim Haspel (Eric Mabius) avant de succomber au charme de la mystérieuse Marina (Karina Lombard) et de devenir une romancière connue ; d’Alice Pieszecki (Leisha Hailey), la bisexuelle de la bande qui réalise bientôt qu’elle préfère définitivement les femmes, tombe amoureuse de sa meilleure amie, la perd, fait une grave dépression avant de se reprendre et de tomber amoureuse d’une militaire ; de Shane (Katherine Moennig), la Don Juan du groupe qui tombe amoureuse d’une femme mariée avant de rencontrer Carmen (Sarah Shahi), une superbe latino qu’elle demande en mariage mais abandonne aux pieds de l’autel…


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Avec The L-Word, Showtime a quadruplé son audience en 2004. Alors que le public a rapidement plébiscité la série, les critiques ont été moins unanimes. Pourtant, aujourd’hui la 5e saison vient de s’achever outre-atlantique et l’on sait déjà que huit épisodes clôtureront la sixième et dernière saison l’année prochaine. Le reproche principal ayant été fait à cette série est de ne pas représenter tous les types de lesbiennes, de rester trop communautaire et de ne montrer que des « lipsticks lesbians ». En même temps, rappelons-nous du début, où les femmes amoureuses n’avaient même pas la possibilité de se tenir par la main sur les écrans américains…


 

À SUIVRE…

Isabelle B. Price (2008)





LE COMING-OUT : UNE OBLIGATION

SCÉNARISTIQUE PÉJORATIVE ?


Une chronique d'Isabelle B. Price, d'
Univers-L

 



Le coming-out est à la communauté homosexuelle ce que sont les arts martiaux aux asiatiques, ce qu’est le racisme aux noirs et le sexisme aux femmes : une caractéristique obligatoire et bourrée de clichés. Le cinéma et la télévision ne se sont pas gênés et ne se gênent toujours pas, d’ailleurs, pour explorer et exploiter ce sujet jusqu’à saturation. Rien d’exceptionnel et de nouveau. Une chose a cependant retenu mon attention, les différentes étapes avant le coming-out fatidique et les conséquences de ce dernier.

Commençons par les différentes étapes de l’acceptation de l’homosexualité (reprises des étapes de la théorie de Vivienne Cass).



I) LES DIFFÉRENTES ÉTAPES DE L’ACCEPTATION DE L’HOMOSEXUALITÉ :
 

Tout d’abord, comme dans la réalité, le jeune gay ou la jeune lesbienne (puisque les caractéristiques sont communes au cinéma homo) prend conscience de sa différence et de son attirance pour le même sexe. Soit il tombe amoureux d’un hétéro, cas le plus difficile puisqu’il ne peut espérer aucune réciprocité comme dans Edgemont, La Rumeur, All Over Me, Anne Trister… (c’est assez répandu), soit il succombe au charme d’un(e) homosexuel(le) qui se sait déjà homosexuel(le) (Aimée & Jaguar, Un Autre Regard, But I’m A Cheerleader…).



Même si ce cas est le plus courant, il ne faut pas faire l’impasse sur ces longs métrages ou séries qui ignorent cette étape en présentant des personnages, souvent adultes qui ont toujours su qu’ils étaient gays mais le cachent volontairement à leurs parents et famille. Ils vivent leur sexualité de manière libérée et fière jusqu’à ce que leur compagnon ou compagne (Floored By Love, Que faisaient les Femmes…) ou amis (Pourquoi Pas Moi ?) ne les obligent, en les mettant au pied du mur, à faire leur coming-out et à s'assumer face à leur famille.



1°/ La Confusion :

Après cette prise de conscience de ses sentiments plus qu’amicaux pour un ou une ami(e), le jeune gay ou la jeune lesbienne passe par une étape de confusion. Forcément. C’est très rarement simple et à ce moment-là, il se pose un demi milliard de questions (un milliard ça aurait fait trop). Soit il le fait en voix off comme Jane dans Le Secret de Jane, soit il écrit des poèmes comme Shannon dans Edgemont ou Katie dans Once & Again. Le fait est que c’est la confusion totale dans son esprit. Il ou elle commence à s’interroger sur son orientation sexuelle et envisage la possibilité d’être homosexuel(le).

2°/ La Comparaison :

C’est le moment où le personnage homosexuel a intégré la probabilité comme une grande possibilité et qu’il se compare aux hétérosexuels. Il prend conscience de ce qu’il n’aura pas et des différences que cette sexualité différente implique. C’est la période que les auteurs et les réalisateurs préfèrent visuellement à mon avis. Celle où ils montrent des couples hétéros se tenant par la main, marchant tendrement enlacés et où le héros ou l’héroïne regarde avec envie. Il peut leur arriver d’aller encore plus loin en montrant des parents avec leurs enfants courant et souriant. Désespoir total et isolement maximum.



3°/ La Tolérance :

Heureusement à ce moment-là, le jeune gay ou la jeune lesbienne se met à intégrer qu’il est homo et ressent le besoin de rencontrer des personnes qui lui ressemble pour pouvoir se confier. Et pour l’aider, on lui trouve souvent un lointain ami gay (quand même, on ne va pas être trop dur non plus) Le Secret de Jane, Le Club des Coeurs Brisés, It’s In The Water
Le héros ou l’héroïne a accepté l’idée mais il a toujours honte. Il vit une sorte de double vie où il sait qui il est mais où les autres l’ignorent (sauf certains privilégiés).

4°/ L’Acceptation :

Il finit par accepter totalement sa sexualité au prix d’un effort surhumain et consent à la vivre pleinement. C’est en général le moment où se dessine le coming-out parce que le jeune gay ou la jeune lesbienne n’a pas le droit de souffler. Les étapes suivantes du développement de l’identité par Vivienne Cass que sont la fierté et la synthèse n’arriveront qu’après, dans longtemps, très longtemps.



Trois solutions à ce moment-là. La première, il ou elle se sent prêt à assumer et provoque une discussion avec sa famille en ayant la ferme intention de leur révéler la vérité. La seconde, il ou elle ne se sent pas prêt(e) mais tous ses amis ou celui ou celle qui partage sa vie ne le supportent plus et lui posent un ultimatum pour qu’il sorte du placard. Dernière option la découverte fortuite au cours d’un baiser (It’s In The Water) ou pire, d’un déshabillage en règle (South of Nowhere).



II) LE COMING-OUT :

Et malheureusement dans une grande majorité des histoires de coming-out, celui-ci se déroule extrêmement mal. Heureusement que d’autres histoires ignorent ce sujet, sinon ce serait déprimant. D’aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais vu une série ou un film où les parents du jeune gay ou de la jeune lesbienne déclaraient, lors de cette découverte : « Je m’en doutais » ou bien « Et tu pense que ta sexualité va changer quelque chose à l’amour que je te porte, tu restes mon enfant, ma chair et mon sang. » Aucun. Jamais. [Je sens que ce point-là va faire débat. (Note de Daniel C. Hall)]

La plupart du temps, le coming-out se déroule donc mal. Toutes les réactions ont été dépeintes de ce côté-là. Pour vous donner une idée et sans rentrer dans les détails, dans tous les films, lorsque les parents font face au coming-out de leur enfant, ils passent par les cinq étapes du deuil définies par Elisabeth Kübler-Ross. Systématiquement. Et ce n’est pas une blague. Alors bien sûr, je vous l’accorde, ils restent principalement bloqués sur les trois premières étapes mais n’empêche.



1°/ Le Choc et le Déni :

C’est systématique. Le meilleur exemple : la mère de Spencer dans South of Nowhere ! Ça c’est du choc ! La mère d’April dans April’s Shower est également pas mal du tout.
Facile à expliquer, cette étape est caractérisée par la sidération. C’est la bouche grande ouverte, le sourcil levé, le malaise avec évanouissement, le choc dans toute sa splendeur.

2°/ Le Déni :

Caractérisé par la phrase  « Non, pas mon enfant ! » (avec un ton dramatique, je vous prie, on est au cinéma tout de même) ou alors « Oh… Mon… Dieu… » et pour les bilingues « Oh… My… God… »
Pour faire simple, les interlocuteurs refusent d’entendre l’information. « C’est pas vrai ! C’est pas possible ! » sont autant d’exclamations que vous retrouverez dans la bouche des mamans lors des coming-out cinématographiques et télévisées. Et elles savent les accompagner de belles mimiques et grimaces.
L’information choquante est refoulée et refusée. Parfois cette étape peut passer très rapidement et parfois, elle peut durer très longtemps. Un exemple ? La mère de Wil dans Saving Face. Elle a découvert sa fille au lit avec une autre femme il y a plusieurs années et continue à lui présenter des hommes et à tenter de la marier. Si c’est pas du déni, je sais pas ce que c’est.

3°/ La Colère :

La phase préférée de la plupart des cinéastes, réalisateurs et scénaristes. L’information a été intégrée mais elle est trop douloureuse. Les parents se révoltent et réagissent de manière violente et agressive, rarement contre eux, principalement contre leur enfant.
Les exemples de parents perdant le contrôle sont nombreux. Je peux à nouveau citer South of Nowhere qui, pour une série adolescente a osé aller très loin dans la réaction violente de la mère à l’encontre de la petite amie de sa fille. Le Secret de Jane va également loin comme Benzina, Treading Water
Les critiques infondées, la culpabilité, le blâme font partie de cette étape de colère. Elle regroupe toutes les réactions négatives du coming-out. C’est extrême, violent, dangereux, ça fait peur, ça secoue, c’est génial pour l’audience en somme. Génial pour l’audience mais pas pour les jeunes téléspectateurs gays ou lesbiens. Vous parlez d’un exemple, tout se passe mal !



L’étape suivante, la dépression symbolisée par une période d’abattement, de tristesse et de désespoir est peu représentée. Elle est tellement moins accrocheuse et glamour qu’il est très facile de faire l’impasse dessus. On arrive directement à la résignation puis à l’acceptation.

Mon problème est donc bien cette représentation extrêmement négative du coming-out. Pourquoi doit-il forcément mal se dérouler, pourquoi doit-il systématiquement être si violent ?
On peut explorer différentes pistes de réflexion.

1) L’aspect rentable : Le drame pour faire de l’audience. Principe facile à énoncer mais qui a fait ses preuves. La violence, même gratuite, attire les spectateurs.

2) L’aspect positif : Une manière de mettre en garde les jeunes homosexuel(les) contre les dangers de l’homophobie en leur montrant des images choquantes et en leur expliquant qu’ils ne connaissent jamais vraiment ceux qui les entourent. Une mise en garde. De la prévention en quelque sorte.

3) L’aspect négatif : Une condamnation flagrante de l’homosexualité à travers les fictions. Un moyen politiquement correct de dire que l’homosexualité est un pêché condamnable, renforcé par le fait que les jeunes ayant fait leur coming-out souffrent.



4) L’aspect politique : Reprise du vieil adage « Pour vivre heureux, vivons cachés ». Une sorte de mise en garde contre les méfaits de la visibilité et des revendications homosexuelles.

5) L’aspect religieux : Succomber à la tentation et oser avouer ses péchés vous donne droit à un aller direct pour l’enfer.

6) L’aspect sociologique : Non, l’homosexualité n’est plus un crime, on remplace la prison par les séances de psychanalyse (demandez donc à la mère de Jane dans Le Secret de Jane).



En gros, rien de très réjouissant. Et pourtant, contrairement à ces représentations négatives, il arrive de plus en plus régulièrement que le coming-out se déroule très bien dans la réalité. J’exhorte donc les auteurs, scénaristes, réalisateurs et producteurs à oser dépasser ces clichés péjoratifs pour offrir des représentations positives à la jeune génération. Un peu de bonheur donnerait du courage.

Enfin il reste tout de même les séries et films sans coming-out ou alors les parents compréhensifs et fiers de leurs progénitures malgré ces différences. Tout le monde avec moi devant A Family Affair et Nina's Heavenly Delights.

Isabelle




HISTOIRE DE FILMS LESBIENS OU QUAND UNE HÉTÉRO TOMBE AMOUREUSE D'UNE LESBIENNE

Une chronique d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 

Hight Art


Dernièrement en regardant les films étiquetés lesbiens sous un jour différent, j’ai pris conscience d’un fait étrange. Régulièrement, des héroïnes hétérosexuelles qui se considèrent comme telles dès le générique d’introduction tombent amoureuses de lesbiennes. J’ai réfléchi, tenté d’agrandir la liste de films et réalisé que ce schéma se répétait très souvent.

J’ai donc essayé de savoir pourquoi. En effet, une découverte de ce genre doit forcément amener un semblant de réflexion. Parce que lorsque vous y réfléchissez quelques secondes, le scénario, une femme ordinaire à qui la vie réussit rencontre une autre femme qui l’attire irrésistiblement et dont elle tombe amoureuse, ça vous rappelle quelque chose.

Oui, ça vous rappelle des réalisations allant de When Night Is Falling à Imagine Me & You en passant par High Art, It’s In The Water, Fire, D.E.B.S., But I’m A Cheerleader, The Incredibly True Adventures Of Two Girls In Love, Fucking Amal, Loving Annabelle et j’en oublie volontairement.


 

Imagine Me & You

 


Le point commun de ces longs métrages ? Leur cible. Le public lesbien. Leur autre point commun ? Une hétérosexuelle sexy en couple avec un homme ennuyeux qui réalise petit à petit que ce dernier ne la comprend pas. Elle rencontre alors une femme, notre lesbienne en question qui se définit très souvent rapidement comme telle.

On sait dès les premières minutes que Luce (Imagine Me & You) est lesbienne ; sa déclaration à Heck en témoigne quand il lui demande si elle envisage de se marier, elle répond « Maintenant que les lois ont changé. » et devant son regard interrogateur et sa question elle ajoute « Je suis gay. » Les autres personnages lesbiens sont souvent déjà définis par leur sexualité dès le début du long métrage de manière à faire gagner du temps. Dans High Art, D.E.B.S., But I’m A Cheerleader, The Incredibly True Adventures Of Two Girls In Love, c’est clair dès le premier instant.


 


Maintenant, d’où vient cette ligne narrative commune et quelque part relativement banale où une femme qui s’est toujours considérée comme hétérosexuelle tombe amoureuse d’une autre femme ? Est-ce le désir de la scénariste ou de la réalisatrice, qui sont lesbiennes la plupart du temps (pas tout le temps non plus mais très régulièrement tout de même) ?

On peut effectivement se demander si ce n’est pas une manière de s’approprier une histoire racontée pendant des siècles par des hommes hétérosexuels qui desservait la communauté lesbienne. En s’appropriant cette trame archi-connue, en la détournant et amenant les deux héroïnes à tomber réellement amoureuses et à vivre une passion vraie, les lesbiennes ne deviennent-elles pas maîtres d’une culture qui les a souvent montré comme des victimes suicidaires ? Ce serait ainsi une manière de s’affirmer en criant au monde, on sait qui on est, on n’en a pas honte et on peut séduire n’importe qui. Il serait question de libération, de pouvoir et de reconnaissance. Une femme ne serait pas ici moins qu’un homme mais son égale puisqu’elle parvient à détourner durablement une femme des bras de ce dernier.


 

Loving Annabelle


Il ne serait plus question de victime ou d’absence de reconnaissance d’une relation, il serait alors question d’égalité entre les sexes. Une égalité entre les femmes et les hommes. En effet, si une femme parvient à séduire une autre femme déjà en couple avec un homme, homme souvent parfait d’ailleurs, et l’amène à l’aimer en retour, il n’est plus question de cet à priori encore répondu qui veut que les lesbiennes sont lesbiennes parce qu’elles n’ont pas trouvé l’homme qui leur convient. Ce serait valider une existence et une relation.

Si l’on continue du côté des scénaristes-réalisatrices, est-ce qu’elles se contentent de reprendre un fantasme lesbien connu, à savoir ce rêve de parvenir à convertir une hétéro ? Je veux dire est-ce un fantasme qu’elles ont et qu’elles mettent en image pour le reconnaître ou, d’une autre manière, comme ce long métrage est destiné à un public lesbien, ont-elle conscience des attentes de ce public et donc choisissent-elles ce sujet pour plaire à leur public ? Est-ce une manière de dire aux lesbiennes, je suis comme vous, je sais ce que vous voulez, je vous ai entendu ? Est-ce donner vie à un fantasme féminin dans une sphère masculine qui les nie en permanence ?


 

Imagine Me & You


Autant de questions que l’on est en droit de se poser, surtout quand on réalise que les films lesbiens sont souvent calqués sur ce même schéma. Cette rencontre, cette montée du désir qui devient étouffant, ces actes manqués qui débouchent finalement sur le baiser tant attendu. Parce que si vous essayez de vous souvenir de tous ces baisers dans les films lesbiens, vous verrez qu’ils sont toujours très travaillés. Je veux dire, ils n’apparaissent pas comme le début de quelque chose mais plutôt la fin d’une attirance, d’un désir, d’une passion. Ils sont désirés à la fois par les deux héroïnes qui se sont tournées autour pendant longtemps et par les spectatrices qui ne rêvent que de les voir se rapprocher vraiment. Un moment où les souhaits des personnages rejoignent ceux du public et permettent une identification réelle.

C’est comme si ce baiser revêtait une signification particulière. Le franchissement ultime de l’interdit pour notre héroïne hétérosexuelle ? Mais pourquoi ? Dans la plupart des comédies romantiques hétérosexuelles, les baisers n’ont pas autant d’importance. Dans la plupart des films hétérosexuels,  ils ne sont pas aussi attendus et calculés. Ici, ils donnent le sentiment de représenter le summum de la passion, du désir, la transgression de l’interdit, le moment clé du film.


 

When Night is Falling


Si l’on y réfléchit, ils ont parfois plus de valeur que la scène d’amour qui n’arrive souvent pas tout de suite mais après quelques minute supplémentaires. Comme s’il était nécessaire de dissocier le baiser de la scène d’amour. Le baiser qui serait l’aboutissement de l’amour ressenti et sentimental parce que pas encore totalement accepté vu comme les héroïnes se tournent autour et la scène d’amour où l’amour serait vécu et physique. Une manière de dissocier les deux ? Pas certain au vu de scènes d’amour guimauve à l’eau de rose totalement éloignées de la réalité où tout est doux et gentil. Un besoin de refuser le physique et de rester sur la sentimentalité ?

Dans les films lesbiens, le baiser est toujours un instant partagé et voulu. Il n’est jamais forcé. Il a quelque chose de profondément respectueux. Une découverte souhaitée, un respect partagé, un désir commun. Sa signification est profonde. Il a plus d’importance que l’amour physique où le corps de la femme ne possède pas cette force. Comme si l’on savait que ce corps pouvait être violé et maltraité. Ici, le baiser impose un partage total de l’âme. Une réelle connexion que ne véhiculent jamais les scènes d’amour ou de baise. Il amène leur relation à un plan beaucoup plus intellectuel et sentimental que physique.

C’est comme si ces histoires avaient été créées en réaction à tous ces films pornographiques masculins mettant en scène des lesbiennes. Le propos n’est pas : non, les lesbiennes n’aiment pas le sexe. Non. Le propos est plutôt : regardez, deux femmes peuvent être vraiment amoureuses l’une de l’autre sans que vous n’ayez même conscience de ce que cela implique.

 

Imagine Me & You

 

Et pourtant cette absence d’érotisation des relations lesbiennes ne me semble pas la solution pour répondre à cette exploitation masculine. Des réalisations nouvelles du genre de Loving Annabelle, Saving Face et surtout The L-Word me semblent plus intéressantes. Elles apportent un réalisme manquant à de nombreuses créations plus politiquement correctes.

D’un autre côté, si l’on prend au premier degré cette rencontre et ce désir naissant d’une femme pour une autre femme, on réalise que la notion de sexualité dépasse la simple étiquette, hétéro, bi et gay. Il n’est plus question de catégorie, de boîte de rangement mais de l’amour d’une personne pour une autre personne. Bien sûr, la question du sexe entre forcément en ligne de compte mais parfois ce n’est pas le sujet principal du long métrage comme dans Loving Annabelle ou Imagine Me & You.

 

Fucking Amal

 

Il est également question de s’accepter tel que l’on est sans avoir honte de ce que l’on ressent. Parce que l’héroïne hétéro se pose obligatoirement une multitude de questions et s’interroge sur qui elle est. Mais la beauté de l’amour qu’elle porte à cette autre femme dépasse le sentiment de malaise qu’elle pourrait ressentir et lui permet d’être enfin elle-même.

En refusant de catégoriser une fois pour toute les personnages principaux et en ne les définissant pas entièrement par leur sexualité, ces films lesbiens ne jouent-ils pas un rôle primordial dans la banalisation de l’homosexualité et de la bisexualité ?

Parce que comme le dit si bien Shane dans The L-Word : « Sexuality is fluid, wether you’re gay, straight or you’re bisexual you just go with the flow...” » (« La sexualité est fluide, que tu sois gay, hétéro ou bisexuel tu as juste à te laisser porter par le courant… »)

Isabelle





TROIS ASPECTS DE LA REPRÉSENTATION LESBIENNE  :
L'ASPECT PHYSIQUE, SOCIOLOGIQUE ET PSYCHOLOGIQUE

Une chronique d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 

The L-word


L'ASPECT PHYSIQUE

Le stéréotype physique de la lesbienne. Le stéréotype est une idée toute faite, une image sortie d'un moule. Ce mot est d'ailleurs issu du procédé typographique qui permet de réaliser et de reproduire des images fixes. Il s'agit ici des caractéristiques superficielles et communes censées représenter les homosexuelles. En réduisant ces femmes à une attitude, une opinion, un physique, elles sont simplifiées à l'extrême et le public se fait une opinion fausse et erronée concernant celles-ci. La représentation des lesbiennes est alors incomplète, trompeuse, éloignée de la réalité et totalement fausse.

La population imagine, la plupart du temps, les lesbiennes comme des « camionneuses ». Elles portent les cheveux courts, des vêtements masculins et militaires, de grosses chaussures type rangers. Elles ont de nombreux percings, une rangée de boucles d'oreilles, un tatouage tribal sur le bras, fument comme des pompiers et refusent de s'épiler. Le stéréotype est certes poussé à l'extrême mais il reprend les grandes lignes.

 


Il est cependant appréciable de constater qu'aujourd'hui, cette représentation n'existe ni au cinéma ni à la télévision. Bien au contraire. En effet, conséquences de l'ultra féminisation dans les médias, de la vague de porno chic dans la publicité, de la banalisation du sexe et de la sexualité, cette image est véritablement entrain de changer.

Aujourd'hui, la représentation des lesbiennes dans les séries télévisées et au cinéma a beaucoup évolué. On assiste à une sur-représentation des « lipsticks lesbians » au détriment des « butchs »dites camionneuses. Les lipsticks lesbians reflètent la nouvelle manière de montrer l'homosexualité féminine aux États-Unis. The L-Word en est la preuve flagrante et éclatante. Ces femmes revendiquent leur féminité de façon ostentatoire. La beauté est leur arme, leur moyen de s'émanciper.

 

The L-word

Le fait est qu'à travers cette représentation, les homosexuelles et les hétérosexuelles sont difficiles à différencier. Parce qu'elles sont belles et séduisantes, parce qu'elles n'arborent pas de signes distinctifs, ces nouvelles lesbiennes ne choquent pas, n'effrayent pas et se fondent dans la masse. Elles séduisent les hommes au même titre que toutes les femmes et leur physique avantageux leur permet de survivre dans un média où l'audimat masculin ne peut être ignoré tant il est important et puissant.

Exemple typique de cette nouvelle manière de représenter les homosexuelles et de les montrer, l'épisode 12 de la saison 1 de The L-Word intitulé « Libération » ou « Looking Back » en Version Originale où les héroïnes se rendent au Dinah Shore Week-End à Palm Springs (Californie). À l'origine de ce rassemblement qui existe réellement, deux femmes, Robin Gans et Sandy Sachs. En 1992, ces deux américaines ont fait leur coming-out dans le célèbre New York Times. Robin, diplômée en psychologie et enseignante à l'université, déclarait récemment à ce sujet : « C'était la première fois que des homosexuelles féminines et « d'apparence normale » sortaient du placard en public. Nous avons motivé des milliers de femmes à faire de même. Il arrive trop souvent que les lipsticks n'avouent jamais leur sexualité et se camouflent parmi les hétéros. Beaucoup sont venues nous remercier et nous demander de fonder un lieu de rencontre pour elles. Nous avons alors ouvert le Girl Bar à Los Angeles et multiplié les apparitions télévisées » . Depuis, ce rassemblement à lieu chaque année et dure trois jours et trois nuits. Une aubaine pour les auteurs adeptes de corps somptueux, de sensualité, de baisers saphiques et en même temps de normalité, de banalité et d'acceptable.


The L-Word

 

Parce que comme l'a si bien précisé Sandy Sachs, les lipsticks lesbians sont rassurantes et ne choquent pas. Elles donnent une image tout à fait acceptable de l'homosexualité, une image qui ne heurte ni les hommes ni les parents puisqu'elles sont et demeurent des femmes séduisantes. « Le fait que nous soyons un couple équilibré et heureux rassure beaucoup de parents. Nombre d'entre eux nous ont écrit être parvenus plus facilement à accepter la sexualité de leur fille après avoir écouté nos témoignages ».

Alors que la butch choque parce qu'elle se pare d'attributs masculins et menace de prendre la place des hommes qu'elles castrent dans leur virilité, les lipsticks revendiquent leur féminité et leur sensualité et ne sont en rien inquiétantes.

 

Ally McBeal

 

L'ASPECT SOCIOLOGIQUE

Un stéréotype répandu veut que les lesbiennes qui travaillent, occupent des postes hauts placés et à responsabilités.


Ally McBeal

 

À partir du moment où une femme demeure à un poste important dans une société, une entreprise ou autre, à partir du moment où une femme se trouve à un poste de direction, qu'elle est toujours célibataire et qu'elle a dépassé la trentaine, ce cliché veut que cette femme soit homosexuelle.


Fastlane (Billie)

 

Les scénaristes se sont servis de cette idée dans la série Fastlane où ils ont volontairement sous-entendu que Billie était peut-être lesbienne. Et cet a priori a également été exploité dans la série Preuve à L'Appui où Jordan qui est une femme médecin forte et indépendante avoue ouvertement qu'elle n'est pas homosexuelle pour rassurer l'audience masculine. Ce n'est pas parce qu'elle fait un travail prenant et difficile, qu'elle est toujours célibataire alors qu'elle a eu trente ans qu'elle est homosexuelle pour autant.

 

Preuve à l'appui (Jordan)

 

Ce stéréotype est malgré tout toujours présent même s'il tend à disparaître avec l'acceptation du travail des femmes et la position à des postes clés à responsabilités de femmes de plus en plus qualifiées. Des séries comme Sex & The City ont fait énormément évoluer les mentalités. Celle-ci a indiscutablement changé la représentation des célibataires hétérosexuelles de plus de trente ans. Bridget Jones dans un registre différent mais tout aussi délirant a permis l'émancipation des hétéros trentenaires au cinéma.

Il n'empêche que les lesbiennes à la télévision et au cinéma semblent toujours appartenir à des milieux aisés et avoir un métier intéressant et passionnant extrêmement bien rémunéré. Une représentation très loin de la réalité lorsque l'on sait qu'à travail égal et à formation identique, les femmes restent toujours moins rémunérées que les hommes. Et donc, dans la grande majorité des cas, les couples d'homosexuelles gagnent moins qu'un couple hétérosexuel qui lui-même gagne souvent moins qu'un couple gay.

 

Queer as folk (US)

 

L'ASPECT PSYCHOLOGIQUE

Quelles qualités possèdent aujourd'hui les homosexuelles lorsqu'elles sont représentées à la télévision et au cinéma ?

Dans ce domaine également, l'évolution a été considérable, il s'agit peut-être de la plus grande évolution dans la représentation des lesbiennes. Aujourd'hui, celles-ci sont majoritairement des femmes fortes, indépendantes et réfléchies. Elles ont généralement la trentaine, une situation confortable et si elles ne sont pas en couple depuis plusieurs années avec l'idée de faire un enfant, elles sont encore à la recherche du Grand Amour.

 

Buffy contre les vampires (Willow et Tara)

 

Les adjectifs pouvant qualifier les homosexuelles dans les séries télévisées telles que Queer As Folk, Urgences, Buffy contre les Vampires, Dark Angel, Fastlane, Xena, Preuve à l'Appui et bien d'autres encore ne manquent pas.

Elles sont : fortes, travailleuses, combattives, fières, intelligentes, réfléchies, sensibles, à l'écoute, compréhensives, rassurantes, aimables, indépendantes et exceptionnelles.

Les homosexuelles dans les séries télévisées et au cinéma ne sont plus passives comme autrefois. Elles ne sont plus victimisées comme dans les années cinquante, soixante avec des films comme Jeunes filles en uniformes, réalisé en 1958 par Geza Von Radvanyi. De nos jours, elles s'imposent comme des femmes fortes et volontaires qui ont le droit au bonheur comme tout le monde.



Quelques personnages rompent cependant avec cette nouvelle représentation des lesbiennes. Tara dans la série Buffy contre les Vampires et les adolescentes comme Jane dans Le Secret de Jane et Shannon dans Edgemont. Elles se différencient des autres parce qu'elles sont douces, sensibles, parfois fragiles et moins agressives que leurs consoeurs. Elles semblent vivre simplement sans aucune revendication et contrastent avec ces autres femmes parfois trop revendicatives. Ces dernières revendiquent un choix de vie, une sexualité différentes et le droit d'exister. Un grand pas en avant mais l'homogénéité qui règne aujourd'hui dans leur représentation et leur grande absence de défauts dans la majorité des cas fait qu'elles finissent par devenir légèrement énervantes.

 

Edgemont (Shannon)

 

Une grande avancée dans la représentation lesbienne qui ne doit pourtant pas tomber dans le systématique et le similaire au risque de perdre toute la diversité qui règne dans la communauté homosexuelle.

Cependant, cette image très progressiste doit être nuancée. Ces lesbiennes ont le droit d'exister parce qu'elles tiennent toutes des propos politiquement corrects, parce qu'aucune n'est choquante ou effrayante et parce qu'aucune n'est sexiste ou trop ouvertement féministe. Elles doivent à tout prix plaire aux hommes sans les menacer pour s'assurer leur audience. Elles sont obligées être parfaites et bien sous tous rapports pour plaire aux mères de famille et à la ménagère de plus de 50 ans qui doivent les trouver et les juger « normales » pour ne pas sentir agressées. Et il faut qu'elles possèdent toutes les qualités citées plus haut pour satisfaire le public homo. Pas évident !

 

Ellen DeGeneres du sitcom Ellen

 

CONCLUSION

La représentation lesbienne est en constante évolution mais elle est toujours engluée dans des stéréotypes qui nuisent à une vision réaliste des lesbiennes à la télévision et au cinéma.
Toujours préoccupés par la question des taux d'audience, les scénaristes et réalisateurs cherchent avant tout à satisfaire le plus grand nombre. Mais plaire aux masses se fait ici au détriment de l'originalité.

Isabelle



 

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