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Fiche technique :
Avec Jake Gyllenhaal, Heath Ledger, Michelle Williams, Anne Hathaway, Randy Quaid, Linda Cardellini, Anna faris, Scott Michael Campbell et Kate Mara. Réalisé par Ang Lee. Scénario : Larry McMurty et Diana Ossana, d’après la nouvelle d’Annie Proulx. Directeur de la photographie : Rodrigo Prieto. Compositeur : Gustavo Santaololla et Rufus Wainwright.
Durée : 134 mn. En salle le 18 janvier 2006.
Résumé :
Eté 1963, Wyoming.
Deux jeunes cow-boys, Jack et Ennis, sont engagés pour garder ensemble un troupeau de moutons à Brokeback Mountain.
Isolés au milieu d'une nature sauvage, leur complicité se transforme lentement en une attirance aussi irrésistible qu'inattendue.
À la fin de la saison de transhumance, les deux hommes doivent se séparer.
Ennis se marie avec sa fiancée, Alma, tandis que Jack épouse Lureen.
Quand ils se revoient quatre ans plus tard, un seul regard suffit pour raviver l'amour né à Brokeback Mountain.
L’avis de Ron (Les mémoires d’un infirmier) :

Il y avait quelque chose de désespérant dans Brokeba
ck Mountain, quelque chose de terrible et d’inéluctable qu’on sentait venir dès les premières images.
Je me suis senti oppressé pendant tout le film, malgré les paysages de montagne, les rivières, les arbres et les moutons. Je me suis senti enfermé, seul et, au bout d’une heure, je regardais déjà ma montre en pestant de n’être qu’à la moitié du film.

Assis à côté d’un type qui sortait d’un abri anti-atomique pour la première fois depuis 30 ans, (timide et hautement improbable) scène de sexe entre hommes, réaction du mec : « Oh putain, oh putain, mais c’est pas vrai, c’est pas POSSIBLE ! »

Assis au milieu de crétins gloussant et éclatant même de rire au milieu de la scène la plus dramatique du film (l’épouse se rend compte que son mari est gay) comme s’ils regardaient George Beller sur la scène du Théâtre des Variétés, dans un vaudeville de boulevard avec hôtesses de l’air, portes qui claquent et femmes de chambre. Le public, hilare, n’en pouvait plus du malheur de cette femme, passant à mille lieues de la vision du réalisateur. Détail atroce, son sac à main sur l’épaule, détail sublime, cette larme qu’elle contient à grand peine et qui emplit son œil. Excellente prestation.

Assis devant un Ang Lee, réalisateur médiocre et surestimé alternant films ridicules (Hulk), chiants (Raisons & sentiments) ou ridicules et chiants (Ride with the Devil), voire beaux mais chiants (Tigre & Dragon) bref, autant d’œuvres dont je ne suis pas fan et qui me le font classer dans la catégorie des mecs qui ne savent pas faire concis (2h15 pour une nouvelle de quarante pages, il faut que ce soit dit), qui ne savent pas faire du majestueux (fallait faire péter le cinémascope sur ce coup-là, enfin).

Un mec pas doué.

Le film traite d’une histoire d’amour virile entre deux types qui ne savent pas communiquer et qui se parlent peu, de toute façon, quand ils en ont l’occasion. Je suis toujours un peu agacé par les love stories impossibles à la Route de Madison que je trouve faciles à écrire, à raconter.

Ah, le Drame, quel genre digne des plus grands artistes !

La Souffrance, c'est noble, c'est beau, presque...

On appelle ça des reliquats judéos-chrétiens, vous aviez deviné de vous-même, n'est ce pas ?
Ça fait le bonheur des psychanalystes depuis des décennies.
Dans ces histoires lacrymales, les héros ne se remuent pas assez le cul pour donner une chance à leur amour, ils restent assis comme des cruches à regretter l’autre, à ne pas oser, ils restent désespérément dans leur malheur contemplatif et, finalement, ne s’aiment pas tant que ça.

Oui.

J’estime, pour ma part, que l’amour donne la foi, l’envie d’abattre les montagnes, de combattre les éléments, l’envie de traverser le pays puis l’enfer à pied pour en revenir avec l’autre, l’amour donne le pouvoir de tout quitter, de ne plus réfléchir.

L’amour, le vrai, c’est ne plus se poser de questions.

Deux détails m’agacent, dont personne ne parle.

1) Cliché homosexuel par excellence : le plus sensible des deux gays, le plus amoureux, celui qui pleure de ne voir jamais l’autre, se fait forcément mettre, est forcément passif (« c’est une femme pour pleurer autant, hein, donc il ne domine pas sexuellement »).

Comme si la virilité avait quoi que ce soit à voir avec la pénétration. N’importe quoi.

2) Les maquillages sont ratés, et l’histoire se passant sur vingt années, voir des ridules puis des rides apparaîtrent sur les visages des garçons, mal dessinées, mal réalisées, gâche un peu le plaisir, preuve supplémentaire de l’amateurisme d’Ang Lee filmant en très gros plan des regards ou des expressions de ces héros. L’artifice saute aux yeux.

Edit :
Pas du tout d’accord avec Garoo qui juge le titre polémique. Il faut penser aux 59 millions de Français qui n’habitent pas dans le Marais et qui se tapent comme de l’an 40 des pratiques sexuelles ethnocentrées de 1 500 tafioles résidant sur quatre rues.
Je le cite: « Au fait… si la nouvelle date de 1997, l’auteur n’a aucune excuse pour avoir choisi un nom aussi… euh, équivoque. (À part celle d’être une femme et d’avoir soixante ans, donc de ne pas être très au fait des pratiques sexuelles déviantes de la fin des années quatre-vingt-dix ».

Edit 2 :
Me réservant le droit d’être totalement de mauvaise foi pour étayer mes dires, de temps en temps, j’avoue humblement avoir adoré Ice Storm d’Ang Lee. Mais c’est l’effet Sigourney Weaver uniquement.
*

(Pour le beau Jake)

L’avis de Dragibus :

Pourquoi suis-je allé voir Brokeba
ck mountain ?
Un film de pd, un « western gay » comme le scande la presse haut et fort ! Certainement.

J'ai détesté ce film, il n'a suscité en moi que de la haine, c'est dire en somme si j'avoue l'avoir adoré.

C'est quoi cette haine, si ce n'est l'expression d'un amour tant contrarié, c'est quoi ce sentiment bizarre qui me retourne les tripes, qui me rappelle que sans amour je ne suis que la moitié de moi même.

J'avais pourtant tout fait, depuis le temps, pour me vacciner de l'amour, fuyant à grandes brasses tous ces océans de mièvreries sentimentales qui nous entourent... Finalement, j'échoue à nouveau sur cette île, perdue au loin, à grands coups d'écume dans la gueule !

C'est quoi ces deux pauvres cow-boys paumés, qui gardent des moutons au milieu de nulle part, pas foutus d'éviter de se toucher sous la tente, après une cuite au whisky.

Ah, pour sûr, si Ang Lee nous avait fait un film avec une vraie pochtronne, au hasard... Catherine Deneuve, même après une caisse de Ja
ck D. 12 ans d'âge, elle risquait pas de virer sa cuti si facilement...
Non, non, au lieu de ça, il nous montre deux petites pédales, qui fument des blondes (pas des gitanes maïs) à défaut de se les taper... et ça marche, et ça marche encore sur moi, quelle tache !

Ça fonctionne, parce que ça me rappelle l'amour de mes phantasmes, cet amour que je cherche et que je n'ai pourtant jamais eu, impérieux, irrépressible, irréversible et impossible.

Ce malaise profond, celui qui décontenance, qui fout en rogne, qui vous transforme subitement en cet autre que l'on cache bien loin au fond de soi et avec tant d'efforts...

Et il nous le montre, cet amour si bandant, avec tous ses aspects qui nous paralysent entre rejet et dépendance.

Pendant plus de deux heures, on aura droit à tout avec Heath et Jake : les rapports de force, la soumission, la fusion, la violence, les jeux, la frustration, le déni, le désespoir, les « je t'aime, moi non plus », les embrassades viriles, les « plaque toi là, tu vas y avoir droit » suivis de grands moments de passivité soumise, l'acceptation, la séparation, les larmes que l'on retient devant lui, celles qu'on déverse en cachette, l'anorexie amoureuse, la boulimie du désespoir (le plus souvent en alcool et cigarettes), le mal au bide quand il s'en va... la peur de demain, celle du regard des autres, les projets déçus, la nostalgie de celui qui est parti, les regrets qui n'en finiront plus, les souvenirs quand il ne reste plus que ça...

J'suis tellement en colère après ce film, qu'il ne m'a même pas fait pleurer, et dieu sait que je chialouse pour un rien (on m'appelle Niagara Falls chez UGC)...

Il m'a foutu les boules, simplement parce qu'il m'a rappelé pourquoi c'est si beau deux hommes amoureux, parce qu'il m'a fait comprendre aussi qu'un amour impossible, c'est mieux que pas d'amour du tout. Il est là le véritable secret de Brokeba
ck Mountain !
Je le hais donc je le l'aime !

Pour plus d’informations :

Bande annonce

Fiche technique :
Avec Jake Gyllenhaal, Heath Ledger, Michelle Williams, Anne Hathaway, Randy Quaid, Linda Cardellini, Anna faris, Scott Michael Campbell et Kate Mara. Réalisé par Ang Lee. Scénario : Larry McMurty et Diana Ossana, d’après la nouvelle d’Annie Proulx. Directeur de la photographie : Rodrigo Prieto. Compositeur : Gustavo Santaololla et Rufus Wainwright.
Durée : 134 mn. En salle le 18 janvier 2006.
Résumé :
Eté 1963, Wyoming.
Deux jeunes cow-boys, Jack et Ennis, sont engagés pour garder ensemble un troupeau de moutons à Brokeback Mountain.
Isolés au milieu d'une nature sauvage, leur complicité se transforme lentement en une attirance aussi irrésistible qu'inattendue.
À la fin de la saison de transhumance, les deux hommes doivent se séparer.
Ennis se marie avec sa fiancée, Alma, tandis que Jack épouse Lureen.
Quand ils se revoient quatre ans plus tard, un seul regard suffit pour raviver l'amour né à Brokeback Mountain.
L’avis de Patri
ck Antoine :
Deux cow-boys (doit-on encore les appeler des cow-boys quand ils ne gardent que des moutons et pas des vaches) sont engagés pour surveiller un troupeau de moutons. Seuls perdus dans l'immensité de la montagne, ils développent une amitié qui finit par se transformer en relation amoureuse. À la fin de la saison, leurs chemins se séparent. Ennis retrouve sa fiancée, ils se marient et fondent une famille. Ja
ck Twist (un jeu de mot facile ?) semble lui un peu plus attiré par les relations masculines, mais il finit un jour par se faire dompter par une femme cow-boy (peut-être doit-on dire cow-girl ?) qui lui passe très vite la corde au cou. Le temps passe...
Et puis un jour, quatre ans après, Ennis reçoit une carte postale de Ja
ck. C'est à ce moment là que sa vie bascule. Les deux hommes décident de se revoir. Et quand ils se retrouvent face à face, Ennis ne peut s'empêcher d'embrasser passionnément son ami, sans se douter un instant que sa femme peut le voir. Ils sortent en ville boire un verre (version officielle pour madame), mais finissent directement dans un motel où ils passent la nuit.
La suite ? Des rencontres plus ou moins espacées, une acceptation plus ou moins facile de leur relation, l'impossibilité de vivre cette relation au grand jour pour l'un, l'insatisfaction pour l'autre de devoir se contenter de si peu, une relation difficile qui ne se vit pas, une relation destructive.

Les critiques que j'ai lues pour ce film étaient toutes dithyrambiques. Un superbe film. Le film homo de l'année. Bla bla bla. Je ne suis pas tout à fait d'accord. Je n'ai pas eu l'impression de voir un film extraordinaire. J'ai vu un film certes valable, mais qui reste au final très moyen. L'image n'est pas formidable, les plans de montagne me semblent sous-exploités, il y a des longueurs superflues, les dialogues sont d'une franche pauvreté, les choses importantes ne sont pas dites, on passe à côté de beaucoup de choses qui ne sont pas utilisées au profit d'autres qui m'ont paru souvent de peu d'intérêt. Je me suis même surpris à regarder ma montre, ce qui n'est jamais un bon signe...

Quant à l'appellation « film homo de l'année » je dis non. Ce film n'est pas un film homo. Ce film est un film hétéro à l'usage des hétéros. Et d'ailleurs il est appréciable en tant que tel. Quand on sait que certains cinémas ont refusé de diffuser ce film en raison de son caractère jugé contraire aux mœurs, on peut dire qu'Ang Lee a eu du mérite de réaliser cette œuvre. Et si il a un tel succès, c'est sans doute parce que nous vivons dans un monde qui reste hétéronormé et qui est surpris par ce genre d'œuvre. Si les sexes étaient vraiment égaux, si homos et hétéros étaient réellement égaux, ce film n'aurait aucun intérêt.

Mais bon, allez le voir quand même, ça reste un film intéressant...

L’avis de Niklas :

Ja
ck et Enis deux jeunes cow-boys, sont engagés pour garder un troupeau de mouton pendant l'été. Une nuit de beuverie, alors qu'il partage la même tente, la complicité infantile se transforme en désir. À la fin de l'été, ils se séparent et retournent à leurs vies : mariages, enfants, travail. Lorsqu'ils se retrouvent, quatre ans après, l'évidence de leurs sentiments réciproques transparaît dès le premier regard...
Even Cow-boys get the blue
s par Ang Lee
Les méthodes publicitaires relatives aux bandes-annonces des films m'étonneront toujours. Et celle de ce film n'a cessé de m'intriguer. Ang Lee y est présenté comme le réalisateur de Tigre et dragon (ce qui n'est pas faux), mais c'est tout de même oublier qu'il a auparavant déjà fait dans la sensiblerie en adaptant le Raisons et sentiments de Jane Austeen avec réussite, et surtout qu'il a déjà fait dans l'homosexualité avec le très bon Garçon d'honneur qu'il est bon de voir avant de se faire une liste des meilleurs films à tendance "Gay". Cette bande annonce donc largement propagée avant chaque film « homo » (« Le Temps qui reste », « Reinas », « Appelez-moi Kubri
ck »,...) fait donc un peu dans le ciblage de masse, et j'en avais fini par déduire que l'estampillage « Par le réalisateur de Tigre et dragon » n'avait pour seul but que celui d'attirer le spectateur qui se serait perdu devant les précédents films cités...
C'est avec une forte sobriété qu'Ang Lee met en place le non-dit qui plane tout au long du film. Une sobriété dans les dialogues, difficultés des deux héros à communiquer, voire évoquer leur relation. Et tout autour d'eux ce silence pesant qui gagnera leurs femmes qui comprennent, mais se taisent elles aussi. Dans cette Amérique puritaine où Ja
ck et Enis vivent, l'homosexualité est mal venue et jugée avec une violence qui n'a d'égal que l'amour qu'ils éprouvent l'un pour l'autre et le manque qu'ils en ressentent. Et le réalisateur filme le silence et le déni avec une subtilité émouvante, ne se laissant pas gagner par trop de sentimentalisme afin de coller au mieux aux personnalités de ses deux personnages principaux. Heath Ledger tout en retenue campe un personnage qui laisse transparaître la souffrance et la guerre intérieure qu'il se livre, entre raison et sentiment. Face à leur vies tiraillées Ang Lee filme ces années qui défilent en brisant le rythme de son film pour mieux offrir à ses héros la tranquillité de leurs retrouvailles à Brokeback. Le réalisateur signe un film bouleversant avec tact et délicatesse, une love story troublante qui ne laisse pas de marbre.
L’avis de Garoo :

Ja
ck (comme dans Titanic !) et Ennis, jeunes cow-boys du Far West qui en fait gardent les moutons dans le Wyoming des années 60, bossent un été isolés dans la montagne, baisent, et reviennent à la vie normale. Ou pas.
Il me semble bien que c’est la première fois de ma vie que je suis comptabilisé dans les entrées parisiennes du matin de la sortie (celles qui ne mesurent rien d’autre que le buzz autour de la promotion d’un film, mais décident du reste de sa carrière sur le territoire), et je ne suis bien sûr pas mécontent que ce soit pour un film comme Brokeba
ck Mountain — je suis tellement militant que j’arrive à aller au cinéma à onze heures du matin, à l’heure où les entrées sont à moitié prix.
Le problème, c’est que maintenant je suis censé pondre une critique. Et ça ne va pas être facile, parce que je ne l’ai pas aimé, et que je me sens un peu seul dans ce cas, donc je suis obligé de me demander si ça vient de moi. J’ai peut-être raté des répliques, rapport à l’accent que prennent les acteurs, avec plus ou moins de bonheur (vous m’excuserez de trouver Heath Ledger totalement ridicule en beauf redne
ck primitif — pas que Gyllenhaal soit plus crédible dans ce rôle, mais au moins lui n’essaie même pas) ? Non, ça ne doit pas être ça, c’est presque un film muet. Ou je me suis endormi, pendant un des nombreux plans de beau paysage bucolique ? Si c’était le cas, ça m’aurait paru moins long.
En ce qui me concerne, le film n’a pas réussi à se remettre de la première heure lente et contemplative — qu’est-ce qu’il y a à contempler de deux bergers écervelés qui découvrent le sexe et se tapent dessus pour se prouver leur affection ? C’est bête, mais j’aime les coups de foudre avec un minimum de cerveau derrière. Par la suite, ça s’arrange (il y a des dialogues, des fois ! et ils sont bons, quand il y en a) mais il y a toujours trop de délayage ; on ne m’empêchera pas de penser que si l’histoire était à l’origine une nouvelle, et que d’habitude on fait des films de deux heures à partir de romans et pas de nouvelles, ce n’est pas pour rien.

Mais c’est totalement décourageant d’essayer d’expliquer pourquoi on a trouvé médiocre et inintéressant un film qui est déjà en train de devenir culte, et qui arrive même à être regardé par des hétéros (c’est sans doute sa plus grande qualité, et aussi son plus grand défaut, même si les films destinés au public homo sont plus souvent mauvais que bons). Vous irez le voir de toute façon, et vous trouverez comme tout le monde que j’ai eu tort.

Au fait… si la nouvelle date de 1997, l’auteur n’a aucune excuse pour avoir choisi un nom aussi… euh, équivoque. (À part celle d’être une femme et d’avoir soixante ans, donc de ne pas être très au fait des pratiques sexuelles déviantes de la fin des années quatre-vingt-dix.)

Pour plus d’informations :

Bande annonce

Fiche technique :
Avec Jake Gyllenhaal, Heath Ledger, Michelle Williams, Anne Hathaway, Randy Quaid, Linda Cardellini, Anna faris, Scott Michael Campbell et Kate Mara. Réalisé par Ang Lee. Scénario : Larry McMurty et Diana Ossana, d’après la nouvelle d’Annie Proulx. Directeur de la photographie : Rodrigo Prieto. Compositeur : Gustavo Santaololla et Rufus Wainwright.
Durée : 134 mn. En salle le 18 janvier 2006.
Résumé :
Eté 1963, Wyoming.
Deux jeunes cow-boys, Jack et Ennis, sont engagés pour garder ensemble un troupeau de moutons à Brokeback Mountain.
Isolés au milieu d'une nature sauvage, leur complicité se transforme lentement en une attirance aussi irrésistible qu'inattendue.
À la fin de la saison de transhumance, les deux hommes doivent se séparer.
Ennis se marie avec sa fiancée, Alma, tandis que Jack épouse Lureen.
Quand ils se revoient quatre ans plus tard, un seul regard suffit pour raviver l'amour né à Brokeback Mountain.
L'avis de Jean Yves :
Été de l'année 1963 : le Wyoming, un Ouest âpre et durement touché par le chômage, où la vie est dure et les cow-boys pas toujours des héros. Loin de tout.
Deux cow-boys, Jack et Ennis. Ils ont 20 ans, à cheval toute la journée à garder des moutons. Un très mauvais orage, un soir… et les voilà sous la même tente juste assez grande pour développer leur intimité…
Les deux hommes ne parlent pas de sexe, ils parlent peu et pourtant il n'y a, entre eux, aucun malentendu. La situation est claire : « Suis pas une tapette.
– Moi non plus. »
Faut-il voir dans ces termes les prémices de la destruction d'une histoire d’amour à peine commencée ?
À la fin de l'été, les moutons rendus à leur propriétaire, les deux hommes doivent se séparer, ils se serrent la main, se tapent sur l'épaule et s'en vont chacun de leur côté. On peut penser alors l'histoire terminée, comme celle d'un été…
Et pourtant, au bout d'un mile, Ennis eut l'impression que quelqu'un lui extirpait les boyaux avec la main, mètre par mètre. C'est ce qu'écrit Annie Proulx dans sa nouvelle (1). Le cinéaste a filmé admirablement ce passage où Ennis n'arrive pas à vomir ; où l'organique prend le pas sur le sentimental. C'est à ce moment le véritable début de cette histoire d'amour qu'est Brokeback Mountain. Une quête qui se poursuivra durant près de trente ans…
Ang Lee a bien respecté les précipités narratifs d'Annie Proulx : puisque suivent immédiatement après le mariage d'Ennis avec Alma, et la naissance de leurs deux petites filles. Ennis a donc préféré s'établir avec une femme, au risque de passer à côté de sa vie. Pourtant,un retour inopiné de Jack va permettre aux deux hommes de se réserver, entre eux, un week-end par mois.
Jack l'extraverti aurait bien voulu assumer sa liaison en plein jour, mais l'introverti et fragile Ennis n'est pas prêt à affronter le jugement des autres. Il faut dire qu'il a été confronté, alors qu'il était encore enfant, au lynchage d'un couple de cow-boys. L'homophobie de son père (même si elle n'était pas désignée alors sous ce terme) a achevé de façonner sa personnalité taciturne.
Au cours de la première retrouvaille, quatre années après l'été 63, Alma les a surpris en train de s'embrasser : elle a refermé la porte. Son malheur n'est ni celui de la nouvelle écrite, ni celui de l'adaptation cinématographique. Elle patientera un peu, divorcera et épousera l'épicier du coin.
Pour montrer le temps qui passe, Ang Lee s'est appuyé beaucoup plus sur les décors (les modèles de voitures, les meubles…) que sur le physique des deux cow-boys même si leur maquillage intervient un peu. Annie Proulx les avait pourtant fait vieillir bien plus réellement : Ils n'étaient plus deux jeunes hommes avec la vie devant eux. Jack s'était étoffé des épaules et des hanches, Ennis était toujours aussi maigre […] une grosseur bénigne sur une paupière lui fermait à moitié l'œil, une fracture du nez s'était cicatrisée de travers. (2)
À croire qu'il est toujours aussi difficile de montrer le déclin corporel dans une histoire d'amour.
Il reste qu'Ang Lee a réussi un film admirable avec Brokeback Mountain en montrant que deux hommes qui s'aiment, n'est pas contradictoire avec la force et la beauté des sentiments.
La scène des premières retrouvailles des deux hommes, après quatre ans de séparation, restera, je l'espère, dans les annales du cinéma : sensuelle, virile et romantique.
Le cinéaste, Ang Lee, a évité les clichés sur l'homosexualité. Il a réalisé mieux qu'un film militant, un film touchant, sincère et sans manipulation.
Peut-être même que Brokeback Mountain contribuera à amener à plus de tolérance…

(1) Brokeba
ck Mountain in "Les Pieds dans la boue", Annie Proulx,
Editions Rivages, 2003, ISBN : 2743610670, page 19

(2) Ibidem pages 30-31
L'avis d'Alex & Greg :
Wyoming, été 1963. Histoire de se faire un peu d'argent, deux jeunes gens, Ennis del Mar et Ja
ck Twist, se font embaucher pour garder les moutons d'un gros éleveur dans les hauts pâturages de Brokeback Mountain. Ennis compte se marier avec Alma au mois de novembre et Jack a la tête remplie de rêves de rodéo. Dans la solitude de la montagne, ils vont se découvrir, devenir complices et s'aimer totalement comme l'on aime qu'une fois dans sa vie. L'été terminé, ils repartiront chacun de leurs côtés pour vivre leurs vies, fonder une famille et se plier aux règles d'une société complètement homophobe. Quatre années plus tard, ils se retrouvent, revivent leur amour et décideront de s'aimer régulièrement mais sporadiquement à l'abri de la montagne.
Tiré de la nouvelle éponyme d'Annie Proulx, le Brokeba
ck Mountain d'Ang Lee s'offre quelques extrapolations par rapport à l'histoire originale. Les personnages secondaires (les femmes des deux cow boys notamment) sont plus développées et l'on voit ici ce qui n'est que suggéré dans le livre. Histoire poignante d'un amour qui ne peut pas se vivre au grand jour, BrokeBack Mountain dresse le portrait de deux hommes à qui la vie ne permettra pas de se réaliser. La caméra d'Ang Lee cadre au plus près des visages où se lisent les failles, les peurs et une insondable tristesse. Ennis ne fait rien pour changer les choses, empêtré dans une histoire familiale calamiteuse, terrorisé par l'idée de sortir du cadre de l'hétéronormalité, désespéré de ne pouvoir vivre pleinement son amour avec Jack. Ce dernier, lui, rêve d'une vie heureuse dans laquelle ils s'occuperaient d'un ranch à deux. En attendant un signe d'Ennis, il joue la comédie de la famille auprès d'une business-woman glaciale... Le signe ne viendra jamais. Pendant vingt années ils se retrouveront dans la montagne, quelques fois une seule fois par ans seulement. Vingt années au bout desquelles ils n'auront eu que Brokeback Mountain comme décor de leur amour, comme souvenir.
Ce film est terriblement poignant, sans pathos aucun. Je passe volontairement sur le fait que ce film est le premier western gay grand public du cinéma, car ce cadre là n'offre qu'un contexte à une tragique histoire beaucoup plus universelle : comment vivre le plus grand amour qui soit quand, tout autour de vous, tout vous l'interdit ? Je ne vous raconte pas la fin de ce film aux images magnifiques, il vous revient d'aller le voir car au-delà des mots, certaines choses ne peuvent être dites mais seulement ressenties. Et il y en a beaucoup dans Brokeba
ck Mountain...
L'avis de Matoo :

En rentrant du cinéma, le soir même, j’ai relu la quarantaine de pages qui constituent cette nouvelle qu’Ang Lee a adaptée. Je voulais vraiment me rendre compte des différences, et comparer le récit que j’avais vu avec la plume si particulière d’Annie Proulx, et ce que j’avais ressenti à la lecture de ce texte il y a plus de quatre ans.

J’ai halluciné lorsque j’ai relu ces pages, l’adaptation frôle une perfection que j’ai rarement vue atteinte au cinéma. Les moindres traits des personnages, les décors, les péripéties, les creux comme les bosses, les vides comme les pleins, jusqu’aux dialogues qui reprennent mot pour mot les lignes de l’auteur, et surtout cette brillante, troublante et si fascinante incommunicabilité qui ceint les personnages sur vingt ans.

Le secret de Brokeba
ck Mountain est l’histoire de deux jeunes cow-boys qui se rencontrent alors qu’ils gardent un troupeau de moutons dans le Wyoming. Ils se rapprochent un soir et ont un rapport sexuel, presque par hasard, avec une brutale animosité mêlée d’une certaine passion. Finalement c’est un amour sincère et difficile à gérer qui va germer entre les deux garçons pendant le temps d’une transhumance. Une affection qu’ils ne nomment pas, qu’ils vivent au gré de leurs ébats. Et lorsqu’il faut partir, rien ne se dit, là encore. Par contre, le manque de l’autre finit par les convaincre de leurs sentiments, sans bien rationaliser la chose. De toute façon, les choses sont claires pour Ennis, il doit épouser Alma en rentrant. Et pour Jake, de rodéos en bars, il finit par se marier lui aussi, avec Lureen, fille d’un riche marchand de machines agricoles. Et puis Jake retrouve Ennis, et en tant que bons « copains de pêche », ils repartent régulièrement ensemble quelques jours tous les ans. Et ils font revivre leur passion ainsi, à l’abri des regards, et tandis que les années passent.
Le film est brillant par sa beauté formelle époustouflante, et là Ang Lee s’en donne à cœur joie en nous régalant de plans magnifiques, où les hommes sont minuscules. Ils se cachent d’ailleurs bien dans ces gigantesques panoramas verts et blancs. Il égrène le temps avec un rythme lent et posé pour mieux nous représenter le temps de la transhumance, et ce n’est jamais lénifiant ou soporifique. L’histoire peut dérouter par ses personnages mutiques, et son scénario sans beaucoup d’actions ou de rebondissements. Mais le réalisateur a tiré de ses acteurs une interprétation dont les silences mêmes remplissent l’atmosphère. Et c’était là tout le challenge : réussir à ce que les comédiens exsudent ces sentiments qu’ils cachent. Or Heath Ledger et Jake Gyllenhaal arrivent à montrer leur soif d’eux-mêmes à travers une incommunicabilité qui les sclérose complètement.

Ce n’est pas non plus le film de l’année ou bien le chef-d’œuvre qui m’a entièrement conquis, mais c’est une très belle réalisation au service d’une magnifique histoire d’amour. Et cette histoire d’amour elle transcende bien les genres et les orientations sexuelles, elle touchera tout le monde. Ce n’est pas la banale aventure entre deux mecs qui tombent amoureux l’un de l’autre, il s’agit d’un amour inavoué, exprimé mais pas par des mots, vécu mais pas dans la plénitude d’une relation. Chacun des deux a ses torts et ses raisons, et on est loin de préoccupations de midinettes. Le film transcende la simple question de l’homosexualité, même s’il la soulève avec une peur et une honte qui imprègnent les deux héros.

Je retiens vraiment cette incroyable adéquation avec l’œuvre de Proulx. Le film d’Ang Lee a alors les qualités et défauts d’une telle adaptation, mais pour moi le résultat final recueille tous les suffrages.

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Bande annonce

Fiche technique :
Avec Jake Gyllenhaal, Heath Ledger, Michelle Williams, Anne Hathaway, Randy Quaid, Linda Cardellini, Anna faris, Scott Michael Campbell et Kate Mara. Réalisé par Ang Lee. Scénario : Larry McMurty et Diana Ossana, d’après la nouvelle d’Annie Proulx. Directeur de la photographie : Rodrigo Prieto. Compositeur : Gustavo Santaololla et Rufus Wainwright.
Durée : 134 mn. En salle le 18 janvier 2006.

Résumé :
Eté 1963, Wyoming.
Deux jeunes cow-boys, Ja
ck et Ennis, sont engagés pour garder ensemble un troupeau de moutons à Brokeback Mountain.
Isolés au milieu d'une nature sauvage, leur complicité se transforme lentement en une attirance aussi irrésistible qu'inattendue.
À la fin de la saison de transhumance, les deux hommes doivent se séparer.
Ennis se marie avec sa fiancée, Alma, tandis que Ja
ck épouse Lureen.
Quand ils se revoient quatre ans plus tard, un seul regard suffit pour raviver l'amour né à Brokeba
ck Mountain.
L'avis de Stéphanie Nolin (Lecinema.ca) :
Brokeback Mountain est un film audacieux dans sa manière de dépeindre le sentiment amoureux comme jamais auparavant. Cette œuvre bouleversante du cinéaste Ang Lee raconte l’amour avec sincérité et sonde les replis mystérieux et inexplorés de l’âme humaine. On y narre l’histoire d’amour singulière, à résonance universelle, de deux hommes dans l'Amérique rurale des années 60 et 70.
Deux cowboys sont engagés pour garder ensemble un troupeau de moutons à Brokeba
ck Mountain en 1963. À l’abri des regards, sur les flancs de la montagne, leur complicité se mue lentement en un amour aussi passionnel qu’inattendu. Quand vient la fin de la saison, les deux hommes doivent se quitter et faire leur vie. Ennis se marie avec sa fiancée Alma (Michelle Williams), tandis que Jack épouse Lureen (Anne Hathaway). Quand ils se revoient quatre ans plus tard, un seul regard suffit pour les embraser. Ces deux hommes devront alors vivre avec ce sentiment si beau qui les habite, dans une société qui le condamne.
Cette adaptation cinématographique d’une nouvelle écrite par Annie Proulx en 1997 a mis pas moins de huit ans avant de voir le jour et, indéniablement, la persévérance de ses artisans pour mettre ce film au monde en valait la peine. Brokeba
ck Mountain frappe en plein cœur, chavire, émeut et ouvre les yeux, tout à la fois.
Réalisé avec intelligence et honnêteté par l'éclectique Ang Lee, cette œuvre lyrique est gorgée d’émotions et saura toucher quiconque a connu l’amour. Le talent du réalisateur se matérialise dans chacune des scènes, dans chacun des gestes de ses acteurs : un regard, un silence, une larme. Lee refuse de cantonner ses personnages dans des stéréotypes, tout comme il s’abstient de montrer une société manichéiste. Il ose également dire et montrer, parfois crûment, ce qu’on dissimule habituellement.
La mise en scène épurée laisse toute la place aux acteurs, les non-dits se font plus éloquents que les paroles. Les majestueux paysages rocailleux de l’Alberta accolés aux vastes étendues poussiéreuses du Wyoming et du Texas font échos aux états d’âme des personnages. Lee joue habillement avec les contrastes, notamment entre la liberté que procure chacun des moments passés à Brokeba
ck Mountain opposée à l’inconfort de la vie au sein d’une société répressive.
Brokeback Mountain met en scène deux interprètes prodigieux, au sommet de leur art et éblouissants de justesse et de sensibilité. Impeccablement dirigés, ceux-ci offrent plusieurs moments fort touchants. Heath Ledger, particulièrement, incarne avec une surprenante retenue un personnage sibyllin, tourmenté par le désir qui le hante. Jake Gyllenhaal et Michelle Williams sont également troublants de vérité.
Si la démarche peut sembler audacieuse et le sujet scabreux, Brokeba
ck Mountain met avant tout en lumière un thème universel, celui de l’amour impossible. Le réalisateur prend à contre-pied les clichés et les préjugés pour nous offrir ce récit épique renversant, à la charge émotive explosive, campé dans des paysages d'une rare beauté. Un film, tout en poésie, qui mérite certainement toute notre attention et qui ne laissera personne de glace. Une bonne occasion de mettre ses préjugés de côté...
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Bande annonce


Fiche technique :
Avec Louise Brooks, Fritz Kortner, Franz Lederer, Gustav Diessl, Carl Goetz, Krafft Raschig, Alice Roberts, Michael Von Newlisky et Daisy D’Ora. Réalisé par Georg Wilhelm Pabst. Scénario de Laszlo Vajda. Directeur de la photographie : Günther Krampf.
Durée : 120 mn. Disponible en en VO, VOST et VF.

L'avis de Jean Yves :
Jeune et belle, Loulou épouse le riche producteur Peter Schön. Mais Loulou est volage et son mariage ne l'assagit pas puisque le soir même de ses noces, elle trompe son mari avec son propre fils, Alve.

Quand le mari découvre son infidélité, il lui tend un pistolet pour qu'elle sauve son honneur en se suicidant. Loulou refuse, une dispute commence, un coup part, Peter Schön est tué. Grâce à la comtesse Anna Geschwitz, Loulou évite la prison. Elle reste - tout en se donnant à d'autres hommes - avec Alve qui devient joueur et tricheur. Un soir, un client l'aborde, c'est l'assassin que la presse a surnommé Jack l'Eventreur : Loulou meurt poignardée.
En tant que spectateur, j'ai été, tout au long de ce film, un admirateur passionné de Louise Brooks (Loulou), tout autant que d'Alice Roberts (la comtesse Geschwitz).
Si l'intrigue est principalement « hétérosexuelle », la passion de la comtesse pour Loulou fait tout l'intérêt du film.

Alors que Loulou se marie pour de mauvaises raisons (en existe-t-il de bonnes ?), la comtesse valse avec elle le soir des noces et foudroie du regard tout homme qui oserait s'interposer.
Plus tard, alors que Loulou tombe dans la déchéance, la comtesse se dévouera pour la tirer d'affaire.

Ce film, qui est un des chefs-d'œuvre du cinéma, a fait de Louise Brooks la légende que nous connaissons, tout en mettant à l'écran une « lesbienne » hors de tout stéréotype. À voir.
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Fiche technique :
Réalisé par Richard Rein.
Durée : 80 mn. Disponible en VF.

Résumé :
Jean-Paul ne s'est jamais reconnu dans le sexe masculin, il n'est devenu lui-même qu'en se donnant l'identité d'une femme : Dominique... Elle s'explique sur cette transformation.
L'avis de Jean Yves :
Cinéma-vérité sans artifice de mise en scène. Caméra fixe. Le document à l'état brut tourné à l'économie. Malaise du voyeurisme. Face à soi, Dominique, la trentaine, parle. Jean-Paul sommeille encore en elle...
Le passage de il à elle.
Témoignage passionnant que celui proposé par Apparence féminine. Balayé le discours classique du travelo en représentation. Battue en brèche l'image de l'hyperféminité tapageuse. Aucune illusion. On a affaire à un travesti qui travaille, qui a un amant et, ô surprise, qui se raconte avec lucidité.
« Je refuse mon homosexualité... je veux mettre entre moi et l'homme qui m'attire une distance maximum pour oublier que je suis peut être comme lui. »
À aucun moment n'est affirmé l'adage selon lequel le travesti est une âme féminine dans un corps masculin, une erreur de la nature. Aucune revendication de ce genre. L'histoire pratiquement logique d'un garçon efféminé, d'un adolescent qui connaît quelques aventures masculines qui lui laissent un goût amer, d'un jeune homme torturé par ses affinités et qui trouve un moyen terme à ses difficultés : lui, hésitant, mal à l'aise, se met à l'abri derrière elle, naissante. Ne pouvant modifier son désir il intervient sur son image qui, transformée, le met à l'abri : les hormones ratifiant la décision qui n'ira jamais jusqu'à la mutilation. Apparence féminine, seulement.
Récit linéaire, parfois trop, jusqu'au moment où se produit la cassure : rencontré des années après le changement, l'ex-moniteur scout, vient dire sa fascination pour Dominique, pour l'itinéraire qu'il/elle a suivi. Piégée par la caméra elle dit la magie de l'autre qui attire et dérange, de l'autre qui réveille en soi un carroussel de contradictions.

Les propos de Dominique méritent d'être ré-écoutés et ré-entendus car ils font partie de ces confessions qui dépoussièrent les idées reçues.
Apparence féminine, c'est ce que mentionne sa carte d'identité.
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Fiche technique :
Avec Jürgen Prochnow, Ernst Hannawald, Werner Schwuchow, Hans-Michael Rehberg, Hans Putz, Elisabeth Fricker, Walo Lüönd, Edith Volkmann, Erwin Kohlund et Alexis von Hagemeister. Réalisé par Wolfgang Petersen. Scénario de Wolfgang Petersen, d’après l’œuvre d’Alexander Ziegler.
Durée : 100 mn. Disponible en en VO, VOST et VF.

Résumé :
En Suisse, un comédien, Martin Kurath, joué par Jurgen Prochnow qui fut entre autres le comédien principal de L’honneur perdu de Katharina Blum de Volker Schloendorff et que Petersen réemploiera dans Das Boot, Le bateau, est condamné à quelques années de prison pour avoir eu une relation sexuelle avec un mineur. Durant sa captivité, lorsque les détenus obtiennent l’autorisation de monter une pièce de théâtre, il fait la connaissance de Thomas, dix-sept ans (l’angélique Ernst Hannawald), qui a un rôle dans cette pièce. Thomas est le fils d’un gardien de la prison. Le garçon tombe amoureux de Martin. Lorsque ce dernier est libéré, il veut vivre avec son jeune amant malgré l’opposition de ses parents. Le père de Thomas porte plainte et le garçon est envoyé en maison de correction où il subit les pires humiliations. Martin parvient à le faire évader. Ils veulent fuir en Allemagne mais il faut un permis de séjour pour résider dans ce pays. Un politicien homosexuel feint d’aider Thomas à condition qu’il cède à ses avances. Thomas retourne à la maison de correction et retombe sous la coupe d’un garde-chiourme sadique. Après une tentative de suicide, il est envoyé en asile psychiatrique où Martin vient le voir. Quelques jours plus tard Martin apprend que Thomas s’est enfui; il est devenu une épave et erre sur les routes...
L'avis de Bernard Alapetite (Eklipse) :
Le film pâtit de sa date de réalisation car comme tout film de prison, il est difficile aujourd’hui de faire abstraction de l’extraordinaire série qu’est Oz. Il faut également vaincre une certaine incrédulité devant cette histoire de théâtre en prison. Bien qu’elle soit adaptée d’une histoire vraie. Il y a d’ailleurs une preuve cinématographique que le théâtre en prison n’est pas qu’un fantasme car la pièce filmée Cock and bull story de Bill Hayes, le scénariste de Midnight express témoigne que de semblables expériences existent puisque le film est issu de l’atelier dramatique de la prison de Saint-Quentin... Et c’est une pièce gay ! Et enfin admettre le choix d’une photographie très peu contrastée tout en camaïeux de gris. Ces réserves faites La conséquence est un beau film très émouvant, un vrais grand mélodrame gay.
La conséquence est adapté d’un livre autobiographique d’Alexander Ziegler, paru en Suisse en 1975. L’auteur, qui a lui même passé deux ans et demi en prison, a collaboré à l’adaptation de son livre. Il interprète dans le film le détenu Lemmi. Le roman a été publié en France en 1986 par les éphémères édition Entre chiens et loups. La fin du livre est plus ouverte que celle du film.
Tourné avec l'aide, et pour la télévision allemande La conséquence fut victime du boycottage de l'une des régions les plus conservatrices de l'Allemagne Occidentale, la Bavière. Cette attitude suscitant campagnes de presse et milliers de lettres a paradoxalement aidé la carrière cinématographique du film et sa présentation au festival de Berlin. À cette époque où les films gays étaient rarissimes, La Conséquence a eu un grand retentissement dans le cœur de beaucoup comme en témoignait Cyril Collard pour les quarante ans des Cahiers du cinéma : « Les lumières de la salle s’éteignirent. Générique, l’adolescent est dans une barque qui se balance sur des eaux calmes. Il s’appelle Thomas. Son visage envahit l’écran et comble d’un coup les vides de mon corps et de mon cœur. Ange blond mais sans aucune fadeur, sans tiédeur, ange noir. Il y a un éclatement blanc dans mon cerveau et tout bascule... J’ai l’impression d’être né dans cette salle. »
Le film ne s’embarasse pas de symbolique. Il traite frontalement les rapports amoureux entre un homme et un adolescent. Il énonçe clairement que le fondement de leur relation est sexuel. Un adolescent amoureux d’un homme adulte défend son droit à l’amour libre par delà tous les préjugés et les interdits sociaux. Le spectateur, sur la base d’une empathie sentimentale, reconnait la passion homosexuelle comme une forme d’accomplissement affective à part entière. Le ton de plaidoyer vibrant évite les clichés même si l’on reste dans la problématique classique de l’éraste et l’éromène. Le scénario montre avec une grande intelligence comment la répression entraine chez Thomas une destruction de l’individu en lui inculquant une haine tournée vers les autres mais aussi contre lui même. La conséquence participe directement de toute une tradition du cinéma classique qui, pour chaque époque considérée, a toujours placé le meilleur de lui-même dans la lutte contre les formes sociales, juridiques et psychologiques de l’oppression.
La vie d’Ernst Hannawald, le Thomas de La conséquence ferait un parfait scénario pour un mélo. Il a passé son enfance dans les orphelinats puis, à la suite de problèmes avec la drogue, dans une maison de correction. C’est là qu’à seize ans, Wolfgang Petersen l’aurait découvert. Aprés  La conséquence, Hannawald tourne une trentaine de rôles pour le cinéma et surtout pour la télévision. En 1980, il est très affecté par la mort de sa soeur jumelle dans un accident d’automobile. Il est lui-même victime d’un grave accident de la route en 1986 dans lequel son ami est tué. À partir de là, c’est la dégringolade dans l’alcool et la drogue qui se termine en 1999 lorsque Ernst Hannawald est condamné à cinq ans de prison pour la participation à deux casses de banque qu’il a fait pour payer son dealer !

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Fiche technique :
Avec Pascale Rocard, Nicolas Silberg, Jean-Louis Rolland, Florence Giorgetti, Patrick Raynal, Séverine Vincent et Albert Dupontel. Réalisé par Paul Vecchiali.
Durée : 87 mn. Disponible en VF.
Résumé :
L'histoire de Louis, père et mari heureux qui tout à coup décidé de vivre une vie plus intense. Il quitte tout, job, femme et enfant et se découvre un goût pour les hommes. Il ira jusqu'au bout de ses amours, jusqu'au bout des ses passions où l'attend tranquillement une terrible maladie.
L'avis de Jean Yves :
L'histoire est simple et fatale : un homme découvre à quarante ans qu'il peut aimer les hommes. Il ira jusqu'au bout. Jusqu'au sida, sans concession. Mourir vivant plutôt que vivre mort. Un film choquant, sans doute, révoltant pour certains, mais pas pessimiste, en ce sens qu'il montre un parcours sans faute dans la dignité et l'acceptation de soi.
Avec son fond musical funèbre, le générique dans le couloir du métro où l'on fait connaissance avec Louis apparaît d'emblée comme un tunnel vers le bout de la vie, en même temps que l'apparition rapide de Vecchiali lui-même indique qu'il revendique totalement le thème très dur de son film.
Le processus filmique adopté pour Encore est original : une suite de dix plans-séquences d'environ neuf minutes chacun. Du 15 octobre 1978 au 15 octobre 1987, le spectateur suit Louis dans son rapport à l'amour (sa femme, sa fille, puis Frantz, Michel et les hommes), qui ne peut devenir qu'un rapport à la vie, à la mort et à soi-même.
Le film est un peu comme une toile où chaque plan, qui marque donc chaque fois une année de plus, apporterait quelques touches de plus au personnage de Louis et à son entourage.
1978 : la première séquence débute sans fioritures sur le malaise du couple : dans le lit, Louis et Sybèle souffrent d'être ensemble, lui parce que cette relation ne le satisfait simplement plus, elle parce qu'elle ressent bien cette insatisfaction muette de Louis, qui a décidé de la quitter.
1979 : on parle de divorce, Sybèle est à l'heure du Tranxène, « oui, ton corps me répugne, je n'ai plus envie de te toucher », dit Louis, qui avoue ne pas avoir de maîtresse.
1980 : scène du métro et rencontre de l'ambigu Ivan qui incarne le passeur, celui par qui Louis pourra basculer dans un autre monde.
1981 : Sybèle a un amant, prédication d'Ivan annonciatrice de mort (« Ne faites plus l'amour, c'est le diable qui court dans ceux qui ont dénaturé l'acte divin ») et arrivée de Frantz dans la vie de Louis.
1982 : la boîte et l'exultation de l'époque de la grande baise, rupture avec Frantz et tentative de suicide…
Encore développe ainsi tout un discours amoureux duquel font partie tout ensemble la crise de la quarantaine chez le couple hétéro, l'ambiguïté de l'amour père-fille, l'homosexualité, le sida.
C'est le film des maladies de l'amour, toutes les maladies : celles du cœur, celle du corps.
Vecchiali clame des partis pris bruyants et provocateurs (« Le sida, c'est la vie ! », phrase que prononce Louis), mais le film n'est pas une leçon de morale, seulement un regard sur la difficulté du rapport amoureux illustrée par diverses de ses possibles composantes.
Malade du sida, Louis donne son dernier baiser à Michel qui l'aime, mais son dernier soupir est pour celui qu'il n'a pas cessé d'aimer, Frantz, malade de solitude.
Fort et terrible de bout en bout, le film s'achève ainsi sur une scène plus forte encore : tragique oui, pessimiste non, car aboutissement d'un parcours dans la dignité et l'acceptation de soi.
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Fiche technique :
Avec Fernando Ramos da Silva, Marilia Pera, Jorge Juliao, Gilberto Moura et Edilson Lino. Réalisé par Hector Babenco. Scénario : Hector Babenco et Jorge Duran, d’après l’œuvre de Jose Louzeiro. Directeur de la photographie : Rodolfo Sanchez. Compositeur : John Neschling.
Durée : 125 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
Pris dans une rafle de police Pixote, dix ans, vit l'enfer d'une maison de redressement. Quand il retourne dans les rues de Sao Paulo, l'apprentissage de la violence a fait de lui un dangereux délinquant.
L'avis de Jean Yves :
Pixote, ne me regarde pas comme ça : seuls les poètes croient que la terre est une orange bleue…

Trois scènes du film Pixote rompent, l'espace d'un espoir, la tension implacable du récit d'une fatalité sociale : un enfant devient criminel. Ce sont les seules où la femme – son symbole – apparaît, témoin bâillonné de la monstrueuse machination des hommes.
● L'institutrice, la doctoresse attardent leur regard professionnel sur cet enfant de dix ans englouti dans l'engrenage de la délinquance.
● Madame Sueli, la putain, serre le meurtrier sur son ventre mort.
● Devant la mer – quelques secondes de bonheur – Pixote pose sa tête sur l'épaule de Lilica, jeune homosexuel : « Il n'y a rien à attendre quand on est pédé », dit-il...
Trois lueurs sur de possibles renaissances pour rendre d'autant plus intolérable l'univers de la violence. Non pas que le film d'Hector Babenco dénonce le sexe et la drogue. Il situe le crime dans le détournement machiste et mercantile du plaisir, de l'amour et du rêve.
Ce n'est qu'un des aspects du film. Documentaire réaliste et tragédie grandiose de la solitude et de la mort, il s'inscrit dans de bien plus vastes dimensions.

Dans les taudis de Sao Paulo, un enfant ajuste un revolver. Dans la misère de Sao Paulo un enfant tue. Il se retourne vers nous : son regard de faon blessé vire peu à peu au noir d'un voyage sans retour.
Les rapports homosexuels sont très honnêtement décrits dans ce film : ceux violents de l'univers carcéral, ceux aussi de l'amour. Ces adolescents ont interdit la mère : trop de pauvreté a brouillé les cartes : la dame de cœur n'a pas eu le temps de bercer son petit.
Comment traverser le temps sans ce viatique qui apprend l'amour au guerrier ?
La femme suspecte et le tenace besoin de tendresse inventent le pédé au grand cœur, fausse femme des délires machos, mais aussi, plus insidieusement, l'amour incommensurable des mecs entre eux, sexualité et tendresse sauvages contre l'adultre traître, quand la dureté vacille un soir trop doux d'été.
Film exceptionnel, film unique, film total sur l'enfance. Enfance d'un truand, éducation sentimentale d'un dur ? Peut-être. Mais aussi regard lucide sur les désirs du garçon, analyse juste d'un âge qu'on s'entête à idéaliser pour mieux se pardonner la lâcheté adulte.

Il faut s'arrêter sur le visage en gros plan de Pixote s'appliquant à écrire cette phrase à hurler :
« La terre est ronde comme une orange ».
Pixote, ce n'est pas encore le jour du fruit-bonheur.
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Fiche technique :
Avec Sophia Loren, Marcello Mastroianni, John Vernon, Françoise Berd, Nicole Magny et Patrizia Basso. Réalisé par Ettore Scola. Scénario : Ettore Scola, Ruggero Maccari et Maurizio Costanzo. Directeur de la photographie : Pasqualino De Santis. Compositeur : Armando Trovajoli.
Durée : 105 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
À Rome le 6 mai 1938. Alors que tous les habitants de l'immeuble assistent au défilé du Duce Mussolini et d'Hitler, une mère de famille nombreuse et un homosexuel se rencontrent.
L'avis de Jean Yves :
Dans le décor écrasant d'un immeuble dont l'architecture fleure bon la mégalomanie fasciste, un homme et une femme se livrent aux jeux subversifs de l'amour sous les yeux d'une concierge-geôlière tandis qu'à l'extérieur la foule exulte et célèbre l'autre rencontre amoureuse : celle d'Hitler et de Mussolini.

Nous sommes à Rome, le 6 mai 1938. Antonietta (Sophia Loren), mère de famille écrasée par le quotidien et achevée d'abrutissement par l'idéologie macho ambiante, se compromet avec Gabriele (Marcello Mastroianni), animateur de la radio italienne, mis en disponibilité pour « dépravation ».

Isolés dans un monde qui bascule dans l'absurde, et bien que tout les oppose, ils vont, pourtant, bientôt se sentir très proches.
Deux solitudes
Antonietta est totalement bouffée par la vie, elle se déplace lentement, elle est aplatie par le régime fasciste et par son mari. Elle ne « s'éclaire » que lorsqu'elle est avec ses enfants. Or, dans le film, elle n'est avec eux que quelques minutes au début et à la fin. Je fais l'hypothèse que le lendemain de cette « journée particulière » elle sera devenue différente et que rien ne sera vraiment plus comme avant.
Le personnage de Gabriele est magnifique. Son homosexualité est suggérée de l'intérieur, sans jamais tomber dans les lieux communs de comportement, de manières : une immense douceur, une certaine mollesse physique et une ouverture sur tout.
Ce film parle de la constance de la marginalité des gens, de la solitude dans un microcosme, quel qu'il soit. Antonietta représente le quotidien dans toute son horreur, dans toute sa détresse. Elle découvre quelque chose de neuf dans la notion de respect que Gabriele traduit à son égard. Ce sont deux solitudes qui se confrontent, se révèlent, s'avouent l'une par l'autre.
Cette « Journée particulière » de 1938 n'appartient pas tant au passé qu'on pourrait le croire. L'histoire de Gabriele et d'Antonietta, ces deux solitudes, ces deux cultures totalement différentes qui se rencontrent, appartient à toutes les époques.

Ettore Scola n'a pas cherché à élaborer une fable didactique. Il raconte simplement une histoire vraie (pas réelle mais authentique) qui n'oppose pas les discours aux discours, les idéologies aux idéologies : ainsi il ne ferme pas la porte à l'espoir et à l'utopie. Par contre, ouvrir cette porte peut mener au drame quand l'histoire s'y oppose. En pleine apogée du fascisme, c'est le cas.
Ce film rend particulièrement sensible la proximité des figures de la femme exploitée et de l'homosexuel pourchassé, figures qui s'éclairent mutuellement non pas pour s'autoglorifier comme martyrs, mais pour retrouver la dignité, le respect et consumer aux feux du désir les vieux oripeaux de la morale sociale.
Pour plus d’informations :

Fiche technique :
Avec Géraldine Danon, Piero Von Armin, Oliver Rohrbeck, Fritz Graner, Claudia Arnold et Olivier Pascalin. Réalisé par Hans Noever. Scénario : Paul Hengge. Directeur de la photographie : Hans-Günther Bücking. Compositeurs : Francis Lai & Roland Romanelli.
Durée : 90 mn. Disponible en VO, VOST et VF.
Résumé :
Franck, jeune chauffeur de taxi berlinois, abandonne sa vie marginale pour l'amour de Jessica, un jeune mannequin. La drogue, pour lui n'est plus qu'un mauvais souvenir. Mais la santé de Franck se dégrade, jusqu'à exiger son hospitalisation. Jessica devra lui apprendre la terrible vérité, il a contracté le Sida...
L'avis de Jean Yves :
Déception sur toute la ligne ! Le film tente, vulgairement et maladroitement, de retracer l'histoire d'un jeune homme, très bien de sa personne (Fritz Graner) chauffeur de taxi de son état dans les rues de Berlin. Il s'entiche d'un mannequin (Géraldine Danon), piètre créature au sourire figé. Tout irait le mieux du monde dans cette love story conjuguée sur le mode soap-opera, mais fatalité: le taxi-driver doit assister son frère de sang, un drogué acculé par ses dealers. Premières sueurs, premières fièvres, le chauffeur dépérit à vue d'œil.
Les premiers symptômes de la maladie pointent le nez. La caméra nous emmène alors dans une boîte homo, où on ironise sur le virus. Après une bagarre pour une histoire de drogue, un type est mordu et lâche la phrase clé : « Il a le sida. Il en a contaminé d'autres ! »
L'amalgame se poursuit dans la plus grande confusion : gigolos, michetons, héroïnomanes, homosexuels caricaturaux...
La folle semble très prisée dans cette ville, et les autochtones rivalisent d'humour sur le sida, à croire que tout le monde n'a que ce sujet de conversation à la bouche.
Au bout de soixante-quinze minutes de supplice, on apprend que le héros est atteint, contaminé par « ces saloperies de seringues ! ». Ses jours sont comptés, et dans un dernier cri, il s'exclame : « Je suis trop jeune pour mourir ! »
Je vous épargne les détails de l'agonie, les contre-vérités médicales et la morale tendancieuse et sous-jacente : « Il est puni par où il a péché. »
Voilà, vous savez tout. Inutile de voir ce film. Regardez plutôt l'excellent Clins d'œil sur un adieu (Parting Glances) de Bill Sherwood.
Pour plus d’informations :
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Fiche technique :
Avec François D., Philippe V. Réalisé par Lionel Soukaz.
Durée : 48 mn. Disponible en VF.
Résumé :
Un film dédié aux longs métrages pornographiques. (Allociné)
« Ce film qui est une série ininterrompue de flashes, de spots, sur un fond musical souvent violent, et qui s'achève par un long ricanement fort pénible, est apparu à la Commission comme une provocation, et une agression systématiques. » (Commission de contrôle)
« Doté d’un montage halluciné rythmé par des morceaux électro-pop, ce film provocateur dans lequel des images (fellation, shoot d’héro, le pape, scènes de sodomie...) s’entrechoquent, construisant une critique cinglante et magnifique des valeurs morales oppressantes à toutes les époques. » (Programme de festival)
L'avis de Jean Yves :
Jusqu'à Race d'Ep un thème commun caractérise les films de Lionel Soukaz : l'homosexualité revendiquée comme une liberté de choix dans l'accomplissement des désirs, comme une chose normale qui ne doit pas être refoulée par les pressions de la société, d'où un aspect parfois quelque peu vindicatif et militant du discours de ces films.
Filmé pendant plusieurs mois, au jour le jour, IXE constitue une sorte de « diary », de journal, avec la révolte en plus.
Ici, ce n'est pas directement l'environnement du cinéaste qui est montré ou analysé, mais ses réactions personnelles, ses angoisses et sa révolte face aux agressions des pouvoirs quels qu'ils soient : politiques, religieux ou moraux.
L'homosexualité n'est pas représentée pour elle-même mais dans le social qu'elle suppose et qu'elle dénonce parfois.
Réactions aux agressions de l'actualité, des guerres et de la répression, des tournées papales qui ne sont en fait que show business à l'échelle religieuse. Pape ridiculisé ; foules qui « marchent » à cette orchestration grotesque.
Face à cela un sentiment de désespoir au sens fort du terme et de révolte devant une société où le bonheur est peut-être le plus grand mythe qui soit.
Mais cette révolte au dernier degré et ce désespoir ne sont pas criés avec des mots mais avec des images, et certaines sont réellement à la mesure du désespoir et de la révolte ressentis. Elles sont insoutenables. Et c'est là où IXE est un film réussi. Il n'utilise que les images et la musique (et les bruitages) pour faire ressentir ce désespoir. Ici l'absurdité de la vie n'est pas dite, elle est montrée. Les images se choquent, les musiques aussi, et elles ont choqué la commission de contrôle.
C'est en cela que IXE est un film fort : il utilise ce qui est la principale caractéristique du cinéma : les images et leur montage.
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Fiche technique :
Avec Copi, René Scherer. Réalisé par Lionel Soukaz et Guy Hockenghem.
Durée : 48 mn. Disponible en VF.

Résumé :
Quatre sketches retraçant cent ans d'histoire homosexuelle. Ce film militant, conçu comme une charge esthétique contre les bien-pensant (le titre, écrit en verlan, signifie "pédéraste"), provoque un scandale à sa sortie et est classé X. Aujourd'hui, il s'agit d'une œuvre marquante, appartenant à l'histoire de la libération des gays et lesbiennes. « Le fait d'être pédé est un acte militant en soi ; le seul endroit qui soit encore provocateur c'est le cul, c'est le sexe. » (L. Soukaz, 1981) 
L'avis de Jean Yves :
Ou une histoire des pédés sous forme de fragments arrachés au refoulement collectif.
Race d'Ep ! a le mérite de restituer la passion des pédés pour la photo et le cinéma, jointe à l'art de la collection, des compositions mythologiques du baron Gloeden avec ses jeunes siciliens aux curiosités de cabinet du Docteur Hirschfeld.
Le parti pris de retracer UNE histoire d'un siècle de l'homosexualité rend difficile la critique. Pourtant le film me semble relativement bâclé même en tenant compte des très modestes moyens mis à sa réalisation.
La première partie, intitulée « le temps de la pose », semble la mieux réussie. Un certain humour y côtoie un certain érotisme et c'est plutôt bien. Le baron Gloeden, incarné avec malice par René Shérer, continue de vouloir suspendre la grâce fugitive de ses jeunes modèles. Ceux-là n'auraient pas à craindre l'œil d'un photographe, premier et seul témoin de leur fantaisie. Ces photographies n'intéressaient alors ni la police ni les touristes, mais de distingués amateurs.
La seconde partie consacrée à Magnus Hirschfeld commence à décevoir. Les pédés ont pourtant dû délaisser le portrait mythologique et exotique pour accumuler les preuves de leur légitime différence. Les vignettes scientistes du Docteur Hirschfeld espéraient démontrer, comme le mouvement allemand, qu'il est une différence innocente, sans danger, inscrite dans leur corps, appelée homosexualité. Documents authentiques ou fiction démontrent parfaitement le drame de ces années folles. Les spécificités d'Hirschfeld se changent en monstruosités torturées par les nazis, les jeunes scouts des mouvements de jeunesse homophiles virent au SS. L'homosexualité est devenue une race à exterminer. Cette tentative de reconstitution en fiction de l'entreprise et de l'aventure du célèbre médecin allemand est pour le moins triviale. Heureusement quelques beaux documents de bibliothèques filmés et un commentaire accrocheur bien qu'un peu concis produisent le passage le plus intéressant de l'ensemble. Ensuite les choses se gâtent.
La troisième partie consacrée aux années 60 se réduit à l'explosion fascinante de la pornographie. Le monde se libère, on oublie les misères du passé. Pourtant Guy Hocquenghem avait pris soin de conclure les années 30 en insistant sur la nécessité de ne pas oublier la cruauté de l'histoire envers les Races d'Ep.
Les années 70 s'envolent. Paris 1979. « Royal Opéra », dernier bar des oiseaux de nuit, quatrième et dernière séquence de ces fragments d'histoire. Cette décennie « 70 » qui précisément outre-Atlantique, et plus tard en Europe, voit naître la seconde vague du mouvement homosexuel, ne laisse aucune trace dans la mémoire singulière des réalisateurs. Guy Hocquenghem oublie aisément sa propre biographie qui l'associe au FHAR français de 1971.
On ne pouvait pas s'attendre de la part de Lionnel Soukaz et de Guy Hocquenghem à une histoire de la Race d'Ep polie, sage et rationnelle. Tant mieux ! Mais j'attendais l'irruption du désir dans l'Histoire. Et là, quelle déception devant des images froides, glacées et glaciales.
Le point fort de ce film : ce voyage des années folles à l'extermination, qui devrait guérir de toute illusion sur le libéralisme d'aujourd’hui.

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Fiche technique :
Avec Francesco Cusimano, Tony Sperandeo, Luigi Maria Burruano, Lucia Sardo, Giovanni Alamia, Benedetto Raneli, Giuseppe Cusimano, Rita Barbanera, Salvatore Scianna et Ignazio Donato. Réalisé par Aurelio Grimaldi. Scénario : Aurelio Grimaldi.
Durée : 86 mn. Disponible en VO et VOST.

L'avis de Bernard Alapetite (Eklipse) :
La vie extrêmement dure des mineurs italiens dans les années vingt et en particulier celle d’ un garçon blond de 11 ans est le sujet de ce drame affreux et implacable. Le bel Acla arrive à l’âge d’accompagner son père et ses deux frères aînés à la mine souterraine de soufre où ils travaillent six jours par semaine pour un salaire de misère. Le réalisateur montre tous les mineurs peu vêtus dans une sensuelle lumière caravagesque. Le travail achevé, les hommes dorment tous ensemble dans la mine même, loin de leur femme. Leur frustration sexuelle les amène à faire l’amour entre eux et souvent ils attirent les garçons avec quelques olives... Un des mineurs dit d’ailleurs : « On baise les garçons la semaine et nos femmes le dimanche. » Acla ne se laisse toucher par personne malgré les sollicitations incessantes de beaucoup. Acla rêve de mer et d’évasion alors qu’il lutte contre l’inhumanité. Bien que le sexe soit omniprésent, il est filmé avec discrétion, le réalisateur se contentant de chair plutôt que d’action. La seule relation tendre de tout le film est entre le frère aîné d’Acla et un autre mineur, et on les voit amoureux, les yeux dans les yeux, dansant sous les regards ravis de leurs compagnons...
Aurelio Grimaldi, scénariste et réalisateur du film, a tourné et écrit une dizaine d'autres longs métrages en particulier un autre film gay, Mery per sempre. Ce film a été édité en vidéo en Italie et aux USA.

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Fiche technique :
Avec Christophe Marcq, Rémi Lange, Antoine Parlebas, Françoise Bitouzet, Halim Anou, Ingrid Marcq, Tom de Pékin, Annie Alba, Pascale Berthault et Pierre-Yves Dodat. Réalisé par Rémi Lange. Scénario : Rémi Lange & Madame H. Compositeur : Arnaud Ruga, Jérôme Gaillard, Anatomie Bousculaire, Flaming Pussy.
Durée : 58 mn. Disponible en VF.

L'avis de Samuel Minne :
Rémi Lange avait étonné en livrant avec Omelette son journal filmé, puis en forgeant avec Les Yeux brouillés une autofiction qui bouleversait sa vie. Dans ces deux films intervenait déjà de manière privilégiée son compagnon Antoine Parlebas. Après les fictions Mes Parents et Tarik el Hob, ils se mettent de nouveau en scène, mais en invitant un complice qui prend le rôle de vedette : Madame H. Connue pour ses spectacles, la présidente d’Homosexualité et Bourgeoisie joue le jeu de la biographie filmée et se complait dans l’autoglorification. Ils interrogent son frère et sa sœur, mais subodorent que Madame H se joue d’eux et les lance sur de fausses pistes… En effet, ce qu’ils veulent vraiment savoir, la question qui les taraude, c’est la nature exacte du sexe de Madame H. Or, elle louvoie et esquive toute question à ce sujet. Puis elle se lasse et congédie les deux fureteurs. Ce n’est pas à leur goût, et ils décident de l’espionner, poursuivant l’enquête à son insu… Par malheur, elle les surprend, et ils se voient forcés de la kidnapper !
À partir d’une mince idée de départ, les compères élaborent un jeu d’exhibitionnisme collectif jalonné de facéties, où tout est prétexte au burlesque : lorsque le couple de vidéastes menace Madame H de leur chat tenu à bout de bras, ou qu’ils attaquent sa ceinture de chasteté au chalumeau, on atteint de grands moments de comique. L’onirisme s’en mêle lorsqu’elle s’échappe et tombe sur un sling, croise d’autres performers comme M. Katia ou Corrine pour une bataille homérique, ou est victime d’un urophile… Le personnage est délibérément queer : qu’elle se fasse sodomiser par une lesbienne n’aide pas à connaître son sexe et brouille sa sexualité. Jeu sur l’identité sexuée et sexuelle, partie de rigolade entre potes, fourre-tout jubilatoire et farce grinçante, The Sex of Madame H ignore le bon goût et ne cherche pas une réalisation parfaite. L’ensemble des bonus forme avec le film un tout à la fois hétéroclite et cohérent. On en retiendra surtout les extraits de La Saga des Transpédégouines, qui justifient amplement l’achat du DVD et expliquent la fascination de Rémi et Antoine pour cette grande dame.

Pour plus d’informations :
Le site de Rémi Lange
Le site de Madame H.

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