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Vendredi 8 août 5 08 /08 /Août 09:30


Fiche technique :

Avec Leonardo Di Caprio, Mark Wahlberg, Lorraine Brasco, Juliette Lewis, Jim Caroll, Ernie Hudson, James Madio, Patrick McCaw, Bruno Kirby, Josh Mostel, Michael Imperioli, Brittany Daniel, Toby Huss, Michael Rapaport et John Hoyt.. Réalisation : Scott Kalvert. Scénario : Jim Caroll & Bryan Goluloff. Directeur de la photographie : David Phillips. Montage : Dana Congdon. Musique: Graeme Revell.

Durée : 100 mn. Disponible en VO, VOST et VF.




Résumé :

Jim (Léonardo Di Caprio) et sa bande de copains (dont l’un d’eux est joué par Mark Wahlberg, la future vedette que l’on connaît) suivent une scolarité rigide dans une école catho et traînent leur mal de vivre dans les rues de New York. Le basket, qu’ils pratiquent à un haut niveau, est leur seule passion. De dérapages en désillusions, ils vont préférer la seringue au ballon. Jim écrit son journal intime, celui d’une descente aux enfers...


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L’avis de Bernard Alapetite :

Le film, le premier du metteur en scène, est l’adaptation d’un livre autobiographique célèbre aux USA de Jim Carroll, l’un des chefs de file de l’avant-garde new-yorkaise des années 70, proche d’Andy Warhol, de Lou Reed et du Velvet Underground. Ce garçon précoce publie son premier recueil de poèmes à 22 ans, Living at the movies, pour lequel il est pressenti pour le prix Pulitzer. Il publie The Basketball Diaries en 1978, à l’âge de 28 ans, dans lequel il racontait au jour le jour son expérience d’ado paumé, drogué, clochardisé, prostitué... Cette prostitution homosexuelle est discrètement présente dans le film dans une scène où l’on perçoit un relent d’homophobie. Ce livre, publié en France par les éditions 10/18 (n°2644), sera le livre culte d’une partie de la jeunesse américaine ; il sidérera Jack Kerouac et marquera cette jeunesse comme l’avait fait avant lui le fameux L’Attrape-cœurs de Salinger. On peut le comparer à ce que fut en France au début des années 80, Flash (Le Livre de Poche). Pourtant le film connaîtra un échec commercial aux USA... Caroll a également commis plusieurs disques, dont Catholic Boy en 91, et on entend certaines de ses chansons dans la bande originale d’E.T.


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À noter que Caroll a suivi le tournage du film et a même joué le rôle d’un vieux junkie dans une scène avec Di Caprio. Ce dernier, comme pour le rôle de Rimbaud, fait preuve d’un grand talent d’interprète à la tête d’une distribution homogène et talentueuse. Il donne une dimension époustouflante à ce personnage d’adolescent désespéré qui ne rêve que de devenir pur. Il faut être courageux pour accepter un tel rôle à l’aube d’une carrière ; il est vrai que Basketball Diaries fut tourné avant son succès titanesque...

Le film n’a dû sa sortie en France, trois ans après son tournage, qu’en raison du succès de Titanic, et c’est une chance, car il aurait été dommage de se priver de ce film bien écrit et bien joué, mais assez mollement filmé, sauf dans les scènes où intervient la musique dans lesquelles Kalvert se souvient qu’il est un bon réalisateur de clips. Dans la lignée d’Outsiders de Coppola, Basketball Diaries est un mélo crépusculaire presque exclusivement interprété par une ribambelle de garçons, souvent dénudés.


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À signaler, à ce titre, quelques scènes particulièrement intéressantes comme celle où les jeunes gens improvisent une partie de basket streap-tease la nuit sous la pluie diluvienne, ou celle où le beau Léonardo se fait fouetter devant tous ses camarades de classe par un prêtre-professeur. On voit DiCaprio jouer au basket à moitié nu avec beaucoup de gros plans impudiques, dont un sur ses fesses nues : il est patent que la réalisation n’est pas insensible aux beautés garçonnières juvéniles. Mais on le voit surtout se battre dans des rues sombres, faire le plein d’héro, vomir et pleurer beaucoup. Le film installe une vision sans fioritures de la toxicomanie, on dira que c’est un peu « Drugstore Schoolboy ».

Pour plus d’informations :

Par Bernard Alapetite - Publié dans : FILMS : Les Toiles Roses
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Jeudi 7 août 4 07 /08 /Août 13:37
Nous attendons avec impatience vos commentaires sur ce onzième objet :


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Par Henry Victoire
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Mercredi 6 août 3 06 /08 /Août 00:07


InTurn est une télé-réalité exclusivement diffusée sur le net, dans laquelle l'équipe d'As The World Turns (dont le "charmant" Chris Goutman, producteur exécutif et réalisateur) organise un casting façon Star Academy pour trouver un nouveau comédien. A chaque épisode, un élève est éliminé. La dernière semaine, les internautes américains votent pour leur préféré parmi les trois derniers, qui auront chacun une scène dans ATWT. Le gagnant remporte un contrat de 13 semaines dans le soap.
"InTurn" est un jeu de mot. "Intern" signifie "stagiaire", et "In Turn" sous-entend "in [As The World] Turn". C'est la 3e année que le concours est organisé. Je posterai ici uniquement les extraits liés à Luke et Noah, (ou Van et Jake). Si vous voulez voir l'intégralité de la série, cliquez sur :
www.cbs.com/originals/inturn3/
Massiarc, thanks for your help.
[InTurn 3 appartient à CBS, ATWT à PGP]


Par Jag1366 - Publié dans : SERIE : AS THE WORLD TURNS (AINSI VA LE MONDE)
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Lundi 4 août 1 04 /08 /Août 00:26


par Stéphane RIETHAUSER


1. Le procès Wilde et l'affaire Rosebery

Vers la fin des années 1880, Oscar Wilde (1854-1900) est la coqueluche des théâtres et des salons londoniens et célèbre dans toute l'Europe. Wilde est marié et père de deux enfants, mais entretient des liaisons avec de nombreux jeunes hommes. En 1892, il fait la rencontre de Lord Alfred Douglas, un jeune aristocrate qui sera sa plus grande passion, mais qui sera aussi à l'origine de sa chute. Accusé de sodomie par le père de Lord Douglas, Wilde tient à se justifier en attaquant le Marquis de Queensberry en diffamation. Mais au cours de ce procès, la pédérastie du dramaturge sera établie. Wilde est accusé de débauche. Ses amis lui conseillent de fuir le pays, mais il refuse, certain que sa popularité et son esprit raffiné le sauveront.

Wilde & Douglas
Après avoir affronté les juges une seconde fois, Wilde est reconnu coupable le 25 mai 1895 de "gross indecency", un événement qui fait la une des journaux de toute l'Europe. Il écope de 2 ans de prison avec travaux forcés. Le flamboyant esthète, le charmant humoriste voit du jour au lendemain sa carrière et sa vie ruinées. Dans les geôles de Reading, il compose sa fameuse Ballade, ainsi que la longue lettre de rancœur et d'amour à Lord Alfred Douglas, le De Profundis. A sa sortie de prison, il s'exile en France où il mourra dans l'indigence et la solitude trois ans plus tard, à l'âge de 46 ans. A noter qu'en 1997, la reine Elizabeth a encore refusé de gracier Wilde.
Dès la condamnation de Wilde, une pétition circule dans les milieux artistiques et intellectuels européens pour demander l'allégement de sa peine. Beaucoup d'écrivains français refusent de signer. François Coppée : "Je veux bien signer en tant que membre de la société protectrice des animaux". Alphonse Daudet : "En tant que père de famille, je ne peux que manifester mon horreur et mon indignation" (ceci pendant que son fils Lucien, à cette époque, devenait l'amant de Marcel Proust). Jules Renard : "Je veux bien signer à condition qu'il prenne l'engagement de ne plus jamais écrire". Henry James, lui-même homosexuel, ainsi qu'Emile Zola, refusent de signer aussi. En Allemagne, Eduard Bernstein, l'un des dirigeants du parti social-démocrate, se prononce publiquement en faveur de Wilde en publiant un article dans la revue officielle de la IIème Internationale, Die Neue Zeit.
Oscar Wilde
La tragique histoire d'Oscar Wilde est connue, mais un autre scandale l'est moins, celui qui a ruiné la carrière de Lord Rosebery (1847-1929), Ministre des Affaires Etrangères puis Premier Ministre de la reine Victoria. Lord Rosebery a pour secrétaire intime Francis Douglas, qui n'est autre que le frère de Lord Alfred Douglas, l'amant de Wilde. Tout Londres murmure que le Premier Ministre a pour amant son secrétaire. Le père de Francis Douglas, Lord Queensberry, traite publiquement Rosebery de pédéraste en le menaçant de sa cravache, comme il l'avait fait à Oscar Wilde au sujet de son autre fils. Le Prince de Galles intervient personnellement pour que l'affaire soit étouffée. Le 18 octobre 1894, Francis Douglas meurt mystérieusement au cours d'une partie de chasse. On parle de suicide. Dès le début du procès de Wilde, Rosebery tombe malade. Le 28 juin 1895, un mois après la condamnation d'Oscar Wilde, le Premier Ministre est mis en minorité et doit démissionner. Sa carrière politique est terminée, mais il n'y aura pas de procès Rosebery.

Citons pour terminer la triste fin du général Hector Mac Donald (1853-1903), héros de la Guerre contre les Boers, puis commandant des forces britanniques à Ceylan. Rappelé à Londres en 1903, il découvre ses aventures avec les garçons révélées par la presse sur le chemin du retour et se suicide dans sa chambre d'hôtel à Paris au lieu d'affronter un procès dans son pays.





Krupp
2. Le scandale Krupp

En 1902 éclate en Allemagne un scandale qui sera à l'origine de l'échec d'une nouvelle tentative de Magnus Hirschfeld de faire abolir le §175 par le Reichstag. Friedrich Albert (Fritz) Krupp (1854-1902) a hérité des plus grandes usines d'armement d'Europe. Outre l'Allemagne, il fournit l'Empire Austro-Hongrois, l'Italie et la Russie en canons. Sous son règne, les usines Krupp vendent plus de 40'000 pièces d'artillerie, faisant de lui l'homme le plus riche d'Europe à l'époque. Krupp est un adolescent efféminé qui a horreur des femmes. Forcé de se marier jeune par sa mère, il n'aura que deux filles auxquelles il interdira de reprendre la direction de l'entreprise familiale. Lorsqu'il séjourne dans les palaces de Berlin, il fait toujours chambre à part avec sa femme. Il passe l'hiver sur son yacht dans la Baie de Capri. Krupp est accusé de s'adonner à des "orgies sexuelles" avec des dizaines de jeunes gens dans des grottes. Mais protégé par toutes les instances politiques et militaires, il n'a pas besoin de s'inquiéter, surtout que nombre de ses connaissances viennent passer leurs vacances chez lui à Capri en compagnie de jeunes garçons italiens.

C'est le journal socialiste Vorwärts qui, heureux de pouvoir s'en prendre à celui qui était considéré comme l'homme le plus riche du monde, sera à l'origine de sa chute en révélant ses penchants au grand public. Sa femme s'indigne et demande au Kaiser d'agir, mais celui-ci l'envoie dans un asile et protège le constructeur de ses canons. Cependant, de plus en plus accablé, Krupp se suicide peu après, en novembre 1902. Sa mort est déguisée en crise cardiaque. Respectant le souhait de Krupp, Guillaume II arrange le mariage de l'héritière des usines Krupp avec l'un de ses hommes de main, von Bohlen und Halbach, et prend ainsi le contrôle des fabriques d'armement. Il fait même une entorse au code civil en faisant adopter à von Bohlen und Halbach le nom de Krupp von Bohlen. Pour l'anecdote, la fille de Krupp se nommait Bertha, et c'est elle qui a donné son nom au fameux canon des Allemands pendant la Grande Guerre.


3. L'affaire Eulenburg

En 1907 éclate en Allemagne le plus grand scandale politique du Deuxième Reich (1871-1914): l'affaire Eulenburg , qui va déclencher une vague d'homophobie dans la presse et dans l'opinion et dont les répercussions sur la société allemande et internationale seront multiples.
Le Prince Philippe zu Eulenburg (1847-1921), qui ne cache pas vraiment ses préférences amoureuses, est le conseiller et le plus proche ami de l'empereur Guillaume II (1859-1941), monté sur le trône en 1888. De 12 ans l'aîné de Guillaume II, Philippe zu Eulenburg entretient une relation ambiguë avec l'Empereur, et est derrière toutes ses décisions. Guillaume II lui propose de reprendre la Chancellerie lorsqu'au début des années 1890, il démet Bismarck de ses fonctions. Eulenburg préférera rester Ambassadeur de Prusse à Vienne. Ecœuré, Bismarck écrit à son fils que la relation entre l'Empereur et Eulenburg "ne peut pas être mise sur la papier."
Eulenburg

Von Moltke
Un journaliste juif, Maximilian Harden (1861-1927), au courant des pratiques de Eulenburg, le fait chanter et le somme de démissionner de ses fonctions d'Ambassadeur à Vienne. Eulenburg cède au chantage et se retire dans sa maison de campagne en Allemagne. Pendant trois ans, il est absent de la vie politique. Mais dès 1905-1906, il reprend ses liens avec l'Empereur. Le bruit court qu'il pourrait reprendre la Chancellerie, et l'opiniâtre journaliste Harden lance alors une nouvelle attaque contre Eulenburg dans deux articles parus dans le journal Die Zukunft, l'accusant implicitement d'avoir une relation avec le commandant militaire de Berlin Kuno Von Moltke (1848-1916) (à ne pas confondre avec le Général Von Moltke, l'artisan de la victoire de l'Allemagne lors la guerre de 1870-71) en les décrivant respectivement comme le "harpiste" (Eulenburg était un amateur et compositeur de harpe) et son chéri "der Süsse" (Von Moltke avait un faible pour les chocolats). Eulenburg s'enfuit en Suisse pour quelque temps et tente d'éviter le scandale.
Il faut attendre six mois supplémentaires pour que l'identité d'Eulenburg et de Von Moltke soit révélée au grand public. Le 27 avril 1907, Harden publie cette fois un article explicite en écrivant que la "vita sexualis" de Eulenburg n'était "pas plus saine que celle du Prince de Prusse Friedrich Heinrich", qui venait d'avouer publiquement son homosexualité. La population voit Harden comme un héros qui sauve l'appareil étatique de la débauche et de la corruption. Le Kaiser, très compromis dans son autorité, force plusieurs hauts fonctionnaires à démissionner. Dans l'embarras, Eulenburg s'accuse lui-même de violation du §175, et après une brève enquête, il bénéficie d'un non-lieu. Mais Von Moltke insiste pour attaquer le journaliste Harden en diffamation.
"Der Harpist" und "Der Süsse"
Dessin de presse satirique, 1907
Le 23 octobre 1907, le procès Von Moltke contre Harden s'ouvre à Berlin, et lors des débats, des détails croustillants de la vie de Von Moltke sont révélés. Plusieurs témoins sont cités, dont Magnus Hirschfeld, soucieux de publicité, amené à la barre par Harden en tant qu'expert scientifique. L'homosexualité de Von Moltke sera formellement établie, et ce dernier perdra le procès. Il est intéressant de relever que lors du premier procès, Hirschfeld, en tant qu'expert scientifique, convainc la cour que Von Moltke n'est ni un pédéraste ni un sodomite mais un "homosexuel", en insistant sur son côté efféminé, artiste, très émotionnel et instable, laissant entendre que l'homosexualité peut être une déviance psychologique qui est innée, dont on n'est pas responsable, et qui n'a pas nécessairement besoin de s'exprimer par la sexualité. Eulenburg et Von Moltke ne se considéraient eux-mêmes pas "homosexuels". En se l'admettant dans les faits sous couvert de relations d'amitié, mais en rejetant l'étiquette de "débauché" ou de "sodomite" à tout prix. Au tribunal, ils se justifient en jurant ne jamais avoir eu des relations "immorales" ou "sales" ("Schweinerei, Schmutzerei"). Mais intervient alors un retournement de situation : le procès est annulé pour vice de forme. Le gouvernement prussien a réalisé que la victoire de Harden, un Juif, associé à Hirschfeld, un autre Juif qui dirigeait le CSH, mettait en péril la réputation des institutions et la respectabilité de la classe gouvernante.
Entre-temps, le 6 novembre 1907, un autre procès s'ouvre, celui qui oppose le Chancelier impérial von Bülow (1849-1929) à Adolf Brand, l'éditeur de la revue Der Eigene. Adolf Brand accuse Von Bülow d'homosexualité. Brand, qui pourrait être qualifié de précurseur de la politique du "outing", adopte une autre tactique que celle de Hirschfeld. Il souhaite attirer l'attention sur l'injustice du §175 lui aussi, mais de manière beaucoup plus provocante et moins politiquement correcte, en dressant une liste de "cas actuels" d'homosexuels. C'est finalement lui, après seulement une journée de procès, qui sera condamné à 18 mois de prison pour diffamation.
Le 18 décembre 1907 s'ouvre le deuxième procès entre Harden et Von Moltke, au terme duquel l'ancien commandant militaire de Berlin est blanchi et Harden condamné à 4 mois de prison pour diffamation. Heureux, le Kaiser réhabilite Eulenburg et Von Moltke. Mais leur joie sera de courte durée, car Harden, une fois sorti de prison, met sur pied un stratagème pour faire tomber Eulenburg et Von Moltke. Il s'associe à un éditeur bavarois, Anton Städele, et fait publier par celui-ci un article frauduleux qui affirme que Eulenburg lui aurait versé un million de marks pour qu'il cesse ses attaques. Harden s'empresse d'attaquer son comparse Städele en justice et transforme le tribunal en scène publique pour relater les détails de l'affaire Eulenburg. Au procès, il fait témoigner des amants d'Eulenburg afin d'engager un autre procès, pour parjure cette fois-ci, Eulenburg ayant juré sous serment n'avoir jamais violé le §175. La combine fonctionne, et le 7 mai 1908, Eulenburg est inculpé de parjure. Mais après de nouveaux procès s'étalant jusqu'en 1909, il ne sera finalement jamais condamné, feignant la maladie et s'évanouissant aux séances de tribunal.

Guillaume II
de Prusse
Fin 1908, un autre scandale, étouffé celui-ci, montre le désarroi dans lequel se trouvait le Kaiser. Guillaume II commet une énorme gaffe diplomatique en accordant un entretien au journal anglais The Daily Telegraph, dans lequel il expose ses vues sur les relations anglo-allemandes et leur rivalité dans la conquête des mers. La publication de l'interview déclenche un scandale au Reichstag, tant dans les rangs des adversaires d'une détente anglo-allemande que d'autres politiciens qui ne voyaient pas d'un bon oeil la divulgation de la stratégie allemande dans la presse britannique. Dépité, Guillaume II se retire dans son domaine de la Forêt Noire pour une partie de chasse. C'est là que lors d'une fête, le Comte Dietrich von Hülsen-Häseler, le chef du Secrétariat Militaire, se donne en spectacle après le repas et exécute un "pas seul" vêtu d'un tutu de ballerine.

Il amuse la galerie jusqu'à ce qu'il tombe raide mort sous les yeux du Kaiser, victime d'un arrêt cardiaque. Guillaume II quitte précipitamment la salle pour ne pas être vu, et tente d'étouffer l'affaire. Elle ne passera pas au grand public, mais l'Empereur, déjà miné par l'affaire Eulenburg et le scandale de l'interview au Daily Telegraph, ne supportera pas ce nouvel esclandre et s'enfoncera dans une dépression nerveuse. Un hôte de la soirée écrit : "En Guillaume II j'ai vu un homme qui, pour la première fois de sa vie, avec des yeux pétrifiés d'horreur, dût regarder le monde tel qu'il était vraiment."


4. Les répercussions de l'affaire Eulenburg

Les répercussions de l'affaire Eulenburg peuvent être constatées à de nombreux niveaux : c'est en effet aux multiples procès découlant de l'affaire Eulenburg que l'on doit la propagation du néologisme "homosexuel" dans le public. Dans les éditoriaux des journaux allemands, on parle de "clique homosexuelle" entourant l'empereur Guillaume II. D'innombrables articles et dessins de presse sont publiés, et introduisent pour la première fois le terme "homosexuel" au grand public, et ce dans tous les pays d'Europe - un mot qui n'était utilisé jusqu'alors que par les psychiatres.

Dessin de presse
1907
La crédibilité des hommes politiques et des institutions est ébranlée. L'idée que l'homosexualité est quelque chose de contagieux et de néfaste qui peut mener le pays à la ruine, qui peut saper les piliers des institutions, rompre les barrières entre les classes, sabrer les hiérarchies administratives et militaires entre dans les esprits. Un député du Reichstag affirme que les révélations de l'affaire Eulenburg "remplissent la nation allemande entière de répulsion et de haine." Le Parti Socialiste profite du scandale pour attaquer l'Empereur et insiste sur la "dégénérescence du pouvoir" en affirmant que l'homosexualité est un "produit de la décadence." Après avoir soutenu les revendications de Hirschfeld, voilà les socialistes qui retournent leur veste et passent dans le camp des homophobes. L'image des institutions est non seulement fortement compromise au niveau national, mais encore au niveau international. En France, on parle déjà du "vice allemand" et on saute sur l'occasion pour attaquer son voisin. En Angleterre, on se fait un peu plus discret par pudibonderie victorienne, mais la presse lance tout de même quelques attaques contre les mœurs des hommes au pouvoir en Allemagne.
L'affaire Eulenburg ne peut être considérée comme un simple scandale de mœurs. Ses répercussions ont été si fortes dans la société allemande et sur la scène internationale que de nombreux historiens l'ont directement mis en relation avec l'entrée en guerre de l'Allemagne en 1914. Bien entendu, les causes de la Première Guerre mondiale relèvent d'un ensemble de faits extrêmement complexes, et il serait hors de propos d'affirmer que l'affaire Eulenburg a été seule responsable de l'entrée en guerre de l'Allemagne. Mais elle en a sans aucun doute été l'un des vecteurs. Dans une époque caractérisée notamment par de fortes rivalités économiques et militaires entre les grandes puissances européennes et une course à l'armement, l'honneur national était au premier plan des préoccupations. Les valeurs de la société allemande étaient fortement secouées, les normes culturelles sens dessus dessous, et l'anxiété palpable tant dans le public et la presse que parmi les sphères dirigeantes. La confiance du peuple était au plus bas et l'honneur de la nation bafoué. Guillaume II avait perdu en Eulenburg un conseiller intelligent et pacificateur. On voyait logiquement l'homosexualité, au côté du féminisme et du judaïsme, comme des agents néfastes et conspirateurs qui menaient la nation à la ruine. Comme toujours lorsqu'il se sent acculé, le pouvoir réagit en désignant des boucs émissaires parmi les minorités dérangeantes. C'est un combat qui s'insère dans un courant plus large, de structures sociales désuètes qui rejette la modernité, un combat qu'on retrouve aussi à Vienne, où la noblesse s'accroche à ses privilèges et s'oppose au "libéralisme-citadin-et-juif".

Sur le plan psychologique, la manière dont l'affaire Eulenburg a été relatée dans la presse a grandement contribué à forger la notion d'une sexualité "normale" et "anormale" dans les mentalités. D'autre part, la diffusion du mot "homosexuel" dans le public de toute l'Europe a aussi fait prendre conscience à beaucoup de gens attirés par des représentants de leur sexe qu'ils pouvaient constituer un ensemble de personnes aux affinités semblables, bien qu'atteintes d'un vice ou d'une maladie, d'une inversion sexuelle, d'une déviance psychologique. Dans son ensemble, l'affaire Eulenburg a encouragé les gens à se sonder au niveau de leur orientation sexuelle sur un plan national et international, tout en stigmatisant cette orientation comme une maladie. Les théories de Krafft-Ebing et de Freud, qui circulent depuis Vienne, appuient avec autorité l'idée d'une maladie psychique.


5. Vienne : le suicide du colonel Alfred Redl

En Autriche, un scandale retentissant secoue aussi les institutions : celui du colonel Alfred Redl (1883-1913). Comme l'affaire Eulenburg, il reflète lui aussi le climat d'homophobie qui régnait à Vienne à cette époque. Redl est un jeune homme d'origine modeste qui se fait admettre à l'école militaire des jeunes aristocrates austro-hongrois. Officier très ambitieux, il monte vite en grade. En 1898, il tombe amoureux du jeune Stefan Hromodka. Afin de pouvoir entretenir son amant, il accepte de l'argent proposé par les Russes. Plus tard, il devient chef des services secrets de l'Autriche-Hongrie. Les agents de la Russie arrivent à prendre des photos compromettantes et le font tomber dans un piège.

Colonel Alfred
Redl (1883-1913)

Redl cède au chantage et livre les plans de guerre de son gouvernement, notamment ceux des forteresses de Galicie, ainsi que les noms des agents autrichiens en Russie. Il est rapidement démasqué. Mais l'état-major veut éviter le scandale d'un procès et contraint Redl à se suicider en 1913 dans une chambre d'hôtel à Vienne. Les Autrichiens devront changer leurs plans de bataille, ce qui contribuera à leur défaite durant la Première Guerre mondiale. Sans cette trahison, l'Autriche aurait vraisemblablement pu conserver la Galicie et conquérir la Serbie. Comme l'ont relevé certains historiens, l'affaire Redl aurait une fois de plus répandu l'idée que les homosexuels posaient des problèmes de sécurité nationale. Cela a notamment servi d'argument pour persécuter les homosexuels dans l'administration américaine par les équipes du sénateur MacCarthy dans les années 1950 aux Etats-Unis.


6. Invisibilité, répression policière et suicide

Au niveau de la vie sociale homosexuelle, il faut souligner le rôle capital joué par la révolution industrielle, qui a permis à des milliers d'homosexuels de s'extirper des structures familiales rurales et de se retrouver indépendants dans l'anonymat des grandes villes. Dans toutes les métropoles européennes, il existe une culture homosexuelle souterraine, formée d'associations secrètes, de réseaux cachés. A Vienne, le Klub der Vernünftigen (Club des Raisonnables), à Rome un Club degli ignoranti (Club des Ignorants), à Bruxelles des Réunions philanthropiques, à Cambridge la Société des Apôtres. La prostitution est très répandue autour des casernes, ou dans des villes portuaires comme Hambourg ou Marseille. Les jardins du Prater à Vienne et le Tiergarten de Berlin, tout comme les Tuileries à Paris ou Hyde Park à Londres, sont le théâtre de rencontres nocturnes.
Comme le montre Hirschfeld dans son ouvrage Les homosexuels de Berlin, l'amour entre hommes se caractérise avant tout par son invisibilité sociale. Punissables de prison, étiquetées "déviantes" par la psychiatrie, et condamnées tant par l'Eglise réformée que par l'Eglise catholique et orthodoxe, sans oublier la religion juive, les relations entre personnes de même sexe étaient le sujet tabou par excellence, toujours dans le contexte plus étendu de la répression sexuelle générale. Mis à part une poignée d'artistes de cabaret et des téméraires comme Alfred Brand, personne n'osait afficher ouvertement son uranisme. Hirschfeld lui-même restait extrêmement discret sur ses préférences sexuelles et se retranchait derrière sa fonction de psychiatre, même si elles ne faisaient aucun doute étant donné ses intérêts scientifiques. Ses détracteurs le surnommaient d'ailleurs "Tante Magnesia".
Magnus Hirschfeld

Dans le public, on ne pouvait concevoir positivement une relation entre deux hommes sur le plan sexuel ou amoureux. La catégorisation des sexes était d'une rigidité implacable. Il y avait d'un côté les hommes, de l'autre les femmes, à qui étaient assignés des rôles bien précis. Ceux qui n'entraient pas dans ces moules étaient étiquetés débauchés, déviants, invertis, pervers, malades. Il n'y avait pas de place pour des personnes différentes dans la société si ce n'est la prison ou l'asile psychiatrique, ni de vocabulaire si ce n'est les termes médicaux ou les grossiers épithètes dérogatoires connus de tous exprimant le vice et la dépravation. Ceux qui se reconnaissaient homosexuels étaient pris de remords, se torturaient la conscience, et ne trouvaient souvent pas d'issue à leur dilemme. On recense en cette période 1906-1907 pas moins de six suicides d'officiers homosexuels qui subissent les pressions de maîtres chanteurs à Berlin. En 1908, Magnus Hirschfeld écrit qu'il a sauvé au moins 20 homosexuels du suicide. Suite à l'affaire Eulenburg, les inculpations au nom du §175 s'intensifient. La brigade des mœurs sévit, et nombreux sont les hommes condamnés à des peines de prison.



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NOTA BENE: les ouvrages utilisés pour ce travail sont répertoriés dans la bibliographie 

Ce travail est l'oeuvre de Stéphane Riethauser. Il sera publié en 10 parties sur le blog Les Toiles Roses avec son autorisation. Qu'il en soit chaleureusement remercié. Stéphane est joignable sur le site de lambda éducation.



Lire le précédent billet : cliquez ici.


Par Stéphane Riethauser - Publié dans : HISTOIRE DE L'HOMOSEXUALITÉ
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Dimanche 3 août 7 03 /08 /Août 00:53

Visuel : (c) GayClic

Cette fois, c'est confirmé. A cause de son père, Noah est vraiment à côté de... la plaque !!!
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Par Jag1366 - Publié dans : SERIE : AS THE WORLD TURNS (AINSI VA LE MONDE)
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Samedi 2 août 6 02 /08 /Août 00:50

Visuel : (c) GayClic

Amira est libre... Est-ce la libération aussi pour nos deux tourtereaux ? Pas sûr.
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Par Jag1366 - Publié dans : SERIE : AS THE WORLD TURNS (AINSI VA LE MONDE)
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Vendredi 1 août 5 01 /08 /Août 00:00


Fiche technique :
Avec Michel Piccoli, Mohsen Mohiedine, Mohsena Tewfik et Patrice Chéreau. Réalisé par Youssef Chahine. Scénario : Youssef Chahine. Directeur de la photographie : Mohsen Nasr. Compositeur : Gabriel Yared.
Durée : 115 mn. Disponible en VO, VOST et VF.



Résumé :
Avide de puissance et de gloire, Bonaparte entame la campagne d'Égypte. Loin de ces préoccupations guerrières, Caffarelli, l'un de ses généraux, part à la découverte de ce pays et de son aâme. Il va s'opposer à l'action exclusivement destructrice de Bonaparte.

Youssef Chahine

L'avis de Jean Yves :
Adieu Bonaparte retrace une tranche d'histoire : durant sa campagne d'Égypte en 1798, Bonaparte (Patrice Chéreau) avait recruté une soixantaine de chercheurs parmi lesquels le général Caffarelli (Michel Piccoli), qui se prend d'un attachement profond pour deux jeunes autochtones, tandis que le petit caporal fait couler le sang à travers le pays.
Youssef Chahine raconte avec une très grande pudeur comment un amour peut commencer : « qu'est-ce qu'un premier regard ? »
Ce film n'est pas une fresque sur la campagne égyptienne de Bonaparte : il se situe loin des délires du Corse malgré les déploiements d'artillerie et les reconstitutions méticuleuses. L'irrespect de Youssef Chahine envers le général y est largement perceptible, ce qui n'est que justice à l'égard d'un tyran arrogant qui saigna à blanc la jeunesse européenne pour satisfaire sa seule volonté de puissance.
Pour le réalisateur donc, l'expédition en Égypte n'est qu'un prétexte : pendant que Bonaparte répand le sang, il focalise l'attention du spectateur sur le général Caffarelli, un savant unijambiste en qui semblent se jouer toutes les luttes de l'âme. À travers l'amour de Caffarelli pour deux jeunes frères égyptiens, à travers l'amitié qu'ils lui rendent (ce qui n'est pas évident étant donné la situation), Chahine nous montre la conscience d'un homme encore humain devant la souffrance, devant l'injustice, devant l'absurdité dans laquelle les foules sont entraînées, de part et d'autre.
C'est une histoire d'amour à trois personnages : Caffarelli, Yehia la tête (Mohamed Atef) et Ali les jambes (Mohsen Mohiedine). Tout le film est axé sur la sublimation, l'engouement que suscitent les deux frères égyptiens, de culture et de coutumes islamiques. Caffarelli veut comprendre, apprendre, aimer, quitte à émettre des avis contraires à la parole de Bonaparte fiévreux, possédé par la mégalomanie.
Toutes les relations, crescendo, de l'approche amicale aux aveux de l'homme qui meurt, sont d'une exquise beauté, finement ciselées par Chahine et soutenues par l'interprétation juste et grave d'un Piccoli au meilleur de sa forme.
L'important, à travers le personnage de Caffarelli, c'est de voir le début d'un amour, ses mécanismes, la difficulté parce que l'autre est différent. L'important n'est pas qui on aime mais comment on aime. Caffarelli finit par transcender sa passion, il parvient à aimer moins pour aimer mieux.

Adieu Bonaparte, une parabole universelle sur l'amour : est-ce que Caffarelli pourra aimer Ali tel qu'il est, pour ce qu'il est, sans vouloir le réduire à une image qui lui convient, sans tomber dans le stéréotype style Indiana Jones, le dieu « civilisé » qui viendra séduire et baiser toutes les femmes, et pourquoi pas sauver le tiers monde ?
Derrière la façade fragile d'une reconstitution historique qui n'est qu'un alibi, Chahine nous offre une réflexion philosophique sur l'amour, et cela est admirable.

Pour plus d’informations :
––

Par Jean Yves - Publié dans : FILMS : Les Toiles Roses
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Jeudi 31 juillet 4 31 /07 /Juil 00:35
Nous attendons avec impatience vos commentaires sur ce dixième objet :


http://douglas.typepad.com/content/pink-tank.jpg

Photo : © D. R. - Sauf mention contraire, toutes les photos publiées sur lestoilesroses.com sont protégées par les lois sur le copyright et appartiennent à leurs auteurs ou ayants droits respectifs. Si vous êtes propriétaire d'une photo publiée dans un article et que vous souhaitez exercer vos droits d'auteur, merci de
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Par Henry Victoire
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Mercredi 30 juillet 3 30 /07 /Juil 00:45


InTurn est une télé-réalité exclusivement diffusée sur le net, dans laquelle l'équipe d'As The World Turns (dont le "charmant" Chris Goutman, producteur exécutif et réalisateur) organise un casting façon Star Academy pour trouver un nouveau comédien. A chaque épisode, un élève est éliminé. La dernière semaine, les internautes américains votent pour leur préféré parmi les trois derniers, qui auront chacun une scène dans ATWT. Le gagnant remporte un contrat de 13 semaines dans le soap.
"InTurn" est un jeu de mot. "Intern" signifie "stagiaire", et "In Turn" sous-entend "in [As The World] Turn". C'est la 3e année que le concours est organisé. Je posterai ici uniquement les extraits liés à Luke et Noah, (ou Van et Jake). Si vous voulez voir l'intégralité de la série, cliquez sur :
www.cbs.com/originals/inturn3/
Massiarc, thanks for your help.
[InTurn 3 appartient à CBS, ATWT à PGP]


Par Jag1366 - Publié dans : SERIE : AS THE WORLD TURNS (AINSI VA LE MONDE)
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Mardi 29 juillet 2 29 /07 /Juil 00:41


par Stéphane RIETHAUSER



6. Sexe et Caractère de Otto Weiniger

En 1903, Otto Weiniger (1880-1903) publie Geschlecht und Charakter (Sexe et Caractère), qui le rend célèbre du jour au lendemain. Pour Weiniger, toutes les cellules sont sexuées. Il avance la théorie d'une bisexualité omniprésente dans tous les organismes vivants. D'abord véritable thèse scientifique publiée sous le titre Eros und Psyche, il l'augmente de théories racistes et misogynes avant sa diffusion dans le public sous son titre actuel. Ce deviendra un pamphlet dans lequel il exprime sa haine des Juifs et des femmes, affirmant qu'ils n'ont pas d'âme et qu'ils sont immoraux. Pour lui, être Juif n'est pas être d'une race mais une attitude mentale qu'il faut surmonter. Méprisant ses propres traits féminins et ses origines juives, Weiniger est le type même du refoulé : sa misogynie et son antisémitisme proviennent d'une haine de soi aiguë. Jeune esprit tourmenté, Weiniger détestait les salles de bal et les bordels, et aspirait s'élever par ses prouesses intellectuelles. Il se convertit au protestantisme en été 1902. En 1903, alors qu'il n'a que 23 ans, il se suicide dans la maison où est décédé Beethoven, moins d'un an après la parution de sa thèse. Peu d'informations existent quant aux préférences sexuelles de Weiniger, mais on sait qu'il partage les goûts du poète Stefan George et de Hans Blüher. Sa trajectoire de vie et ses écrits ne laissent pas supposer qu'il aimait les femmes.

7. Sigmund Freud et le "but sexuel normal"


Sigmund Freud
(1856-1939)

En 1905, Sigmund Freud (1856-1939), déjà célèbre pour L'interprétation des rêves (1899), publie les Trois essais sur la théorie sexuelle (Drei Abhandlungen zur Sexualtheorie). Mille exemplaires brochés sont vendus en 4 ans, et quatre mille autres entre 1910 et 1920. Ce livre rend Freud impopulaire dans les milieux conservateurs. La bonne société viennoise le juge immoral et obscène, et cesse de saluer son auteur dans la rue. Mais fort de quelques idées dérangeantes, son livre a finalement plus contribué à sa renommée qu'il ne l'a discrédité.

L'ouvrage de Freud est révolutionnaire sur un point : celui de la théorie de la sexualité infantile. Personne auparavant n'avait ébauché de théorie allant dans ce sens, l'enfant étant jusqu'alors considéré comme asexué. Selon Freud, l'enfant est un "pervers polymorphe" à la sexualité anarchique. Celle-ci s'exprime sur toutes les zones du corps sans but précis, puis sur des objets sexuels. A adolescence, l'instinct sexuel se transforme après les modifications physiques (maturation des organes) et les inhibitions psychiques (éducation, pudeur, dégoût), pour arriver au désir du sexe opposé: au "but sexuel normal". Si le schéma d'évolution est interrompu ou mal vécu, par accident ou par prédisposition, apparaissent les "aberrations sexuelles" - titre évocateur du premier essai du recueil, dans lequel Freud consacre de longues pages à l'"inversion", qui, selon lui, est une perversion et un arrêt dans le développement de la sexualité.

Les théories de Freud confirment la tendance dans l'approche de l'homosexualité. Comme ses prédécesseurs Krafft-Ebing ou Ellis, Freud ne voit pas l'homosexualité comme quelque chose de criminel et de condamnable. Ce n'est plus un péché ou une dépravation qui mérite la punition, mais une infirmité ou un déficit sexuel qu'il faut tolérer, voire guérir. L'homosexuel est considéré comme un primitif, un attardé de la vie sexuelle, qui a échoué dans un développement harmonieux de sa sexualité.

En ouverture de ses Trois Essais, Freud justifie l'attirance des sexes opposés en se référant à une "fable poétique", selon lui "la plus belle illustration de la théorie populaire de la pulsion sexuelle" (qui n'est autre que le discours d'Aristophane sur les sphères androgynes, tiré du Banquet de Platon). Pour Freud, le désir de l'élément mâle de rejoindre l'élément femelle explique l'amour hétérosexuel chaste, le "but sexuel normal". Le reste n'est que déviance et inversion. Freud passe sous complet silence l'amour masculin encensé tout au long des discours de Platon. Ses oeillères morales viennoises l'empêchent-elles de voir ce qui pourtant saute aux yeux tout au long de cette apologie de la pédérastie ? Quelques lignes seulement après la mention de l'espèce androgyne, Platon écrit que "cette disposition était à deux fins : si l'étreinte avait lieu entre un homme et une femme, ils enfanteraient pour perpétuer la race, et, si elle avait lieu entre un mâle et un mâle, la satiété les séparerait pour un temps, ils se mettraient au travail et pourvoiraient à tous les besoins de l'existence. C'est de ce moment que date l'amour inné des hommes les uns pour les autres". Si Freud n'avait pas frauduleusement cité Platon pour jeter les bases de sa théorie du "but sexuel normal", on pourrait extrapoler que le cours de la psychanalyse et le destin de bon nombre d'homosexuels en aurait été changé. En interprétant le discours d'Aristophane à sa guise et en lui substituant sa propre conception de l'homosexualité, Freud ne fait pas preuve de beaucoup de rigueur analytique. Si le "divin" Platon (c'est ainsi que Freud le qualifie à la fin de la préface à la quatrième édition des Trois Essais) avait loisir de lire l'ouvrage de Freud, de voir ainsi décrit l'amour entre hommes, de voir ainsi utilisé son Banquet, à n'en pas douter, il se retournerait dans sa tombe.

Freud déclare son animosité à l'encontre de Hirschfeld et refuse d'écrire dans l'Annuaire sur les états sexuels intermédiaires, comme il le déclare dans une lettre à Jung datée du 25 février 1908 . Il reproche notamment à Hirschfeld d'être perverti parce qu'il a des relations avec des prostitués masculins. Freud pense qu'il est aberrant de vouloir donner des droits aux homosexuels, qu'il considère comme des infirmes. Il reviendra pourtant sur ses propos en 1922, lorsqu'il acceptera finalement d'apposer sa signature aux côtés de celles de Einstein, Mann, Hesse, Zweig et d'autres sur une pétition de Hirschfeld réclamant l'abolition du §175.

Deux visions cohabitent chez Freud : d'un côté, une largesse d'esprit qui admet comme naturelle la sexualité polymorphe de l'enfant, de l'autre des présupposés moraux qui assignent à la sexualité de l'adulte un but "normal". Tout au long de son ouvrage, qu'il augmentera par trois fois (1910, 1915, 1920), Freud ne démord pas de sa vision infundibuliforme faisant tout converger vers cet inamovible "but sexuel final". Son esprit pourtant scientifique est aveuglé par les injonctions sociales de "normalité". Bien qu'il ait l'honnêteté d'avouer en conclusion que "nous sommes loin d'en savoir (...) suffisamment pour former à partir de connaissances fragmentaires une théorie qui permette de comprendre aussi bien le normal que le pathologique" , c'est par cette distinction même entre "normal" et "pathologique" qu'il fera le plus grand tort aux personnes homosexuelles, en les classant dans cette dernière catégorie.

En 1910, Freud publie Un souvenir d'enfance de Léonard de Vinci et rattache l'homosexualité du génie italien à une double cause : d'une part le refoulement de l'amour pour sa mère et la fuite loin des femmes par fidélité à l'image maternelle, d'autre part l'élection de sa propre personne "comme idéal à la ressemblance duquel il choisit ses nouveaux objets d'amour". "Il est ainsi devenu homosexuel, mieux, il est retourné à l'auto-érotisme, les garçons (...) n'étant que des personnes substituées et des éditions nouvelles de sa propre personne enfantine."

En 1911, Freud résume sa théorie de l'homosexualité dans Cinq psychanalyses (cas n°4, Président Schreber) : "Ceux qui, plus tard, deviennent des homosexuels manifestes sont des hommes n'ayant jamais pu se libérer de cette exigence que l'objet doive avoir les mêmes organes génitaux qu'eux-mêmes."

Freud revient une dernière fois sur l'homosexualité en 1935, quatre ans avant sa mort, dans une lettre à une mère, publiée dans sa correspondance (9 avril), où il réaffirme sa théorie de l'arrêt du développement. Freud écrit que l'homosexualité n'est "ni un vice ni un avilissement et on ne saurait la qualifier de maladie." Il se montre prudent quant à des chances de guérison par traitement, mais n'y est pas formellement opposé.

L'opinion de Freud sur l'homosexualité va marquer durablement l'opinion publique pendant des décennies en la stigmatisant d'une part comme un arrêt dans le développement, une perversion, d'autre part en la décrivant avec la plume du scientifique comme un phénomène purement sexuel, omettant d'y associer les affinités du cœur, les sentiments, la tendresse, l'amour. Dans les Trois Essais, Freud ne fait pas une seule fois référence à l'amour, si ce n'est en mentionnant l'absence de chapitres relatant la "vie amoureuse des enfants" dans les ouvrages des autres scientifiques de l'époque, et ceci dans une note infra-paginale. Même si on peut louer le psychiatre viennois de ne pas considérer l'homosexualité comme une maladie en tant que telle, force est de constater que c'est bien lui qui a consacré avec le plus d'influence l'entrée de l'amour entre hommes dans la sphère de la pathologie.


8. Les disciples de Freud : Ferenczi, Jung, Adler et Groddeck

En 1906, celui qui deviendra un grand psychanalyste et la tête de file de ce mouvement en Hongrie, le Docteur Sandor Ferenczi, ne connaît pas encore les travaux de Freud lorsqu'à l'âge de 33 ans, il présente à l'Association des Médecins de Budapest un texte qui demande l'abolition des sanctions pénales contre les homosexuels en Hongrie. Il prend ouvertement parti pour les homosexuels qu'il appelle "Uraniens" et il conseille à ses collègues de s'associer aux campagnes du Comité Humanitaire Scientifique de Hirschfeld. Il élabore une théorie de la bisexualité et considère l'homosexualité comme naturelle.

Sandor Ferenczi
Mais en 1907, il découvre les travaux de Freud et est ébloui. Il consacre deux articles au livre de Freud et dès 1909, il publie ses Nouvelles remarques sur l'homosexualité où il se rétracte dans ses propos, affirmant que l'homosexualité est "une névrose étroitement apparentée à l'impuissance : les deux ont en commun la fuite devant la femme". Il se distance également de Hirschfeld en écrivant que "la théorie du troisième sexe a été inventée par les homosexuels eux-mêmes", qu'il qualifie de "résistance sous forme scientifique", avant de conclure que "la responsabilité de l'homosexualité incombe au refoulement de l'hétérosexualité". En 1911, il publie L'homoérotisme : nosologie de l'homosexualité masculine où il renforce encore la théorie de l'arrêt dans le développement. Enfin, en 1932, dans sa Présentation abrégée de la psychanalyse, Ferenczi classe l'homosexualité parmi les "perversions sexuelles les plus fréquentes".
Il est intéressant de constater que de tous les écrits de Ferenczi réunis dans ses œuvres complètes, son vibrant plaidoyer originel pour les homosexuels n'est pas inclus. Il faut attendre 1983 pour qu'il soit réédité en France. On voit que, dans le domaine de l'homosexualité au moins, l'influence de Freud sur Ferenczi a été désastreuse, et que la postérité n'a retenu de lui que ses analyses faisant suite à la découverte des écrits du maître viennois.
Carl Gustav Jung, le psychiatre suisse, ne portait pas les homosexuels dans son cœur, comme en témoigne une lettre qu'il écrit à Freud en 1911, en parlant d'un médecin hollandais, un certain Docteur Römer : "C'est le chef de tribu des homosexuels, le Hirschfeld hollandais (...) Il n'est, comme tous les homosexuels, pas un plaisir." Après sa rupture avec Freud, Jung ne s'intéressera plus beaucoup à la sexualité.
C. G. Jung
En 1917, le Docteur Alfred Adler publie Le problème de l'homosexualité, perpétuant la stigmatisation pathologique des homosexuels. "L'homosexualité est la négation de la volonté humaine dans un de ses points les plus sensibles ; car la volonté humaine porte d'une façon vivante en elle l'idéal d'une perpétuation. Ce simple fait suffit pour imposer l'hétérosexualité en tant que norme et pour placer toute perversion, y compris la masturbation, au rang du crime, de l'égarement ou du péché".
En 1920, un ancien disciple de Freud, le Docteur Georg Groddeck (1866-1934) publie Le Livre du Ça, un livre sous forme de lettres écrites à une amie, dans lequel il expose les problèmes de l'âme et du corps. La lettre n° 27 est consacrée à l'homosexualité. Groddeck évoque l'amour de la Grèce antique et mentionne certains Evangiles, où les jeunes gens posaient leur tête sur la poitrine du Seigneur. "Nous restons aveugles devant tous ces témoignages. Nous ne devons pas voir ce qui crève les yeux." Selon Groddeck, le désir homosexuel est universel et est inné en chacun de nous. "Pour tous, pour moi-même, il y a eu une période de notre vie où nous avons accompli des efforts surhumains pour étouffer en nous cette homosexualité tant décriée en paroles et en écrits. Nous ne réussissons même pas à la refouler et pour pouvoir soutenir ce mensonge incessant, quotidien, nous apportons notre appui à la flétrissure publique de l'homosexualité, allégeant d'autant notre conflit intime." Groddeck trouve ridicule de chercher des causes à l'homosexualité et se distance nettement de Freud sur ce point. Ce dernier rejettera ces propos certes plus polémiques que scientifiques - mais toutefois empreints d'un bon sens fort dérangeant -, tout en empruntant à son ancien disciple le terme du "ça" pour l'opposer au "moi" dès 1923 dans Le Moi et le Ça . Sur la durée, les affirmations du Docteur Groddeck n'ont joui de presque aucun écho. Les théories de Freud demeureront et influenceront durablement l'opinion publique jusqu'à nos jours.

9. La psychiatrie, nouvelle autorité

Les théories de Freud et de ses acolytes consacrent la reprise de la question homosexuelle par la psychiatrie des mains du pouvoir religieux. Amorcé par le Siècle des Lumières et la Révolution française, puis par les théories de Darwin, l'effritement de l'autorité de l'Eglise a laissé la voie libre aux scientifiques, qui, forts d'un nouveau vocabulaire, assoient leur autorité en la matière. Certes les actes de caractère homosexuel ne perdent pas entièrement leur connotation pécheresse, mais c'est à ce moment de l'Histoire que ce qui était jusqu'alors uniquement considéré comme un crime contre nature et contre Dieu devient une "déviance psychologique" clairement définie. D'actes blasphématoires et criminels isolés commis par un individu, les relations entre personnes du même sexe relèvent à présent de "l'homosexualité", et font entrer celui ou celle qui les pratique dans une nouvelle catégorie, celle des "invertis", des "pervers", des "déviants". On reconnaît à présent ces perversions sexuelles même à l'état latent. Conscientes ou inconscientes, ces émotions anormales relèvent toujours d'une condition psycho-sexuelle déviante. Sans ôter totalement son autorité morale à l'Eglise, la psychiatrie n'a fait que s'ériger en une instance autoritaire supplémentaire pour juger de manière péjorative l'amour entre hommes, et ce sous le couvert des progrès de la science.

Georg Groddeck


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NOTA BENE: les ouvrages utilisés pour ce travail sont répertoriés dans la bibliographie 

Ce travail est l'oeuvre de Stéphane Riethauser. Il sera publié en 10 parties sur le blog Les Toiles Roses avec son autorisation. Qu'il en soit chaleureusement remercié. Stéphane est joignable sur le site de lambda éducation.



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Par Stéphane Riethauser - Publié dans : HISTOIRE DE L'HOMOSEXUALITÉ
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Lundi 28 juillet 1 28 /07 /Juil 00:53


par Stéphane RIETHAUSER


1. Les premières théories médicales

C'est un médecin lausannois, Samuel Auguste Tissot, qui parmi les premiers s'est penché sur la sexualité en tant que médecin. Tissot est célèbre dans toute l'Europe, notamment pour ses traités sur l'épilepsie et la fièvre bilieuse, mais surtout pour son Avis au peuple sur la santé, traduit en treize langues. Voltaire et Rousseau, tout comme le Roi de Pologne et l'Electeur de Hanovre, le veulent pour médecin. Avec son Essai sur les maladies produites par la masturbation, qui paraît en 1760, il lance les premières attaques médicales contre la masturbation, en affirmant que l'onanisme est non seulement une maladie mais un crime. Extrait de ses "observations cliniques" :



Samuel Tissot
"C'est un tableau effrayant propre à faire reculer l'horreur. En voici les principaux traits : un dépérissement général de la machine ; l'affaiblissement de tous les sens corporels et de toutes les facultés de l'âme ; la perte de l'imagination et la mémoire, l'imbécillité, le mépris, la honte ; toutes les fonctions troublées, suspendues, douloureuses ; des maladies longues, bizarres, dégoûtantes ; des douleurs aiguës et toujours renaissantes ; tous les maux de la vieillesse dans l'âge de la force... Le dégoût pour tous les plaisirs honnêtes, l'ennui, l'aversion des autres et de soi ; l'horreur de la vie, la crainte de devenir suicide d'un moment à l'autre." Tissot trouve en Jean-Jacques Rousseau un fervent admirateur, le Genevois lui écrit des lettres enflammées : "Bien fâché de n'avoir connu plus tôt le Traité de la Masturbation... Je sais que nous sommes faits, vous et moi, pour nous entendre et nous aimer. Tous ceux qui pensent comme nous sont amis et frères... Je suis à vos pieds, Monsieur." Le traité sur la masturbation de Tissot est l'un des premiers best-seller à caractère médical et sexuel : il se vend sans interruption jusqu'au début du XIXe siècle et marque durablement les esprits.
Un autre médecin va faire entendre sa voix depuis la France : en 1857, le docteur Ambroise Tardieu publie ses Etudes médico-légales sur les attentats aux m?urs, qui listent les symptômes de cette "pratique contre nature". "Je ne reculerai pas devant l'ignominie du tableau," écrit-il avant de se lancer dans le portrait d'une "infâmie" qu'il associe étroitement à la "délinquance". Il décrit des pédérastes efféminés et clinquants, et distingue entre les "actifs" et les "passifs", en soulignant les caractéristiques de ces derniers : petites dents, lèvres déformées, rectum "infundibuliforme".

Autre son de cloche en Allemagne, où le médecin Johann Ludwig Casper est le premier qui en 1852 avance la théorie que l'attirance des hommes pour les hommes est innée. Casper dénie à l'Etat le droit d'intervenir dans des questions de morale. Ses conseils n'auront pas grand écho. Une quinzaine d'années plus tard, en 1869, un autre point de vue médical se fait entendre par la plume du médecin allemand Karl von Westphal, qui publie un article décrivant l'amour entre hommes comme un "sentiment sexuel contraire". Von Westphal suggère que ce phénomène est une maladie mentale et conseille de traiter les personnes qui en souffrent plutôt que de les punir de prison.


2. Kertbeny invente le terme "homosexualité"

C'est le 6 mai 1868 que les mots "homosexualité" et "hétérosexualité" apparaissent pour la première fois par écrit en allemand, dans une lettre que le psychiatre et sexologue hongrois établi à Vienne Károly Mária Kertbeny (1824-1882) adresse à Karl Heinrich Ulrichs. En 1869, dans une lettre ouverte au ministre prussien de la justice qui fait l'apologie d'une dépénalisation de l'homosexualité, Kertbeny utilise le terme de manière publique pour la première fois.



K. M. Kertbeny
Vocable formé des mots grec "Homo" (même) et latin "sexus" (sexe), ce néologisme à la consonance si clinique va changer beaucoup de choses dans l'approche du phénomène. Il faudra attendre le début du XXe siècle pour que le terme s'impose et supplante ses concurrents "uranisme", "inversion", "ou sentiment sexuel contraire". Les termes "homosexualité" et "hétérosexualité" n'entreront dans la langue française qu'en 1891.

"L'homosexualité" traduit un nouveau regard et une nouvelle attitude mentale par rapport à la question. Certes, l'acte relève toujours de la débauche, du péché ou de la déviance dans les esprits, mais à partir de ce moment, le phénomène est considéré aussi comme une maladie. Souffrant déjà de l'opprobre social et moral et de la surveillance policière, voilà l'amour entre personnes du même sexe épinglé par la médecine. Même si le mot "homosexualité" ne fait que s'ajouter à une liste d'épithètes dérogatoires bien trop longue ("bardache", "bougre", "castor" (XVIe-XVIIe), "culiste", "infâme", "tante" (XVIIIe), "rivette", "corvette", "persilleuse", "sodomite" ou "pédéraste" (XIXe)), il a l'avantage d'être porté par les voix autoritaires des médecins. Il s'affirme aisément par son caractère scientifique, parce qu'il a un contraire, "hétérosexualité", et qu'il cerne clairement une "déviance" sexuelle. En cela, il est la source d'une modification d'envergure dans la perception de la question. Avec une double connotation libératrice et répressive : d'une part il permettra, lorsqu'il passera dans le grand public, à une certaine partie de la population de se reconnaître et de s'organiser, de l'autre, il désigne à la fois des individus isolés, les étiquetant de "malades", et un mal social à combattre à tout prix. Bien loin de faire songer à l'amour, malgré les tentatives de certains comme Magnus Hirschfeld, l'homosexualité a été perçue au tournant du siècle de façon croissante comme une menace contre l'ordre établi, contre la reproduction, contre la productivité capitaliste, et contre le modèle si étroitement défini de la famille bourgeoise. En lui-même, en n'en référant qu'à la sexualité à proprement parler, il attire bien maladroitement l'attention sur ce seul aspect.


3. Le Psychopatia Sexualis de Richard Von Krafft-Ebing

En 1886, l'année du suicide de Louis II de Bavière, Richard Von Krafft-Ebing (1840-1902), un psychiatre allemand installé à Graz en Autriche, publie un mince ouvrage en latin qui va énormément marquer les esprits : Pyschopatia Sexualis. Comme son titre l'indique, l'ouvrage considère l'homosexualité comme une forme de dégénérescence. C'est Krafft-Ebing qui le premier présente concrètement l'homosexualité sous l'angle médical. Il définit l'homosexualité comme "une tare névro-pyschopathologique" ou un "stigmate fonctionnel de dégénérescence". Même si Krafft-Ebing se prononce contre la criminalisation des actes homosexuels, il n'en demeure pas moins qu'il place l'homosexualité au rang des maladies mentales, et qu'il fait l'amalgame entre crimes sexuels et actes à caractère érotique (homosexualité, travestisme, fétichisme ou exhibitionnisme). Krafft-Ebing va jusqu'à qualifier l'érotisme de "déviance". Catholique fervent, son refus de la sexualité est presque total : la seule fonction naturelle de la sexualité est de propager l'espèce.



Von Krafft-Ebing
Fils d'un célèbre avocat de Heidelberg, le baron Krafft-Ebing exerce comme psychiatre légiste, criminologue et expert auprès des tribunaux. Il est le psychiatre le plus réputé à Vienne, et a parmi ses patients le Kronprinz Rodolphe - ses conseils n'éviteront cependant pas à l'hériter de la couronne d'Autriche-Hongrie de se suicider. Juste avant que Louis II de Bavière ne se donne la mort par noyade, il avait averti le médecin personnel du roi de prendre garde aux tendances suicidaires de son patient. Dès 1892, Krafft-Ebing occupe pendant dix ans la chaire de psychiatrie de l'Université de Vienne, la plus importante d'Europe. C'est à Krafft-Ebing qu'on doit le terme de "masochisme", qu'il forge d'après le nom et les écrits du romancier Leopold von Sacher-Masoch (1836-1895), et qu'il associe au sadisme, qui lui tire son origine d'un autre écrivain connu pour ses écrits pornographiques scandaleux, le Marquis de Sade.
Le Pyschopatia Sexualis de Krafft-Ebing connaît un énorme succès. Rapidement traduit en sept langues, il atteint sa douzième édition en 1902 au moment de la mort de son auteur et sa dix-septième en 1924. Il est encore aujourd'hui disponible en librairie. Ce livre va avoir une influence capitale sur le monde de la psychiatrie, en décrétant ce qui est sain et normal et ce qui est déviant en matière de sexualité pendant des décennies. Krafft-Ebing influencera Sigmund Freud sur bien des points, mais s'attirera l'hostilité de ce dernier en 1896 pour avoir dénigré sa première étude sur la sexualité infantile en la qualifiant de "fable" ("Märchen"), ce qui ne l'empêchera pas de soutenir la candidature de Freud à un poste de professeur par deux fois. Sans succès, puisque Freud devra attendre 1903 et la promesse du don d'un tableau de l'une de ses patientes, Marie Ferstel, au Ministre de l'Education von Hartel pour orner la galerie qu'il projetait d'ouvrir, afin de décrocher le titre de "professeur extraordinarius".

Krafft-Ebing publie un autre ouvrage en 1894, Le mâle sexuel déviant devant la cour de justice dans lequel il affirme que "de tels dégénérés n'ont pas le droit à l'existence dans une société bourgeoise réglée (...) Ils mettent grandement la société en danger, et ce tout au long de leur existence. La science médicale n'a pas trouvé le moyen de guérir ces victimes d'une tare organique. Ils doivent être écartés absolument, bien qu'il ne faille pas les considérer comme des criminels - ce sont des malheureux qui méritent la pitié."

4. L'inversion sexuelle de Havelock Ellis

En 1897, le Docteur Havelock Ellis, un médecin anglais, publie en Angleterre
L'inversion sexuelle. Dans cet ouvrage, il dresse la liste de plusieurs figures historiques, de Michel-Ange à Verlaine, en passant par Ulrichs et Hirschfeld. Hétérosexuel, Ellis n'a rien contre les homosexuels, mais prône plutôt l'abstinence. Il veut aider l'inverti à bien se porter, et reste sceptique quant aux soins qu'on peut apporter aux homosexuels. Son livre est qualifié d'obscène et est saisi et détruit sur ordre du procureur de Londres. Les travaux de Havelock Ellis connaîtront malgré tout leur public, et influenceront Freud.


Havelock Ellis

5. Magnus Hirschfeld, instigateur du premier mouvement de libération homosexuelle en Allemagne

Magnus Hirschfeld (1868-1935) est un neurologue juif allemand qui a voyagé dans le monde entier avant de s'établir à Berlin. En 1896, à l'âge de 28 ans, il publie sous le pseudonyme de Th. Ramien Sappho et Socrate et s'engage contre les discriminations dont sont victimes les homosexuels.
Le 14 mai 1897, Hirschfeld fonde avec l'aide de l'éditeur Max Spohr (1850-1905) et le juriste Eduard Oberg (1858-1917) le Comité Scientifique Humanitaire (CSH), le premier groupe socio-politique organisé pour lutter contre les discriminations qui frappent les hommes qui aiment les hommes. Il lance une pétition avec trois objectifs : 1) abolir le §175, 2) expliquer au grand public le caractère de l'homosexualité, 3) intéresser les homosexuels eux-mêmes à la lutte pour leurs droits. Hirschfeld se présente comme un docteur, un psychiatre, un scientifique (qu'il était), mais ne s'affiche pas ouvertement comme homosexuel (qu'il était aussi).
Magnus Hirschfeld
Le 13 janvier 1898, le Reichstag débat de la pétition du CSH qui demande l'abolition du §175. C'est August Bebel, un ancien ouvrier devenu le chef du parti social-démocrate qui la défend devant le Parlement, usant notamment de l'argument du nombre considérable d'homosexuels dans toutes les couches de la population. Si le §175 était appliqué à la lettre, les prisons de la nation seraient rapidement surpeuplées. Mais l'assemblée est sourde à ses arguments : la proposition est rejetée par la majorité.
En 1898, Hirschfeld réédite les écrits de K.H. Ulrichs, qui avait sombré dans l'oubli, et en 1899, il publie à Berlin le premier des 23 volumes de son Annuaire sur les états sexuels intermédiaires (Jahrbuch für Sexuelle Zwischenstufen), dans laquelle il élabore sa théorie du "troisième sexe". Cet annuaire recense de nombreux articles traitant de la question homosexuelle, écrits par des spécialistes de toutes les disciplines. On peut y trouver notamment une biographie de Heinrich Hössli par Ferdinand Karsch, parue en 1903. Un autre contributeur à la revue de Hirschfeld est Richard Von Krafft-Ebing qui publie en 1901 un article affirmant que certains homosexuels peuvent être "normaux", réfutant ainsi les théories qu'il avait ébauchées quelques années plus tôt.
En 1903, Magnus Hirschfeld publie une étude sur des étudiants et des ouvriers allemands dans laquelle il établit que 2,2 % des 6'611 hommes interrogés sont homosexuels, ce qui, appliqué à l'échelle nationale, revenait à dire que plus de 1,2 million d'Allemands étaient homosexuels. On le poursuivit en justice, mais il bénéficia d'un non-lieu en raison du caractère scientifique de son étude.
En 1904 paraît sous la plume de Hirschfeld Les homosexuels de Berlin, qui analyse les problèmes que soulèvent les pratiques du point de vue de la loi et de l'opinion. Hirschfeld n'y expose que des "faits", comme il l'écrit dans son avant-propos, et déclare suivre une démarche scientifique. Il ne s'implique pas personnellement, mais fait recours à des témoignages anonymes. Il rapporte ce qu'il constate dans ses entretiens ou lors de ses visites dans des endroits fréquentés par les homosexuels, dans des dîners, des bars, ou des bains. Il décrit le milieu de la prostitution, les petites annonces, les rencontres dans les parcs de la capitale, notamment ce qui se passe la nuit au Tiergarten. Il dénonce le chantage dont sont victimes de nombreux uraniens, et montre ainsi les effets pervers du §175. Hirschfeld insiste sur la nature de l'uranien, et non sur sa sexualité. Il montre comment les homosexuels restent invisibles, en calquant leur comportement sur celui de la majorité, mais aussi comment ils vivent dans leurs réunions secrètes. Hirschfeld conclut sur l'universalité de l'homosexualité et lance un plaidoyer pour l'acceptation de cette nature. En 1906, les théories de Hirschfeld font des adeptes à Vienne. L'ingénieur Joseph Nicoladoni et le psychanalyste Wilhelm Stekel tentent de créer l'antenne autrichienne du Comité Scientifique Humanitaire de Hirschfeld , mais sans succès.
Frontispice de l'édition
française (1908)

Malgré quelques revers, l'activité de Hirschfeld s'avère de plus en plus payante. Son Comité Scientifique Humanitaire fait des adeptes au niveau international. Des dizaines de milliers d'exemplaires de l'imprimé Was soll das Volk vom dritten Geschlecht wissen (Ce que le peuple doit savoir sur le troisième sexe) sont diffusés. Des dizaines de discours publics sont tenus dans toutes les villes allemandes d'importance. Les récoltes de signatures se succèdent pour faire pression sur les membres du Reichstag et faire tomber le §175. Rien qu'en 1904, Hirschfeld envoie sa pétition à tous les médecins du Reich, soit 30'000 personnes. Seuls 2'000 d'entre eux répondent favorablement.


*****

NOTA BENE: les ouvrages utilisés pour ce travail sont répertoriés dans la bibliographie 

Ce travail est l'oeuvre de Stéphane Riethauser. Il sera publié en 10 parties sur le blog Les Toiles Roses avec son autorisation. Qu'il en soit chaleureusement remercié. Stéphane est joignable sur le site de lambda éducation.



Lire le précédent billet : cliquez ici.


Par Stéphane Riethauser - Publié dans : HISTOIRE DE L'HOMOSEXUALITÉ
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Dimanche 27 juillet 7 27 /07 /Juil 00:27

Visuel : (c) GayClic

Luke dit ENFIN ses quatre vérités à Noah... Hélas, ça n'arrange rien.
[ATWT appartient à PGP et CBS]


Par Jag1366 - Publié dans : SERIE : AS THE WORLD TURNS (AINSI VA LE MONDE)
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Samedi 26 juillet 6 26 /07 /Juil 02:21

Visuel : (c) GayClic

Alors que Luke se fait lourder, Lily est lourdingue et se croit à Lourdes. Que du lourd, quoi.
A 5'03, avant le fondu au noir, je pressens que Van Hansis est au bord du fou rire.
[ATWT appartient à PGP et CBS]


Par Jag1366 - Publié dans : SERIE : AS THE WORLD TURNS (AINSI VA LE MONDE)
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Vendredi 25 juillet 5 25 /07 /Juil 00:19




L'EXPLOSION DES MAMANS LESBIENNES

DANS LES SÉRIES TÉLÉVISÉES



Une chronique d'Isabelle B. Price, d'Univers-L
 


Queer as folk


Les américains restent à ce jour les précurseurs en matière de visibilité homosexuelle dans les séries télévisées. Et même si les lesbiennes ont mis plus longtemps à s’imposer, elles ont connu un véritable âge d’or avec la présence sur les écrans de Mélanie et Lindsey dans la série Queer As Folk, de Willow et Tara puis Kennedy dans Buffy contre les Vampires, de Kerry Weaver dans Urgences et des héroïnes de The L-Word.


http://www.afterellen.com/archive/ellen/TV/Photos/melanielindsaygus.jpg

Queer as folk

 

Malheureusement, une augmentation de la visibilité n’entraîne pas inévitablement une croissance intéressante des histoires relatives aux lesbiennes. À ce titre-là, les américains ont été les premiers à s’ennuyer de l’habituel coming out. Ils ont souhaité diversifier les trames et se sont alors engouffrés dans la voie toute tracée de l’homoparentalité.

Il faut reconnaître qu’en 1993 lorsque Meredith Baxter obtenait une nomination aux Emmy Awards pour son rôle dans Others Mothers, une histoire où un jeune garçon avait deux mères lesbiennes, le sujet était révolutionnaire et nouveau. À cette époque, la visibilité lesbienne en était encore à ses balbutiements et il était invraisemblable d’aborder la question de l’homoparentalité tant l’homosexualité posait déjà problème.

Et pourtant, à partir de cet instant, les lesbiennes désirant devenir mères se sont peu à peu multipliées sur le petit écran. NYPD Blue a ouvert la marche avec Abby et Kathy, ont suivi Melanie et Lindsay (Queer As Folk) puis Kerry et Sandy (Urgences) sans oublier Bette et Tina dans le récent The L-Word. Et encore, il ne s’agit que des séries, les téléfilms tels Deux mères pour un enfant, Les Liens du Cœur, Bobbie’s Girls… ont également abondé dans ce sens.

Il apparaît clair que lorsque les américains ont commencé à ne plus savoir quoi faire des lesbiennes, ils se sont précipités sur cette trame de l’homoparentalité avec délectation. Attention, je n’ai rien contre la représentation de cette question à la télévision bien que le parti pris soit, la plupart du temps, trop politiquement correct. Je n’ai rien non plus contre la maternité chez les lesbiennes. Je constate juste qu’on ennuie moins les hommes avec cette trame.


Urgences

 

Il semble qu’aujourd’hui les termes de "femmes" et de "mères" soient à nouveau extrêmement liées au point d’oublier que l’épanouissement personnel ne se réalise pas uniquement à la maison avec la famille et les enfants. En se focalisant sur cette question, les auteurs enlèvent une certaines légitimité aux homosexuelles qui ne semblent exister qu’à travers leur progéniture. N’est-ce pas cette idée que les femmes et les féministes ont combattu si violemment pendant des années ?

Je n’ai rien contre le fait que deux femmes, qui s’aiment et qui sont en couple depuis longtemps, songent à avoir un enfant (bien que Kerry et Sandy de la série Urgences aient brûlées les étapes me semble-t-il). Je n’ai rien non plus contre la question de l’insémination artificielle vécue par Bette et Tina et qui correspond à ce que beaucoup de lesbiennes vivent (même si ça réussit un petit peu trop vite). Et encore moins de réticences contre le fait qu’une mère se batte au tribunal pour que ses droits sur l’enfant qu’elle a élevé mais qui a été porté par sa partenaire soient reconnus comme dans Les Liens du Cœur. Mais il y a une limite. Une limite qui est sur le point d’être dépassée.


Bobbie's Girl


J’avoue que le fait qu’autant de lesbiennes soient mères de famille dans les fictions télévisées m’agace un peu. Mais ce qui m’agace le plus, c’est que les histoires sont toujours les mêmes et qu’on va finir par se lasser et ne plus supporter de se voir asséner ces questions d’homoparentalité, surtout les fervents défenseurs des valeurs chrétiennes (entre autre et les autres, bien évidemment). Si nous, lesbiennes, commençons à fatiguer… les homophobes, eux, vont finir par disjoncter.


The L-word

 

En plus, excusez-moi du peu, mais vous ne verrez pas de parents plus conventionnels et réactionnaires à la télévision que les couples de lesbiennes. Même le pasteur Camden et sa famille (7 à la Maison) sont plus ouverts et plus tolérants. Proches de la perfection, ces couples paraissent intouchables. Les deux principales intéressées sont systématiquement belles, intelligentes, proches sans trop l’être, ont réussi parce qu’elles ont une belle maison et un emploi dont on ne parle jamais et qui leur laisse beaucoup de temps libre. Elles ont tout pour être heureuses… il ne leur manque qu’un enfant.

Et quand bien même cette question de l’homoparentalité arrive à rendre l’homosexualité plus « visible » et « normale » en montrant des femmes qui se préoccupent plus de leur progéniture que de leurs propres vies, la saturation guette.


http://www.afterellen.com/archive/ellen/People/Photos/cherry%20jones/whatmakesfamily.jpg

Les Liens du cœur

 

Et les français, qui ont tout compris et ont toujours cinq ans de retard sur leurs homologues américains, viennent de trouver la question de l’homoparentalité géniale ! Si, si, si.

En janvier 2006, durant le premier épisode de la saison 6 d'Une Famille Formidable intitulé « Rien ne va plus », Nicolas Beaumont (Roméo Sarfati), le fils de Jacques (Bernard Le Coq) et Catherine (Anny Duperey), annonçait à ses parents et à tous les téléspectateurs qu’il était le géniteur de l’enfant que portait sa voisine et amie Laura, interprétée par Anne Malraux. Laura, lesbienne et en couple depuis quelques temps avec Natalia (Sandrine Rigaux).

Les parents Beaumont, après avoir appris la nouvelle, quittaient leur fils sous le choc et n’arrivaient pas à s’en remettre, surtout que le couple de Nicolas avec son ami Jean-Marc ne semblait pas aller très bien. Leur fils gay était simplement le géniteur de l’enfant de ses voisines lesbiennes ! Jusque-là, c’était relativement clair.

Malheureusement, tout se complique à la naissance de l’enfant. Laura, qui a l’impression que Natalia ne la comprend plus, se rapproche de Nicolas, heureux de jouer le père… qu’il n’est pas. Il tombe sous le charme de son enfant, qui n’est pas réellement le sien mais pas non plus celui de Natalia et finit par le kidnapper.


Une famille formidable (Laura et Natalia)

 

Après une fuite en Espagne, Nicolas retrouve finalement la raison et rend leur enfant à Laura et Natalia. Mais il a beaucoup de mal à se faire à l’idée qu’il n’a aucun droit sur son fils. Pas de quoi pavoiser, d’autant plus que la représentation de l’homoparentalité est très loin de me satisfaire. Et puis alors le Nicolas, depuis le temps qu’il joue les fils immatures, inconscients et irresponsables, il pourrait grandir un peu.

Le couple de lesbiennes est peu représenté. Elles apparaissent très gentilles dans ce premier épisode, heureuses de la grossesse et proches, puis leur relation se complique à la naissance. Et finalement, elles virent totalement folles, paranoïaques et agressives quand leur fils est kidnappé (ce que l’on peut comprendre en même temps). Rien de très reluisant en somme.


Une famille formidable (Laura, Nicolas et le petit Louis)

 

Je passe volontairement sur la question du téléfilm La Surprise d’Alain Tasma. Dans celui-ci, une femme de quarante ans interprétée par Mireille Perrier, divorcée et mère d’une adolescente succombe au charme d’une jeune brocanteuse, Claude, jouée par Rachida Brakni. Elle se retrouve obligée d’en parler à sa fille Justine (Chloé Coulloud) qui prend très mal la nouvelle. Rien à dire à part que les américains rendent les mères de famille, seules et nouvellement célibataires, lesbiennes depuis des années. Ils ont commencé avec la mère de Roseanne dans la série Roseanne en 1996, puis ont continué avec la mère de Steve dans Beverly Hills 90210 en 1999 et la mère d’Harrison dans Popular. Un schéma éculé où même si ces femmes ne tiennent pas le rôle principal de l’histoire, contrairement à La Surprise, elles découvrent leur homosexualité tardivement. Et puis, elles sont sympathiques et ont les aiment malgré tout, étant donné qu’elles sont les mamans de nos héros préférés. Steve n’ira-t-il pas jusqu’à frapper un crétin pour protéger la réputation de sa « maman », la seule femme qui l’ait toujours aimé ? Mais laissons cette question de côté pour nous intéresser à une autre représentation française d’homoparentalité.


Avec la série Diane Femme Flic, les auteurs de TF1 ont abordé brièvement et lamentablement cette question durant l’épisode « Bourreau de Travail ». Non, pas avec Bimbo (Vanessa Guedj) qui semble avoir oublié qu’elle a dit qu’elle était lesbienne dans l’épisode pilote. Non, avec une superbe commandant nommée Jessica Lotti (Camille Panonacle) qui fait du charme au capitaine Bochko (Joël Zaffarano). Elle semble tout d’abord lui faire des avances, l’invite à dîner, se laisse embrasser et avant que les choses n’aillent plus loin déclare qu’elle aime les femmes et veut un enfant de lui.

Bien évidemment, au départ, personne n’aime cette femme, elle appartient à la BRB, met des bâtons dans les roues à Diane (Isabelle Otero), l’héroïne, et fait une erreur monumentale de jugement qui permet aux braqueurs de se sauver. Elle a beau être belle, ça ne fait pas tout. Le capitaine est lui sous le charme et s’éloigne de son équipe pour se rapprocher de la jeune femme. Au début, le téléspectateur la trouve même « louche » et pense qu'elle est associée aux malfaiteurs.

Lorsque Jessica avoue finalement qu’elle « aime les femmes », le téléspectateur réalise qu'il a été conditionné pour ne pas apprécier le personnage. Le capitaine Bochko, lui, est surpris et ne comprend pas pourquoi elle l’a allumé de la sorte (nous non plus d’ailleurs). La jeune femme déclare qu’elle veut un enfant qui ait un père et qu’elle veut que ce soit lui. Bochko est flatté mais demande à réfléchir. Il réalise qu’il ne peut pas faire un enfant de cette manière même si Jessica lui a avoué qu’elle pourrait aller jusqu'à « coucher avec lui ».


Tous les papas ne font pas pipi debout

 

Jessica Lotti, loin d’être une représentation positive, est un personnage déprimant. Tout d’abord, elle n’est jamais qualifiée de « lesbienne » ou « d’homosexuelle ». On est sur TF1, en première partie de soirée, il ne faut surtout pas choquer. Donc on se contente de dire qu’« elle aime les femmes ». Ensuite, on passe sur le fait qu’elle soit incompétente au travail parce qu’elle est plutôt bien habillée mais la manière dont elle drague le père potentiel et qu’elle lui dit la vérité… est lamentable. En plus, je vous assure qu’elle sourit quand il l’embrasse sur la bouche. Et ça, c’est étrange pour une lesbienne, non ? Mais le pire réside à mon avis dans le fait qu’elle veut un enfant seule, pas de compagne, rien. Elle veut un « bébé toute seule ». Lamentable et déprimant, je vous dis. Si encore on savait copier les bonnes choses correctement. Mais non, même pas.

Pourtant, des téléfilms intéressants et forts abordant la question de l’homoparentalité, les français savent faire ! Tous les papas ne font pas pipi debout diffusé en 1998 sur France 2 et Des Parents pas comme les autres en 2001 sur M6 ont traité avec efficacité, naturel et tolérance de cette difficile question. Loin d’être idylliques, ils ont tous deux dépeint une réalité méconnue et touchante. Mais pourquoi faut-il obligatoirement que ces représentations positives et riches soient ponctuelles et éphémères ?

Vivement que les américains retrouvent leur inspiration et que les français retrouvent leur frilosité en matière de visibilité lesbienne jusqu’à une prochaine bonne idée.

 

Isabelle B. Price (2008)

Par Isabelle B. Price - Publié dans : ET LES FILLES, ALORS ?
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Vendredi 25 juillet 5 25 /07 /Juil 00:10
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Par Henry Victoire
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Jeudi 24 juillet 4 24 /07 /Juil 01:30

   


(4.26)





Après les fêtes familiales, c’est le cœur serré que j’ai quitté, jeudi 3 juillet, ma toutoune Nicia [c’est le diminutif de son chien (Note de Daniel C. Hall)] pour retrouver Andréa à Paris. Notre rencontre, la semaine précédente, avait bouleversé mon emploi du temps. Déjeuners, brunchs et drinks par ailleurs non confirmés furent purement et simplement annulés. Tout à la ferveur de l’amour naissant, je décidai de me consacrer entièrement à Andréa.

Notre première escapade en amoureux fut pour le Cimetière du Père-Lachaise. Chemin faisant, je reçus un appel courroucé de TiFrère qui m’avait généreusement prêté son appartement. Il était sur le point de partir pour Rio de Janeiro afin de rencontrer le docteur Joao Ribeiro da Costa, élève spirituel du feu docteur Alvarez réputé dans la blogosphère pour avoir « créé » Tri-Tinh Wan-Seng. TiFrère était donc en colère que je ne l’ai point encore appelé, étant trop pris par mes retrouvailles avec Andréa qui lui dit que finalement je dormirai chez lui et non au presbytère (TiFrère est hébergé par l’archevêché).

C’est donc nantis de sa bénédiction que nous parcourûmes les allées du célèbre cimetière de l’Est, nous embrassant devant les dernières demeures des gloires du passé : Balzac, Piaf, Salvador et une princesse Dolgorouki reçurent l’hommage de nos prières. En sortant de ce lieu reposant, nous faillîmes y retourner plus tôt que prévu, manquant être empoisonnés par l’infecte nourriture d’un fast-food chinois nommé « KONG ». Deux comprimés de citrate de bétaïne nous sauvèrent la vie et nous pûmes ensuite nous prélasser dans un parc, sous le regard bienveillant des badauds et d’une petite vieille qui montrait sa culotte sans la moindre gêne.

Nous rendîmes ensuite une visite à TiFrère, qui finissait de pré-préparer la rentrée scolaire dans une annexe de la Cité Universitaire. Le vent se mit à souffler tandis que j’accusais le coup des chinoiseries de l’après-midi. Andréa et moi rentrâmes pour nous reposer et nous aimer dans le confort douillet de son studio. Comme nous avons célébré la première semaine de notre rencontre, la nuit ne fut évidemment pas de tout repos.

Le lendemain matin, nous prîmes notre temps avant de nous mettre en route en direction de Montmartre. Nous fîmes étape à Drouot où nous flânâmes (deux A avec accent circonflexe, qui dit mieux ?) devant les galeries et fîmes étape dans celle du marquis Valentin de Privas qui figurait parmi les invités du dîner du vicomte de La Fresnais. Nous continuâmes à pieds jusqu’à la place de Clichy et j’emmenai mon amour voir mon ancien appartement. Je l’ai présenté à ma gentille gardienne qui s’est demandée si ce jeune faisait partie de ma famille. C’est sous un soleil radieux que nous poursuivîmes notre route vers la butte, nous arrêtant dans un restaurant italien pour un déjeuner en amoureux.



Nous reprîmes ensuite notre parcours, lentement, en direction de l’Hôtel de Ville pour l’exposition « Grace Kelly, Princesse de Monaco ». Sagement, nous fîmes la queue comme tout le monde, renonçant à faire usage de nos passe-droits respectifs pour aller plus vite. À peine étions-nous entrés dans le Château que Daniel m’appelait pour me demander si Andréa et moi avions fait certaines choses que la bienséance m’interdit de retranscrire en ces lignes. Si vous passez par l’Hôtel de Ville, allez voir cette expo sur Grace Kelly, elle vaut le détour. C’est bien évidemment une sortie à faire de préférence en amoureux, car on en profite puissance dix. Certes, les fans de cinéma ou d’altesses royales ou encore les yeux aiguisés repèreront certains anachronismes qui ont échappé à la vigilance du prince Albert, trop occupé à se demander s’il épousera un jour sa Charlène à lui, et à ses sœurs qui ont d’autres chats à fouetter. Mais les photos, les objets d’époque, les robes, les bagages, les bijoux, les affiches de films, les lettres, et même les passeports diplomatiques dont un au nom de « Grace de Rosemont » raviront le cœur de midinette qui sommeille en chacun de vous.

Après une halte espiègle dans un café sur les bords de la Seine, nous fîmes enfin une croisière en bateau-mouche pour admirer Paris vue de l’eau. La pauvreté des commentaires du guide touristique était heureusement compensée par le charme inégalé que revêt une première croisière en amoureux dans la ville la plus romantique du monde. À l’abri des regards indiscrets, dans le carré VIP du bateau, nous pûmes donner libre cours à notre passion. La nuit tombée, nous renonçâmes à aller à un concert de jazz, afin de regagner notre nid d’amour.

Samedi, nous avons continué nos promenades pédestres dans les rues de Paris. De passage dans un café du 9e, nous fûmes témoins d’une altercation entre un client et un barman. À mon grand regret, les deux matamores s’en tinrent aux mots et ne réglèrent pas leur différend sur le trottoir. Nos pas nous conduisirent ensuite Place Vendôme dont nous fîmes le tour en léchant les vitrines des célèbres joailliers. Nous ne pûmes résister à la tentation d’entrer chez Cartier où le directeur, d’une exquise onctuosité, nous fit admirer et essayer des alliances tout en nous faisant servir des rafraîchissements. Convenant néanmoins qu’il était encore tôt pour choisir nos anneaux, nous remerciâmes le directeur qui était maquillé comme pour passer au JT, et reprîmes notre route vers le Louvre où nous attendait une amie d’Andréa.

Nue sous sa robe, la pétulante Bérénice nous conduisit jusqu’au Palais-Royal où nous prîmes des consommations sous les frondaisons du jardin, tout en devisant sur nos amours respectives. L’après-midi passa comme un rêve et déjà nous étions au bord du soir. Après d’ultimes flâneries en l’île Saint-Louis, nous allâmes dans le Marais, non que nous considérions une incursion dans cette jungle étrange comme un passage obligé de notre week-end romantique, mais parce que nous devions y honorer un rendez-vous.

Louis de La Fresnais, père putatif de notre histoire d’amour, nous avait invités au restaurant pour un dîner qui, à mon sens, avait valeur de test et à l’issue duquel il ne put qu’être conforté sur l’état de nos sentiments. Andréa et moi finîmes la soirée dans le square près du Pont-Neuf et de la statue du bon roi Henri IV. Enjambant les grilles heureusement basses qui en interdisaient l’accès à cette heure tardive, nous nous installâmes sur un banc pour rêver au clair de lune et des péniches finissant leurs tournées, entourés par les rats (tatouille) qui pullulent à l’entour, nous imaginant faire mille coquineries au milieu de la nuit.

Dimanche matin il me fallut partir et subir, déjà, le stress du retour avec les distributeurs de billets en tous genres (RATP, banque) en panne et pour finir un incident sur le RER B qui nous contraignit à prendre un taxi. À l’aéroport, une fois le dépôt des bagages effectués, nous prîmes un petit déjeuner bien français avant de nous dire au revoir et de nous embrasser devant le check-point. Dès la frontière passée, le manque de l’autre nous étreignit respectivement, et le téléphone nous relia une dernière fois avant que le grand oiseau de fer ne m’emporte dans ses flancs pour me ramener au Canada…

 

TO BE CONTINUED…


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Par Zanzi - Publié dans : HUMEUR : Zanzi and the City
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Mercredi 23 juillet 3 23 /07 /Juil 09:08


Fiche technique :

Avec Cui Zien, Zhang Kang, Wei Jiangang, Yan Qing, Yu Bo et Yu Mengjie. Réalisé par Liu Bingjian. Scénario : Cui Zien et Liu Bingjian. Directeur de la photographie : Jinliang et Xu Jiang. Compositeur : Ah Yi.

Durée : 90 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :

Hiver 1998, Xiao Bo, jeune homme réservé, arrive de province à Pékin pour chercher du travail. Il échoue par hasard dans une boutique de mode. La gérante, Qin Jie, l’engage aussitôt et met une chambre à sa disposition. Se prenant d’affection pour lui, elle lui présente sa meilleure amie, pensant qu’ils feront un beau couple, ce qui est parfaitement vrai, les deux jeunes gens étant très agréables à regarder. Mais Xia Bo ne manifeste aucun intérêt pour la jeune femme... Celui-ci préfère la compagnie de Chong Chong, son meilleur ami, un gay tendance folle flamboyante qui édite une revue consacrée aux graffitis et maximes des toilettes publiques !

L’avis de Bernard Alapetite :

Le Protégé de Madame Qing, dont le titre chinois est Nan nan nu nu voulant dire « Homme homme, femme femme » et aussi quelque chose comme « toutes sortes de gens », a été tourné en catimini et au nez et à la barbe des autorités. Liu Bingjian procède par collage et insert. La rapidité de tournage a sans doute influé sur le style. Le film s'attaque à un thème tabou dans un pays où le gouvernement nie encore l'existence du sida : l'homosexualité.

Dans ce film, les rapports entre les personnages ne sont pas ce qu’ils devraient être, et surtout, ils ne sont pas ce qu’ils semblent être. Ainsi une ambiguïté permanente pèse tout le long du film sur les sentiments des protagonistes, comme si la sophistication de la société chinoise avec l’intrusion de la technologie (ordinateurs, téléphones portables...) allait de pair avec la sophistication des êtres. L’ambiguïté touche également parfois le sexe des personnages, en témoigne la féminité troublante de Gui Gui (étonnant sosie de Sihanouk, l’empereur du Cambodge) ou la voix grave et masculine d’une amie de Chong Chong.

L’ineffable Gui Gui est joué par le très talentueux Cui Zi’En, qui est par ailleurs réalisateur de plusieurs films dont Night Scene.

Le film est animé par des personnages qui ont soif de liberté mais surtout de fantaisie, montre que le destin des chinois à l’aube du troisième millénaire n’est plus tout à fait ce qu’il était. C’est la grande et heureuse nouvelle qu’annonce ce film. On y voit surgir le vécu homosexuel sous de multiples formes presque inconnues du spectateur occidental, souvent cocasses comme ce journal des pissotières mettant à la disposition des lecteurs des petites annonces et des dessins trouvés dans les toilettes.

Le style du film est celui d'un réalisme qui confine au documentaire. Le cinéaste refuse tout effet de dramatisation pour atteindre une forme d'ascèse. La caméra est d'une fixité parfois exagérée, mais cette sobriété finit par créer un vrai climat et le film devient le constat de l'homosexualité en 1998 en Chine. On a le sentiment de vivre en direct la préfiguration d’une vie gay organisée et militante. On sent la genèse d'une émancipation, celle de garçons et de filles qui ont subi trop longtemps la répression communiste. Mais avec elle apparaît une occidentalisation à outrance de la Chine.

Bo nous est d'abord présenté comme un jeune homme que rien ne pourrait faire soupçonner de préférer les hommes. Masculin, il n'hésite pas à se battre si nécessaire. Il est donc aux antipodes de tous les clichés habituels. Pour cette raison, son indifférence face à l'amie de sa patronne, belle jeune fille que tout jeune homme devrait désirer, semble inconcevable. Dans cette première partie du film où Bo révèle très progressivement sa personnalité et son rapport aux autres, le spectateur est lui même en proie au doute quant à la conscience qu'il peut avoir ou non de sa propre sexualité. À partir de la rencontre de Bo et Chong, le film prend une autre dimension.

La représentation de l'amour entre hommes reste particulièrement chaste. Les attouchements sont très elliptiques. Si l’on sent le poids du tabou néanmoins le film est touchant et aborde quand même sans détour avec un réalisme saisissant un sujet banni par la censure en Chine. On ne peut que saluer le courage et la détermination du cinéaste.

Liu Bingjian appartient à ce que l’on peut appeler, faute de mieux, le cinéma indépendant chinois. Il recouvre une réalité assez enthousiasmante née des évènements tragiques de Tiananmen, qui voit des jeunes cinéastes passer à la réalisation dans des conditions de précarité, de clandestinité qui sont un défi à la censure de leur pays et à un cinéma en voie d’officialisation comme celui de Zhang Yimou, Chen Kaige...

Avec Liu Bingjian, Wang Xiaoshuai (So Close to Paradise, 1998), Zhang Yuan (Les Bâtard de Pékin, 1993), He Yi (Les Perles rouges, 1993), Jia Zhangke (Xiao Wu, 1997), Zhao Jisong (Scenery, 1998), Yu Likwal (Love Will Tear Us Apart, 1999) sont les principaux représentants de cet underground chinois qui prospecte les eaux troubles de la société chinoise.

Liu Bingjian n’a aucun complexe par rapport aux cinéastes de la 6e génération, comme l'illustre la scène entre le Xiao Bo et la meilleure amie de Madame Qing. Le héros y avoue son désintérêt du cinéma et de Gong Li !

Liu Bingjian a obtenu, pour Le Protégé de Madame Qin, le Prix du meilleur réalisateur au Festival du Film International de Locarno en 1999. Depuis, il a réalisé le savoureux Les Larmes de Madame Wang.


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L'avis de Philippe Serve :

Les Camarades (terme ironique employé par les homosexuels chinois entre eux)

Il fut une époque reculée où l'homosexualité (tongxinglian) était chose courante et parfaitement acceptée en Chine, une simple composante d'une sexualité ouverte malgré le poids de la tradition confucéenne qui voyait en l'homme un chef de famille appelé à créer une descendance en fidélité au culte des ancêtres. L'occidentalisation quelque peu forcée de la société après les guerres de l'opium (1839-1842 et 1858-1860) créera et développera une morale petite-bourgeoise qui mettra au pilori l'homosexualité, tout en tournant le dos à la polygamie (qui favorisait ou permettait le lesbianisme, des épouses encourageant leur mari à prendre pour concubine leur propre maîtresse). L'instauration du communisme à partir de 1949 ne fit que renforcer l'ostracisme envers cette déviance sexuelle. Jusqu'à très récemment encore, être homosexuel en Chine, sujet tabou, relevait d'une « anomalie médicale », mentale pour être précis. Le code pénal se montrant muet sur la question, la répression passait par l'assimilation de l'homosexualité au hooliganisme et au désordre de l'ordre public...

Cet amalgame disparut en 1997 et l'équation homo = malade mental fut définitivement repoussée par l'Association de Psychiatrie chinoise en avril 2001.... Aujourd'hui en Chine et notamment dans les grandes villes, les homosexuels ne se cachent plus et se retrouvent librement dans des bars, les saunas ou des boîtes gays, à Pékin ou Shanghai comme à Paris, Londres ou Berlin. C'est cette Chine là que l'on retrouve dans le très intéressant film de Liu Bingjian Le Protégé de Madame Qing (le titre original, Nan nan, nü nü, littéralement « Homme homme, femme femme » signifie aussi quelque chose comme « Toutes sortes de gens »).

Empruntant directement à la technique du documentaire (film indépendant tourné très vite et clandestinement en 10 jours, caméra fixe mais aussi portée, sujet de société, acteurs non professionnels et jouant leurs propres rôles, etc.) chère aux réalisateurs de la 6e génération dont Liu fait partie, le film surfe sur un humour dévastateur. Bo, peu sensible au charme de la jolie Meng, préfère se rapprocher de son ami Chong-chong. Celui-ci travaille et vit avec le très gay Gui-gui (joué par le scénariste du film, Cui Zien, professeur et militant de la cause homo). Leur activité ? Publier une littérature de toilettes publiques... Un exemple ? Les Fables des pissotières radieuses! Ainsi, Chong-chong se rend de toilettes en toilettes afin de recueillir sur les murs quelque prose immortelle que Gui-gui répercutera sur les ondes de son émission radio (émission « pirate » bien sûr).

Humour aussi ou plus exactement ironie avec cette Mme Qing, la quarantaine à la silhouette juvénile, qui materne Bo au plus près et finira par quitter son macho de mari pour... Meng, la jeune fille qu'elle destinait à son « protégé »...

Mais ne croyons pas pour autant que si la situation des homosexuels en Chine a très favorablement évolué, elle soit devenue facile, l'irruption massive du Sida ne faisant que compliquer les choses pour une communauté qui, si elle est moins harcelée par le pouvoir, a encore à se faire accepter par la société elle-même, paradoxalement plus conservatrice pour ne pas dire plus réactionnaire que l'État lui-même ! Mme Qing ne s'y trompe pas lorsqu'elle déclare: « Si il (Bo) l'est vraiment, il va souffrir... ».

Liu Bingjian a l'intelligence de ne faire preuve ni de didactisme ni de prosélytisme. Il raconte seulement une histoire et des gens par le biais d'une mise en scène sans effets particuliers. Les plans s'étirent en plans-séquences, parfois à la durée limite, Liu n'étant tout de même pas Hou Hsiao-hsien...

Le Protégé de Madame Qing n'intègrera certes pas les annales ou la légende des plus grands films chinois mais restera comme une œuvre originale, osée, attachante et drôle teintée d'une légère amertume aussi élégante que désabusée...

Pour plus d’informations :

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Par Bernard Alapetite et Philippe Serve - Publié dans : FILMS : Les Toiles Roses
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Mercredi 23 juillet 3 23 /07 /Juil 02:54
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L’avis de Laurent :

Fiche technique :
Avec Liu Ye, Hu Jun, Su Jin, Li Huatong, Lu Fang, Zhang Yongning, Shunag Li et Minfen Zhao. Réalisation : Stanley Kwan. Scénario : Jimmy Ngai. Directeur de la photographie : Tao Yang. Compositeur : Yadong Zhang.
Durée : 86 mn. Disponible en VO et VOST.



Résumé :

Pékin, 1988.

Chen Handong appartient à la grande bourgeoisie de Pékin. Il dirige une société de courtage en pleine expansion. Un soir, son associé qui connaît sa préférence pour les garçons lui fait rencontrer Lan Yu, un jeune étudiant qui envisage de se prostituer. Cette rencontre sexuelle se transforme vite pour Lan Yu en un véritable amour.

Chen Handong ne veut pas s’engager et préfère considérer leur relation uniquement sur un plan sexuel, tout en rendant Lan Yu affectivement dépendant : Lan Yu, frusté et dépité, part. Quelques mois passent... Au moment des évènements de juin 1989, Chen Handong, très inquiet, se met à rechercher Lan Yu dans les rues de Pekin.

Les deux hommes tombent dans les bras l’un de l’autre. Chen Handong décide de vivre avec Lan Yu dans la somptueuse villa qu’il lui offre. Pourtant, Chen Handong n’assume toujours pas cette relation et préfère épouser une jeune traductrice. Les deux hommes se séparent mais bientôt Handong finit par divorcer et fait en sorte de retrouver Lan Yu à qui il déclare ses sentiments au moment même où sa propre société est accusée de vol...


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L’avis de Bernard Alapetite :

Stanley Kwan est le cinéaste qui offrit un très beau rôle à Maggie Cheung dans Center Stage. Lan Yu est son film suivant et traite d’une histoire d’amour au masculin. C’est l’adaptation d’un roman qui a été publié sur un site gay chinois et qui a fait scandale. Deux acteurs excellents (Hu Jun et Liu Ye) habitent ce marivaudage grave dans le Pékin de la fin des années 80. Le cinéaste montre le désir entre deux hommes à l’état brut, et nous rappelle le Happy Together de Wong Kar-Waï, le tango en moins.

La mise en scène élégante et la sensualité des images font de Lan Yu une histoire d'amour exaltée, riche d’envolées et de déchirements. Le cinéaste filme cette romance avec évidence. La force de Lan Yu, c’est de nous faire presque oublier son côté gay. C’est un film très délicat. On retrouve la sensibilité et la finesse d’un certain cinéma asiatique. La mise en scène est parfois très elliptique : des périodes de plusieurs années sont parfois coupées, lorsqu’ils sont séparés. Il y a d'ailleurs quelques problèmes de chronologie. Chaque séquence du film est un fragment de leur histoire, c’est très beau. Stanley Kwan filme de façon neutre, presque distante, mais malgré tout un brin mélancolique. Les images sont soignées, une musique discrète et très jolie les accompagne.

Lan Yu est pour la Chine un film hautement subversif d'autant plus pour les caciques du régime qu'il décrit une relation entre deux hommes où ce qui pose problème n'est pas la crainte de la répression mais l'ambivalence des sentiments. L'étudiant puceau connaît l'amour dans les bras de Chen Hadong, mais celui-ci veut obéir à trop de désirs contradictoires, stoppé dans ses élans par une antienne risquée : « Quand on se connaît trop bien, il faut se séparer. » Les deux acteurs sont filmés avec un sens inouï de l'intimité, dans une lumière hivernale et des intérieurs ombrés. L'incompréhension entre les amants devient peu à peu plus grave encore que l'opprobre sociale, si fortement inscrite dans le code amoureux qu'elle promet au sentiment du manque, une éternelle jeunesse.

Le tournage s’est déroulé en semi-clandestinité. Il a été très difficile car l’homosexualité est un sujet tabou en Chine. Le film, d’ailleurs, se déroule beaucoup en intérieur et de nuit alors que cet amour mérite la liberté et la lumière. Le réalisateur finit son œuvre avec une caméra embarquée dans une voiture, volant de jour des images des rues de Pékin baignées de soleil. Des rues où on peut penser qu’il aurait aimé voir Lan Yu et son amant enlacés.


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L’avis de Boris Bastide :

Stanley Kwan, réalisateur en provenance de Hong-Kong, fait un petit détour par la Chine continentale pour cette histoire d’amour homosexuel. Le film est adapté d’un roman publié en plusieurs parties sur Internet.

Lan Yu est une histoire d’amour hantée par la mort. Au commencement, une voix se souvient et nous ramène des images toutes droit venues de l’obscurité du premier plan. Les personnages nous apparaissent d’abord figés, en quelques plans en noir et blanc. Peu à peu, ils prennent vie. L’histoire peut recommencer. Nous sommes à Pékin, en 1988. Le film narre la rencontre, un soir, de deux personnages totalement différents. Le premier se nomme Chen Handong. C’est un chef d’entreprise d’une trentaine d’années, vieux citadin au niveau de vie aisé. Le second est Lan Yu, jeune étudiant venu de sa province du Nord-Est pour étudier l’architecture à Pékin. Ce dernier va tout d’abord se prostituer auprès du premier, avant que ne se développe entre eux une relation amoureuse.

L’intrigue se déroule sur plusieurs années, à coups d’arrêts et de recommencements, un peu à la manière du Happy Together de Wong Kar-Wai. D’un point de vue narratif, le film est composé d’une juxtaposition de scènes de la vie quotidienne. Cette forme nous rappelle les souvenirs qui viendraient à l’imagination du narrateur, de manière éparse et hasardeuse. Seule compte ici l’intimité qu’ont pu avoir ces deux hommes, intimité à la fois physique et sentimentale. Lan Yu et Handong se retrouvent donc quasiment toujours seuls, face-à-face. Le couple, par sa façon d’exister, annihile toute intervention de l’extérieur. Il est constamment reclus dans des intérieurs aux lumières très obscures. Ici, Stanley Kwan excelle à filmer ces scènes d’enfermement intime. La photographie de Lan Yu, toute en plages sombres menaçant constamment d’envelopper les personnages et de les engloutir dans la nuit, est somptueuse. La dimension politique du film est elle aussi déterminée par l’histoire des deux amants. On ne verra des massacres de la Place Tienanmen qu’une fuite de vélo en pleine nuit. Plus tard, Handong est menacé par le régime de peine de mort pour ses agissements illégaux, mais le réalisateur s’attache surtout à la manière qu’a Lan Yu de réagir à la situation.


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Le thème de l’homosexualité et de la prostitution permet néanmoins à Stanley Kwan de développer une vision critique d’une Chine moderne, dans laquelle l’argent joue un rôle moteur. Car si l’on ne voit pas grand chose de Pékin (hormis lors de la magnifique scène finale), le film nous en dit quand même beaucoup sur ce qui s’y passe. Les personnages vivent dans des espaces clos mais le pays, lui, s’ouvre aux relations commerciales avec l’extérieur. On comprend aussi qu’une partie de la population des régions les plus pauvres se rend à la capitale pour essayer de s’en sortir. Les normes imposées par la société sont encore fortes et mettent à rude épreuve l’amour des deux individus. L’un rêve de se marier, l’autre de quitter le pays. Les deux hommes sont aliénés dans leur propre intimité, constamment séparés dans l’espace par l’architecture des pièces ou les jeux de miroir.

Le plus dur, au delà des disputes et des ratés inévitables de la relation, ce serait donc de trouver le bonheur dans un monde en constante mutation. Tout le film est marqué par un fort sentiment de mélancolie, dans la musique, dans la lumière ou chez les personnages eux-mêmes. Tout semble déjà joué : Lan Yu n’est qu’un regard en arrière sur une belle histoire révolue, avant de pouvoir, peut-être, tout recommencer. L’amour des personnages est condamné à être à l’image de leur ville : en constant chantier, entre écroulement et reconstruction, entre la mort et la vie.


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L’avis de Géraldine (Ciné-asie) :

Pékin fin des années 80.

Venu de sa campagne pour y faire des études d’architecture, Lan yu est un jeune homme seul, sans un sou, un peu perdu. Vendre son corps à des hommes lui paraît être une solution de survie. Chen Handong n’a rien à se prouver ; la quarantaine florissante, il est le patron nanti d’une société prospère. Il ne compte que sur lui et son associé, son unique ami.

Son argent est son pouvoir, il peut se permettre de vivre ce qu’il veut avec qui il veut quand il veut. Il incarne la réussite. Ne lui manque que l’amour. Ils se rencontrent un soir d’été dans un bar à Pékin. Chen Handong détourne Lan yu d’un futur « client » et se l’approprie. Il ne lui promet rien, mais le relooke, le couvre de cadeaux, pendant que Lan Yu se laisse posséder et tombe amoureux de sa première relation homosexuelle. Lui, a découvert l’amour.


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Stanley Kwan a construit son film en trois actes. Après les deux premières parties décrites tout en douceur, en lenteur, le rythme s’accélère enfin pour amener les rôles que tiennent les deux principaux personnages à s’inverser progressivement. Le réalisateur hongkongais, qui connaît bien l’univers homosexuel, utilise là une nouvelle publiée sur le net en Chine, basée sur une histoire vécue. Il y décrit ses personnages avec une sensualité et une pudeur qui seyent parfaitement au contexte chinois. Il amène les personnages au plus profond de leurs contradictions et dépeint admirablement l’univers sensuel dans lequel ils vont évoluer.

Lan Yu n’est pas un film exceptionnel par son sujet à proprement parler, mais il faut avouer que Stanley Kwan, peut-être du fait qu’il n’a pu obtenir les autorisations nécessaires pour son film, a su avec talent placer ses personnages dans des scènes de huis clos, renforçant ainsi l’intensité de la relation qui lie Lan Yu à Chen Handong, et permettant ainsi au spectateur de s’immiscer étroitement dans leur vie de couple.

 Certains ont jugé nécessaire de préciser le contexte politique de Pékin à la fin des années 80 (Tian An Men 1989), peut être comme valeur ajoutée à « un plan marketing », ou bien parce que la Chine leur paraît encore « insondable ».


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À mon sens, cette référence historique n’a qu’une valeur anecdotique, sans aucune influence sur le récit de cet amour au masculin, qui ne serait d’ailleurs pas si remarquable sans l’interprétation talentueuse des acteurs et plus précisément de Hu Jun et Liu Ye.

Cet amour semble éternel, sans laisser malgré tout au spectateur la possibilité d’en oublier le caractère éphémère. Il plane dans ce film comme une douceur amère, une fragilité qui envahirait le couple lentement, une menace mystérieuse, « quand on se connaîtra bien, on se séparera ».

Mystère, qui ne se révèlera qu’à la toute fin du film comme s’il n’y avait qu’une seule chose, inéluctable qui puisse séparer deux êtres qui s’aiment.


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L'avis de Laurent :

De 1988 à nos jours, à Pékin, l’histoire d’amour impossible entre Lan Yu, étudiant en architecture et Chen, un riche homme d’affaires : c’est pour se faire un peu d’argent, afin de financer ses études, que Lan Yu accepte initialement de coucher avec Chen, plus vieux, plus « expérimenté » et surtout plus riche que lui. Mais Lan Yu s’éprend très vite et de manière inattendue de Chen. Or, celui-ci ne veut considérer leur relation que comme un divertissement et refuse de s’investir. Pour lui, à un certain âge, un homme doit savoir « se ranger » et fonder une famille...

Lan Yu est inspiré d’un roman anonyme (signé du simple pseudonyme « Bejing tongzhi » : littéralement « Le camarade de Pékin », le terme « tongzhi » désignant aussi une personne gay en argot chinois), qui fut publié sur Internet, sous le titre de Bejing Gushi (Bejing story). Stanley Kwan, lui-même homosexuel, n’a pu que se sentir concerné par l’histoire de ces amours interdites et contrariées : il a en effet lui aussi dû faire face à la volonté de son propre compagnon de trouver une épouse afin de fonder une « vraie » famille…



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En voyant Lan Yu, on repense bien sûr à Happy Together, de Wong Kar-Wai, autre film hongkongais traitant de l’homosexualité, mais surtout des problèmes de couples en général. Car la force des deux films, c’est de nous faire presque oublier le côté « gay » (Lan Yu était présenté au 7e Festival gay et lesbien de Paris), et de nous montrer une histoire d’amour « universelle », dans laquelle chacun peut se retrouver.

Pourtant, le film de Stanley Kwan n’atteint sans doute pas les sommets esthétiques, formels et émotionnels d’Happy Together (mais à l’impossible, nul n’est tenu). On reste en effet surpris par une fin incongrue et rapide, qui donne une fâcheuse impression de « bâclé ». Par ailleurs, de trop nombreuses ellipses et sauts dans le temps nous empêchent de nous investir totalement dans cette histoire et de ressentir fermement le lien qui unit les deux amants.

Cependant, le film est souvent touchant, il est servi par des acteurs exemplaires (le couple Lan Yu-Chen en particulier). De plus, il apporte certainement un vrai point de vue (il faisait partie de la sélection officielle d’« Un certain regard », à Cannes) et une approche novatrice de l’homosexualité. Il dépeint avec brio une Chine où l’homosexualité reste un tabou puissant, malgré les mutations formidables que le pays a subies depuis quinze ans, mutations dont Stanley Kwan saisit et restitue l’ampleur et l’ambiance à travers le croisement de deux destins hors normes.

Pour plus d’informations :


Par Bernard Alapetite, Boris Bastide, Géraldine & Laurent - Publié dans : FILMS : Les Toiles Roses
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Lundi 21 juillet 1 21 /07 /Juil 19:21

par Stéphane RIETHAUSER


1. La Révolution française abolit les sanctions pénales

En France, suite à la Révolution de 1789, l'Assemblée Constituante adopte en 1791 le nouveau code pénal et supprime les relations entre personnes de même sexe de la liste des délits, tout comme le blasphème, la magie ou le sacrilège. Une tendance confirmée par la promulgation du Code Napoléon en 1810. C'est le Duc de Cambacérès (1753-1824), un amateur de garçons plutôt flamboyant proclamé deuxième Consul par Napoléon, qui rédige les nouveaux codes civil et pénal. Napoléon est pleinement conscient de l'orientation affective de son second. Bien que son complice et protecteur, Napoléon lui conseillera tout de même de s'afficher avec une femme pour faire cesser les railleries à son sujet. Mais en France, l'absence de poursuites au niveau légal n'implique pas pour autant une plus grande acceptation morale des relations entre hommes, qui restent extrêmement mal jugées par la bourgeoisie, les autorités religieuses et par la population, qui a déjà derrière elle plusieurs siècles de conditionnement homophobe.

Cambacérès
(1753-1824)
Si l'Autriche de l'Empereur Joseph II a aboli la peine de mort pour sodomie en 1787, une loi héritée du Saint-Empire Germanique, la peine reste la prison à vie avec travaux forcés jusqu'en 1852. En 1813, la Bavière suit l'influence du Code Napoléon, et sur les recommandations du juriste Anselm von Feuerbach, (à ne pas confondre avec son homonyme le peintre (1829-1880)) dépénalise les relations entre personnes de même sexe. L'état de Hanovre l'imite en 1840. Mais en 1851, la Prusse, le plus puissant Etat d'Allemagne, introduit le §143 du code pénal qui punit de prison "la débauche contre nature", à savoir la sodomie. Une année plus tard, l'Autriche criminalise les relations sexuelles entre femmes, mais réduit par la même occasion les peines frappant les relations entre hommes. En Angleterre, sous le règne de la Reine Victoria, la peine de mort est abolie en 1861 et transformée en prison à vie, jusqu'au "Labouchère Amendment" de 1885 qui punit la "gross indecency" (grossière indécence) de 2 ans de travaux forcés.
Avec l'essor de la Révolution industrielle et la migration croissante de la population vers les villes, des changements interviennent dans les structures sociales. Libérés des contraintes familiales de la vie de rurale, de plus de plus d'hommes profitent l'anonymat des cités pour jouir de leurs pulsions homosexuelles, même si celles-ci doivent se vivre dans la clandestinité. Car la loi sanctionne durement les "écarts" et le monde bourgeois impose une morale stricte, basée sur la famille et une séparation nette des rôles masculins et féminins. L'économie et l'éthique bourgeoise n'ont qu'un mot d'ordre : produire et reproduire.

2. Suisse : Heinrich Hössli, pionnier du mouvement de libération homophile
Dans la Suisse du XIXe siècle, la plupart des cantons alémaniques punissent les relations entre personnes de même sexe de peines allant de un à quatre ans de prison. Toutefois, grâce à l'influence du Code Napoléon, elles ne sont pas poursuivies pénalement dans les cantons de Genève, Vaud, et Valais, ainsi qu'au Tessin. L'avènement de la Suisse moderne et la Constitution de 1848 ne changent pas la donne et laissent les cantons libres de légiférer en matière de droit pénal. Il faudra attendre le Code Pénal fédéral de 1942 pour que les relations entre personnes de même sexe ne soient plus punissables de prison à l'échelon national.
Heinrich Hössli
C'est le Glaronnais Heinrich Hössli (1784-1864) qui peut être considéré comme étant à l'origine du mouvement de libération de l'amour entre hommes en Suisse et en Allemagne. Décorateur d'intérieur, chapelier et grand couturier respecté dans le monde de la mode féminine en Suisse, homme d'affaires à succès, marié et père de deux enfants, Hössli publie en 1836 à Glaris le premier volume d'Eros, die Männerliebe der Griechen (L'amour entre hommes chez les Grecs), un ouvrage qui retrace l'Histoire de l'amour entre hommes dans les domaines de l'éducation, la littérature et la législation, de la Grèce antique au début du XIXe siècle, en passant par les pays islamiques. On y trouve aussi une liste d'hommes célèbres aimant les hommes. Dans la préface, Hössli écrit : "Ton silence ou ta parole décidera à présent de ta propre destinée d'homme et, punition ou bénédiction, te guidera jusqu'au delà de la vie. Ecris, bon Dieu ! Ou sois jugé, et accablé de remords pour l'éternité." Les mots de Hössli sont le reflet de l'opprobre social et juridique qui recouvre les relations entre personnes de même sexe en Suisse centrale à cette époque, et témoignent du courage qu'il fallait pour oser se pencher sur ce thème. Hössli publiera le second tome de son livre à Saint-Gall deux ans plus tard, les autorités de Glaris lui déniant le droit de le publier sur leur sol. Il mourra avant de pouvoir achever le troisième volume de son oeuvre. L'ouvrage de Hössli est révolutionnaire dans la mesure où il est le premier livre de l'époque moderne à défendre sans détour l'amour entre hommes et à retracer quelques aspects de l'histoire sciemment oubliés ou falsifiés par d'autres. Et également parce qu'il va avoir un impact considérable sur l'autre grand précurseur du mouvement de libération homophile, l'allemand Karl Heinrich Ulrichs.

3. Karl Heinrich Ulrichs : le premier coming-out de l'époque moderne

Influencé par l'ouvrage de Hössli, Karl Heinrich Ulrichs (1825-1895), juriste et assesseur au tribunal du royaume de Hanovre, publie en 1864 sous le pseudonyme de Numa Numantius Recherches sur l'énigme de l'amour entre hommes. Dans son ouvrage, il invente le terme d'"uranisme" (qui tire sa racine de "Ourania", l'autre nom de la déesse Aphrodite, mentionné dans le discours de Pansanias dans le Banquet de Platon) Ulrichs nomme "Urninge" ("uraniens" ou "uranistes" en français) les hommes qui aiment les hommes, "Dioninge" les personnes qui aiment le sexe opposé, et "Urninden" les femmes qui aiment les femmes. Il considère ces personnes comme faisant partie d'un "troisième sexe", et avance la théorie de l'âme féminine dans un corps masculin, et réciproquement.



Karl Heinrich Ulrichs
En 1866, la Prusse de Bismarck (1815-1898) et de Guillaume Ier envahit et annexe le royaume de Hanovre. Au service du royaume, Ulrichs est accusé d'activités subversives et emprisonné. Ses écrits sont saisis. Bismarck avait des vues bien précises sur les relations entre hommes : si l'on acceptait la sexualité entre mâles, des problèmes d'autorité et de hiérarchie pouvaient surgir, mettant en péril l'armée, l'administration, la justice et la police.
Le 29 août 1867, un mois après sa sortie de prison, Ulrichs récolte un peu d'argent auprès de certains de ses amis uraniens pour entreprendre le voyage à Munich, où se déroule alors la conférence annuelle des juristes allemands. Durant son discours, il est raillé lorsqu'il affirme que l'uranisme devrait être toléré socialement plutôt que condamné. C'est le premier "coming-out" en tant qu'acte politique, la première fois dans le monde moderne où un homosexuel s'affirmant comme tel prend la parole en public afin de réclamer la liberté sexuelle et amoureuse. Ses collègues le conspuent et l'empêchent de finir son discours. C'est le scandale : Ulrichs est forcé de se retirer. Pour ne pas perdre son honneur, il participe tout de même à la réception qui clôt la conférence, même si la plupart de ses collègues l'évitent et ne lui adressent pas la parole. Ulrichs est forcé de quitter Munich et se réfugie à Würzburg, où il continue de publier, sous son vrai nom cette fois, la suite de ses Recherches. En 1868, dans Gladius Furens, il relate l'incident de Munich et publie la totalité de son discours. Quelques années plus tard, autour de 1870, il tente de fonder une revue uranienne du nom de Prométhée, mais il échoue par manque de soutien. Il quitte l'Allemagne en 1880 pour l'Italie où il finira ses jours.
Deux ans après le scandale de Ulrichs à Munich, Karl Marx envoie à Engels le livre de Ulrichs. Engels lui répond dans une lettre du 22 juin 1869 : "Les pédérastes commencent à découvrir qu'ils sont un groupe puissant dans notre Etat. Ce qui leur manque est une organisation, mais elle a l'air d'exister déjà, bien qu'elle soit cachée. Et puisqu'ils peuvent compter sur l'appui de nombreuses personnalités, dans les anciens comme dans les nouveaux partis, leur victoire semble assurée. 'Guerre aux cons, paix aux trous-du-cul' dira-t-on dorénavant. C'est encore une chance que nous soyons personnellement trop vieux pour avoir à craindre de payer un tribut de notre corps à la victoire de ce parti. Mais la jeune génération ! Soit dit en passant, il n'y qu'en Allemagne qu'un type pareil (Ulrichs) peut se manifester, transformer la cochonnerie en théorie", écrit-il, avant de conclure en affirmant que "nous autres, pauvres amateurs de femmes, nous aurons à passer un mauvais moment."
Friedrich Engels
Dans l'un de ses derniers livres, De l'origine de la famille, de la propriété privée et de l'Etat (1884), Engels se prononce sur l'homosexualité des Grecs : "Ils s'enfoncèrent dans la répugnante pédérastie et avilirent leurs dieux non moins qu'eux-mêmes avec le mythe de Ganymède."


4. L'assassinat psychiatrique de Louis II de Bavière

En 1864, le roi Louis II de Bavière (1845-1886) monte sur le trône à l'âge de 19 ans. Dès l'adolescence, il découvre son attirance pour les hommes et en est traumatisé. Ses Carnets secrets n'ont été publiés qu'en 1986, cent ans après sa mort. Fiancé à Sophie d'Autriche, la soeur de l'Impératrice Sissi, il ne supporte pas l'idée du mariage et demande aux médecins un certificat d'inaptitude. Toute sa vie, pris d'épouvantables remords, il lutte contre la masturbation et ses penchants affectifs.

Louis II de Bavière
Il quitte Sophie d'Autriche après s'être épris de son bel écuyer Richard Horning - une rencontre majeure dans sa vie - qu'il nommera son secrétaire particulier et emmènera partout avec lui en voyage. L'idylle durera 16 ans, avant que Horning se marie et se voie chassé. Louis II s'éprend alors d'un jeune officier, le baron de Varicourt, puis d'un acteur. Il a des relations régulières avec ses valets, qu'il fait parfois battre lorsqu'ils le délaissent. Louis II n'aime ni la chasse, ni la politique ni la guerre. Il évite ses conseillers, préférant la compagnie de ses domestiques aux affaires du royaume. Personnalité tourmentée, constamment en état de dépression, il invite des hôtes imaginaires à sa table : Louis XIV, Louis XV ou Marie-Antoinette. Angoissé, il boit souvent du champagne toute la nuit, il organise des séjours dans son chalet de montagne avec de jeunes paysans, ou se fait donner des représentations de théâtre dans une salle vide. Il fait construire ses fabuleux palais de Neuschwanstein et Linderhof (qui inspireront notamment Walt Disney), et de Herrenschiemsee, pastiche de Versailles. Il raffole de décoration intérieure et des arts. Sa passion pour la musique est développée. Il apprécie tout particulièrement Wagner, à qui il écrit des lettres passionnées (on recense plus de 600 lettres entre les deux hommes).
Impuissant, Louis II assiste à l'ascension de la Prusse de Bismarck et à l'annexion du royaume de Bavière dans le nouveau Reich allemand. En 1869, ce qui est à présent la Confédération d'Allemagne du Nord adopte le §152, qui reprend le texte du §143 du code prussien. Louis II a des raisons d'être dépité : en sus d'être classées "déviantes" par l'ordre moral, ses pratiques sont à présent illégales et punissables de prison. En 1871, au terme de la Guerre Franco-Allemande, l'Empire Allemand est proclamé à Versailles. Le §152 du code pénal allemand est remplacé par le §175 du code du nouveau Reich.
Au mois de juin de 1886, une conspiration établit un rapport médical sur l'état mental de sa Majesté le Roi Louis II de Bavière afin de pouvoir l'interner. Le rapport ne fait aucune allusion à son homosexualité, même si son faible pour les hommes est connu dans tout le royaume. Quatre jours après la rédaction du rapport, le gouvernement bavarois le dépose en invoquant sa folie. Louis II est interné, et l'on appointe le régent, son oncle, alors que Othon Ier, le frère cadet de Louis II, est officiellement Roi de Bavière. Othon était déjà enfermé pour folie et homosexualité - on lui connaît des agressions à l'encontre de ses serviteurs, comme son frère, et des déclarations pornographiques. Le lendemain de son internement, Louis II se suicide par noyade. Selon Thomas Szasz, l'apôtre de l'anti-psychiatrie, l'internement de Louis II a été "le premier assassinat psychiatrique commis avec succès et au grand jour sur un personnage important."


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NOTA BENE: les ouvrages utilisés pour ce travail sont répertoriés dans la bibliographie 

Ce travail est l'oeuvre de Stéphane Riethauser. Il sera publié en 10 parties sur le blog Les Toiles Roses avec son autorisation. Qu'il en soit chaleureusement remercié. Stéphane est joignable sur le site de lambda éducation.



Lire le précédent billet : cliquez ici.
Par Stéphane Riethauser - Publié dans : HISTOIRE DE L'HOMOSEXUALITÉ
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Lundi 21 juillet 1 21 /07 /Juil 10:39
http://www.moovelyon.net/IMG/jpg/affiche_pride_fille_petit.jpg
Par Daniel C. Hall - Publié dans : VISUELS : Les affiches et pubs roses
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