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FILMS : Les Toiles Roses


Fiche technique :
Avec William Hurt, Raul Julia, Sonia Braga, José Lewgoy et Milton Gonçalves. Réalisé par Hector Babenco. Scénario : Leonard Schrader, d’après l’œuvre de Manuel Puig. Directeur de la photographie : Rodolfo Sanchez. Compositeur : John Neschling
Durée : 120 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
Dans une prison d'Amérique du Sud, Molina, un homosexuel, évoque chaque soir de vieux films romantiques. Son compagnon de cellule, Valentin, un prisonnier politique, entre peu à peu dans cet univers fantasmagorique.
L'avis de Jean Yves :
La folle et le castriste. Le Baiser de la femme araignée d'Hector Babenco (d'après le roman de Manuel Puig) ne brille pas seulement par l'interprétation de William Hurt. Cette confrontation du pédé et du révolutionnaire est aussi un grand moment de cinéma.
Si l'on excepte le dernier quart d'heure, le film d'Hector Babenco est un huis clos d'où l'on s'échappe par moments à la faveur de ce que chacun des deux protagonistes raconte à son compagnon de cellule.
Dans Le Baiser de la femme araignée, rien, au départ, n'est plus différent de l'univers de Molina (William Hurt), la folle maniérée et quelque peu hystérique, que celui de Valentin (Raul Julia), le journaliste révolutionnaire qui combat le régime fasciste de son pays.
Hector Babenco se complaît avec une certaine jubilation dans l'affrontement caricatural de deux masques étrangers l'un à l'autre, que rien de semblable ne préoccupe, et qui pourtant, peu à peu, vont se fissurer, se désagréger, avant de tomber carrément au terme d'un duel psychologique serré, émouvant, souvent cruel.
Au sérieux de Valentin, avec sa barbe d'extrême gauche et son discours théorique que rien ne semble pouvoir ébranler, s'oppose la futilité quasiment folklorique de Molina qui se prend pour Zarah Leander, à travers la narration des amours de Leni (Sonia Braga) pour un bel officier blond, et nazi évidemment. Tout l'arsenal de la fascination de la folle pour la star de cabaret, les uniformes rutilants, les hôtels luxueux et les belles voitures avec chauffeur, sans qu'une seconde, vienne l'effleurer l'idée de la complicité avec l'assassin nazi.
Pourtant, par le biais de cette histoire (un mélo qui avait marqué Molina, au cinéma, lorsqu'il était enfant), par le biais de la sensuelle femme araignée (toujours Sonia Braga) et l'évocation de leurs obsessions respectives, les deux hommes trouvent le joint, la faille dans leurs personnalités d'apparence monolithique, et se rapprochent l'un de l'autre, révélant en eux-mêmes (et à eux-mêmes) des terrains intérieurs qu'ils ne soupçonnaient pas.
L'art de Babenco réside surtout dans sa manière intelligente et judicieuse d'amener sans heurts, comme naturellement, le dénouement. Certes, des ambiguïtés demeurent, auxquelles Babenco n'apporte pas de réponse dans le film. L'ambiguïté majeure concerne finalement Valentin : rien ne permet de dire qu'il ne s'est pas servi de l'amour que lui vouait Molina, qu'il ne l'a pas séduit par intérêt, pour s'assurer qu'une fois sorti de prison il remplira sa mission auprès de l'organisation révolutionnaire. D'un autre côté, la fidélité à Valentin n'est-elle pas un prétexte pour Molina de justifier son destin tragique et de devenir, plus ou moins inconsciemment, le héros d'un mélo vivant, bien réel cette fois ? La folle frivole qui projetait ses fantasmes sur les divas en détresse devient vraiment un autre : l'homo qui fuyait le réel dans le mythe de pacotille décroche soudain des illusions de l'imaginaire pour redescendre tragiquement dans l'engrenage fatal du destin, tandis que son compagnon resté en cellule s'apprête à endurer la cruauté des tortionnaires. Ces derniers avaient spéculé sur la trahison de Molina ; ils n'auront favorisé que l'éclosion d'une histoire d'amour.
Pour plus d'informations :


Fiche technique :
Avec Klaus Maria Brandauer, Armin Müller-Stahl, Gudrun Landgrebe, Hans-Christian Blech et Jan Niklas. Réalisé par Istvan Szabo. Scénario : Istvan Szabo, d’après l’œuvre de John Osborne. Directeur de la photographie : Lajos Koltai.
Durée : 140 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

L'avis de Jean Yves :
Dans les fastes d'un empire austro-hongrois décadent, Istvan Szabo nous conte l'ascension et la chute du Colonel Redl, qu'interprète Klaus-Maria Brandauer : l'univers militaire, l'homosexualité, les bals viennois et la trahison…
Le film s'inspire assez librement d'un fait divers qui avait secoué l'empire austro-hongrois un an avant la Première Guerre mondiale. Le 25 mai 1913, le colonel Alfred Redl, commandant du 8e corps d'armée à Prague et directeur du service de renseignements de l'armée impériale, se suicidait : la presse (déjà vigilante) soupçonna une affaire d'espionnage et de haute trahison, mais l'état-major demeura silencieux. Il fallut attendre une dizaine d'années pour qu'un journaliste tchèque fouille les dessous de cette histoire et en arrive à la conclusion que Redl avait fourni des renseignements à la Russie : selon ce journaliste, Redl aurait été victime d'un chantage de la part de l'attaché militaire russe à Vienne. Ce dernier aurait menacé Redl de révéler son homosexualité aux autorités impériales s'il ne lui livrait pas des informations secrètes. Pendant que Redl monnayait ces renseignements, son amour pour un jeune homme, qui lui faisait le chantage au mariage s'il ne payait pas, lui coûtait très cher… Redl fut pris en flagrant délit dans un bureau de poste viennois alors qu'il venait retirer une lettre contenant une grosse somme d'argent provenant d'une petite ville proche de la frontière russe.
Le film d'Istvan Szabo, semble moins catégorique sur la trahison de Redl. Ses penchants pour les garçons sont clairs, eux, depuis l'enfance, où le jeune Redl, fils d'un chef de gare pauvre de Galicie, est admis à l'école militaire de la monarchie austro-hongroise et se prend de passion pour Christophe Kubinyi, un jeune aristocrate. Cette amitié passionnée durera longtemps, mais ne résistera pas à la différence de classe sociale qui sépare les deux hommes.
C'est d'ailleurs sur ce problème d'intégration du roturier Redl à une classe qui n'est pas la sienne et regarde de haut ses modestes origines que Szabo a centré son film, laissant finalement planer quelques doutes de la réalité d'une trahison.
Redl est intelligent, brillant, ambitieux et dévoué à l'empereur. Il domine de sa compétence tous les aristocrates décadents et paresseux qui occupent leurs fonctions en vertu de la naissance et non de leurs réelles qualités. La position acquise par Redl, par son travail et par ses dons, grâce aussi à l'appui d'un vieil officier perspicace, ne peut provoquer que des jalousies, et bientôt des haines, surtout lorsque Redl, tel un Saint-Just au service de l'idéal impérial, décide de faire le ménage au sein même de l'aristocratie militaire débauchée.
Le film donne plutôt l'impression d'une conspiration contre Redl, dont la loyauté et la rigueur entraînent la réaction de l'archiduc François-Ferdinand, héritier du trône et soutenu par une partie de l'état-major hostile à l'empereur. L'archiduc confie à Redl une opération destinée à se retourner contre lui.
Par son thème, par son héros, par les fastes qu'il met en scène, Colonel Redl est une vaste fresque qui rappelle évidemment Visconti. On pourra taxer le film d'académisme. La structure du film, la façon dont Istvan Szabo brosse le portrait des personnages, progresse dans son intrigue, cerne la psychologie de Redl, tout cela est magistral.
De plus, le réalisateur hongrois a su évoquer l'homosexualité de Redl avec tact, intelligence et sensibilité, sans fausses pudeurs, ce qui est tout à son honneur.
Pour plus d'informations :


Fiche technique :
Avec Lior Ashkénazi, Knut Berger, Caroline Peters, Gideon Shemer, Hanns Zischler, Carola Regnier, Eyal Rozales et Sivan Sasson. Réalisé par Eytan Fox. Scénario de Gal Uchovsky. Directeur de la photographie : Tobias Hochstein. Compositeur : Ivri Lider.
Durée : 1O4 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
Eyal est un agent du Mossad. Sa mission est de retrouver la trace d'un ancien officier nazi, Alfred Himmelman. Pour mener son enquête, il va servir de guide touristique au petit-fils d'Himmelman, Axel, venu en Israël rendre visite à sa soeur. Celle-ci vit en effet dans un kibboutz depuis qu'elle s'est brouillée avec sa famille. Axel veut essayer de la convaincre de revenir avec lui en Allemagne pour l'anniversaire de leur père. Malgré leurs personnalités contrastées, Eyal sympathise avec Axel. Même si parfois le machisme et le conservatisme d'Eyal se heurtent aux vues libérales d'Axel, en particulier quand ce dernier lui révèle qu'il est homosexuel. S'installent alors des relations tendues entre les deux hommes.
Alors qu'Axel rentre en Allemagne sans sa sœur, le Mossad suspecte l'ex-nazi Himmelman de vouloir refaire surface pour la fête d'anniversaire du père d'Axel.

L'avis de Paula :
Ces dernières années, la France a pu découvrir un cinéma israélien polymorphe, peu consensuel, une brèche ouverte par le cinéaste Amos Gitaï. Le cinéma d’Eytan Fox s’inscrit dans cette volonté d’innovation. Son nouveau film Tu marcheras sur l’eau navigue entre le policier, la comédie et le drame psychologique. Inclassable.
Quel point commun entre un agent du Mossad et un jeune allemand ouvertement homosexuel ? Le poids du génocide. La mère d’Eyal, juive d’origine allemande, a péri dans les camps. Le grand-père d’Axel en a été le bourreau. Les deux personnages appréhendent la tragédie de la même manière : ils n’en parlent jamais. L’émotion n’a pas cours. Eytan Fox, le réalisateur a été jusqu’à tarir les yeux d’Eyal, le pourvoyant d’une maladie lacrymale qui l’empêche de pleurer. La seule eau qui réunit Eyal et Axel, c’est celle de la mer Morte, où personne ne peut couler, dans une scène de baignade particulièrement émouvante.
Au-delà de l’aspect historique, Eytan Fox a également réussi un film sur la société israélienne telle qu’elle est aujourd’hui : moderne, plus ouverte. La population vit au rythme des attentats kamikazes mais continue d’aller danser la nuit. Axel entraîne Eyal dans une boite gay, lui qui n’a jamais côtoyé que des hommes de son milieu. Pia, horrifiée par le passé de sa famille, est partie en Israël dans l’espoir avoué d’une rédemption, elle qui sait tout de la fuite de son grand-père. Au terme de ce parcours : la libération. Eyal, hanté par les images de sa femme, n’arrive plus à tuer froidement, comme son métier l’exige. Axel prend conscience de son lourd héritage familial sur un air de Festen.
Le film mêle donc plusieurs thèmes sans jamais perdre le fil de l’eau. Plutôt rare. Rythmé, ponctué de dialogues sarcastiques, il révèle un duo d’acteurs épatants : Lior Ashkénazi et Knut Berger. Le dénouement pourra dérouter. Peu importe, vous aurez déjà été touché.

L'avis de Jean Yves :
Le cinéma israélien est en pleine effervescence, questionnant avec acuité ce pays né à la fois d'une utopie et de la Shoah ; terre promise pour les opprimés et puissance colonisatrice pour ses voisins. Le personnage de Eyal symbolise ces contradictions : agent du Mossad, il porte la mort au nom de la défense d'Israël, plus enclin à l'efficacité qu'au doute. Mais une enquête, d'apparence routinière, sur un ancien nazi ébranle ses certitudes. Voilà le dur obligé de jouer les faux guides touristiques auprès de deux jeunes Allemands, petits-enfants du criminel recherché. L'action cède la place au dialogue, la posture virile se fait plus humble, le passé occulté avec ses fantômes resurgit, et le droit de tuer devient tout relatif. Eytan Fox brasse là des questions essentielles et ose regarder droit dans les yeux son pays, mais sans nous assommer de grands discours. Son film court, efficace comme un thriller.
Un film captivant, quasi métaphysique, mais non dénué d'humour, où l'on apprend que marcher sur l'eau, c'est à la portée de chacun. Avec un peu de volonté.

Pour plus d’informations :
Bande annonce


Fiche technique :
Avec Daniel Auteuil, Gérard Depardieu, Thierry Lhermitte, Michèle Laroque, Michel Aumont, Jean Rochefort, Alexandra Vandernoot et Luc Hamet. Réalisé par Francis Veber. Scénario : Francis Veber. Directeur de la photographie : Luciano Tovoli. Compositeur : Vladimir Cosma.
Durée : 84 mn. Disponible en VF.

Résumé :
François Pignon, un homme au costume sombre et à l'allure discrète, est comptable dans une usine de caoutchouc, dont le secteur privilégié est le préservatif.
Il est sur le point d'être licencié, lorsque sur les conseils de Belon, son voisin d'immeuble, il propage la rumeur selon laquelle il est homosexuel. Suite à ce faux coming out, les cadres de la direction décident de garder Pignon pour des raisons « politiquement correctes ».
Celui-ci passe brusquement pour un marginal, bien qu'il n'ait rien changé à son comportement. C'est le regard des autres qui va s'en trouver modifié.

L'avis d’Olivier Guéret (Cinopsis) :
Comptable austère dans une entreprise, François Pignon risque de se faire licencier. Sur les conseils d'un ami, il lance la rumeur qu'il est homosexuel, forçant ses employeurs à la garder pour raisons « politiquement correctes ». Mais ce faux coming-out n'est pas sans conséquences sur les autres...
Francis Veber est un orfèvre de la comédie. Le cynisme cinglant de son Dîner de cons a fait rouler sous les banquettes un nombre impressionnant de spectateurs. Après ce modèle du genre, aux dialogues dégraissés jusqu'à l'épure, on ne pouvait qu'attendre avec une joie entremêlée de peur le contenu de ce Placard. Dans ce film, François Pignon (Daniel Auteuil) s'affiche comme homosexuel pour conserver son poste au sein d'une entreprise.
Ce point de départ sert de prétexte à une enfilade de bons mots et de comique de situations à gogo. Si l'écriture se veut moins fine et sèche que dans son précédent film, Francis Veber a l'intelligence de s'attarder sur le regard des autres plutôt que d'étaler sa science des mots en faisant jouer les folles à un Daniel Auteuil remarquable de sobriété. On ne pourra pas en écrire autant de Gérard Depardieu qui plonge dans une outrancière caricature. Michèle Laroque, Jean Rochefort, Thierry Lhermitte et l'émouvant Michel Aumont viennent compléter la distribution foisonnante de cette distraction sympathique mais non révolutionnaire, aux modiques accents sociologiques.

Pour plus d’informations :


Fiche technique :
Avec Hugo Weaving, Genevieve Picot, Russel Crowe, Heather Mitchell, Jeffrey Walker, Daniel Pollo
ck et Frankie J. Holden. Réalisé par Jocelyn Moorhouse. Scénario : Jocelyn Moorhouse. Directeur de la photographie : Martin McGrath.
Durée : 86 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
Martin, jeune photographe aveugle de naissance, est partagé entre son amitié pour Andy, jeune plongeur du restaurant qu'il fréquente et l'amour exclusif que lui porte Célia, terriblement jalouse de cette nouvelle amitié.
L'avis de Jean Yves :
Martin est aveugle, Célia est sa béquille, son regard sur le monde. Entre elle et lui, un témoin : Andy qui aime Martin mais qui ne le sait pas. Jeux de mots et de passion entre ces deux êtres et les Polaroïds que prend l'aveugle. Instantanés d'amour volés à la vie, cruelle.
Dans Proof (La Preuve), premier film de l'Australienne Jocelyn Moorhouse, la vue a partie liée avec le sexe. « On ne touche pas les gens comme ça. Un doigt n'est pas un œil. », tancera Celia (Geneviève Picot), s'adressant à Martin (Hugo Weaving), aveugle de naissance dont elle reste depuis des années la féroce mais indispensable femme de ménage.
Elle est pour lui le monde ; en retour il est, pour elle, le seul au monde. Passion dévorante et dévorée... L'aveugle hait cette femme dont il a besoin ; elle n'aime en lui que ce besoin qu'il a d'elle. Entre eux, il y a Andy (Russell Crowe) : gentil plongeur du restaurant où l'aveugle a ses habitudes.
Martin ne croit personne, à commencer par Celia. « Seules les photos ne mentent pas. » Alors il prend des Polaroid, et le jeune Andy lui en fait la description. L'un palpe, l'autre voit : leur complicité est une alliance des sens. Et pour Martin, la vérité repose dans la parole que pose Andy sur ces épreuves muettes.
Faut-il en croire ses yeux ? Ce que l'on voit est-il la sanction du vrai ? Pour Martin, complexé, vulnérable, sensible, la preuve du réel se confond bientôt avec la foi illimitée qu'il accorde à cette « seconde vue », de plus en plus exigeante et fidèle – comme l'amour. Un amour qui ne dira jamais son nom.
Il y a dans le film une scène « d'agression » inouïe, où Martin et Andy, sur un malentendu (l'aveugle, laissé à lui-même, exhibe une capote devant un beauf hétéro, qui prend la mouche) à la fois pathétique et burlesque, sont pris pour un couple d'homosexuels, et donc pour ce qu'ils sont sans le savoir eux-mêmes, sous l'œil monstrueux de la « normalité ».
Et le film développe sa cruelle parabole : très vite, entre les deux garçons, il y a cette femme pour détruire cette relation qui l'évince virtuellement. Elle n'hésitera pas à coucher avec Andy, pour l'arracher à Martin.
D'un côté, la voracité sexuelle hétéro, le stratagème sans scrupule de la passion. De l'autre, la pureté, la virginité du sentiment (homo, mais précisément pas sexuel, ou pas encore) que les photos font mentir.

La Preuve est un petit chef-d'œuvre d'articulation : la force du film de Jocelyn Moorhouse repose sur un scénario impeccable qui transgresse, sur la question de l'homosexualité, toutes les conventions, tous les clichés.
À noter, qu'il est difficile d'aller plus loin dans la noirceur malfaisante, dans l'abomination libidinale du modèle féminin. Quand Martin comprend enfin, preuve à l'appui, de quoi la femme est capable, il la congédie. Andy, quant à lui, l'a déjà sacrifiée. La place est libre pour l'amour fou. Entre hommes.

Pour plus d’informations :


Fiche technique :
Avec Gérard Lanvin, Christian Clavier, Jean-Pierre Bacri, Philippe Khorsand, Louise Portal, Jean-Pierre Darroussin, Marie-Anne Chazel, Didier Pain et Jacques François. Réalisé par Jean-Marie Poiré. Scénario : Jean-Marie Poiré et Christian Clavier. Directeur de la photographie : Claude Agostini. Compositeur : Michel Goglat
Durée : 110 mn. Disponible en VF.

Résumé :
Quelques amis de jeunesse approchant de la quarantaine se retrouvent à l'occasion de la venue à Paris d'une rock star québécoise, Bernadette Legranbois, qu'ils ont connu durant leur jeunesse. C'est l'occasion pour Jean-Michel, Richard, Guido, Antoine et Dany de régler quelques vieux comptes et de faire un bilan mi-doux, mi-amer de ce qui reste de leurs rêves d'adolescents.
L'avis de Jean Yves :
Que se passe-t-il quand quelqu'un qui a réalisé son rêve retrouve ses anciens complices qui, eux, ne l'ont pas réalisé ?
Dans Mes meilleurs copains, Jean-Marie Poiré imagine les retrouvailles d'un groupe de copains avec une copine qui est devenue star de ro
ck au Canada. Peu après 68, ces gauchistes de circonstance et de pacotille avaient formé un groupe « pop », mais seule Bernadette (Louise Portal) avait intéressé les professionnels du show-biz.
Vingt ans après, tandis que les garçons sont restés liés comme à la belle époque de leur jeunesse, Bernadette vient à Paris pour un récital à l'Olympia, et ils vont tous se retrouver, le temps d'un week-end mouvementé, dans la maison de Richard (Gérard Lanvin).
La présence de Bernadette est le prétexte idéal pour que chacun fasse le bilan de sa vie, justifie son évolution des idées révolutionnaires au comportement petit-bourgeois. Elle est le révélateur des non-dits enfouis depuis tant d'années, et les révélations vont effectivement aller bon train, sur le ton du psychodrame comique.
Il y a ainsi, dans le film de Jean-Marie Poiré, un parcours des protagonistes vers la connaissance de soi, vers la prise de conscience de la vérité de leurs relations. Les personnages sont parfaitement emblématiques de l'itinéraire d'une génération prise dans la contradiction de ses rêves et de sa progressive intégration au système qu'elle condamnait.
L'itinéraire de Guido (Jean-Pierre Bacri) est particulièrement intéressant à suivre : on voit comment il profite des ambiguïtés de la révolution sexuelle pour affirmer dans le groupe son homosexualité, pour l'imposer même face à ses copains réticents mais coincés par le sceau de l'amitié. Guido révèle aux autres ses goûts par l'intermédiaire d'un petit film en super 8 comme il en fleurissait dans les années 70, et où il s'affiche ouvertement avec un éphèbe italien dénudé à la manière des modèles du baron de Gloeden. Guido avouera ensuite ne plus baiser depuis 1983 et avoir tout transféré sur une dépense sportive forcenée, tandis que Bernadette exige de Jean-Michel (Christian Clavier) une capote pour s'envoyer en l'air.
Guido apparaît comme un personnage sérieux, un peu aigri, mais au regard juste et quand même assez drôle. À l'époque du groupe, c'était lui le plus éclaté, et en 1989, c'est lui le plus strict, le plus rigoureux. Il reste que Guido n'est accepté qu'en partie : il vient toujours seul chez ses copains, il n'amène jamais un autre homosexuel avec lui. Cela correspond sans doute à une réalité sociologique de l'époque.
Par des raccourcis qui visent juste, par une mise en scène qui joue avec le temps et les modes, par des dialogues acérés, Jean-Marie Poiré a réussi cette fresque comico-sociologique qui mène de l'explosion débridée de 68 aux années sida.

Pour plus d’informations :



Fiche technique :
Avec Farley Granger, Ruth Roman, Robert Walker, Leo G. Carroll, Patricia Hitchco
ck, Marion Lorne, Jonathan Hale, Laura Elliot, Howard St-John, Norma Varden, John Brown et Robert Gist. Réalisé par Alfred Hitchcock. Scénario : Raymond Chandler, Czenzi Ormonde, Whitfield Cook et Ben Hecht. Directeur de la photographie : Robert Burks Compositeur : Dimitri Tiomkin.
Durée : 100 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
Un champion de tennis est abordé dans un train par un inconnu qui lui propose un étrange marché : il supprime sa femme encombrante si celui-ci se charge d'éliminer son propre père. Croyant avoir à faire à un fou, le tennisman ne lui prête aucune attention. Peu de temps après, sa femme est assassinée...
L'avis de Jean Yves :
L'année 1951 est marquée par une réalisation essentielle dans le domaine de la psychologie criminelle : adapté d'un roman de Patricia Highsmith, L'inconnu du Nord-Express est certainement le chef-d'œuvre d'Alfred Hitchcock.
Le premier plan du film : les chaussures de deux messieurs qui se frôlent noue l'action en quelques secondes.
Un champion de tennis, Guy Haines, est abordé dans un train par un jeune oisif nommé Bruno Antony. Bruno révèle qu'il connaît par la presse à scandales les infortunes conjugales de Haines et sa passion pour la fille d'un sénateur.
Il lui propose un étrange marché : faire disparaître son encombrante épouse (à tous les sens du terme) ; en échange Haines le débarrassera d'un père qu'il déteste. Cet échange doit aboutir à deux crimes parfaits, parce que sans mobiles personnels pour les meurtriers.
Robert Walker, qui interprète le rôle de Bruno, n'est pas un inconnu pour le public américain de l'époque : acteur instable, il mourra lui-même quelques mois plus tard dans une maison de santé. Quant à Farley Granger, il était trois ans plus tôt, dans La corde d'Alfred Hitchco
ck, un séduisant assassin homosexuel.
Inconsciemment ou pas, le spectateur connaît ces éléments. Et le réalisateur les utilise à son profit. Il joue en même temps sur l'homosexualité visible de Bruno : sa grosse tête d'enfant gâté élevé dans un milieu de blasés excentriques, sa silhouette, sa manière de s'habiller, une rigidité anormale qui semble réprimer une démarche trop ondulée, lui octroient une présence saisissante.
Mais Hitchco
ck joue également sur l'homosexualité latente, plus sourde, de Guy Haines. L'athlète n'est pas indifférent aux coquetteries de ce jeune homme un peu frêle, mollement renversé sur la banquette du train.
Il faut ajouter que l'univers de L'inconnu du Nord-Express, où les coupables sont innocents et où les innocents sont coupables est caractéristique de l'univers du film noir, et plus encore de celui d'Hitchco
ck où personne n'échappe jamais à la condamnation, pas même le public.
Certes, le plan que Bruno va réaliser est diabolique. Cependant le refus de Guy d'accepter ce marché manque de fermeté et suggère une approbation intérieure et un secret intérêt pour ce singulier compagnon de voyage.
Jusqu'au dénouement, Hitchco
ck ne cessera pas d'éveiller pour l'assassin psychotique la sympathie du spectateur.
Pour plus d’informations :


Fiche technique :
Avec Nigel Terry, Nigel Davenport, Michael Gough, Dexter Fletcher, Sean Bean, Tilda Swinton et Robbie Coltrane. Réalisé par Derek Jarman. Scénario : Derek Jarman. Directeur de la photographie : Gabriel Beristain. Compositeur : Simon Fisher-Turner.
Durée : 93 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
Artisan majeur de la Renaissance italienne, Michelangelo da Caravaggio a marqué le XVIe siècle et l'histoire artistique du pays.
L'avis de Jean Yves :
Après avoir fait son apprentissage, le peintre Caravaggio se rend à Rome où il mène une vie misérable en vendant ses tableaux dans la rue.
Alors qu'il est hospitalisé, Caravaggio reçoit la visite du Cardinal Del Monte qui le prend sous sa protection. Mais le peintre va succomber au charme d'un jeune modèle vénal et de sa jeune femme, une belle prostituée. Pris au piège de cette relation triangulaire, Caravaggio est mêlé à de sombres intrigues et finit par poignarder son modèle.
Avec Caravaggio, Derek Jarman nous propose une lecture de la vie du Caravage. Le décor est truffé d'accessoires anachroniques ou parasites : ampoules électriques, machine à écrire, moto et camion des années 40, etc.
Ainsi, le réalisateur orchestre le film selon deux modes : d'un côté les événements de la vie du peintre, de l'autre leur interprétation, immédiate dans un contexte déplacé. Ce qui permet au spectateur de s'égarer dans des rencontres visuelles inattendues.
Rencontres que l'on retrouve dans les compositions et le clair-obscur des tableaux du Caravage et qui sont parfois mises en scène dans le film : scènes devenant elles-mêmes de possibles tableaux. À la réflexion sur le peintre se mêlent ainsi les désirs du cinéaste : désir d'Italie, de garçons...

Pour plus d’informations :

 


Fiche technique :
Avec Richard Ganoung, John Bolger, Steve Buscemi, Adam Nathan et Kathy Kinney. Réalisé par Bill Sherwood. Scénario : Bill Sherwood. Directeur de la photographie : Jacek Laskus. Compositeur : Sharon Stone.
Durée : 90 mn. Disponible en VO, VOST et VF.

Résumé :
Michael et Robert, un couple gay, préparent le départ pour l'Afrique de ce dernier, en mission pour deux ans.
L'avis de Jean Yves :
Une histoire gay émouvante dans un New York touché par le sida.
Parting Glances, subtilement traduit en français par Clins d'œil sur un adieu.
Le film se déroule au cœur de Manhattan où le sida est devenu un sujet de conversation obsessionnel. Beaucoup d'individus ont été touchés par la maladie, et chacun connaît malheureusement, au moins, une personne qui est décédée. Michaël (Richard Ganoung), rewriter dans une maison d'édition, et Roger (John Bolger), cadre dans une organisation humanitaire, se fréquentent depuis dix ans et vivent en couple depuis six. Avant de le connaître, Michaël a eu une liaison avec un jeune musicien ro
cker, actuellement atteint du sida.
Fataliste sur l'issue de sa maladie, le musicien se laisse assister par son ancien amant qui, tous les jours, lui consacre quelques heures afin de le distraire et le faire manger.
En vingt-quatre heures, le spectateur découvre les caractères de chacun. Michaël est perturbé et inquiet, tandis que Roger, plus lâche, lui avoue qu'il part en Afrique (« L'Europe, c'est trop folle ! ») pour fuir la fin probable de Ni
ck.
Double drame pour le perturbé Michaël qui va devoir remettre en cause, en l'espace d'une soirée et d'une nuit, toutes ses opinions sur l'amour, la fidélité, mais surtout la maladie et la mort.
Et le film bascule d'une manière fort habile (une party d'adieu est organisée par tous les amis du couple, par surprise), dans la réflexion intelligente, habile et constructive. Loin des clichés misérabilistes qui sont trop souvent de rigueur, Parting Glances est au contraire plein de sagesse et de sérénité.
Tout en ne tombant pas dans l'absurdité inverse, c'est-à-dire en fermant les yeux et en fuyant la réalité. Parce que les personnages sont des gens intelligents.
La scène de la party est à cet égard riche d'enseignements : la complicité de la vieille dame qui en a vu d'autres et qui vous remonte le moral en moins de deux ; le petit jeune de vingt ans qui « désire vivre éternellement » et à qui Ni
ck conseille plus sagement « de profiter de sa vie pépère, son bon vieux temps » et « de prendre une revanche : dire aux autres de ne pas perdre de temps ». C'est tout ça Clins d'œil sur un adieu, des témoignages d'amitié et de sagesse, et une infinie tendresse.
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Fiche technique :
Avec Jonathan Caouette, Renée LeBlanc, David Sanin Paz, Rosemary Davis et Adolph Davis. Réalisé par Jonathan Caouette.
Durée : 88 mn. Disponible prochainement en dvd en France.
Résumé :
Tarnation élabore une nouvelle écriture du documentaire. Ce long métrage est l'autoportrait de Jonathan Caouette, 31 ans, qui dès l'âge de 11 ans, décide de filmer la chronique chaotique de son enfance dans une famille texane. Avec Tarnation, il nous entraîne dans un tourbillon psychédélique à partir d'instantanés, de films d'amateur Super-8, de messages enregistrés sur répondeur, de journaux intimes vidéo, de ses premiers courts métrages et de bribes de la culture pop des années 80, accompagnés de scènes reconstituées, pour tracer le portrait d'une famille américaine éclatée par de multiples crises mais réunie par la force de l'amour.
L'avis de Mérovingien02 :
Pas de doute là-dessus, Tarnation est un film underground ! Et son auteur, Jonathan Caouette, un personnage bien singulier, complètement frappé, touchant, sincère et totalement fascinant. Son film, c'est un peu un journal intime, plein d'idées, plein de chose à dire, plein d'ambitions... Et un véritable foutoir qui, si l'on prend la peine de l'ouvrir, s'avèrera aussi fascinant pour les uns que révulsant pour les autres. Car Tarnation, c'est une histoire vraie, celle du « réalisateur » Jonathan Caouette, donc, qui se filme depuis ses 11 ans et a mis des images de sa vie bout à bout, montées sur IMovie. Tarnation a coûté 218 dollars. Et c'est fou tout ce qu'on peut faire avec un simple ordi ! Car sur la forme, cette auto-fiction nous en fait voir de toutes les couleurs : accélération, ralenti, fondu, musique, After Effect... Tout est bon pour créer un véritable OFNI, Objet Filmique Non Identifié, qui file à toute allure, avec son aspect bricolé à la main et ses images réelles craspec. L'histoire, c'est tout simplement celle du réalisateur et de sa relation avec sa mère. Si le film a bien une certaine trame (et une progression chronologique), on y retrouve l'aspect underground dans un refus systématique de mener une logique narrative trop poussée (pas de longues séquences, passage d'une image à une autre sans explication...) qui fait vraiment penser un film d'étudiant en cinéma qui bricole son petit bébé dans un style très (trop) conceptuel. On aime ou on n'aime pas.
Mais la démarche assumée a le mérite de forcer le respect. On pourra toujours l'accuser de voyeurisme pourtant, son film est d'une sensibilité à fleur de peau dans la description lente de la folie de sa mère (présentée de manière très elliptique, ceci dit) et dans sa lutte vis-à-vis de ses démons intérieurs. La forme agressive peut donc se voir comme une plongée dans l'esprit de son propre créateur, une œuvre d'auto-analyse destinée à exorciser ses démons (voir le tout dernier plan du film). Le film de la survie en somme. D'ailleurs, c'est à partir du moment où Jonathan parle de lui que le film prend sa véritable voie. Ainsi, les dix premières minutes se révèlent un peu lourdes à nous décrire la vie de ses grands-parents et de sa mère par des textes à l'écran. Une exposition trop longue, des montages photos et quelques morceaux de musique plus tard : le décor est enfin planté. Son enfance est également racontée par de petits textes et si l'on peut commencer à trouver le temps long (on a l'impression de voir un roman-photo mis en musique), le film se réoriente à partir du moment où le réalisateur se filme dans des numéros qui donnent toute la mesure de sa névrose : travesti en femme battue, il improvise dans le noir un numéro touchant qui laisse bouche bée.
Il est désormais temps de s'intéresser de près à la personnalité borderline de Jonathan. Sa déprime, son univers intime, ses doutes personnels... Il nous donne à voir une facette à la fois intime mais à la résonance universelle. Ainsi, il nous donne à voir une réflexion sur l'acceptation de soi. Sa vie sert d'exemple (que certains taxeront de voyeurisme ou d'exhibitionnisme) à tout un chacun dans le but de s'accepter sans renier ce que l’on est. Jonathan est en effet un homo qui s'est vite assumé, c'est également quelqu'un qui a vécu le mal-être dans un monde malsain et qui ne rêvait que de s'enfuir. C'est enfin un enfant accablé par la maladie de sa mère et qui a toujours été en quête d'amour familial. Il est agréable de voir avec quelle sincérité il nous présente ses premiers émois amoureux (avec un camarade de classe) jusqu'à l'homme de sa vie, le très mignon David Sanin Paz qui le soutient moralement. Une manière de présenter une homosexualité sans tabou, sans cliché et tout en tendresse. Une homosexualité pas forcément bonne à afficher dans l'État du Texas où il vit (même si le film n'aborde pas frontalement le sujet). Un Texas, véritable gangrène des États-Unis, monde arriéré et isolé. Et un véritable berceau de grands malades : les diverses familles d'accueil dans lesquelles Jonathan a vécu le battent, ses grands-parents au faciès effrayant ne sont guère mieux (on pense bien souvent à Massacre à la Tronçonneuse, notamment dans la scène où Jonathan retourne chez lui à la trentaine pour découvrir une maison délabrée).
De ce milieu malade où les secrets familiaux et le non-dit fusent (on croit comprendre que ses grands-parents ont abusé de sa mère), Jonathan a fini par hériter de la folie (« Les parents malades engendrent les enfants malades » entend-on). Mais il tient à tout prix à s'en échapper. Son mal de vivre se diffuse dans l'enfance par des automutilations (avec des images effrayantes d'entailles de rasoir), puis par une volonté de s'échapper du milieu dans lequel il vit (il a fini par vivre à New York et semble avoir trouvé une stabilité familiale en rencontrant enfin son père et en vivant avec l'homme de sa vie). Mais dans un premier temps, son échappatoire, c'est le cinéma et l'art en général. Se filmant dans des numéros d'improvisation hallucinants, montant une adaptation musicale de Blue Velvet, côtoyant les artistes underground, puis réalisant des petits films, on peut dire que Tarnation se pose comme une démonstration de l'art comme moyen d'expression et de survie psychologique. Une œuvre cathartique en quelque sorte. Un véritable voyage obsédant, quoiqu'il en soit. Pour peu que l'on rentre dans le jeu visuel du film, aux expérimentations parfois lourdes et aux trouvailles brillantes, le film se révèle envoûtant et presque hypnotique. On retrouve dans cette œuvre kaléidoscopique un style débridé et déjanté qui colle d'ailleurs bien à l'esprit du producteur du film, John Cameron Mitchell, qui avait signé le brillant Hedwig and the Angry Inch.
On pourra toutefois préférer les instants où l'on prend un peu de temps pour mesurer les évènements, comme dans cette scène effrayante où la mère de Jonathan, Renée Leblanc, entre dans une folie totale sans s'en rendre compte ou encore lorsque le réalisateur se filme, à la fin, comme pour confesser à lui-même ses peurs et ses doutes vis-à-vis de sa mère (« Elle vit à l'intérieur de moi »).
Tarnation est donc une expérience étrange que l'on peut rejeter comme adorer, soutenue par une BO de qualité (superbe morceau « arround and arround ») et à la démarche intègre et barrée. À tenter.
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Bande annonce
Voir la fiche n°1, l'avis de Matoo

Fiche technique :
Avec Didier Hercend, Marie Thonon, Jean-Louis Jacopin, Copi, Luc Bernard, Sabine Morellet et Emmanuel Schaeffer. Réalisé par Lionel Soukaz. Scénario : Lionel Soukaz. Directeur de la photographie : Jérôme de Missolz.
Durée : 55 mn.

L'avis de Jean Yves :
Maman que man est une histoire homosexuelle : mais ce n'est pas que cela. C'est aussi une histoire de drogue : mais elle va bien au-delà de cet aspect.
C'est un film très dur, d'une violence sourde et désespérée, qui met à nu les angoisses morbides du cinéaste, en même temps que son amour fou de la vie, du désir, du plaisir, même s'il sait que pour lui, pour sa sensibilité exacerbée, l'existence n'est que souffrance.
Ce film est Soukaz tout entier à travers les personnages si différents présentés :
– l'adolescent est l'ange déchu, avide d'amour à n'importe quel prix, prêt à fuir l'enfer quotidien, à tout donner, à tout laisser, pour l'illusion d'un bonheur fugace où il pressent qu'il sera berné.
– l'arnaqueur à veste blanche, c'est le démon tentateur, le menteur que l'on veut croire aveuglément parce qu'il offre l'impossible, tant pis s'il est le messager de la mort.
– le père (joué par Copi), c'est la voix de la vérité, mais on ne parvient pas à l'entendre, noyée qu'elle est dans les hoquets de l'alcool.
– la mère de l'adolescent tout au long de ce chemin de croix : couchée sur un matelas à même le sol, elle va mourir, image pathétique de l'impuissance, de l'incapacité à changer le cours inéluctable du malheur.
La force du film de Soukaz est de n'être pas l'œuvre d'un faiseur qui n'aurait rien compris à ce malheur qu'il exhibe, mais d'être vécu de l'intérieur comme un drame personnel qui est la réplique de celui qui se joue des centaines de milliers fois dans le monde au sein d'une jeunesse qui est prête à mourir pour un instant de vrai bonheur, de vraie tendresse.
Faut-il reprocher à Soukaz d'avoir incité aux larmes en intégrant à la misère de son jeune héros la mort d'une mère ? Sûrement pas. D'abord parce qu'il s'agit là d'un épisode que le réalisateur a douloureusement traversé ; ensuite parce qu'il me plaît d'imaginer qu'il a eu envie de faire pleurer des gens malheureux, comme si cela allait faire sortir les humeurs mauvaises, les tourments emprisonnés, en un flot libérateur.

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Fiche technique :
Avec Robert Downey Jr, Val Kilmer, Michelle Monaghan, Corbin Bernsen, Deanna Dozier, Dash Mihok, Larry Miller, Rockmond Dunbar, Shannyn Sossamon, Angela Lindvall, Indio Falconner Downey et Ariel Winter. Réalisé par Shane Black. Scénario de Shane Black et Brett Halliday. Directeur de la photographie : Michael Barrett. Compositeur : John Ottman.
Durée : 102 mn. Actuellement en salles en VO et VF.
Résumé :
Harry Lockhart, voleur en fuite, se retrouve accidentellement au beau milieu d'un casting de polar Hollywoodien. Afin de préparer au mieux son rôle, il fait équipe avec un détective privé sans foi ni loi et une comédienne en herbe. Ils finiront par se retrouver impliqués dans une réelle et mystérieuse affaire de meurtre.
L'avis de Matoo :
Quelqu’un peut-il m’expliquer la traduction du titre américain Kiss kiss, bang bang par le titre français : Shane Black’s Kiss kiss, bang bang, parce que là je suis un peu perdu ? Et puis, qui est-ce qui décide des traductions de titres comme ça, et quel a donc été le complexe processus intellectuel qui nous a emmené là ?
Ce film est une sacrée réussite en tout cas, et rassure carrément sur le potentiel du cinéma américain. Et enfin, enfin, enfin, un scénario ! Un vrai scénario avec des choses intrigantes, déjantées, cocasses, originales et inspirées. Il s’agit d’un curieux mélange entre comédie presque burlesque et polar bien noir, le tout dans un décor à base de piscine, bimbos et palmiers made in L.A. Et en duo de choc pour remuer le tout : Robert Downey Jr et Val Kilmer, qui sont excellents.
Robert Downey Jr est un petit escroc new-yorkais qui passe un casting par erreur et se retrouve balancé dans une soirée VIP à L.A. avec son caractère à la Woody Allen. Val Kilmer, un détective privé gay, doit former l’autre pour qu’il endosse au mieux son personnage. S’en suit alors une histoire dingue de meurtre et d’enquête dans ce milieu bien cliché de L.A., avec notamment une amie d’enfance de Robert Downey Jr qu’il rencontre par hasard. Cette dernière, fan de polars et actrice en herbe, s’était enfuie de chez elle car elle ne supportait plus la vie qu’elle menait, et surtout parce que sa petite soeur subissait l’inceste de son père.
On débarque dans une histoire sans dessus dessous aux relents de films noirs, et pourtant on avance dans cette intrigue, et petit à petit cela devient plus limpide, donc au final ce n’était même pas n’importe quoi ! Richard Downey Jr est un fabuleux narrateur, et le réalisateur a mis une énergie incroyable dans sa mise en scène pour souligner les talents des comédiens. Donc ça foisonne de coups de feu, de rebondissements narratifs et de blagues débiles. On peut aussi remarquer des dialogues très bien léchés, drôles et pétillants.
On notera le rôle assez original et incroyablement bien « jaugé » du pédé de service joué par Val Kilmer. Il est parfait, et son rôle n’est ni caricatural, ni trop lisse. Le seul bémol est pour moi cette scène de la fin où il baffe le père incestueux (alors qu’il ne connaît même pas la fille victime). Je n’ai pas pu m’empêcher d’y voir une grande allégorie, qui part certainement d’un bon sentiment, mais qui est un peu en trop et superflue. En effet, on peut y lire la volonté de l’auteur d’affirmer que c’est l’homosexuel honnête, sensible, intelligent et gentil qui condamne l’incestueux méchant homme, et il positionne ainsi moralement ses personnages. C’est certes assez nouveau et gonflé comme « imagerie » et métaphore, mais j’ai trouvé que ça tombait un peu comme un cheveu sur la soupe, et que cela ne servait vraiment pas l’histoire.
Mais en définitive, un très bon divertissement qui donne la pèche et qui rompt avec la morosité des mois derniers en terme de production US « grand public ».
Pour plus d’informations :
Site officiel du film
Bande annonce
Voir la fiche n°1, l'avis d'Alex et Greg

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